RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 08 Mars 2019
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/00751 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BX2KL
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 Novembre 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 15/01641
APPELANT
Monsieur [Z] [U]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1] (TUNISIE)
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Laurent DELPRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1299
INTIMEE
CPAM [Localité 3]
DIRECTION DU CONTENTIEUX ET DE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901 substitué par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 3]
[Localité 5]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 janvier 2019, en audience publique et rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre, et madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Claire CHAUX, présidente de chambre
Madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère
Monsieur Lionel LAFON, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme DAMPIERRE Vénusia, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par madame Claire CHAUX, présidente de chambre, et par Mme Vénusia DAMPIERRE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [Z] [U] d'un jugement rendu le 25 novembre 2015 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3].
EXPOSE DU LITIGE
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.
Il suffit de rappeler qu'un contrôle a porté sur les actes et cotations effectués durant la période du 1er août 2009 au 31 juillet 2011 par M. [U], exerçant la profession de chirurgien-dentiste.
Par décision du 11 septembre 2013, la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3] ( ci- après la caisse ) a notifié à M. [U] ses observations au sujet des anomalies relevées par ses agents et la créance en résultant sur le fondement de l'article L.133-4 du code de la sécurité sociale d'un montant de 9 814,09 €.
M. [U] a saisi la commission de recours amiable de sa contestation, avant de saisir la juridiction des affaires de sécurité sociale de Paris le 16 mars 2015.
Par jugement du 25 novembre 2015 , ce tribunal a rejeté sa demande et condamné M. [U] à payer à la caisse la somme de 9 814,09 €.
Aux termes de conclusions soutenues par son conseil, M. [U] demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en ses demandes, d'infirmer le jugement attaqué, de constater les irrégularités formelles, de prononcer l'annulation de la procédure et des notifications d'indus, à défaut, d'ordonner une expertise, de condamner la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3] à lui verser la somme de 1 000 € au titre des préjudices économiques et moraux subis et celle de 3 600 € au titre des frais d'instance.
Il fait valoir que :
- la procédure est entachée d'irrégularité dans la mesure où il n'a reçu aucune information préalable sur les patients qui allaient faire l'objet d'une vérification, contrairement aux dispositions de l'article R.315-1-1 du code de la sécurité sociale,
- le service n'en est exonéré qu'en cas de fraude ou de trafic de médicaments, ce qui n'est pas le cas,
- l'arrêt invoqué de la Cour de Cassation du 14 février 2013 est transposable, en ce qu'il ne fait qu'appliquer l'article R.315-1-1 précité,
- dans 20 cas, il est reproché la réalisation de couronnes sur des dents non délabrées alors qu'elles étaient agressées, mal positionnées ou présentaient des problème de parodontite,
- dans 29 cas, la réalisation des inlays-cores était justifiée,
- dans 14 cas, il en était de même de la réalisation de traitements endodontiques,
- dans 12 cas, si la réalisation des inlays-cores n'a pas été constatée, il est produit des fiches de traçabilité et une radiographie pour en justifier,
- dans 6 cas, les pulpectomies étaient justifiées par les douleurs endurées,
- les anomalies alléguées justifient la réalisation d'une expertise indépendante.
La caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3] fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions tendant à confirmer cette décision et à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour ordonnait une expertise, à en mettre les frais à la charge du Dr [U].
Elle explique que :
- l'arrêt de cassation invoqué concerne les dispositions de l'article R.315-1-1 du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure au décret du 20 août 2009, ce qui n'est pas le cas pour un contrôle postérieur,
- en matière de recouvrement d'indu, les seules dispositions applicables sont celle de l'article L.133-4,
- le Dr [U] ne conteste que 81 cas sur 173 anomalies détectées, soit un indu non contesté de 4 145,40 €,
- par décision du 4 juin 2014, le conseil régional de l'ordre a considéré que les griefs constituaient des fautes et abus au sens de l'article L.145-1 du code de sécurité sociale et justifiaient une interdiction de soins,
- ces professionnels ont collectivement validé les griefs et donc le bien-fondé de l'indu, la mesure d'expertise est donc inutile,
- en matière de contrôle de facturation, la Cour de cassation considère l'expertise comme étant sans incidence,
- si le chirurgien-dentiste est libre de ses soins, il doit limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire,
- les griefs qui sont reprochés au Dr [U] portent soit sur la réalisation d'actes non justifiés par les besoins du patient, soit sur la facturation d'actes dont la matérialité n'est pas établie ou constatée ou encore qui ne sont pas remboursables,
- la demande de dommages et intérêts ne repose sur aucune faute, aucun préjudice et aucun lien de causalité.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE, LA COUR,
Sur la régularité de la procédure de contrôle
M. [U] se prévaut de l'absence d'information préalable de la liste de ses patients qui allaient faire l'objet d'une vérification par le service du contrôle médical.
Il ressort des dispositions de l'article R 315-1-1 du code de la sécurité sociale en sa version postérieure au décret du 20 août 2009 applicable aux faits de l'espèce, que lorsque le service du contrôle médical procède à l'analyse de l'activité d'un professionnel de santé, il peut consulter les dossiers médicaux des patients ayant fait l'objet des soins dispensés, et en tant que de besoin, entendre et examiner ces patients, qu'il en informe au préalable le professionnel sauf lorsque l'analyse a pour but de démontrer l'existence d'une fraude, d'une fraude en bande organisée ou de faits relatifs à un trafic de médicaments.
Il résulte de ces dispositions que le service du contrôle médical ne peut ainsi agir qu'après avoir informé le professionnel de santé de l'identité des patients qu'il entend auditionner ou examiner. Il n'est pas contesté en l'espèce, que cette information préalable n'a pas existé.
Cependant, s'agissant d'une contestation de notification d'indu, acte qui ouvre la procédure de recouvrement et met un terme à la procédure de contrôle médical, ce moyen est inopérant, seul l'article L.133-4 du code de sécurité sociale étant applicable. Le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de contrôle médical sera donc écarté.
Sur les causes de l'indu
Il sera observé que le Dr [U] ne conteste que 81 cas sur 173 et que les anomalies contestées portent soit sur la réalisation d'actes présentés comme non justifiés par les besoins du patient, soit sur la facturation d'actes dont la matérialité n'était pas établie ou constatée, soit sur la facturation d'actes présentés comme non remboursables.
Si le Dr [U] conteste ces griefs, sollicitant au besoin une expertise, ceux-ci ont été soumis au conseil de l'ordre des chirurgiens-dentistes d'Île-de-France suite à la plainte déposée par le médecin conseil de la caisse primaire d'assurance maladie [Localité 3]. Par une décision devenue définitive du 4 juin 2014, le conseil a retenu l'ensemble des faits qui lui étaient soumis et considéré qu'ils constituaient des fautes et abus au sens de l'article L.145-1 du code de sécurité sociale, ce qui justifiait à l'encontre du Dr [U] la sanction de l'interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant deux mois, assortie du bénéfice du sursis pour la période excédant trois semaines.
Il s'en déduit que les violations des règles de facturations sont incontestables, que la mesure d'expertise sollicitée n'est pas justifiée et que l'indu doit être validé. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé.
Sur les autres demandes
Les demandes de dommages et intérêts et d'article 700 du code de procédure civile présentées par M. [U] étant l'accessoire de sa demande principale, le rejet de cette dernière justifie aussi le rejet des premières.
M. [U] qui succombe supportera les dépens de l'instance d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Déboute M. [Z] [U] de ses demandes de dommages et intérêts et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Z] [U] aux dépens de l'instance d'appel.
La GreffièreLa présidente