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28/02/2019 | FRANCE | N°16/22931

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 28 février 2019, 16/22931


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 5 - Chambre 5





ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2019





(n° , 8 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/22931 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2AQZ





Décision déférée à la cour : jugement du 04 novembre 2016 -tribunal de commerce de BORDEAUX - RG n° 2015F00977






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APPELANTE





SASU RAVE DISTRIBUTION


Ayant son siège social [...]


N° SIRET : 950 450 569


Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège





Représentée par Maître Marie-Laure...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 28 FÉVRIER 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/22931 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2AQZ

Décision déférée à la cour : jugement du 04 novembre 2016 -tribunal de commerce de BORDEAUX - RG n° 2015F00977

APPELANTE

SASU RAVE DISTRIBUTION

Ayant son siège social [...]

N° SIRET : 950 450 569

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Marie-Laurence MARIE, avocate au barreau de PARIS, toque : K0164

Ayant pour avocat plaidant Maître Eric ANDRES, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE

SA FRANCIAFLEX

Ayant son siège social [...]

[...]

N° SIRET : 788 165 793

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Ayant pour avocat plaidant Maître Frédéric BIAIS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 08 novembre 2018, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, chargé du rapport

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère

Madame Christine SOUDRY, Conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Patrick BIROLLEAU dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Noël Fermetures (Noël) a fait assurer une partie du transports de ses marchandises par la société Transports Durou, devenue, en mars 2009, un établissement de la société RAVE DISTRIBUTION. Un contrat spécifique pour la prestation de simple affrètement a été conclu le 30 octobre 2011 entre Noël et Rave

La société Noël Fermetures ayant été placée en redressement judiciaire, le tribunal de commerce de Douai a, par jugement en date du 29 septembre 2012, arrêté un plan de cession par lequel la société FRANCIAFLEX a repris certains éléments du fonds de commerce de la société Noël.

Un accord est intervenu le 16 novembre 2012 sur les tarifs appliqués par Rave pour la période postérieure au 1er novembre 2012.

Pour 2013, la société FRANCIAFLEX a sollicité Rave pour qu'elle présente ses propositions tarifaires, en l'invitant à effectuer un effort dans le sens de la baisse de ses prix.

Les négociations s'étant poursuivies à la fin de l'année 2013 et au premier semestre de 2014, la société FRANCIAFLEX a refusé, le 7 mai 2014, les conditions proposées par la société RAVE DISTRIBUTION, lesquelles comprenaient une augmentation de ses tarifs de 3 %.

Par courrier en date du 1er août 2014, elle mis un terme aux activités de distribution à compter du 5 septembre 2014, puis, par courriel en date du 24 octobre 2014, a notifié à Rave la cessation des activités dites «Tournées» pour la semaine suivante, et de l'activité dite 'locations exclusives' à effet du 1er décembre 2014.

S'estimant victime d'une rupture brutale des relations commerciales établies, la société RAVE DISTRIBUTION a, par acte en date du 22 septembre 2015, assigné devant le tribunal de commerce de Bordeaux la société FRANCIAFLEX aux fins d'obtenir la réparation de son préjudice.

Par jugement rendu le 4 novembre 2016, le tribunal de commerce de Bordeaux a :

- débouté la société RAVE DISTRIBUTION de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné la société RAVE DISTRIBUTION à verser à la société FRANCIAFLEX la somme de 2.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Vu l'appel interjeté le 17 novembre 2016 par la société RAVE DISTRIBUTION à l'encontre de cette décision ;

***

Prétentions des parties :

La société RAVE DISTRIBUTION, par dernières conclusions signifiées le 9 février 2017, demande à la cour, au visa des articles L.442-6 du code de commerce et 1134 ancien du code civil, de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bordeaux le 4 novembre 2016 ;

- constater que la société FRANCIAFLEX n'a respecté aucun préavis lors de la rupture des relations commerciales ;

- constater que la brutalité de cette rupture ouvre droit à des dommages-intérêts au profit de la société Transports RAVE DISTRIBUTION ;

En conséquence,

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société RAVE DISTRIBUTION la somme de 246.754,71 euros au titre du préjudice constitutif à la rupture brutale des relations commerciales représentant neuf mois de marge brute ;

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société RAVE DISTRIBUTION la somme de 40.100 euros au titre du coût du rachat des véhicules ;

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société RAVE DISTRIBUTION la somme de 63.200 euros au titre de l'acquisition des portes caisses ;

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société Rave DISTRIBUTION la somme de 31.992,8 euros au titre du préjudice social ;

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société Rave DISTRIBUTION la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts compte tenu de l'exécution déloyale du contrat ;

- condamner la société FRANCIAFLEX à payer à la société Rave DISTRIBUTION de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir que la société FRANCIAFLEX a tenté d'obtenir des conditions tarifaires toujours plus intéressantes pour elle, sans que la poursuite des négociations ne se confonde avec la rupture elle-même de la relation et l'obligation, en cas de rupture, de notifier un préavis.

Elle souligne que les parties étaient en relation commerciale depuis neuf ans, que la société Rave DISTRIBUTION travaillait depuis 2005 (Transport Durou) avec Fermetures Noel, puis FRANCIAFLEX, que FRANCIAFLEX a de fait repris et continué le contrat qui avait été conclu avec la société Rave DISTRIBUTION sans aucune interruption avant et après le plan de cession, avec des tarifs et des modes de facturation ainsi que des volumes de transports demeurés inchangés.

Elle indique que la rupture est intervenue de manière brutale, la menace d'une interruption des relations au cas d'absence d'abaissement des conditions tarifaires ne pouvant s'analyser comme une prévision de la rupture, que la société Rave DISTRIBUTION a tout mis en oeuvre pour satisfaire les besoins de sa cocontractante, qu'en tout état de cause, la société FRANCIAFLEX n'a jamais manifesté de mécontentement de nature à justifier la rupture.

La société Rave DISTRIBUTION précise qu'à la même époque, la société FRANCIAFLEX a non seulement confié ses prestations à d'autres transporteurs sans que soit organisé un quelconque appel d'offres, illustrant l'absence de préavis.

La société Rave DISTRIBUTION en conclut qu'elle est fondée à réclamer le paiement par la société FRANCIAFLEX :

- de la perte de marge brute pour neuf mois de préavis de rupture qui auraient dû lui être accordés ;

- du prix de rachat du véhicule, ce matériel se révélant totalement inutilisable ;

- du prix d'acquisition de portes caisses très spécifiques, ce matériel se révélant également inutilisable ;

- du préjudice social, la société Rave DISTRIBUTION ayant dû supporter le coût de la reprise des salariés de la société Noël Fermetures ;

- de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat par la société FRANCIAFLEX, cette dernière ayant fait supporter à sa cocontractante un choix économique d'externalisation.

La société FRANCIAFLEX (anciennement Noël Fermetures), par dernières conclusions signifiées le 10 avril 2017, demande à la cour, au visa des articles L.442-6 et L.442-7 du code de commerce, de :

- déclarer la société Rave DISTRIBUTION mal fondée en son appel ;

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce du 4 novembre 2016 ;

En conséquence,

- débouter la société Rave DISTRIBUTION de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Rave DISTRIBUTION au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société FRANCIAFLEX fait valoir que sa relation avec la société appelante n'a débuté qu'à compter de 2012 et non de 2005, puisque d'une part, outre le fait que le contrat entre la société Rave DISTRIBUTION et la société Noël ne figure pas parmi les contrats listés par le tribunal de commerce de Douai, la société FRANCIAFLEX n'a pas repris le fonds de commerce de la société Noël mais uniquement les actifs liés à la production de menuiseries à Luzech et une partie du personnel administratif - la société FRANCIAFLEX ajoutant au surplus que la vente du fonds de commerce ne substitue pas de plein droit le cessionnaire au cédant dans les relations contractuelles et commerciales ; elle précise que, si la cour devait considérer qu'il y a eu un transfert de fonds de commerce, l'appelante ne rapporte pas la preuve d'une volonté de la part de la société FRANCIAFLEX de poursuivre les relations contractuelles existantes. La société FRANCIAFLEX en infère que la relation entre les parties n'était pas établie au sens de l'article L.442-6,I,5° du code de commerce, ce caractère établi devant nécessairement être «suivi, stable et habituel» et supposant que la victime ait pu 'avant la rupture raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affairesavec son partenaire commercial', qu'en l'espèce les négociations tarifaires duraient depuis plus d'un an avec le risque d'un changement de partenaire en cas d'échec, de sorte que la société Rave DISTRIBUTION ne pouvait s'attendre à une pérennité de la relation d'affaires et que, dès lors, elle n'était pas tenue au respect d'un préavis.

La société FRANCIAFLEX ajoute que, si le caractère établi de la relation devait être confirmé par la cour, la rupture n'a, de toutes les façons, pas été brutale, puisque d'une part, outre le fait que les parties étaient en négociation tarifaires depuis plus d'un an, la rupture a été suivie d'un préavis d'un mois pour une relation commerciale de deux ans, donc un préavis suffisant par nature pour rompre les relations commerciales établies; et puisque d'autre part, la rupture de la relation entre les parties s'explique essentiellement par des raisons économiques, de sorte que la rupture présentait un caractère prévisible dès le 1er août 2014.

La société FRANCIAFLEX fait valoir que la demande formulée par la société Rave DISTRIBUTION en réparation de son préjudice au titre de la prétendue rupture brutale des relations commerciales établies n'est pas bien fondée puisque, outre le fait qu'elle a évolué entre la première instance et la présente instance sans que cette différence ne soit expliquée, d'une part, la durée de la relation commerciale, constitutive d'un des seuls critères valables pour apprécier la durée suffisante du préavis, n'a duré que deux ans et puisque d'autre part, et en tenant compte de l'évolution du chiffre d'affaires réalisé entre les deux sociétés, la marge brute, retenue en l'espèce à hauteur de 27.417,19 euros par la société appelante, est basée sur un calcul erroné ; la société FRANCIAFLEX ajoutant à ce titre, d'une part, que le taux de marge brute de 13,4 % tel que retenu dans les calculs de la société Rave DISTRIBUTION sur la base de l'indice CNR, est discutable - cet indice CNR étant celui du comité routier et étant étranger au taux de charge de la société Rave DISTRIBUTION, et ce taux de marge étant appliqué sur l'ensemble du chiffre d'affaires de la société Rave DISTRIBUTION alors qu'il aurait dû être appliqué uniquement sur le chiffre d'affaires réalisé entre les parties durant le temps qu'a duré leur relation commerciale.

Enfin, la société FRANCIAFLEX fait valoir que les demandes de paiement en réparation des divers préjudices prétendument subis par la société intimée au titre du rachat de véhicule, de l'acquisition des portes caisses, de la reprises des salariés travaillant pour la société Noël et de l'exécution déloyale du contrat ne peuvent pas aboutir, faute d'être bien fondées, puisque d'une part, le rachat des véhicules a été fait aux risques et périls de la société Rave DISTRIBUTION de sorte que la société FRANCIAFLEX n'est pas tenue de l'indemnisation de ce préjudice ; puisque d'autre part, les portes caisses ont été acquis pour honorer le contrat entre la société Rave DISTRIBUTION et la société Noël et non pour satisfaire la société FRANCIAFLEX ; puisque également, la reprise des salariés n'étant pas un conséquence directe de la brutalité de la rupture de la relation mais ayant eu lieu pour satisfaire l'engagement pris avec la société Noël, elle ne peut faire l'objet d'une demande d'indemnisation ; la société FRANCIAFLEX ajoutant à cela que non seulement le volume d'affaires et la durée des relations n'étaient pas garantis lors de la reprise de la société Noël, mais qu'en outre, la société Rave DISTRIBUTION avait pris la décision de se séparer de plusieurs salariés, de sorte qu'elle ne peut pas considérer cette reprise comme étant constitutive d'un préjudice, même en cas de licenciement desdits salariés ; et puisque enfin, aucun contrat n'ayant été signé entre les parties, seule les conditions tarifaires négociées étaient applicables entre les parties, de sorte que la société FRANCIAFLEX avait le droit d'en solliciter la renégociation.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

MOTIFS

Considérant que l'article L.442-6 I 5° du code de commerce dispose qu''engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution, par l'autre partie, de ses obligations ou en cas de force majeure.' ;

Considérant que l'existence d'une relation commerciale établie entre les parties n'est pas, en son principe, contestée ;

Considérant qu'il est constant que :

- par courriel du 1er août 2014 (pièce Rave n°48), la société Noël a notifié la fin de la relation sur la prestation 'affrètement' à compter du 5 septembre 2014 ;

- par courriel du 24 octobre 2014 (pièce Rave n°49), la société Noël a informé la société Rave DISTRIBUTION de la fin des relations commerciales à effet :

* pour l'activité 'tournées', de la semaine 45, soit le 3 novembre 2014 ;

* pour l'activité 'locations exclusives', de la semaine 49, soit le 1er décembre 2014 ;

Que ces courriels constituent une notification de rupture de la relation ;

Sur le caractère prévisible de la rupture

Considérant que Francialex soutient que la rupture brutale n'est pas caractérisée dès lors qu'elle était prévisible ;

Considérant que les parties ont engagé, pour l'année 2013, des négociations tarifaires à partir du 24 octobre 2013, date à laquelle la société Noël a réclamé à la société Rave de nouvelles grilles de prix à lui communiquer le 29 octobre 2013 au plus tard, en lui demandant un effort de baisse de ses prix (pièce Rave n°33) ; que, selon courriel du 31 octobre 2013, les propositions de Rave n'ont pas reçu l'accord de FRANCIAFLEX (pièce Rave n°35) ; que, le 28 novembre 2013, la société Rave a transmis ses propositions tarifaires pour 2014 (pièce Rave n°39) ; que, le 25 mars 2014, la société Rave a envoyé une nouvelle offre, portant sur une augmentation des tarifs de 3 % (et non plus de 5 % comme précédemment), proposition à nouveau rejetée par FRANCIAFLEX le 7 mai 2014 en raison de la hausse tarifaire de 3% jugée inacceptable (pièce Rave n°47) ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que, si aucun accord entre les parties n'est intervenu sur les conditions tarifaires, la poursuite des négociations n'a pas, pour autant, rendu la rupture prévisible, dès lors que :

- Noël et Rave ont régulièrement exprimé leur volonté de poursuivre leur relation, ainsi que cela ressort notamment :

- du courriel de Noël du 31octobre 2013 ('Je tiens à vous rappeler les enjeux qui sont de continuer à travailler ensemble si les conditions tarifaires sont réunies et de pouvoir vous amener plus de volume en vous remettant les commandes à destination des clients Créal.' - pièce Rave n°36) ;

- du courriel de Rave du 15 janvier 2014 ('Je vous souhaite avant tout une excellente année 2014. Pour qu'elle démarre dans les meilleurs conditions pour nos deux sociétés, nous souhaiterions poursuivre au plus vite notre dernière conversation sur les conditions économiques des locations.' - pièce Rave n°41) ;

- il se déduit de la multiplication des réunions (27 novembre 2013, 20 mars 2014) que les parties ont effectivement recherché un accord ;

Qu'en tout état de cause, l'existence d'une négociation tarifaire ne saurait dispenser l'auteur de la rupture d'accorder un préavis ; que Noël a d'ailleurs inscrit la fin de la relation dans le cadre de l'article L.442-6 I 5° en accordant à Rave un préavis de rupture ;

Sur l'imputabilité de la rupture

Considérant que Francialex fait, par ailleurs, valoir que la rupture n'est en réalité que la conséquence du refus par la société Rave de baisser ses tarifs ;

Considérant qu'une modification unilatérale substantielle des conditions contractuelles peut être assimilée à une rupture brutale de la relation commerciale établie ;

Mais considérant que c'est FRANCIAFLEX qui s'est efforcée d'imposer au transporteur, de façon comminatoire, une baisse drastique de ses prix ; que, si Rave a proposé de revaloriser ses tarifs, cette augmentation, de seulement 3 %, ne présentait aucun caractère prohibitif et ne peut être assimilée à une rupture ; qu'en revanche, la rupture de la relation est imputable à société FRANCIAFLEX qui s'est employée à imposer des conditions de vente profondément différentes de celles pratiquées jusqu'alors ;

Sur la brutalité de la rupture

Considérant qu'il résulte de l'article L 442-6-I 5° que la durée du préavis que doit respecter l'auteur de la rupture du contrat s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale ;

Considérant que, si la société Rave prétend que la relation entre les parties a débuté en 2005 entre la société FRANCIAFLEX et la société Transports Durou, qui aurait été rachetée le 13 mars 2009 par la société Rave DISTRIBUTION, elle n'en rapporte nullement la preuve ; qu'il n'est, de même, pas établi que FRANCIAFLEX ait repris le contrat conclu entre les sociétés Rave et Noël, le plan de cession de la société Noël, arrêté par jugement du tribunal de commerce de Douai en date du 29 septembre 2012, n'ayant pas prévu la cession du fonds de commerce de la société Noël, mais la seule reprise des 'contrats clients, au contrat de fourniture d'eau de l'établissement de Luzech, aux contrats EDF et GDF de l'établissement de Luzech et aux contrats de télécommunication (fixe et mobile)', énumération dont ne relève pas le contrat conclu entre Rave et Noël ; que la relation a seulement débuté en 2012 ;

Considérant que, pour une relation commerciale de seulement deux années, et eu égard à l'activité en cause, le préavis d'un mois mis en oeuvre pour les activités 'affrètement' et 'locations exclusives' apparaît d'une durée suffisante ; qu'en l'absence de rupture brutale de la relation commerciale établie, le jugement déféré sera en conséquence confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que l'équité commande de condamner la société Rave à payer à la société FRANCIAFLEX la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris ;

CONDAMNE la SAS Rave DISTRIBUTION à payer à la SA FRANCIAFLEX la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

CONDAMNE la SAS Rave DISTRIBUTION aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/22931
Date de la décision : 28/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°16/22931 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-28;16.22931 ?
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