La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/03/2019 | FRANCE | N°18/21026

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 13 mars 2019, 18/21026


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 13 MARS 2019



(n°132 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/21026 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6MWB



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Avril 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/50840



APPELANT



Monsieur [C] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le

[Date naissance 1] 1983 à [Localité 1] (75)



Représenté par Me Lucien FELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0467

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/21888 d...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 13 MARS 2019

(n°132 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/21026 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6MWB

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 20 Avril 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 18/50840

APPELANT

Monsieur [C] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1983 à [Localité 1] (75)

Représenté par Me Lucien FELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : D0467

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/21888 du 17/09/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉES

CENTRE HOSPITALIER [Localité 2], établissement public hospitalier, pris en la personne de son Directeur en exercice

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Hervé REGOLI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0564

Assistée par Me Francis CAPDEVILA, avocat au barreau de VERSAILLES

Etablissement Public CONSEIL GENERAL DEPARTEMENTAL DU [Localité 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Assigné à personne morale le 30 octobre 2018

Etablissement Public AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Fabienne DELECROIX de l'ASSOCIATION DELECROIX GUBLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R229

Assistée par Me Marie-Agnès PERRUCHE, substituant Me Fabienne DELECROIX de l'ASSOCIATION DELECROIX GUBLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R229

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Février 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, Mme Sophie GRALL, Conseillère, et Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre

Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère

Mme Sophie GRALL, Conseillère

Qui ont en délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Anaïs SCHOEPFER

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre et par Anaïs SCHOEPFER, Greffière.

Du 23 mars 2011 au 4 avril 2011, M. [F] a fait l'objet d'une mesure d'hospitalisation sous contrainte sur demande d'un tiers au Centre hospitalier [Localité 4].

Par jugement du 12 décembre 2016, le tribunal de grande instance de Paris a constaté l'irrégularité de son hospitalisation à la demande d'un tiers et a condamné le centre hospitalier [Localité 4] clinique [Établissement 1] à verser à M. [F] la somme de 2.600 euros en réparation de son préjudice outre la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par exploits délivrés les 19 janvier, 1er et 6 février 2017, M. [F] a assigné l'agent judiciaire de l'Etat, le centre hospitalier [Localité 2] et le conseil général [Localité 3] devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins notamment de les voir condamner à lui payer des provisions au titre du préjudice subi du fait de sa privation de liberté sans motif valable, défaut de notification de ses droits et d'administration forcée de traitements sous contrainte et traitements inhumains ou dégradants et voir ordonner l'annulation d'expertises psychiatriques.

Par exploits des 23 et 26 février 2018, M. [F] a de nouveau assigné l'agent judiciaire de l'Etat, le centre hospitalier [Localité 2] et le conseil général [Localité 3] devant le même juge en présentant des demandes identiques, en modifiant toutefois le quantum de provisions.

Les deux affaires ont été jointes.

Par ordonnance du 20 avril 2018, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a :

- Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes d'annulation d'expertise et d'indemnisation présentées par M. [C] [F] ;

- Condamné M. [C] [F] aux dépens et à payer au Centre Hospitalier [Localité 2] la somme de 500 euros, en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejeté toutes autres demandes des parties.

Suivant déclaration du 18 septembre 2018, M. [F] a interjeté appel de cette ordonnance.

Par ses conclusions transmises le 12 octobre 2018, il demande à la cour de :

- Le juger recevable et bien fondé en son appel ;

En conséquence ;

- Infirmer l'ordonnance entreprise ;

- Débouter les intimés ;

- Les condamner solidairement à lui payer à titre de provision :

- 20.000 euros au titre de sa privation de liberté sans motif valable et sérieux ;

- 20.000 euros au titre du défaut de notification de ses droits et refus de communication de plusieurs éléments le concernant dont les deux expertises ;

- 15.000 euros au titre de l'administration forcée de traitements sous contraintes ;

- 45.000 euros au titre des traitements inhumains et dégradants ;

- 8.000 euros au titre des 'résistances abusives persistantes et remarquables' ;

- Dire et juger que les deux expertises psychiatriques réalisées à la demande du procureur de la République par les docteurs [I] et [Y] les 22 juin 2010 et 14 novembre 2014 ont violé le principe du contradictoire et doivent être annulées ;

- Condamner solidairement les intimés à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que 2.500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et aux entiers dépens.

Il fait valoir que :

- Ses demandes sont recevables en application des dispositions de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile dès lors que le tribunal de grande instance de Paris dans son jugement du 12 décembre 2016 a dit qu'il avait subi une privation de liberté lors de son hospitalisation du 23 mars 2011 au 4 avril 2011 sur la base d'une demande irrégulière.

- Sa réputation a nécessairement souffert de son internement irrégulier lequel a compliqué les relations avec son entourage et il a été contraint durant cette hospitalisation de suivre un traitement inhumain et dégradant.

- Ses demandes de provision sont fondées dès lors qu'il a subi une privation de liberté sans motif valable, ne s'est pas vu notifier ses droits et n'a pas reçu communication de plusieurs éléments le concernant dont notamment les expertises.

Par ses conclusions transmises le 8 novembre 2018, l'agent judiciaire de l'Etat demande à la cour de :

À titre principal,

- Confirmer l'ordonnance du 20 avril 2018 ;

- Dire et juger qu'il n'y avait pas lieu à référé ;

À titre subsidiaire,

- Dire et juger que l'action du requérant est prescrite ;

En conséquence,

- Débouter M. [F] de toutes ses demandes fins et conclusions formulées à l'encontre de l'agent judiciaire de l'Etat ;

- Condamner M. [F] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et aux dépens.

Il fait valoir que :

- Les demandes indemnitaires de M. [F] se heurtent à l'absence des conditions d'intervention du juge des référés quelque soit le fondement juridique retenu, que la condition d'urgence n'est pas remplie car la mesure d'hospitalisation est ancienne; qu'il n'entre pas dans les attributions du juge des référés d'annuler des expertises psychiatriques dont l'existence n'est au demeurant pas démontrée ; les demandes au titre de l'hospitalisation sur demande d'un tiers se heurtent à l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 12 décembre 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Paris.

- M. [F] a déjà obtenu l'indemnisation de ses préjudices par le jugement précité devenu définitif, de sorte que l'introduction de la présente instance est abusive et doit donner lieu à sa condamnation à des dommages et intérêts.

- Subsidiairement les demandes indemnitaires de M. [F] se heurtent à la prescription d'une partie de l'action en vertu de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat qui prévoit que les actions indemnitaires se prescrivent par l'écoulement d'un délai de quatre ans.

Par ses conclusions transmises le 20 novembre 2018, le Centre hospitalier [Localité 2] demande à la cour de :

- Confirmer l'ordonnance en toutes ses dispositions ;

- Condamner M. [F] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Le condamner à lui payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts, sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile ;

- Le condamner aux dépens.

Il fait valoir que :

- M. [F] n'a pas été hospitalisé au centre hospitaliser [Localité 2] mais à la clinique psychiatrique du centre hospitalier [Localité 4] ;

- Aucune pièce n'est versée aux débats relativement aux expertises psychiatriques critiquées pour justifier de la pertinence des griefs ;

- En vertu d'une jurisprudence constance, il n'appartient pas au juge des référés de statuer sur la nullité de mesures d'expertise.

Le Conseil général départemental [Localité 3], régulièrement assigné par exploit du 30 octobre 2018 n'a pas constitué avocat.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, les pièces adressées par M. [F] en cours de délibéré, sans que ce dernier ait sollicité et obtenu la moindre autorisation, doivent être écartées des débats.

Aux termes de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile le président peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

À l'appui de ses prétentions tendant à l'infirmation de l'ordonnance entreprise M. [F] se prévaut du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 12 décembre 2016 qui a reconnu qu'il avait subi une privation de liberté lors de son hospitalisation sous contrainte du 23 mars au 4 avril 2011 sur la base d'une demande irrégulière pour réclamer de nouvelles provisions à valoir sur ses préjudices subis du fait de l'irrégularité commise.

Il est constant que M. [F] a été hospitalisé du 23 mars au 4 avril 2011, non pas au centre hospitalier [Localité 2], mais à la clinique psychiatrique [Établissement 1] du centre hospitalier [Localité 4]. Ses demandes de provisions sont dès lors nécessairement mal fondées en ce qu'elles sont dirigées contre le centre hospitalier [Localité 2] et doivent être rejetées.

Le jugement du 12 décembre 2016 rendu par le tribunal de grande instance de Paris, que l'appelant verse aux débats, constate l'irrégularité de son hospitalisation à la demande d'un tiers intervenue au centre hospitalier [Localité 4] du 23 mars au 4 avril 2011 et condamne ce dernier à lui verser la somme de 1.600 euros en réparation de son préjudice subi résultant de sa privation de liberté durant pendant 12 jours. Le tribunal indique dans ses motifs que M. [F] est fondé à soutenir que le tiers qui a demandé son hospitalisation ne remplissait pas les conditions prévues par l'article L 3212-1 du code de la santé publique, n'étant pas un membre de sa famille et n'ayant aucune relation antérieure avec lui. Il considère par ailleurs que faute d'information sur ses droits M. [F] a perdu une chance d'user des voies de droit adaptées pour contester son hospitalisation, condamnant le centre hospitalier [Localité 4] à lui verser en réparation de ce préjudice la somme de 1.000 euros.

Le tribunal a par ailleurs jugé qu'il n'était pas établi que le représentant de l'Etat avait reçu une information précise et spécifique sur l'hospitalisation litigieuse par le centre hospitalier de sorte que, n'en ayant pas eu connaissance, il n'était pas intervenu dans le prononcé de la décision, n'avait donc pris aucune décision pouvant porter atteinte à M. [F] pour en conclure que les demandes dirigées contre l'agent judiciaire de l'Etat devaient être rejetées.

Il s'ensuit que la demande de provision sollicitée par l'appelant à l'encontre de l'agent judiciaire de l'Etat, qui a déjà été rejetée devant le juge du fond en l'absence de preuve d'une quelconque faute imputable au représentant de l'Etat dans la mesure d'hospitalisation litigieuse ne peut prospérer devant le juge des référés, juge de l'évidence qui ne peut remettre en cause ce qui a été tranché par ledit juge du fond.

Le tribunal dans son jugement du 12 décembre 2016 a encore rejeté les demandes de M. [F] s'agissant des préjudices allégués au titre de l'administration de traitements sous contrainte, de traitements inhumains ou dégradants et de l'atteinte à sa vie privée. Dès lors, ses demandes de provisions fondées sur ces mêmes chefs en raison de cette hospitalisation irrégulière subie du 23 mars au 4 avril 2011 qui ont été déclarées mal fondées devant le juge du fond ne peuvent pas non plus prospérer devant le juge des référés.

Il n'appartient pas non plus au juge des référés, juge de l'évidence, de se prononcer sur la validité des expertises psychiatriques réalisées par les docteurs [I] et [Y], ces demandes se heurtant manifestement à des contestations sérieuses qui relèvent de l'appréciation du juge du fond. Au demeurant elles ne sont pas produites aux débats de sorte que leur simple existence n'est pas justifiée.

Enfin l'appelant n'invoque aucun moyen ni fondement juridique à l'appui de ses demandes de provisions dirigées à l'encontre du conseil général [Localité 3] lesquelles seront donc rejetées comme étant mal fondées.

En conséquence l'ordonnance entreprise doit être confirmée en toutes ses dispositions.

L'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que lorsqu'est caractérisée une faute en lien de causalité directe avec un préjudice. En l'espèce, un tel comportement de la part de l'appelant n'est pas caractérisé. La demande du centre hospitalier [Localité 2] sera donc rejetée.

Le sort des dépens et de l'indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge.

À hauteur de cour, il convient d'accorder tant au centre hospitalier [Localité 2] qu'à l'agent judiciaire de l'Etat, contraints d'exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions précisées au dispositif ci-après.

Partie perdante M. [F] ne peut prétendre à l'allocation d'une indemnité de procédure et supportera les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats les pièces adressées par M. [F] en cours de délibéré;

Confirme l'ordonnance ;

Y ajoutant ;

Condamne M. [F] à payer à l'agent judiciaire de l'Etat et au centre hospitalier [Localité 2], chacun la somme de 1.000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [F] aux dépens.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/21026
Date de la décision : 13/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°18/21026 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-13;18.21026 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award