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13/03/2019 | FRANCE | N°17/19648

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 13 mars 2019, 17/19648


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 13 MARS 2019



(n° 2019/162, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/19648 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4KFY



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2017 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017000476





APPELANTES



SARL AMARANTE prise en la personne de ses re

présentants légaux

Immatriculée au RCS de [Localité 1] sous le numéro 382 369 437

[Adresse 1]

[Localité 2]



SA J.J.W. FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatr...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 13 MARS 2019

(n° 2019/162, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/19648 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4KFY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2017 - Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2017000476

APPELANTES

SARL AMARANTE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de [Localité 1] sous le numéro 382 369 437

[Adresse 1]

[Localité 2]

SA J.J.W. FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de [Localité 1] sous le numéro 382 939 510

[Adresse 1]

[Localité 2]

Société JJW LIMITED, société de droit étranger, prise en la personne de ses représentants légaux

Suite [Adresse 2]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

SAS JJW LUXURY HOTELS prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de [Localité 1] sous le numéro 432 182 863

[Adresse 1]

[Localité 2]

SARL MEDIAN prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de [Localité 1] sous le numéro 384 636 643

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentées par Me Charles-Hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Représentées par Me Flavie HANNOUN de la SELAS L&A, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

Société AAREAL BANK AG, société de droit allemand, prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515

Représentée par Me Virginie VERFAILLIE TANGUY de la SELARL BREMOND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C1097

SCP THEVENOT PARTNERS, anciennement dénommée SCP THEVENOT PERDEREAU MANIERE EL BAZE, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan des sociétés JJW France, Amarante, JJW Luxury Hôtels, Median.

[Adresse 7]

[Localité 2]

SELARL ACTIS ès qualités de mandataire judiciaire des sociétés JJW France, Amarante, JJW Luxury Hôtels, Median.

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentées par Me Antoine BENECH de la SELARL SYGNA PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0540

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

Monsieur Marc BAILLY, Conseiller

Madame Pascale LIEGEOIS, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Françoise CHANDELON, Présidente de chambre et par Anaïs CRUZ, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

La société JJW Limited immatriculée à [Adresse 5] est la maison mère du groupe hôtelier international JJW.

La société JJW France est une holding de droit français qui détient 99% du capital des sociétés Amarante et Médian.

La société Amarante possède l'intégralité du capital de la société JJW Luxury Hotels.

La société JJW Luxury Hotels vient aux droits, à la suite d'une opération de fusion, des sociétés Hôtel Balzac et Hôtel de Vigny.

La société Aareal Bank (ci-après Aareal) est une société de droit allemand.

Selon acte authentique du 19 avril 2007, Aareal a consenti aux sociétés Hôtel Balzac, Hôtel de Vigny, Amarante et Médian, qui se sont engagés comme co-emprunteurs solidaires, une ouverture de crédit de 97 000 000 € essentiellement destinée à refinancer des prêts antérieurs.

L'échéance a été fixée au 19 avril 2012 avec possibilité de prorogation d'une année.

L'intérêt stipulé est EURIBOR 3 mois majoré de la Marge, soit 5,42% à la date du contrat, le taux de période indiqué étant de 1,402% et le taux effectif global (TEG) 5,608%.

Le prêt est entré en phase d'amortissement progressif le 30 septembre 2008, le capital devant être réglé à échéance s'élevant à 56 918 287,45 €.

Au nombre des garanties souscrites figurait le cautionnement de la société JJW France et un engagement à première demande de la société JJW Limited, souscrit par acte séparé du même jour et annexé à l'acte notarié.

Après avoir réglé 6 échéances, les emprunteurs ont cessé tout paiement à compter du 30 juin 2010.

Aareal a alors, après avoir vainement appelé la garantie à première demande à hauteur de 22 091 922,13 €, saisi le juge des référés en paiement de cette somme.

Débouté par cette juridiction le 26 mai 2011, Aareal a engagé la présente procédure par exploit du 5 mars 2012.

Par quatre jugements du 17 avril 2012, le tribunal de commerce de Paris a accueilli la demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde formulée par chacune des sociétés JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian le 10 précédent, ces entités exposant ne pas être en mesure de procéder au remboursement du concours d'Aareal désormais échu.

Le 23 juillet 2012, Aareal a déclaré sa créance à hauteur de 96 885 807,78 €, hors intérêts, au passif de chaque société et le juge commissaire s'est déclaré incompétent pour connaître des contestations soulevées par les débiteurs, par ordonnance du 24 juin 2014, confirmée le 25 juin 2015 par cette cour et a sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir dans la présente procédure.

Un plan de sauvegarde a été arrêté pour chaque société par jugements de la juridiction consulaire en date du 16 juillet 2013.

Celui de la société Amarante a été résolu le 31 octobre 2017 et la liquidation judiciaire de cette personne morale a été prononcée.

Cette affaire aurait donné lieu à un appel mais aucune partie ne communique l'arrêt rendu le 29 mai 2018.

Cette procédure a été initiée par Maître [O] [W], commissaire à l'exécution du plan, qui s'est employé dans ses différents rapports, notamment le dernier en date du 1er décembre 2016, à dénoncer le manque total de coopération et de transparence des sociétés sous sauvegarde, mettant en cause la fiabilité des élements de gestion commmuniqués, faute d'outils appropriés, ainsi que la médiocrité persistante des performances dont il impute la responsabilité à la paralysie des processus de décisions de gestion, toutes concentrées sur la personne de Monsieur [B] [R], principal actionnaire.

Le 29 novembre 2017, Me [W] a déposé une requête visant à constater l'état de cessation de paiement des trois autres sociétés françaises du groupe et prononcer la résolution du plan, rejetée par décision du tribunal de commerce en date du 27 mars 2018.

Par conclusions du 14 mai 2013, les sociétés JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian France sont intervenues volontairement à l'instance engagée le 5 mars 2012 pour voir prononcer la nullité du prêt pour défaut de cause.

La banque a attrait en la cause, par exploit du 8 août 2013, les mandataire et administrateur judiciaires désignés dans le cadre des plans de sauvegarde sus évoquées.

Le 29 juillet 2014, Aareal les a assignés pour voir statuer sur les contestations soulevées devant le juge commissaire ayant donné lieu au sursis à statuer précité tenant à la nullité du prêt et de l'intérêt conventionnel.

Par jugement du 28 septembre 2017, le tribunal de commerce de Paris, après avoir joint les différentes instances, a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

débouté les sociétés JJW Limited, JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian de leurs demandes,

condamné la sociétés JJW Limited au paiement de la somme de 22 091 922,13 €,

condamné solidairement les sociétés JJW Limited, JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian au paiement d'une indemnité de 20 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnances des 10 juillet et 27 novembre 2018, le juge commissaire s'est déclaré incompétent pour statuer sur la demande de participation de la Banque, à titre provisionnel, aux répartitions faites dans le cadre du plan.

Par déclaration du 24 octobre 2017, les sociétés JJW Limited, JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian ont interjeté appel de la décision du 28 septembre 2017.

Dans leurs dernières conclusions du 22 janvier 2019, elle demandent à la cour outre des « constats » qui ne s'analysent pas comme des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile :

de débouter Aareal de sa demande de nullité de la déclaration d'appel pour avoir mentionné une adresse erronée de son siège social, en l'absence de grief,

déclarer leur appel recevable,

d'infirmer le jugement déféré,

de débouter Aareal de sa demande dirigée contre JJW Limited en raison du défaut de cause de la garantie à première demande et de la nullité de la convention de crédit, exception que l'auteur de ladite garantie est en droit d'opposer au créancier, son engagement devant s'analyser comme un cautionnement,

subsidiairement, de constater l'irrégularité des appels en garantie du 31 janvier 2011, de les juger abusifs et de débouter Aareal de sa demande,

de condamner l'intimée, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, à verser à JJW Limited la somme de 35 000 € et aux quatre autres sociétés appelantes celle de 20 000 €.

Dans leurs dernières conclusions du 23 avril 2018, la SCP Thevenot Partners et la Selarl Actis, agissant en leurs qualités respectives de commissaire à l'exécution du plan et mandataire judiciaire des sociétés JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian s'en rapportent à justice et sollicitent, chacune, la condamnation de tout succombant à leur verser une indemnité de 5 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures du 18 janvier 2019, Aareal conclut :

à la nullité de la déclaration d'appel pour inexactitude de l'adresse du siège social de la société JJW Limited,

à la confirmation du jugement du chef de la condamnation prononcée contre la société JJW Limited,

de dire et juger que chacune des sociétés JW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian, reste lui devoir la somme de 96 885 807,78 € outre intérêts contractuels capitalisés et que cette créance est privilégiée,

de condamner solidairement les appelantes à lui verser une indemnité de 40 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 janvier 2019.

CELA ÉTANT EXPOSÉ

LA COUR

Sur la nullité de la déclaration d'appel

Considérant, outre que le conseiller de la mise en état est seul compétent pour la prononcer aux termes des dispositions de l'article 914 du code de procédure civile, que s'agissant d'une nullité de forme, elle suppose démontrée l'existence d'un grief et l'absence de régularisation ;

Que les dernières conclusions de JJW Limited mentionnant son adresse exacte, telle qu'elle figure sur le registre des sociétés de [Adresse 5], il n'y a pas lieu de renvoyer l'examen de cet incident au conseiller de la mise en état ;

Sur la garantie à première demande

Sur sa nullité

Considérant que dans sa partie introductive consacrée à l'identité des parties, l'acte du 19 avril 2017 intitulé « GARANTIE A PREMIERE DEMANDE » dispose « DE JJW LIMITED... A AAREAL BANK FRANCE, une société anonyme constituée conformément aux lois françaises ayant son siège social sis [Adresse 9], en sa qualité propre et en tant qu'agent pour les Prêteurs selon les termes de la Convention d'Ouverture de Crédit... »

Considérant que les appelantes en déduisent que cet engagement est nul pour défaut de cause, la société AAREAL BANK FRANCE n'ayant jamais accordé quelque concours que ce soit aux sociétés du groupe JJW ;

Considérant que la banque soutient que cette mention résulte d'une simple erreur de plume dont les parties pouvaient se convaincre à la lecture de l'acte, argumentation retenue par la juridiction consulaire ;

Considérant que cette motivation doit être approuvée dès lors que l'adresse du bénéficiaire de la garantie est précisée en page 4 de l'acte : « Paulinenstrabe 5, Wiesbanden » (Wiesbaden') et que figure, en fin d'acte, juste au-dessus de la signature de la partie désignée Bénéficiaire, la mention « Aareal Bank AG » ;

Sur la requalification demandée

Considérant que les appelantes considèrent que la société JJW Limited n'a pas souscrit un engagement distinct et indépendant de celui du débiteur principal (gras dans les conclusions) ;

Qu'appréciant le critère d'autonomie au travers de son objet, la dette garantie, et constatant qu'en l'espèce la société JJW Limited s'est engagée dans la limite des sommes dues par ses filiales, que l'acte contesté renvoie au contrat principal sur la définition des termes employés ou la date d'échéance de la convention, elles demandent sa requalification en cautionnement leur permettant d'opposer au créancier toutes les exceptions inhérentes à la dette garantie ;

Considérant que la société JJW Limited s'est engagée en ces termes :

«1 Conformément à l'article 2321 du Code Civil français, le Garant s'engage de manière irrévocable et inconditionnelle à payer au Bénéficiaire, lors de sa première demande, toute somme que le Bénéficiaire peut réclamer jusqu'à un montant maximum égal au total des sommes échues et payables tel que défini par la Convention d'Ouverture de Crédit au moment de la demande de paiement visée par la garantie.

Le Garant effectuera le paiement au Bénéficiaire dans les 5 jours suivant la réception de la demande envoyée au format défini à l'Annexe A des présentes (la « Demande ») et notifiée conformément à l'article 8 ci-après. Le Garant reconnaît et accepte que toute Demande constitue la preuve définitive de l'obligation de s'acquitter de toutes les sommes réclamées par le Bénéficiaire .

2 Cette garantie forme une obligation indépendante et autonome du Garant. Le Garant ne sera en aucun cas habilité à invoquer une prescription de paiement résultant de la relation entre le Bénéficiaire et le Garant ou n'importe quel tiers, en vue de refuser ou de retarder le paiement visé par les présentes.

3 Cette garantie peut être appelée une fois ou plusieurs fois par le Bénéficiaire qui peut présenter plusieurs demandes dont chaque paiement sera effectué par le Garant.

4 Cette garantie expire soit à la Date d'échéance finale de la Convention d'Ouverture de Crédit, soit, si avant, à la date où le Ratio DSCR Global est supérieur à 1,30 pendant une durée minimum de deux ans, comme visé par l'article 24 de la Convention d'Ouverture de Crédit. A partir de cette date, le Bénéficiaire ne pourra plus envoyer de Demande supplémentaire à condition que l'expiration n'ait pas de conséquence ou de préjudice sur la validité de toute Demande envoyée par le Bénéficiaire avant cette date » ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2321 du Code civil :

La garantie autonome est l'engagement par lequel le garant s'oblige, en considération d'une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant les modalités convenues.

Le garant n'est pas tenu en cas d'abus ou de fraude manifestes du bénéficiaire ou de collusion de celui-ci avec le donneur d'ordre.

Le garant ne peut opposer aucune exception tenant à l'obligation garantie.

Sauf convention contraire, cette sûreté ne suit pas l'obligation garantie ;

Considérant que ce texte, née de l'ordonnance n°2006-346 du 23 mars 2006, consacre la validité de cette garantie en droit français dont elle exclut de son champ d'application les crédits à la consommation ou immobilier et, en partie, les baux d'habitation ;

Qu'il est constant que la reconnaissance légale de cette sûreté vise à favoriser le commerce international en offrant à un partenaire une garantie le dispensant de discuter les éventuelles questions de droit liées à la conclusion ou à l'exécution du contrat de base sous la seule réserve d'un abus -consistant à solliciter un paiement indu- ou d'une fraude -supposant un détournement de la règle de droit -;

Qu'en l'espèce l'intervention de la maison mère a permis aux sociétés du groupe d'obtenir une ouverture de crédit d'un montant substantiel ;

Considérant ainsi que les parties, commerçants avisés, qui ont, aux termes d'un contrat dépourvu d'ambiguïté, excluant ainsi toute interprétation du juge, rejeté le cautionnement classique pour adopter une sûreté reconnue par la loi française à laquelle elles se sont soumises, laquelle ne distingue pas selon l'objet de la garantie, ne sauraient se voir imposer une requalification de leur convention au seul motif des similitudes du but recherché avec le cautionnement, étant encore observé que JJW Limited ne saurait soutenir que la garantie choisie serait dans l'intérêt exclusif de la banque alors qu'une clause particulière réduit la durée de son engagement dans l'hypothèse où la marge d'exploitation des emprunteuses permet d'augurer leurs capacités à faire face à leur charge de remboursement ;

Que la liberté contractuelle s'y oppose de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de requalification ;

Sur le caractère abusif de l'appel en garantie

Considérant que les appelantes concluent subsidiairement à un abus dans la mise en 'uvre de la garantie aux motifs que son appel n'a pas respecté les formes contractuelles décrites comme suit dans l'article 8 :

« Toutes les notifications et les communications en rapport à la présente Garantie seront rédigées par écrit, par fax (à condition que ce fax soit immédiatement confirmé par une lettre recommandée avec accusé de réception, en mains propres ou par courrier express international).

Toutes les notifications et les communications seront réputées avoir été faites de manière valide :

à la livraison, lorsqu'il s'agit d'une notification ou communication effectuée par lettre recommandée avec accusé de réception ; ou

à réception, lorsqu'il s'agit d'une notification ou d'une communication effectuée par fax ;

à condition que si la date qui apparaît sur l'accusé de réception n'est pas un jour ouvré (un jour ouvré étant un autre jour qu'un samedi, dimanche ou tout autre jour de fermeture des institutions bancaires à [Localité 1] ou à [Adresse 5], un « Jour ouvré », la date de réception sera réputée être le premier jour ouvré qui suit la date apparaissant sur l'accusé de réception ;

(iii) à réception par le destinataire de la notification ou de la communication lorsqu'il s'agit d'une notification ou d'une communication délivrée en mains propres ou par courrier express international.

Toute notification ou communication doit être envoyée aux adresses à l'attention des personnes ci-après ou à toute autre adresse et à l'attention de toute autre personne notifiée par l'une des parties à l'autre partie, conformément au présent article.

Considérant, outre qu'une inobservation des formalités requises pour l'appel en garantie ne saurait caractériser un abus (défini ci-dessus) que l'appelante justifie avoir adressé les courriers recommandés suivants à l'adresse de [Adresse 5] figurant dans l'acte signé :

le 14 décembre 2010 pour appel de 19 677 020,64 €,

le 31 janvier 2011 pour appel de 1 244 687,51 €,

le 12 avril 2011 pour appel de 1 170 213,98 €,

de sorte que le grief n'est pas fondé ;

Sur la nullité du contrat d'ouverture de crédit

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que seules les sociétés emprunteuses et leurs cautions ont qualité à soulever ce moyen ;

Sur la nullité pour défaut de cause

Considérant cette nullité a été soulevée pour la première fois dans les conclusions d'intervention volontaire des emprunteuses et de leur caution -dans une instance ne les concernant pas-, le 14 mai 2013 aux motifs que bien que désignés co-emprunteurs les sociétés Hôtel Balzac, Hôtel de Vigny, Amarante et Médian n'auraient, chacune, perçu qu'une fraction du prêt, de surcroît destiné à rembourser les précédents concours accordés par la même banque ;

Mais considérant que l'ouverture de crédit ayant été consentie le 19 avril 2007, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que leur action était prescrite depuis le 20 avril 2012 ;

Que contrairement à ce qu'elles soutiennent l'action de la banque dirigée contre leur maison mère ne saurait interrompre la prescription de leur action en nullité, l'effet interruptif de l'assignation délivrée ne pouvant profiter qu'à la banque et ne nuire qu'à la société JWW Limited tandis que les fondements juridiques ou les contrats sont distincts ;

Que n'ont pas davantage d'effet interruptif :

les premières conclusions de JJW Limited en date du 30 octobre 2012, étant encore observé, outre qu'elles sont postérieures à l'expiration du délai de prescription en nullité du prêt, qu'elles ne soulevaient pas ce moyen- ;

la déclaration de créance de la banque tandis que la contestation qui lui a été opposée, notamment sur le fondement de la nullité du prêt pour défaut de cause, résulte de conclusions des 30 juillet et 4 septembre 2013 donc tardives ;

Sur la nullité pour illicéité du prêt

Considérant que les appelantes soutiennent qu'à supposer la convention causée, la cause serait illicite évoquant l'artifice du prêt de restructuration qualifié de fraude perpétrée au préjudice des Emprunteuses ;

Qu'elles évoquent au sein du même paragraphe les dispositions de l'article L650-1du code de commerce  ;

Considérant, sur l'illicéité du prêt, que la loi du 17 juin 2008 (entrée en vigueur le 19 suivant) étant venue réduire à 5 ans la prescription alors trentenaire, elle était acquise le 19 juin 2013 ;

Que cette demande ayant été formée pour la première fois dans des conclusions du 4 septembre 2013, l'action est également prescrite ;

Que pour les raisons précitées, il n'y a pas eu interruption de la prescription pour les motifs allégués et que seule l'absence de cause, à l'exclusion de sa licéité était évoquée dans les conclusions d'intervention volontaire ;

Considérant que la demande fondée sur les dispositions de l'article L650-1 du code de commerce -qui restreint les conditions de mise en jeu de la responsabilité de la banque en cas d'ouverture d'une procédure collective- n'a pas été soumise aux premiers juges de sorte qu'elle est irrecevable selon les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile que le juge est autorisé à soulever d'office ;

Sur la demande de la banque en fixation de créance

Considérant que la demande de l'intimé tendant à voir dire et juger que chaque emprunteuse reste devoir au tire du prêt la somme de 96 885 807,78 € s'analyse en une demande de fixation de créance à titre privilégié qu'il convient d'accueillir s'agissant du quantum, des intérêts conventionnels et de leur capitalisation en l'absence de toutes contestations des emprunteuses -pourtant formulées devant le juge commissaire- ;

Que la cour ne saurait cependant en l'absence de tout élément les caractérisant ou les chiffrant fixer une créance correspondant aux accessoires et honoraires de conseil ;

Sur l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que l'équité commande de confirmer la condamnation prononcée par les premiers juges et d'allouer à la banque, au titre de la procédure d'appel, une indemnité de 20 000 € sur ce fondement, de 2 000 €, chacune aux sociétés [W] Partners et Actis ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Fixe, à titre privilégié, la créance de la société Aareal Bank au passif des sociétés JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian la somme de 96 885 807,78 € portant intérêts capitalisés selon les modalités de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne les sociétés JJW Limited JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian à verser, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile , au titre de la procédure d'appel :

20 000 € à la société Aareal Bank,

2 000 € à la SCP [W] Partners,

2 000 € à la Selarl Actis ;

Déclare irrecevable la demande fondée sur l'article L650-1 du code de commerce ;

Rejette toute autre prétention ;

Condamne les sociétés JJW Limited JJW Luxury Hotels, JJW France, Amarante et Médian aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 17/19648
Date de la décision : 13/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°17/19648 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-13;17.19648 ?
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