La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/2019 | FRANCE | N°17/08158

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 20 février 2019, 17/08158


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 20 FÉVRIER 2019



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08158 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3E3J



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/09810





APPELANTE



SARL DAPHNE, agissant poursuites et diligences de son re

présentant légal domicilié en cette qualité audit siège

immatriculé au RCS de PARIS sous le numéro 415 273 515

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Guillaume GOURDIN,...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 20 FÉVRIER 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08158 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3E3J

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/09810

APPELANTE

SARL DAPHNE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

immatriculé au RCS de PARIS sous le numéro 415 273 515

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Guillaume GOURDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : B1177, avocat postulant

Assistée de Me Serge SMILEVITCH de l'ASSOCIATION SMILEVITCH & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R122, avocat plaidant

INTIMÉE

LE SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 1] représenté par son syndic en exercice, la SAS ORALIA SULLY GESTION, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 327 562 062,

[Adresse 2]

[Adresse 1],

Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Me Ilan TOBIANAH, avocat au barreau de PARIS, toque : D0718, avocat plaidant substitué pas Me Patricia MORENO avocat au barreau de PARIS, toque : D0718, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Novembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sandrine GIL, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Sandrine GIL, conseillère

Madame Françoise BARUTEL-NAULLEAU, conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

La société DAPHNE exploite un fonds de commerce de restauration dans des locaux situés au sein de l'immeuble en copropriété du [Adresse 1].

Cet immeuble est composé des bâtiments A, B, C,D et E, seul le bâtiment A est élevé sur caves.

Les locaux qu'elle exploite se situent en rez-de-chaussée du bâtiment A, au 1er étage du bâtiment B et C ainsi qu'au sous-sol du bâtiment A dans lequel se trouve la cuisine, des chambres froides et des réserves et qui est relié par un escalier intérieur aux locaux du rez-de-chaussée qu'elle occupe.

Un conflit oppose depuis plusieurs années la société DAPHNE et le syndicat des copropriétaires concernant son occupation d'une partie du sous-sol du bâtiment A.

La cour d'appel de Paris a rendu un arrêt en date du 20 juin 2012, infirmant un jugement rendu le 21 septembre 2010 par le tribunal de grande instance de Paris, en ce qu'il avait ordonné à la société DAPHNE de libérer le sous-sol de l'immeuble et dit que, faute de s'exécuter volontairement, il pourrait être procédé à son expulsion ainsi qu'en ce qu'il avait dit que la Société DAPHNE devra procéder aux travaux portant sur la gaine d'aération dans le délai de trois ans à compter de la signification du jugement et statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant a dit que la société DAPHNE, venant aux droits de M. [E], a un droit d'occupation du sous-sol de l'immeuble et l'a condamnée à procéder aux travaux portant sur la gaine d'aération de nature à mettre fin aux nuisances olfactives sous le contrôle de l'architecte de l'immeuble dans un délai de 4 mois à compter de la signification du l'arrêt.

Par acte d'huissier en date du 21 décembre 2012 visant l'arrêt précité, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] a donné congé à la société DAPHNE des locaux situés au sous-sol de l'immeuble [Adresse 1] pour la date du 14 juillet 2013.

Par acte d'huissier de justice du 14 janvier 2013, la société DAPHNE a protesté au congé délivré et a saisi le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir, à titre principal, dire nul et de nul effet le congé délivré par le syndicat copropriétaires le 21 décembre 2012 qui ne répond pas aux prescriptions impératives du statut des baux commerciaux et à titre subsidiaire, dire que ledit congé lui ouvre droit à indemnité d'éviction conformément au statut des baux commerciaux.

Par jugement rendu le 16 février 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- Jugé que les locaux loués par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] en sous-sol de l'immeuble doivent être qualifiés de locaux accessoires au bail commercial principal sur les locaux situés en rez-de-chaussée et 1er étage de l'immeuble,

- Jugé en conséquence que le bail liant le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] et la SARL DAPHNE sur ces locaux en sous-sol est soumis aux statuts des baux commerciaux ;

- Constaté que par l'effet du congé délivré le 21 décembre 2012, ledit bail a pris fin le 14 Juillet 2013 ;

- Relevé qu'il n'y a pas de motif grave et légitime pour refuser le droit à indemnité d'éviction dans le cadre du congé avec refus de renouvellement ;

- Jugé en conséquence que la SARL DAPHNE a droit à une indemnité d'éviction concernant lesdits locaux ;

- Débouté le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble de ses demandes ;

- Ordonné la réouverture des débats ;

- Invité les parties à faire toutes observations sur la poursuite de la procédure suite à la présente décision, notamment sur le recours à une mesure d'expertise,

- Renvoyé pour ce faire l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état de la 8 ème chambre 1 ère section du 9 mai 2016 à 10h,

- Condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à payer à la société DAPHNE la somme de 4.000€ (quatre mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] aux dépens,

- Ordonné l'exécution provisoire,

Par déclaration en date du 18 avril 2017, la SARL DAPHNE a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance sur incident en date du 2 mai 2018, le conseiller de la mise en état a: - déclaré les conclusions notifiées le 16 novembre 2017 par la SARL DAPHNE recevables sous réserve de la suppression du dernier paragraphe ajouté page 11 par rapport à ses précédentes conclusions: ' En tout état de cause, si la cour ne s'estimait pas suffisamment informée, elle désignera tel expert ... est de nature à compromettre

l'exploitation de son fonds de commerce de restauration' et de la demande subséquente figurant au dispositif,

- déclaré recevable le Syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] représenté par son syndic le cabinet ORALIA SULLY GESTION en son appel incident.

Dans ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 31 octobre 2018, la SARL DAPHNE demande à la cour de :

- Déclarer tant recevable que bien fondée la société DAPHNE,

- L'y recevant,

Vu notamment les articles L. 145-1 et suivants du Code de commerce,

Vu le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 16 février 2016,

- Confirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 16 février 2016 en ce qu'il a jugé :

- Que les locaux loués par le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à la société DAPHNE, en sous- sol de l'immeuble, doivent être qualifiés de locaux accessoires au bail commercial principal sur les locaux situés en rez-de-chaussée et 1er étage de l'immeuble,

- En conséquence que le bail liant le syndicat des copropriétaires [Adresse 1] et la société DAPHNE sur ces locaux en sous-sol est soumis au statut des baux commerciaux,

- Pour le cas où par impossible la Cour ne s'estimait pas suffisamment informée,

- Désigner tel expert qu'il plaira à la Cour avec mission de donner son avis sur le fait que la privation des locaux situés au sous-sol de l'immeuble où est situé l'établissement principal de la société DAPHNE au rez-de-chaussée et au premier étage est de nature à compromettre l'exploitation de son fonds de commerce de restauration.

- Infirmer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris du 16 février 2016 en ce qu'il a constaté que par l'effet du congé délivré le 21 décembre 2012, ledit bail sur ces locaux en sous-sol a pris fin le 14 juillet 2013.

Statuant de nouveau,

- Dire nul et de nul effet le congé délivré par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à la société DAPHNE le 21 décembre 2012.

- Déclarer irrecevable et mal fondé le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] en son appel incident,

- Débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] de ses demandes, fins et conclusions.

- Condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] à payer à la société DAPHNE la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] en tous les dépens.

Dans ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 23 octobre 2018, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] représenté par son syndic le cabinet ORALIA SULLY GESTION, demande à la cour de :

Vu le jugement du Tribunal de grande instance de Paris du 16 février 2016,

Vu le règlement de copropriété en date du 11/07/1953 modifié le 28/12/1961 puis le 29/10/1984,

Vu les pièces versées au débat,

- Déclarer irrecevable et mal fondée en son appel la société DAPHNE et de déclarer recevable et bien fondé le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] en son appel incident.

Y faisant droit,

- Débouter la société DAPHNE SARL de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que les locaux loués par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] en sous-sol de l'immeuble doivent être qualifiés de locaux accessoires au bail commercial principal sur les locaux situés en rez-de-chaussée et 1er étage de l'immeuble,

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le bail liant le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1]) et la SARL DAPHNE sur ces locaux en sous-sol est soumis au statut des baux commerciaux ;

Statuant de nouveau,

- Dire et juger que les locaux loués par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à la SARL DAPHNE en sous-sol de l'immeuble n'appartiennent pas au propriétaire du local où est situé l'établissement principal au rez-de-chaussée et au premier étage de l'immeuble ;

- Dire et juger que la privation des locaux litigieux en sous-sol de l'immeuble n'est pas de nature à compromettre l'exploitation du fonds de commerce où est situé l'établissement principal au rez-de-chaussée et au premier étage de l'immeuble ;

En conséquence,

- Donner acte au syndicat des copropriétaires de sa contestation du changement de destination des locaux du sous-sol à usage de caves en cuisine, chambres froides et réserves ;

- Dire et juger que les locaux litigieux loués par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] à la SARL DAPHNE en sous-sol de l'immeuble ne sont pas des locaux accessoires au bail commercial principal sur les locaux situés en rez-de-chaussée et premier étage de l'immeuble ;

- Dire et juger que le bail liant le syndicat des copropriétaires et la SARL DAPHNE sur ces locaux en sous-sol n'est pas soumis au statut des baux commerciaux ;

- Dire et juger que le congé délivré par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] le 21 décembre 2012 est non nul ;

- Constater que par l'effet du congé délivré par le Syndicat des copropriétaires [Adresse 1] le 21 décembre 2012 le bail liant le syndicat des copropriétaires et la SARL DAPHNE sur ces locaux en sous-sol a pris fin le 14 juillet 2013 ;

- Ordonner l'expulsion et la libération des lieux loués par la SARL DAPHNE ainsi que de tous occupants de son chef ;

- Condamner la SARL DAPHNE au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant outre les charges à compter du 14 juillet 2013 et ce, jusqu'à complète libération des lieux loués ainsi que de tous occupants de son chef ;

- Condamner la SARL DAPHNE au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la SARL DAPHNE au paiement des entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 novembre 2018.

MOTIFS

Sur le congé

La société DAPHNE expose que le fonds de commerce de restauration est exploité depuis 1948 au rez-de-chaussée de l'immeuble et au 1er étage ; que le 6 avril 1971 ce fonds de commerce a été cédé à M. [E] avec le droit au bail portant sur ces locaux consenti par Mme [S] ; que celle-ci a par acte sous seing privé également donné à bail à M. [E] le sous-sol de l'immeuble à compter du 15 juillet 1971 pour son usage, à savoir celui de restaurateur ; que M. [E] a ainsi étendu l'exploitation du fonds de commerce au sous-sol ; que le bail portant sur le rez-de-chaussée et le 1er étage a été renouvelé à plusieurs reprises ; que le bail du sous-sol d'une durée de 6 ans s'est poursuivi par tacite reconduction ; que la cour d'appel de Paris par arrêt rendu le 20 juin 2012 a considéré que la société DAPHNE qui vient aux droits de M. [E] pour avoir acquis son fonds de commerce de restauration bénéficiait d'un titre locatif sur le sous-sol. Elle réplique au syndicat des copropriétaires qui prétend que Mme [S] ne pouvait pas louer une partie du sous- sol dont elle n'était plus propriétaire suite à la mise en copropriété de l'immeuble que celle-ci en était le propriétaire apparent ; que le Syndicat des copropriétaires a ratifié la location initialement consentie par Mme [S] en 1981; qu'en toute hypothèse s'il devait être considéré qu'il y avait pluralité de propriétaires, les locaux ont été loués au vu et au su du Syndicat des copropriétaires en vue d'une utilisation jointe avec le local principal. Elle ajoute que la transformation des caves de l'immeuble n'est pas de son fait mais celui de M. [E] qui les a transformés pour les exploiter à usage de restaurant. Elle soutient que la privation des locaux en sous-sol qui sont reliés au rez-de-chaussée par un escalier non accessible à la clientèle serait de nature à compromettre l'exploitation du fonds de commerce s'agissant de la cuisine et des chambres froides et réserves ; que l'intégration de ces éléments dans les locaux du rez-de-chaussée ou du 1er étage réduirait de manière conséquente la surface dédiée à la clientèle.

Le syndicat des copropriétaires soutient que la location du sous-sol à M. [E] est antérieure au bail portant sur les locaux du rez-de-chaussée et du 1er étage consenti à la société DAPHNE le 12 mars 1998 qui est un nouveau bail qui met fin à la chaîne des baux antérieurs dont la société DAPHNE ne peut se prévaloir ; que ce bail ne porte pas sur les caves du sous-sol faute pour la bailleresse, la SCI NJF 5757, qui a acquis les locaux en 1997 de M. [Y] héritier de Mme [S] d'en être propriétaire. Il ajoute que Mme [S] n'était pas propriétaire en 1971 des caves qu'elle a données en location à M. [E] qui sont des parties communes appartenant au syndicat ; que cette location s'est faite à son insu ; que l'avenant de 1981 est une convention d'occupation précaire d'une durée de 6 ans incompatible avec les statuts des baux commerciaux ; qu'il n'a pas autorisé la location des caves en vue d'une utilisation jointe avec le local principal ; que dès lors les locaux ne peuvent être accessoires à la location principale du rez-de-chaussée et du 1er étage. Le syndicat des copropriétaires précise que la société DAPHNE a modifié l'usage des caves sans son autorisation ; que le bail consenti en 1998 porte notamment sur le lot 101 situé au rez-de-chaussée se composant d'une salle de restaurant, d'une cuisine et d'un escalier, ce qui correspond au descriptif de ce lot dans le règlement de copropriété ; que dès lors l'exploitation des caves en sous-sol n'est pas une condition nécessaire à celle des locaux du rez-de-chaussée et du 1er étage puisque la configuration d'origine prévoit une cuisine au rez-de-chaussée.

La cour rappelle que par application de l'article L145-1 I du code de commerce, le statut des baux commerciaux s'applique 2°) 'aux baux de locaux (...) accessoires à l'exploitation d'un fonds de commerce quand leur privation est de nature à compromettre l'exploitation du fonds et qu'ils appartiennent au propriétaire du local (...) où est situé l'établissement principal. En cas de pluralité de propriétaires, les locaux accessoires doivent avoir été loués au vu et au su du bailleur en vue d'une utilisation jointe'.

Il en résulte que ces locaux ne sont soumis au statut des baux commerciaux qu'à la double condition, s'agissant de locaux donnés en location par un bailleur distinct, d'une part que ce dernier ait connu l'utilisation jointe des locaux et d'autre part, que la privation desdits locaux soit de nature à compromettre l'exploitation du fonds.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] a délivré à la société DAPHNE, en date du 21 décembre 2012, un congé pour la date du 14 juillet 2013 à minuit de libérer les caves situées au sous-sol.

Mme [S] a loué à compter du 15 juillet 1971 une partie du sous-sol de l'immeuble par un engagement non daté prenant effet au 15 juillet 1971 à M. [E] 'pour son usage' moyennant un loyer annuel de 3 600 francs pour une durée de 6 ans renouvelable par semblable période faute de congé préalable suivant 'l'usage de Paris'. Par avenant en date du 20 mai 1981 le syndicat des copropriétaires a fixé l'indemnité d'occupation (révisable chaque année) des caves de M. [E] à la somme de 5000 francs par an outre le remboursement des taxes et imposition.

Par arrêt définitif rendu le 20 juin 2012 entre les parties et ayant autorité de la chose jugée, la cour d'appel de Paris a jugé que 'la société DAPHNE, venant aux droits de M. [E], a un droit d'occupation du sous-sol de l'immeuble'.

Par conséquent, le droit d'occupation de la société DAPHNE, en tant que successeur de M. [E], ne peut plus être remis en cause.

Il convient de rappeler que le droit à occupation du sous-sol s'est maintenu au profit des successeurs de M. [E], à savoir la société 'IL ETAIT UNE FOIS LE MARAIS', puis selon acte du 3 novembre 1994, la société 'LA ROUTE DES EPICES'; puis selon acte du 27 mars 1998 la société DAPHNE ; qu'il a été remis un exemplaire original des cessions du fonds de commerce selon les formalités de l'article 1690 du code civil au syndicat des copropriétaires par acte du 20 décembre 1994 et par acte du 20 avril 1998 sans que le syndicat des copropriétaires ait émis de contestation du droit d'occupation des successeurs de M. [E] ou entendu délivrer congé, les actes de cession du fonds de commerce mentionnant l'occupation d'une partie du sous-sol par référence.

Lorsque Mme [S] a donné à bail à M. [E] le sous-sol de l'immeuble pour 'son usage', à charge pour celui-ci de le nettoyer, d'enlever le débarras qui s'y trouve et de démolir un mur de séparation menaçant de s'écrouler, celui-ci exploitait déjà selon acte de cession du fonds de commerce du 6 avril 1971, non versé aux débats mais repris dans les cessions successives du fonds de commerce, les locaux du rez-de-chaussée et de 1er étage à usage de restaurant dont il n'est pas discuté qu'ils appartenaient alors à Mme [S]. La location du sous-sol en 1971 est donc présumée être intervenue en vue de l'utilisation jointe avec le local principal donné à bail à M. [E].

S'il est exact qu'au vu du règlement de copropriété modificatif en date du 26 décembre 1961, la totalité des caves du bâtiment A se trouvant au sous-sol sont des parties communes, le syndicat des copropriétaires ne peut toutefois prétendre que la location du sous-sol s'est faite à son insu puisqu'il a conclu un avenant de révision en 1981 avec M. [E] en tant que 'locataire de divers locaux à usage commercial' portant sur l'occupation d'une partie des caves de l'immeuble ; qu'il ne pouvait donc ignorer que la location était faite en vue de l'utilisation jointe avec le local principal destiné à l'usage de restaurant, vins et liqueurs exploité depuis plusieurs années.

Comme le précise le syndicat des copropriétaires, le bail consenti le 12 mars 1998 par la SCI NFJ 5757, qui a acquis les locaux du rez-de-chaussée et du 1er étage, le 23 juillet 1997 de M. [M] [Y], dont il n'est pas discuté qu'il est l'héritier de Mme [S], décrit le local du rez-de-chaussé comme étant une salle de restaurant, cuisine, escalier menant au 1er étage, lequel comprend deux pièces, ce qui est conforme au règlement de copropriété de 1961.

Les locaux du rez-de-chaussée comportent, au vu du descriptif repris par le juge des loyers commerciaux de Paris en date du 11 mai 2012 du rapport d'expertise judiciaire déposé le 4 octobre 2011, au rez-de-chaussée une salle de restaurant de 31 couverts dans le prolongement une deuxième salle de restaurant de 14 couverts dans laquelle se trouvent deux escaliers, conduisant l'un au premier étage où se trouve une petite salle de restaurant, une réserve et un sanitaire aveugle et l'autre au sous-sol où il y a la cuisine. Le sous-sol est en effet aménagé à usage de cuisine, de chambres froides et de réserves au vu des photographies versées aux débats par la société DAPHNE.

La société DAPHNE expose que la cuisine était déjà installée dans le sous-sol de l'immeuble lorsqu'elle a acquis le fonds de commerce, ce qui est contesté par le syndicat des copropriétaires qui impute à l'appelante l'aménagement actuel du sous- sol. La société DAPHNE n'apporte pas la preuve que le sous-sol était aménagé en cuisine avant qu'elle ait acquis le fonds de commerce, les cessions successives du fonds de commerce ne précisant pas la consistance du sous-sol et les aménagements effectués par M. [E] du sous-sol n'étant pas précisément connus. En outre les cessions du fonds de commerce successives ainsi que celle de 1998 établie au profit de la société DAPHNE font état d'une cuisine au rez-de-chaussée.

Dans ces conditions, la simple tolérance par le syndicat des copropriétaires en sa qualité de bailleur des caves de la modification de l'affectation de celles-ci en cuisine, ne légitime pas un tel usage. En conséquence, seul un usage de caves doit être pris en considération pour déterminer si la privation de ce local est de nature à compromettre l'exploitation du fonds.

La cour relève que bien qu'il soit établi que la cave litigieuse est raccordée aux locaux du restaurant, pour autant, la société DAPHNE n'apporte pas la preuve que la privation de cette cave est de nature à compromettre l'exploitation de son fonds de commerce, alors que cette preuve lui incombe.

Dans ces conditions, le congé qui lui a été délivré par le syndicat des copropriétaires qui n'avait pas à respecter le formalisme de l'article L145-9 du code de commerce est valable et doit produire effet ainsi qu'il sera précisé dispositif et il convient d'infirmer le jugement entrepris.

Cependant, compte tenu de la durée de la tolérance accordée quant à l'usage de la cave comme cuisine, il sera accordé un délai avant que le syndicat des copropriétaires ne puisse procéder à l'expulsion afin de permettre à la société DAPHNE de prendre ses dispositions pour libérer le sous-sol qu'elle occupe et de procéder le cas échéant au réaménagement des locaux du rez-de-chaussée et du 1er étage.

Sur les demandes accessoires

Il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qui concerne le sort des dépens de première instance et la condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il ne sera pas fait application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile et la société DAPHNE qui succombe sera condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement,

Statuant de nouveau et y ajoutant,

Dit que les locaux loués en sous-sol par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] à la société DAPHNE ne sont pas des locaux accessoires au bail commercial principal portant sur les locaux situés en rez-de-chaussée et 1er étage de l'immeuble, au sens de l'article 145-1 I 2° du code de commerce ;

Dit que le congé délivré par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] à la société DAPHNE le 21 décembre 2012 est valable ;

Constate que par l'effet de ce congé le bail liant le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 1] et la SARL DAPHNE sur ces locaux en sous-sol a pris fin le 14 juillet 2013 ;

Ordonne à la société DAPHNE de libérer les lieux loués en sous-sol, qu'elle occupe, dans un délai de huit mois à compter de la signification du présent arrêt ;

Dit que passé ce délai le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] sera autorisé à procéder à l'expulsion de la société DAPHNE desdits locaux, avec si besoin est le concours de la force publique ;

Condamne la SARL DAPHNE au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer courant outre les charges à compter du 14 juillet 2013 et ce, jusqu'à complète libération des lieux loués ainsi que de tous occupants de son chef ;

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société DAPHNE au entiers dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/08158
Date de la décision : 20/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°17/08158 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-20;17.08158 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award