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06/03/2019 | FRANCE | N°17/04877

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 06 mars 2019, 17/04877


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 06 Mars 2019

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/04877 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3AZ4



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mars 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 16/03049





APPELANT

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Véronique GALL

OT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0486 substituée par Me Louise MILBACH, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE

Association AVEA LA POSTE

[Adresse 2]

75013 PARIS/FRANCE

re...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 06 Mars 2019

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/04877 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3AZ4

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Mars 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 16/03049

APPELANT

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

représenté par Me Véronique GALLOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0486 substituée par Me Louise MILBACH, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

Association AVEA LA POSTE

[Adresse 2]

75013 PARIS/FRANCE

représentée par Me Aline JACQUET DUVAL de la SARL JACQUET - DUVAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E2080

substituée par Me Tiphaine VIBERT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 janvier 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre

Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère

Madame Florence OLLIVIER, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 17 décembre 2018

Greffier : Mme Sylvie FARHI, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre et par Madame Sylvie FARHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [Z] a été embauché, à compter du 4 mai 2009, en qualité d'assistant transports par l'association l'Avéa La Poste qui pour objet l'organisation et la gestion de séjours et de vacances pour des enfants et adolescents des agents de la poste et de ses filiales. Il est devenu adjoint du responsable transports, puis responsable transports, et à compter du 1er avril 2015, directeur des systèmes d'information, groupe I, indice 500 de la convention collective nationale de l'animation.

L'association fait valoir qu'au printemps 2015, un directeur général a été embauché alors qu'auparavant le président était aussi directeur général, et qu'à cette occasion ont été mis en lumière de graves dysfonctionnements au sein du service transports et notamment les difficultés de la direction financière à obtenir les données comptables de ce service.

Il a été confié à une société extérieure de conseils, la société OMP, une étude sur l'organisation du service. Celle-ci a déposé son rapport le 6 novembre 2015.

Le 9 novembre 2015, l'association a notifié à Monsieur [Z] une mise à pied conservatoire et l'a convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 27 novembre 2015. Elle l'a licencié pour faute grave par lettre du 11 décembre 2015 ainsi motivée :

« Les faits qui vous sont reprochés et que vous n'avez pas niés, à savoir des dysfonctionnements majeurs dans l'organisation du service transports qui mettent en péril l'Avéa, sont plus précisément les suivants :

'vous avez mis à votre nom personnel le nom de domaine de « l'Avéa transports » qui renvoie aux sites sur lesquels se connecte l'ensemble des parties prenantes concernées par le voyage des enfants partants ou revenants des séjours organisés par l'Avéa '. Lors de l'entretien préalable, vous avez soutenu que vous étiez propriétaire du nom de domaine de ce site mais que vous le laissiez à disposition de l'Avéa jusque-là.

'Vous avez institué des codes d'accès, que vous êtes le seul à détenir, sur la totalité des systèmes d'information, empêchant l'ensemble de fonctionner sans vous. Il a fallu vous demander ces codes par voie d'huissier. Vous avez indiqué lors de l'entretien préalable que vous étiez propriétaire des logiciels que vous auriez développés sur votre temps de travail et que l'Avéa devait donc se rendre devant le juge si elle souhaitait les récupérer.

Malgré les mises en garde votre employeur, vous avez refusé de donner ces codes qui n'ont pu être récupérés que le 5 décembre 2015, et encore de manière incomplète.

'Vous avez mis le service transports en coupe réglée, distribuant à vous-même et à vos proches, des billets d'avion achetés depuis le compte de l'Avéa pour un montant de 17 277,12 euros, que vous devez impérativement rembourser.

Pour éviter que cette situation ne soit mise à jour, vous avez organisé un système qui ne permettait pas d'individualiser les billets en comptabilité et vous disposiez d'un compte IATA avec des codes que vous étiez seul à détenir.

Lors de votre entretien préalable, vous avez soutenu qu'il s'agissait du paiement d'heures supplémentaires, pensant ainsi que l'Avéa ne rechercherait pas votre responsabilité alors même que, salarié en forfait jours, vous ne pouvez bénéficier d'heures supplémentaires.

'Vous avez refusé à plusieurs reprises, ou délivré avec un grand retard le justificatif de vos dépenses.

Il s'agit de montants substantiels, liés notamment à des frais de restaurant (certains concernant sans doute des accompagnants d'enfants),' mais ils sont très rarement documentés. Vous avez indiqué que la comptabilité détenait les facturettes qui pouvaient selon vos dires tenir lieu de justificatifs, alors que cela n'est nullement le cas comme cela vous avait été indiqué à plusieurs reprises et relevé par le commissaire aux comptes.

Il s'agissait pour vous de dissimuler vos dépenses personnelles' »

le 21 mars 2016 Monsieur [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris afin d'obtenir le paiement notamment d'indemnités de rupture, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappels de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et de jours supplémentaires.

Il a été débouté de ses demandes par jugement du 15 mars 2017.

Il a interjeté appel interjeté appel et, dans des conclusions déposées par voie électronique, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, il sollicite de voir :

'infirmer le jugement ;

'juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

'condamner l'association à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité conventionnelle de licenciement, rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, indemnité de préavis, congés payés afférents, à titre de jours supplémentaires non rémunérés pour les années 2013, 2014 et 2015, les congés payés afférents, une indemnité pour travail dissimulé, au titre de congés payés non pris en rémunérés, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre la remise des documents sociaux et bulletins de paye rectifiés. Le montant des sommes réclamées est précisé au dispositif des conclusions

L'intimée, dans des conclusions déposées par voie électronique, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, sollicite de voir :

'confirmer le jugement ;

'condamner l'appelant à lui verser 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Il convient d'examiner examiner les motifs du licenciement :

Sur l'enregistrement du nom de domaine sous le nom personnel de Monsieur [Z]

Le 25 novembre 2015, le directeur général de l'association a écrit à Monsieur [Z] qu'il venait de constater que le nom de domaine « avea-transports.fr » à partir duquel était exploité le site Internet du pôle transports, avait été enregistré à son nom et non, comme il se devait, au nom de l'association et qu'il pensait qu'il ne pouvait s'agir que d'une erreur de sa part.

Monsieur [Z] s'est dit étonné que l'association soutienne n'avoir découvert à l'automne 2015, cet enregistrement de nom de domaine à son nom dès lors qu'il ressort de la capture d'écran de la page d'accueil du site, réalisé à la date du 12 juillet 2013, que le nom de Monsieur [Z] figure de façon claire.

L'association réplique que le directeur général n'a découvert ce fait qu'en octobre 2015 car il « avait pris ses fonctions au printemps et que celles-ci ne requéraient naturellement pas qu'il étudie scrupuleusement, à peine arrivé, les mentions légales figurant en bas de page du site Internet de l'association. L'ancien président, Monsieur [V], était quant à lui probablement informé de cette circonstance..... compte tenu de sa proximité avec l'appelant' » Le rapport de la société déposé par la société OMP en novembre 2015 révèle en effet l'opacité du fonctionnement de l'association, ce qui explique cette découverte tardive.

L'appelant ne peut sérieusement soutenir dans ses conclusions que « quant au nom de domaine de l'Avéa transports, il était effectivement initialement enregistré au nom de Monsieur [Z] mais cela ne portait en aucun cas un quelconque préjudice à l'association puisque l'enregistrement est une formalité purement administrative ».

Sur la rétention abusive des codes d'accès au logiciel et au nom de domaine

Le 23 novembre 2015, l'association a mis en demeure Monsieur [Z], par voie d'huissier, de communiquer les codes administrateurs installés sur l'adresse du nom de domaine afin de permettre l'organisation et le bon fonctionnement du transport des enfants. Elle a réitéré cette demande dans sa lettre du 27 novembre 2015.

Il résulte du compte rendu de l'entretien préalable du 27 novembre 2015 produit par Monsieur [Z], que le directeur général a demandé à Monsieur [Z] lui fournir les codes GTA.

Monsieur [O] : «' les codes GTA, pouvez-vous me les fournir maintenant ' »

Monsieur [Z] : « Pas tout de suite. S'il le faut nous irons en justice car ces codes sont ma propriété. Si décision contraire de la justice je les rendrai. »

'

Monsieur [O] : « le nom de domaine « avea-transports.fr » sous votre nom '

Monsieur [Z] : « mis en place par mes soins jamais demandé par l'association »

Il résulte du procès-verbal de constat d'huissier du 1er décembre 2015 qu'à cette date le site Internet de l'association était encore bloqué.

Les éléments nécessaires à la gestion des différents outils informatiques du service transport n'ont été récupérés que le 7 décembre 2015.

Le logiciel a donc été bloqué du 9 novembre au 7 décembre 2015 ce qui a gravement entravé la préparation de l'acheminement de centaines d'enfants d'agents de la poste à l'approche des vacances de Noël.

Sur l'achat de billets d'avion par Monsieur [Z]

Pour la période du 1er juin 2014 au 30 octobre 2015, Monsieur [Z] a fait payer à l'association des billets d'avion pour un montant de 17 277,12 euros.

Monsieur [Z] a remboursé la quasi-totalité des billets le 11 décembre 2015, ce qui révèle qu'il était conscient de son comportement indélicat. Par ailleurs, il ne peut sérieusement soutenir que ces billets compensaient l'exécution d'heures supplémentaires d'autant qu'il était soumis à une convention de forfait jours et que la cour ne retient pas ci-après l'existence d'heures supplémentaires.

Sur le retard dans la délivrance de justificatifs de dépenses

Le rapport de la société OMP indique :

'« Aucune dépense ne fait l'objet d'un bon de commande ou d'un ordre de mission préalable »

'« on peut mettre 6 à 8 mois pour avoir certaines factures et obtenir les frais du responsable, c'est à son bon vouloir »

'« Au jour du début de notre étude, la direction financière attendait depuis 6 mois environ la validation de 700 factures fournisseurs et justificatifs de notes de frais par le service transport. MG a fourni les factures 3 jours après notre première intervention' »

'« Le service reçoit régulièrement des factures d'un café'restaurant pour des sommes pouvant aller jusqu'à 1,5KE pour lesquelles le fournisseur ne précise aucun détail et notamment le nombre de couverts facturés (montant global). Après interview, MG précise que les dépenses sont utiles au bon fonctionnement des journées d'opérations intenses. « Les ambassadeurs, convoyeurs, sont invités à l'issue de leur journée de travail pour les remercier et les encourager pour les fois suivantes ».

'« Sur les 9 premiers mois de l'exercice comptable 2015, les dépenses de carte bleue du service s'élèvent à 120keuros. Sur ce montant, 80 % sont justifiées par une facturette mais aucune n'est justifiée automatiquement par une affectation analytique »

Il résulte de ces constatations et sans qu'il il y ait lieu d'examiner les autres griefs, que le comportement du salarié constituait une faute grave rendant impossible le maintien du contrat de travail. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes au titre de la rupture.

Sur les rappels de salaire au titre des années 2013, 2014 2015

Monsieur [Z] était soumis au forfait jours. L'association fait remarquer à juste titre que les relevés de badgeage qu'il produit pour la première fois un mois avant l'audience d'appel, ne sont pas de nature à étayer sa demande, la situation de ses anciens collègues dont la durée de travail était calculée en heures et qui relevaient des accords de modulation, ne pouvant être comparée à la sienne. Par ailleurs, les attestations versées aux débats par Monsieur [Z] sont dépourvues de précision. L'existence d'heures supplémentaires n'est donc pas établie.

Il sera débouté de ce chef de demande ainsi que de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur les jours de congés payés

Il résulte des pièces versées aux débats que les jours de congés payés ont été intégralement réglés dans le solde de tout compte à concurrence de 7544,88 euros (19 jours reliquat de congés payés pour 2015 et 17 jours de congés payés pour 2009) la société faisant en outre remarquer que les 17 jours de 2009 étaient prescrits.

Il est équitable d'accorder à l'association une somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne Monsieur [Z] à payer à l'association L'Avéa La poste une somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/04877
Date de la décision : 06/03/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°17/04877 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-03-06;17.04877 ?
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