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20/02/2019 | FRANCE | N°18/19432

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 20 février 2019, 18/19432


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRET DU 20 FEVRIER 2019



(n° 80, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/19432 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6HU5



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2018 -Président du TC de PARIS - RG n° 2018017023



APPELANTS



Monsieur [Z] [U]

[Adresse 1]

[Localité 1]
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SAS QUIMEO

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 788 835 569



Représentés et assistés par Me David LUSSIGNY de l'AARPI NABARRO & HINGE, avocat a...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 20 FEVRIER 2019

(n° 80, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/19432 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6HU5

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juin 2018 -Président du TC de PARIS - RG n° 2018017023

APPELANTS

Monsieur [Z] [U]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1988 à [Localité 2]

SAS QUIMEO

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 788 835 569

Représentés et assistés par Me David LUSSIGNY de l'AARPI NABARRO & HINGE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0131

INTIME

Monsieur [K] [V]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 2] 1985 à [Localité 3] (77)

Représenté par Me Estelle FERNANDES de la SELAS INSOLIDUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E1907

Assisté par Me Eve SCHÖNBER du Cabinet Racine, avocat au barreau de LYON, toque T138

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Janvier 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre

Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère

Mme Sophie GRALL, Conseillère

Qui ont en délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Anaïs SCHOEPFER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre et par Anaïs SCHOEPFER, Greffière.

Le 22 octobre 2012, M. [K] [V] et M.[Z] [U] ont constitué la SAS Quimeo au capital de 10 000 euros, divisé en 10 000 actions de 1 euro chacune, dont l'objet social est notamment l'édition de logiciels informatiques. Le capital a été réparti comme suit :

- M. [Z] [U], titulaire de 5 700 actions, soit 57% du capital social,

- M. [K] [V], titulaire de 4 300 actions, soit 43% du capital social.

L'article 14 des statuts, relatif à la cessation des fonctions d'un actionnaire prévoit que tout actionnaire, personne physique, qui cesse définitivement d'exercer ses fonctions salariées et/ou de mandataire social au sein de la Société perd, de ce seul fait et dès ce moment, l'exercice de ses droits attachés à sa qualité d'actionnaire, notamment le droit d'assister et de voter aux assemblées.

Le 30 septembre 2015, suite à des divergences de vue avec son associé, M. [V] a démissionné de la société. Les parties ne sont pas parvenues à un accord sur la valeur de ses actions.

Par acte du 2 mars 2016 M. [V] a fait assigner la société Quimeo et M. [U] devant le président du tribunal de commerce de Paris sur le fondement des articles 145 du code de procédure civile et 1843-4 du code civil afin d'obtenir une expertise ayant pour objet la détermination de la valeur de ses 4.300 actions.

Par ordonnance en la forme des référés du 15 avril 2016 le juge saisi a fait droit à sa demande et désigné M. [N] [P] avec pour mission de fixer le prix auquel les parts de la société Quimeo détenues par M. [V] devaient être cédées.

Suivant exploit délivré le 4 août 2017, M. [V] a demandé au président du tribunal de commerce de Paris de procéder au remplacement de l'expert désigné M. [P] au visa de l'article 1843-4 du code civil. Par ordonnance en la forme des référés du 19 septembre 2017 le magistrat saisi à déclaré la demande irrecevable.

Sur recours interjeté par la société Quimeo et M. [U] à l'encontre de l'ordonnance du 15 février 2016 désignant M. [P] en qualité d'expert, la cour d'appel de céans a, par arrêt du 12 octobre 2017, rejeté l'appel nullité et condamné les appelants la société Quimeo et M. [U] à payer une indemnité de procédure à M. [V] outre les dépens.

À la suite de cet arrêt M. [V] a demandé à M. [P] de reprendre sa mission. Ce dernier lui a indiqué son refus par courrier du 15 novembre 2017.

Par assignations délivrées le 28 mars 2018, M. [V] a saisi le président du tribunal de commerce de Paris au visa de l'article 1843-4 du code civil aux fins de voir désigner un expert en remplacement de M. [P] avec pour mission de déterminer le prix auquel doivent être cédées les parts détenues par lui dans le capital social de la société Quimeo.

Par ordonnance rendue en la forme des référés le 7 juin 2018, le président du tribunal de commerce de Paris a :

- Vu l'article 1843-4 du code civil,

- Vu l'ordonnance du 15 avril 2016,

- Dit M. [V] recevable en son action,

- Désigné M. [V] [W],

- Débouté les parties de leurs autres demandes,

- Laissé les dépens à la charge de M. [U] et de la société Quimeo.

Par déclaration du 1er août 2018, la société Quimeo et M. [U] ont interjeté appel-nullité, en application de l'article 901 du code de procédure civile, à l'encontre de cette ordonnance.

Au terme de leurs conclusions communiquées par voie électronique le 1er octobre 2018, ils demandent à la cour de :

- Vu les dispositions de l'article 1843-4, II, du code civil, 1355 du code civil, 480 et 481 du code de procédure civile,

- Les recevoir en leur appel nullité et les en déclarer bien fondés,

- Annuler l'ordonnance n° 2018017023 rendue par le président du tribunal de commerce de Paris statuant en la forme des référés dans toutes ses dispositions,

- Condamner M. [V] à leur payer chacun la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Ils font valoir que les conditions édictées par la jurisprudence pour former un appel-nullité sont remplies dès lors que la décision entreprise n'est pas susceptible de recours mais est entachée manifestement d'un excès de pouvoir puisqu'elle se heurte au principe de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance rendue le 19 septembre 2017.

Ils plaident que l'ordonnance entreprise tranche exactement le même litige entre les mêmes parties qui avait déjà fait l'objet d'une décision devenue définitive rendue le 19 septembre 2017 ; qu'il est dès lors incontestable qu'en faisant droit à la demande de remplacement d'expert sollicitée par M. [V], le président du tribunal de commerce de Paris dans sa décision du 7 juin 2018 a fait usage d'un droit juridictionnel dont il ne disposait pas et a donc commis un excès de pouvoir ; que l'arrêt de la cour d'appel ne peut constituer un fait nouveau ayant modifié la situation antérieurement reconnue en justice par l'ordonnance du 19 septembre 2017.

M. [K] [V], par conclusions transmises par voie électronique le 26 octobre 2018, demande à la cour de :

- Déclarer la société Quimeo et M. [U] irrecevables en leur second appel nullité,

- Confirmer l'ordonnance rendue en la forme des référés le 7 juin 2018;

débouter la société Quimeo et M. [U] de l'intégralité de leurs demandes,

- Condamner solidairement la société Quimeo et M. [U] à lui verser la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,

- Condamner solidairement la société Quimeo et M. [U] à verser la somme de 10.000 euros au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- Condamner solidairement la société Quimeo et M. [U] à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit du cabinet Insolidum Avocats Associés.

Il fait valoir qu'en raison du caractère exécutoire de l'ordonnance du 15 avril 2016 et du caractère non suspensif du premier appel nullité, la carence de M. [P], premier tiers estimateur désigné l'a contraint de solliciter à nouveau du président du tribunal de commerce par assignation du 4 août 2017 qu'il désigne un autre expert ; que la lecture de l'ordonnance du 19 septembre 2017 suffit à convaincre la cour que c'est l'ordonnance du 15 avril 2016 qui a seule l'autorité de la chose jugée et qu'il doit s'en déduire implicitement des termes employés par le magistrat que l'ordonnance rendue le 19 septembre 2017 en est dépourvue ; que l'ordonnance du 7 juin 2018 est parfaitement motivée et précise que 'l'autorité de la chose jugée effectivement attachée à la première ordonnance, concerne l'application des dispositions de l'article 1843-4 du code civil (...) et aucunement à une décision ultérieure tendant uniquement au remplacement de l'expert initialement désigné qui renonce à sa mission et ne peut ainsi exécuter la mission qui lui a été confié.'

Il ajoute que l'ordonnance du 19 septembre 2017 n'ayant tranché aucune contestation au fond elle ne saurait avoir l'autorité de la chose jugée de sorte qu'aucun excès de pouvoir n'a été commis par le président du tribunal de commerce.

Il plaide que les appelants tentent d'instrumentaliser cette procédure en tirant opportunément prétexte de ce qu'ils qualifient être un excès de pouvoir du premier juge pour échapper à toute évaluation objective de ses parts sociales à dire d'expert ; qu'un tel abus doit être sanctionné par l'allocation de dommages et intérêts et une amende civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est constant que la décision prise par le président du tribunal de commerce de Paris le 7 juin 2018 rendue en la forme des référés en application de l'article 1843-4 du code civil est sans recours possible et il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.

La société Quimeo et M. [U] considèrent qu'en faisant droit à la demande de changement d'expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil de M. [V] le magistrat a commis un excès de pouvoir compte tenu de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance du 19 septembre 2017 ayant déclaré la demande de changement d'expert irrecevable.

L'article 480 du code de procédure civile dispose que 'Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche. Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4.'

L'article 1355 du code civil dispose que 'L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.'

Il ressort des éléments versés aux débats que par exploit du 4 août 2017 M. [V] a fait assigner la société Quimeo et M. [U] devant le président du tribunal de commerce de Paris statuant en la forme des référés sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil aux fins de voir désigner un nouvel expert qui se substituera au premier expert désigné M. [P] et qui aura pour mission de déterminer la valeur exacte des 4.300 actions détenues par M. [V] dans le capital de la société Quimeo.

Par ordonnance du 19 septembre 2017, le président du tribunal de commerce de Paris a dit la demande de M. [V] irrecevable et l'a condamné aux dépens. Cette ordonnance n'a fait l'objet d'aucun recours.

Suivant exploit délivré le 28 mars 2018, M. [V] a, à nouveau, fait assigner la société Quimeo et M. [U] devant le président du tribunal de commerce de Paris statuant en la forme des référés au visa de l'article 1843-4 du code civil aux fins de voir désigner tel expert en remplacement de M. [N] [P] avec pour mission de déterminer le prix auquel doivent être cédées les parts détenues par M. [V] dans le capital de la société Quimeo.

À l'évidence cette assignation tendait exactement aux mêmes fins que celle délivrée le 4 août 2017 et concernait les mêmes parties à savoir M. [V], demandeur et la société Quimeo et M. [U], défendeurs, en leurs mêmes qualités dans les deux instances.

M. [V] ne peut utilement soutenir que l'ordonnance du 19 septembre 2017 serait dépourvue de l'autorité de la chose jugée dès lors qu'elle a fait droit à la fin de non recevoir soulevée par la société Quimeo et M. [U] laquelle a eu pour effet de dessaisir la juridiction saisie. Il ne peut pas plus invoquer l'existence d'événements postérieurs venant modifier la situation antérieurement reconnue en justice, l'arrêt rendu par cette cour sur l'appel nullité interjeté à l'encontre de la décision désignant M. [P] ne modifiant en rien la situation des parties.

Il s'ensuit que la demande de M. [V] dont était saisi le président du tribunal de commerce par l'assignation du 4 août 2017, identique pour les parties, l'objet et la cause se heurte à l'autorité de la chose jugée attachée à l'irrecevabilité de la demande déjà prononcée dans le dispositif de l'ordonnance du 19 septembre 2017.

Par suite le président du tribunal de commerce a méconnu l'étendue de son pouvoir en faisant droit à la demande de M. [V] dans son ordonnance du 7 juin 2018. Il convient donc d'annuler l'ordonnance en la forme des référés entreprise qui a fait droit à la demande de remplacement de M. [P] par M. [W] au visa de l'article 1843-4 du code civil.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du

code de procédure civile.

M. [V], partie perdante, supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

Annule l'ordonnance rendue en la forme des référés par le président du tribunal de commerce de Paris le 7 juin 2018 ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [K] [V] aux dépens.

La Greffière, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/19432
Date de la décision : 20/02/2019
Sens de l'arrêt : Annulation

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°18/19432 : Annule la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-20;18.19432 ?
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