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12/02/2019 | FRANCE | N°18/00981

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 12 février 2019, 18/00981


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 12 Février 2019



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00981 et 18/10964 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B43PT



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 février 2014 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 05/09523, infirmé partiellement par le pôle 6 - chambre 8 de la cour d'appel de Paris par arrêt du 19 novembre 2015, dont la décision a

été cassée partiellement par arrêt de la Cour de Cassation en date du 12 octobre 2017 qui a ordonné le renvoi devant la Cour d'Appel de Paris autrem...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 12 Février 2019

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/00981 et 18/10964 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B43PT

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 février 2014 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 05/09523, infirmé partiellement par le pôle 6 - chambre 8 de la cour d'appel de Paris par arrêt du 19 novembre 2015, dont la décision a été cassée partiellement par arrêt de la Cour de Cassation en date du 12 octobre 2017 qui a ordonné le renvoi devant la Cour d'Appel de Paris autrement composée.

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 25 février 2002 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - RG n° 01/02615, infirmé partiellement par le pôle 6 - chambre 9 de la cour d'appel de Paris par arrêt du 8 avril 2015, dont la décision a été cassée par arrêt de la Cour de Cassation en date du 13 avril 2016 qui a ordonné le renvoi devant la Cour d'Appel de Paris autrement composée.

APPELANT

Monsieur [V] [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 2]

représenté par Me Virginie BOUCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : L0047

INTIMEE

SA FRANCE MELASSES

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : B591 920 251

représentée par Me Rose-Marie TOURDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0836

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Décembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence SINQUIN, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre

Madame Roselyne NEMOZ, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Valérie LETOURNEUR, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Exposé du litige

Monsieur [V] [D], engagé à compter du 27 décembre 1976 en qualité de garçon de course et chauffeur par la société DEBAYSER, et dont le contrat de travail a été transféré en 2000 à la société FRANCE MELASSES, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'heures supplémentaires. Il a été licencié par la suite par lettre du 21 novembre 2005.

Par jugement du 25 février 2002, le conseil de prud'hommes de PARIS a fait droit aux demandes de Monsieur [D] et a condamné la société FRANCE MELASSES au paiement de 168.319,50 euros à titre d'heures supplémentaires du 1er janvier 1996 au 31 mars 2001.

Par arrêt du 8 mai 2005, la Cour d'appel de Paris a infirmé le jugement et débouté Monsieur [D] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires au motif qu'aucune pièce produite aux débats, y compris les attestations dont se prévaut Monsieur [D], n'est de nature à établir qu'il était tenu par son employeur de demeurer à disposition de jour comme de nuit sur le navire, dans les locaux du port, ou encore dans un local spécialement affecté à cet usage et situé près du lieu de travail, que les périodes entre deux interventions professionnelles au cours desquelles il pouvait librement vaquer à des occupations personnelles ne constituaient pas un temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel, que la société FRANCE MELASSES justifie qu'en contrepartie des sujétions liées à la période d'attente, Monsieur [D] a bénéficié d'un statut particulier comprenant un régime compensatoire par l'attribution de jours de repos dits de "récupération", que ce système de récupération a été mis en oeuvre par l'employeur de manière méthodique et sérieuse.

Par arrêt du 23 novembre 2011, la chambre sociale de la Cour de cassation, au visa des articles L.3121-1 et L3121-5 du code du travail, a cassé et annulé partiellement l'arrêt rendu le 18 mai 2005, mais seulement en ce qu'il a débouté Monsieur [D] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires au motif que la Cour d'appel, en se déterminant comme elle l'a fait, alors qu'elle avait relevé que le salarié devait se tenir prêt à répondre à un éventuel appel de son employeur pour intervenir en cas de difficulté pendant les opérations de chargement et déchargement des navires, sans nécessairement être présent à tout moment sur le lieu de travail, aurait dû rechercher quel était le nombre d'heures effectivement réalisées par le salarié lors de ses interventions.

Par arrêt du 8 avril 2015, la Cour d'appel de Paris autrement composée, statuant comme Cour de renvoi, a confirmé le jugement du 25 février 2002 et fait droit à la demande de Monsieur [D] en paiement des heures supplémentaires au motif que le salarié a été contraint de se tenir prêt à répondre à un éventuel appel de son employeur de manière à pouvoir intervenir en cas de nécessité durant les opérations de chargement et de déchargement des navires, cela sans obligatoirement être présent à tout moment sur ses différents lieux de travail, et que ces périodes d'activité correspondaient à des permanences qu'il était tenu d'assurer sur les sites portuaires ou à leur proximité immédiate, afin de répondre à toute demande d'intervention sur les navires, ce qui ne peut en conséquence que s'analyser en un temps de travail effectif devant être rémunéré comme tel.

Par arrêt du 13 avril 2016, la chambre sociale de la Cour de cassation, au visa de l'article L3121-1 du code du travail a cassé dans toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 8 avril 2015 au motif que la Cour d'appel, en se déterminant comme elle l'a fait, sans rechercher si pendant ces permanences, le salarié était à la disposition de l'employeur et ne pouvait vaquer à des occupations personnelles, n'a pas donné de base légale à sa décision.

La Cour d'appel de Paris, désignée comme cour de renvoi, a été saisie dans le délai de quatre mois prévu par l'article 1034 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la présente instance.

Monsieur [D] a aussi été licencié pour faute grave par lettre du 21 novembre 2005 énonçant le motif suivant :

'...Nous faisons suite à l'autorisation de licenciement qui nous a été accordée par Madame [M], Inspectrice du travail, en date du 15 novembre 2005 dont vous trouverez la copie de la décision jointe. Nous vous signifions par la présente votre licenciement pour faute grave au motif de votre abandon de poste persistant depuis le 5 septembre 2005 tel qu'énoncé par la décision précitée de l'Inspectrice du travail...'

Par jugement du 24 février 2014, le conseil de Prud'hommes de Paris a jugé que le licenciement de Monsieur [D] était dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société FRANCE MELASSES à lui régler des indemnités de rupture de son contrat de travail.

Par arrêt du 19 novembre 2015, la Cour d'appel de Paris a jugé que le licenciement de Monsieur [D] était nul et lui ouvrait droit à une indemnité pour licenciement nul au motif qu'en application des dispositions des article L. 2411-1, L.2411-3, L.2411-4, et L.2422-14 du code du travail, lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un salarié investi de l'un des mandats énumérés, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent, qu'ainsi, l'annulation de l'autorisation administrative de licenciement par l'autorité hiérarchique ne laisse rien subsister de celle-ci, ce qui équivaut à une absence d'autorisation, que dès lors, le licenciement de Monsieur [D] est nul, qu'à ce titre, il a droit aux indemnités de rupture, ainsi qu'à une indemnité pour licenciement nul.

Par arrêt du 12 octobre 2017, la chambre sociale de la Cour de cassation, au visa des articles L.1235-1, L.1235-3, L.2411-1, L.2422-1 et L.2422-4 du code du travail, a cassé et annulé partiellement l'arrêt rendu le 19 novembre 2015, mais seulement en ce qu'il a dit que le licenciement de Monsieur [D] est nul et lui ouvre droit à une indemnité pour licenciement nul au motif qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le salarié, qui a été licencié en vertu d'une autorisation administrative ultérieurement annulée, et qui ne demande pas ou plus sa réintégration, a droit, d'une part, à l'indemnisation de son préjudice depuis le licenciement et jusqu'à l'expiration du délai de deux mois qui suit la notification de la décision annulant l'autorisation de licenciement, l'indemnité due à ce titre ne pouvant se cumuler avec les indemnités journalières servies par la Sécurité sociale, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et enfin au paiement de l'indemnité prévue par l'article L.1235-3 du code du travail, s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.

Sur ces points, la cause et les parties ont été renvoyées devant la cour d'appel de PARIS, autrement composée.

La Cour a été saisie dans le délai de quatre mois prévu par l'article 1034 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable à la présente instance.

Par conclusions récapitulatives du 30 octobre 2018, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, Monsieur [D] demande à la Cour :

- sur les heures supplémentaires, de confirmer le jugement du 25 février 2002, sauf sur le quantum. Il demande de condamner la société FRANCE MELASSES à lui verser :

- 181.785,41 euros à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires et les congés payés afférents ;

- 71.057,37 euros à titre de complément d'indemnité sur les repos compensateurs ;

- 2.500,00 euros de dommages et intérêts pour violation de la durée maximale hebdomadaire de travail ;

- 2.500,00 euros de dommages et intérêts pour défaut d'information relative aux repos compensateurs outre les intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes de Paris, soit le 15 mars 2001 pour les créances salariales, et à compter de la décision à intervenir pour les créances indemnitaires avec capitalisation des intérêts :

Il sollicite aussi la remise des bulletins de salaires, d'une attestation Pôle Emploi récapitulative, et d'un certificat de travail conformes, sous astreinte.

- sur le licenciement, de confirmer le jugement du 24 février 2014, sauf sur le montant alloué au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse , de fixer son salaire de référence à 5.847,30 euros et de condamner la société à lui verser :

- 17.541,90 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents;

- 108.175,05 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 350.838 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 22.621,31 euros à titre d'indemnité pour défaut de réintégration ;

- 25.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice distinct.;

Il réclame aussi les intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil de prud'hommes de Paris, soit le 4 août 2005 pour les créances salariales, et à compter de la décision à intervenir pour les créances indemnitaires avec capitalisation, le rejet de la demande de compensation entre la somme de 11.100,00 euros due par Monsieur [D] et les indemnités de rupture auxquelles la société FRANCE MELASSES pourrait être condamnée et la condamnation de la société à 5.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 23 octobre 2018, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société MELASSES demande à la Cour d'infirmer le jugement du 25 février 2002 sur les heures supplémentaires, de débouter Monsieur [D] de ses demandes et d'ordonner le remboursement des causes de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 avril 2015 qui lui ont été payées avec intérêt légal à compter du 22 février 2002.

Sur le licenciement, la société FRANCE MELASSES demande la confirmation du jugement du 24 février 2014, sauf en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société au paiement de 17 669,28 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Elle demande de juger que le licenciement pour faute grave pour abandon de poste de Monsieur [D] repose sur une cause réelle et sérieuse, de déclarer irrecevable la demande d'indemnité de 15.000,00 € de Monsieur [D] afférente à la non-reconnaissance de son statut cadre au motif que celle-ci se heurte à l'autorité de chose jugée de l'arrêt de la Cour de Paris du 8 mai 2005 et de débouter Monsieur [D] de ses demandes.

En tout état de cause, la société réclame la compensation entre la somme de 11.000,00 euros due par Monsieur [D] avec les indemnités de rupture auxquelles la société pourrait être condamnée dans le cadre de la présente instance, et la somme de 5.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

****

MOTIFS

Sur la jonction des instances

En application de l'article 367 du code de procédure civile, il convient, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner la jonction des instances inscrites au répertoire général du greffe sous les numéros RG 1800981et 1810964 et de dresser du tout un seul et même arrêt sous le numéro 1800981.

Sur la demande d'heures supplémentaires

Aux termes de l'article L3121-1du code du travail, la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.

Constitue un travail effectif le temps pendant lequel des salariés sont tenus de rester dans les locaux imposés par l'employeur et situés à proximité de leur lieu de travail, peu important les conditions d'occupation de tels locaux, afin de répondre sans délai à toute demande d'intervention sans pouvoir vaquer à leurs occupations personnelles.

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments.

Monsieur [D] explique qu'il a été recruté pour assurer le début et la fin du chargement ou du déchargement de la mélasse, ce qui donnait lieu à rémunération. Néanmoins, il soutient que la réalité de ses fonctions consistait à demeurer à la disposition de la société sans pouvoir vaquer à ses occupations pendant toute la durée des opérations de chargement ou de déchargement. Il fait valoir que les heures de permanence durant les opérations de chargement ou de déchargement ne donnaient pas lieu à rémunération alors qu'elles s'analysent comme du travail effectif.

Afin d'étayer sa demande, Monsieur [D] produit :

- un courrier de la société du 15 février 1996,

- des documents relatifs à ses interventions pour incident technique ou administratif ou autre avant, après et durant les opérations de chargement ou de déchargement,

- des attestations de collègues,

- des décomptes hebdomadaires de ses heures supplémentaires réalisées durant ses heures de permanence.

Dans le courrier du 15 février 1996, l'employeur rappelle expressément à Monsieur [D] qu'il doit être présent durant les heures de chargement et de déchargement afin de pallier à toute difficulté :'...Lors des chargements ou déchargements des navires nous vous rappelons que votre présence ne doit pas se limiter au début et à la fin du chargement mais doit être suffisante pour pallier toute difficulté pouvant survenir pendant les opérations...'

Ce courrier révèle que Monsieur [D], indépendamment de son temps de travail au début et à la fin du chargement ou du déchargement, devait se tenir à la disposition de l'employeur durant les opérations afin d'intervenir en cas de difficulté.

Il produit également des attestations de différents collègues qui attestent que Monsieur [D] se tenait à la disposition de l'employeur durant les opérations.

En effet, Monsieur [P], représentant des armateurs, atteste la chose suivante :

'... Monsieur [D] était à l'entière disposition de la société FRANCE MELASSES de jour comme de nuit pendant la durée des opérations (...). J'ai pu constater que son rôle et sa responsabilité commencent avant l'arrivée des navires et se prolongent après le départ des navires [et qu'il était toujours] en mesure d'intervenir en cas d'urgence ou de nécessité (...) Il serait totalement erroné de prétendre que l'on puisse s'occuper d'un navire « tanker » à quelque titre que ce soit uniquement dans les heures normales d'ouverture de bureau...'.

Monsieur [K], directeur du dépôt de [Localité 4], atteste ainsi :

'...Monsieur [D] quelle que soit l'heure du jour ou de la nuit, était d'astreinte permanente (...) Il n'hésitait pas à assurer des permanences de nuit au dépôt quand cela s'avérait nécessaire...'.

Monsieur [E] atteste que : '...Monsieur [D] était amené à travailler avant, pendant et après le déchargement, quel que soit l'heure ou le jour (...) et était joignable en permanence au téléphone...'.

Monsieur [B] indique que : '...Monsieur [D] était joignable en permanence par téléphone quand il allait se reposer ou prendre ses repas et (') n'a jamais failli à intervenir très rapidement quelque soit l'heure du jour ou de la nuit (...) son rôle étant de palier à tout moment à tout problème qui aurait pu entraîner une incidence financière pour le GIE...'.

Messieurs [W] et [L] précisent que, durant son temps de travail du mélassier, Monsieur [D] était très présent sur le site, et quand il n'était pas présent sur le site, il était joignable en permanence par téléphone.

Enfin, Monsieur [G] atteste que '...Monsieur [D] était disponible en dehors de sa présence physique sur le lieu de travail, il était en permanence joignable par téléphone...'.

Monsieur [D] produit en outre des documents internes à la société relatifs à ses interventions pour motif technique, administratif ou autre, qui démontrent qu'il pouvait être tenu d'intervenir pendant les opérations et non seulement à leur début et à leur fin.

- Sur le navire Eva au port [Localité 5] ' Belgique (3 documents)

- Sur le navire Vinjerak au port [Localité 6] ' Angleterre (3 documents)

- Sur le navire Vladimir Kokkinaki au port de [Localité 4] (2 documents)

- Sur le navire Agean Mariner au port [Localité 7] ' Russie (3 documents)

- Sur le navire Probo Gull aux ports d'[Localité 8] et [Localité 5] (17 documents)

- Sur le Kapitan Korotayev au port de [Localité 4] (6 documents)

- Sur le navire Petrobulk Radiance au port de [Localité 9] (2 documents)

- Sur le navire New Star au port de [Localité 10] (2 documents)

- Sur le navire Mazal en Italie (2 documents)

- Sur le navire Genmerkviladle au port [Localité 11] ' Guatemala (2 documents)

- Sur le navire Pazar au port [Localité 12] (4 documents)

- Sur le navire Chem Pioneer au port [Localité 13] ' Maroc (5 documents)

- Sur le navire Alsterstern au port de [Localité 14] (12 documents)

- Sur le navire Laconia au port de [Localité 4] (1 document)

- Sur le navire Sea Flower au port de [Localité 14] (4 documents)

- Sur le navire Anna Theresa au port de [Localité 15] (7 documents)

- Sur le navire Fertility aux ports [Localité 16] ' Danemark (2 documents)

- Sur le navire Inzhener Valchuk à [Localité 17] ' Angleterre (2 documents)

- Sur le navire Rumbulat au port [Localité 8] (2 documents)

- Sur le navire de Vityaz à [Localité 10] (1 document)

- Sur le navire Al Kortoubi au port de [Localité 4] (1 document)

- Sur le navire Inzhener Rozhkov au port de [Localité 13] ' Maroc (4 documents)

- Sur le navire Cheyenne à [Localité 10] (13 documents)

- Sur le navire de Bow Viking au port de [Localité 4] (1 document)

- Sur le navire Lady Nil au port de [Localité 9] (2 documents)

- Sur le navire Ilona Theresa à [Localité 10] (9 documents)

- Sur le navire Sandra au port de [Localité 15] (19 documents)

- Sur le navire Lipetsk au port de [Localité 4] (16 documents)

- Sur le navire Gerd au port de [Localité 14] (1 document)

- Sur le navire Betty Théresa au port [Localité 5] (2 documents)

- Sur le navire Anette J au port de [Localité 18] (2 documents)

- Sur le navire de Sarra Theresa au port de [Localité 18] (1 document)

- Sur le navire Oratuna au port de [Localité 18] (7 documents)

- Sur le navire Dvina aux ports de [Localité 10], [Localité 15] et [Localité 19] (7 documents)

- Sur le navire Salina au port de [Localité 18] (6 pages)

- Sur le navire Iktinos au port [Localité 8] (2 page)

- Sur le navire Iktinos au port de [Localité 15] (5 pages)

- Sur le navire Iktinos au port [Localité 12] (5 documents)

Pour exemple, sur le navire Alsterstern au port de [Localité 14], Monsieur [D] a communiqué à son employeur une lettre de réserve ('letter of protest') le 12 octobre 1998 à 10h30 afin de l'alerter sur le temps anormal lent du déchargement, ce qui démontre la présence de Monsieur [D] tout au long de l'opération de déchargement et non seulement à son début et à sa fin.

Parmi ces documents figurent les notes de frais de Monsieur [D] dont il résulte qu'il logeait à l'hôtel durant les opérations de chargement et de déchargement à proximité du navire afin de pouvoir s'y rendre immédiatement en cas de besoin.

Il résulte de ce qui précède que durant les opérations, il se tenait à la disposition de l'employeur dans des lieux à proximité du navire et qu'il était systématiquement immédiatement disponible en cas de besoin.

Monsieur [D] produit enfin un décompte hebdomadaire de ces heures supplémentaires sur la période de janvier 1996 à mars 2001.

La demande de Monsieur [D] doit donc être considérée comme étayée, de sorte qu'il appartient à l'employeur de fournir ses propres éléments pour démontrer la réalité du temps de travail de Monsieur [D].

A cet égard, la société admet aux termes de ses écritures que le salarié devait être disponible durant les opérations.

En effet, ses écritures sont ainsi rédigées : '...En effet, pendant le déchargement du navire, le travail est effectué par le personnel du dépôt auquel n'appartient pas Monsieur [D] qui se contentait simplement d'être joignable sur son téléphone portable en cas d'éventuel problème si, par exemple, la mélasse se répandait à la suite de la rupture des flexibles (gros tuyaux par lesquels le produit est transvasé), ce qui n'arrive d'ailleurs qu'exceptionnellement...'.

En revanche, elle conteste que Monsieur [D] ait été dans l'impossibilité de vaquer à ses occupations personnelles, dans la mesure où il n'était tenu de demeurer ni sur le lieu de travail ni en un quelconque lieu imposé par l'employeur de sorte que les heures de disponibilité ne pouvaient s'analyser en du temps de travail effectif.

A l'appui, elle fait valoir que Monsieur [D] choisissait lui-même ses hôtels et restaurants et que sa femme lui a rendu visite à plusieurs reprises à l'hôtel.

En l'espèce, la circonstance selon laquelle Monsieur [D] choisissait lui mêmes les hôtels où il résidait ne saurait s'analyser en la possibilité qu'il avait à vaquer à ses occupations dans la mesure où la société lui rappelait aux termes du courrier précité du 15 février 1996, qu'en tout état de cause, il devait pouvoir être disponible à tout moment durant les opérations, ce qui contraignait Monsieur [D] a opter pour un hôtel à proximité du navire. Cette circonstance particulière imposait au salarié d'opérer un choix d'hébergement commandé par ses préoccupations professionnelles et non pas personnelles réduisant d'autant la capacité qu'il avait d'y vaquer librement à des occupations personnelles.

En outre, la société prenait à sa charge les frais d'hôtel et de restauration de Monsieur [D], de sorte que là encore les choix en terme d'hébergement et de restauration de l'intéressé étaient contraints, ne laissant pas une liberté de choix à Monsieur [D].

La circonstance selon laquelle l'épouse de Monsieur [D] lui a rendu visite à l'hôtel n'est pas de nature à remettre en cause l'impossibilité de Monsieur [D] de vaquer à ses occupations personnelles dans la mesure où l'ensemble des pièces démontre que, durant les opérations, l'intéressé se tenait à la disposition de l'employeur dans des lieux à proximité du navire, et qu'il se trouvait systématiquement et immédiatement disponible en cas de besoin, ce qui démontre son impossibilité de vaquer à ses occupations personnelles.

Il suit de là que ces heures de travail constituent du travail effectif devant donner lieu à rémunération.

La demande de Monsieur [D] est fondée pour les heures de permanence durant lesquelles il n'est directement intervenu pour la société, mais durant lesquelles il s'est tenu à sa disponibilité sans pouvoir vaquer à ses occupations.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement du 25 février 2002 en ce qu'il a jugé que 'pendant ces heures le salarié se trouve effectivement à la disposition permanente de son employeur puisque prêt à tout moment à intervenir sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.'

En revanche, s'agissant des heures durant lesquelles Monsieur [D] a dû intervenir pour la société durant ses heures de permanence, il y a lieu de rechercher si le système de contrepartie mis en place par la société pouvait s'analyser en une rémunération de ces heures.

Sur le système de contrepartie, la société FRANCE MELASSES explique que Monsieur [D] a bénéficié outre la prise en charge des frais de déplacement, d'hébergement et de restauration de contreparties sous forme de jours de récupération de sorte que ces heures ont donné lieu à rémunération.

Elle produit à l'appui un décompte des interventions de Monsieur [D] durant les opérations de chargement et de déchargement à hauteur de 950 heures ainsi que les feuilles d'attribution des jours de récupération de Monsieur [D] à hauteur de 390 jours.

Il résulte des feuilles individuelles de congés concernant les droits de Monsieur [D] du 1er juin 1995 au 31 mai 2001 et portant sa signature et celle du chef de service, qu'il a pris, outre ses congés et des ponts, des jours de récupération au nombre global de 400, précisément décomptés chronologiquement pour chaque année de référence.

La société FRANCE MELASSES justifie que ce système de récupération a été mis en 'uvre de manière méthodique et sérieuse à partir de documents intitulés 'Vacances et Absences ' Plannings des congés et des chantiers' pour chaque année de référence de la période considérée et renseignée avec précision et, au fur et à mesure, pour l'ensemble des salariés, y compris Monsieur [D], avec la mention des périodes d'activité, de l'éventuel solde des congés à prendre et des repos compensateurs.

Il suit de là que les heures d'intervention de Monsieur [D] on été rémunérées.

En revanche, s'agissant des heures de permanence durant lesquelles Monsieur [D] n'est pas intervenu auprès de la société, celles-ci n'ont pas été rémunérées.

Le décompte de Monsieur [D] ne tient pas compte des jours de récupération qui étaient alloués par la société à l'occasion des voyages comportant une absence de son domicile le dimanche et jours fériés.

Il y a lieu de prendre en considération le décompte de Monsieur [D], en déduisant les 950 heures d'intervention qui ont déjà été rémunérées par la société au moyen de 400 jours de récupération.

Par conséquent, Monsieur [D] est fondé à réclamer le paiement du différentiel entre le décompte qu'il produit et les 950 heures supplémentaires déjà rémunérées, soit 6.474 heures supplémentaires évaluées à la somme de 120.000,00 euros outre la somme de 12.000,00 euros à titre de congés payés y afférents.

(400 jours de repos = 950 heures de travail rémunérées

7424 heures supplémentaires décomptées par le salarié

7424 - 950 = 6.474 heures supplémentaires non rémunérées évaluées à hauteur de 120.000,00 euros)

Le jugement du 25 février 2002 sera confirmé en ce qu'il a fait droit dans son principe à la demande de Monsieur [D] au titre des heures supplémentaires, mais sera infirmé sur le quantum accordé à ce titre.

Il y a par ailleurs lieu d'ordonner le remboursement par Monsieurs [D] des causes de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 avril 2015 que la société FRANCE MELASSES a exécutées et lui a payées avec intérêt légal à compter du 22 février 2002, soit la somme de 60.000,00 euros.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de la durée maximale hebdomadaire de travail

Il ressort du différentiel entre le décompte de Monsieur [D] et le nombre de jours de repos obtenu par lui en contrepartie de ses sujétions durant les heures de permanence que l'intéressé a réalisé 6.474 heures supplémentaires de 1996 à 2001 soit :

- 4.49 heures supplémentaires par jour soit un total de 11.49 heures par jour

- 22,47 heures supplémentaires par semaine soit un total de 57,54 heures par semaine.

Il suit de là que ni la durée maximale hebdomadaire du travail, limitée à 48 heures, ni la durée maximale journalière du travail n'ont été respectées de sorte qu'il y a lieu de réparer le préjudice qui en résulte à hauteur de 1.000,00 euros.

Sur la demande de complément d'indemnité sur les repos compensateurs

L'article L.3121-26 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, dispose que dans les entreprises de plus de vingt salariés, les heures supplémentaires accomplies à l'intérieur du contingent annuel d'heures supplémentaires conventionnel ou réglementaire ouvrent droit à un repos compensateur obligatoire.

La durée de ce repos est égale à 50 % de chaque heure supplémentaire accomplie au-delà de quarante et une heures.

Cette durée est portée à 100 % pour chaque heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent.

Aux termes de l'article 1er de l'avenant n° 26 du 27 décembre 2007 de la convention collective de la Meunerie, dans sa rédaction alors applicable, le contingent annuel d'heures supplémentaires prévu par l'article L. 212-6 du code du travail est fixé à 130 heures pour les autres catégories de salariés soumis au contingent d'heures supplémentaires, dans les entreprises employant plus de 20 salariés.

En l'espèce, il résulte des développements précédents que Monsieur [D] a réalisé 6.474 heures supplémentaires qui n'ont pas donné lieu à un repos compensateur.

Les heures effectuées au delà de 41 heures et en deçà du contingent annuel (89 heures) doivent donner lieu à 50% de repos compensateur soit 44,5 heures de repos compensateur.

Les heures effectuées au delà du contingent annuel (6344 heures) doivent donner lieu à 100% de repos compensateur soit 6344 heures de repos compensateur.

Monsieur [D] est fondé à demander un total de 6388,5 heures de repos compensateur, soit 912 jours, évalués à 118.687,00 euros, outre 37 jours de repos compensateurs acquis depuis le mois de mai 2005, évalués à 4.815,00 euros, soit un total de 123.458,00 euros.

(118.687,00 + 4.815,00)

Néanmoins, il est admis de part et d'autre que la société a réglé la somme de 74.050,63 euros correspondant au paiement de 569 jours de repos compensateurs.

Il suit de là que la société reste redevable du différentiel, soit la somme de 49.407,55 euros, auquel il convient de la condamner.

Le jugement du 25 février 2002 sera confirmé en ce qu'il a jugé que Monsieur [D] avait acquis des jours de repos compensateur au titre de ses heures supplémentaires, mais sera infirmé sur le montant alloué.

Sur la demande de dommages et intérêts pour défaut d'information relative aux repos compensateurs

Monsieur [D] formule une demande de dommages et intérêts à hauteur de 2.500,00 euros pour défaut d'information relative aux repos compensateurs au mois le mois.

Or le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur, de présenter une demande de repos compensateur, a certes droit à l'indemnisation du préjudice subi, mais cette indemnisation comporte déjà le montant de l'indemnité de repos compensateur.

En l'espèce, Monsieur [D] ayant obtenu une indemnité de repos compensateur à hauteur de 49.407,55 euros, ne rapporte pas la preuve d'avoir été victime, dans le cadre de l'exécution de ses heures supplémentaires, d'un préjudice distinct, justifiant qu'il lui soit alloué, en sus de l'indemnité de repos compensateur précédemment allouée, des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

Partant, il y a lieu de le débouter de sa demande.

Sur le salaire de référence

Au préalable, aux termes de l'article R.1234-4 du code du travail, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement,

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Ainsi, à l'appui des bulletins de paie couvrant la période du mois de novembre 2004 au mois d'octobre 2005, le salaire moyen mensuel brut de référence sera fixé à 2.944,88 euros.

Le jugement du 24 février 2014 sera donc confirmé sur ce point.

Sur le licenciement

Aux termes des articles L.1235-1, L.1235-3, L.2411-1, L.2422-1 et L.2422-4 du code du travail, le salarié, qui a été licencié en vertu d'une autorisation administrative ultérieurement annulée et qui ne demande pas ou plus sa réintégration, a droit, d'une part, à l'indemnisation de son préjudice depuis le licenciement et jusqu'à l'expiration du délai de deux mois qui suit la notification de la décision annulant l'autorisation de licenciement, l'indemnité due à ce titre ne pouvant se cumuler avec les indemnités journalières servies par la sécurité sociale, d'autre part, au paiement des indemnités de rupture, s'il n'en a pas bénéficié au moment du licenciement et s'il remplit les conditions pour y prétendre, et enfin au paiement de l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail, s'il est établi que son licenciement était, au moment où il a été prononcé, dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le montant de l'indemnisation correspond aux rémunérations que le salarié aurait perçues pendant la période considérée s'il avait continué à travailler, en y intégrant les primes annuelles et les augmentations de salaires.

Monsieur [D] a été licencié le 21novembre 2005 et la décision annulant l'autorisation de licenciement a été notifiée le 23 mai 2006. En application des dispositions précitées, l'intéressé est fondé à demander le paiement de son salaire pour cette période de 6 mois et 2 jours, soit la somme de 17.865,60 euros, de laquelle il y a lieu de déduire les indemnités journalières perçues durant cette période, soit la somme de 7.199,92 euros, soit un total de 10.665,68 euros.

([2.944,88 x 6] + [2.944,88 x (2/30)] = 17.865,60

17.865,60 - 7.199,92 = 10.665,68)

Sur les indemnités de rupture

Au vu des pièces versées aux débats, il convient d'accorder à Monsieur [D] les sommes de 8.834,64 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis de 3 mois en application de l'article 9 de l'annexe IV de la convention collective de la Meunerie et 883,46 euros au titre des congés payés y afférents. Ainsi, le jugement du 24 février 2014 sera confirmé sur ces points.

La qualité de cadre a été reconnue à compter du 1er août 1986 à Monsieur [D] par l'arrêt qui a force de chose jugée de la Cour d'appel de Paris du 18 mai 2005.

Pour la période du 27 décembre 1976 au 1er août 1986, l'indemnité conventionnelle de licenciement doit être calculée selon les dispositions de l'article 8 annexe IV de la convention collective de la Meunerie et pour la période du 1er août 1986 au 21 février 2006, l'indemnité conventionnelle de licenciement doit être calculée selon les dispositions de l'article 10 de l'annexe IV de la convention collective de la Meunerie applicables aux cadres.

- Statut Employé (article 8 annexe IV de la convention collective de la Meunerie) du 27 décembre 1976 au 1er août 1986 soit 9 ans, 7 mois et 5 jours

2 944,88 € x (4/15) x 9 x (7/12) x (5/365) = 7.536,55

- Statut Cadre (article 10 de la convention collective de la Meunerie alors applicable) du 1er août 1986 au 21 février 2006 soit 20 ans

2.944,88 x (3/10) x 5 = 5.417,32

2.944,88 x (4.10) x 5 = 5.889,76

2.944,88 x (6/10) x 5 = 8.834,64

2.944,88 x (8/10) x 5 x (1/12) x (25/365) = 11.779,52

L'indemnité conventionnelle de licenciement s'élève donc à la somme de 39.457,79 euros.

Sur la demande de compensation

La société FRANCE MELASSES demande à la Cour d'ordonner la compensation entre la somme de 11.000,00 euros due par Monsieur [D] à la société FRANCE MELASSES au titre de ses différentes condamnations avec les indemnités de rupture auxquelles la société pourrait être condamnée dans le cadre de la présente instance.

En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que Monsieur [D] a été définitivement condamné à payer à la société FRANCE MELASSES les sommes suivantes au titre des différentes décisions de justice suivantes :

- Décision du Juge de l'Exécution du Tribunal de Grande Instance de Gap du 22 février 2006 : 5.000,00 € à titre de dommages-intérêts et 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Arrêt de la Cour d'appel de Grenoble du 17 janvier 2007 : 2.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Arrêt de la 1ère chambre civile de la Cour d'appel de Paris du 23 mars 2007 : 500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Ordonnance du Juge de la Mise en Etat du Tribunal de Grande Instance de Gap du 10 avril 2013 : 600,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Arrêt de la 2 ème chambre civile de la Cour d'appel de Grenoble du 8 janvier 2013 : 1.000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, soit la somme totale de 11.100,00 €.

S'agissant de créances fongibles certaines liquides et exigibles, il y a lieu d'en ordonner la compensation avec la créance de Monsieur [D] de 39.457,79 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Le jugement du 24 février 2014 sera confirmé en ce qu'il a ordonné la compensation des deux créances.

Il y a donc lieu de condamner la société au paiement de la somme de 28.357,79 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Le jugement du 24 février 2014 sera infirmé sur le quantum de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur l'indemnité prévue par l'article L. 1235-3 du code du travail

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et justifie son départ immédiat. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, il ressort de la lettre de licenciement du 21 novembre 2005 que Monsieur [D] a été licencié pour faute grave à raison de son abandon de poste depuis le 5 septembre 2005.

Monsieur [D] soutient qu'il était fondé à prendre ses congés ou, à tout le moins, le reliquat de ses jours de repos compensateur obtenus par jugement du Conseil de prud'hommes en date du 25 février 2002.

Or, dans la mesure où le 13 juin 2005, Monsieur [D] s'est présenté à son poste et a demandé à l'employeur de lui accorder ses congés et, à défaut, le reliquat des jours de repos compensateurs, ce qui lui a été refusé, Monsieur [D] n'était pas fondé à prendre seul la décision de ne plus se présenter à son poste et à se soustraire ainsi à la subordination de l'employeur, de sorte qu'il a commis une faute grave ayant rendu immédiatement impossible son maintien au sein des effectifs.

Partant, le licenciement est justifié de sorte que Monsieur [D] n'est pas fondé à obtenir le paiement de l'indemnité prévue à l'article L1235-3 du code du travail.

Le jugement du 24 février 2014 sera infirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêt pour défaut de réintégration

Dans la mesure où le licenciement de Monsieur [D] est justifié, il n'est pas fondé à demander des dommages et intérêts pour défaut de réintégration.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice distinct

Monsieur [D] ne rapporte pas la preuve d'avoir été victime, dans le cadre de ce licenciement, de conditions brutales ou vexatoires, ni d'un préjudice distinct lié à la non reconnaissance de son statut Cadre à compter du 1er août 1986 justifiant qu'il lui soit alloué des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ou financier.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [D] de sa demande à ce titre.

Sur la demande de remise de documents

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de documents sociaux conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif.

PAR CES MOTIFS

SE PRONONÇANT au vu des arrêts rendus les 13 avril 2016 et 12 octobre 2017 par la chambre sociale de la Cour de cassation sur les chefs atteints par la cassation totale pour l'arrêt du 13 avril 2016 et par la cassation partielle pour l'arrêt du 12 octobre 2017,

ORDONNE la jonction des procédures inscrites au répertoire général de la Cour sous les numéros RG 1800981et 1810964 sous le numéro 1800981,

CONFIRME le jugement du 25 février 2002 en toutes ses dispositions, sauf sur le quantum accordé au titre des rappels d'heures supplémentaires et sur le nombre de jours de repos compensateur accordé,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

CONDAMNE la société FRANCE MELASSES à payer à Monsieur [D] les sommes de :

- 120.000,00 euros à titre de rappels de salaire pour heures supplémentaires réalisées de 1996 à 2001,

- 12.000,00 euros à titre de congés payés y afférents,

DIT que Monsieur [D] a acquis 912 jours de repos compensateurs au titre des heures supplémentaires,

Y ajoutant,

ORDONNE le remboursement par Monsieur [D] des causes de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 avril 2015 que la société FRANCE MELASSES a exécutées et lui a payées avec intérêt légal à compter du 22 février 2002, soit la somme de 60.000,00 euros.

CONDAMNE la société FRANCE MELASSES à payer à Monsieur [D] la somme de :

- 1.000,00 euros de dommages et intérêts pour violation de la durée maximale hebdomadaire de travail,

- 49.407,55 euros à titre de complément d'indemnité sur les repos compensateurs

CONFIRME le jugement du 24 février 2014 en toutes ses dispositions, sauf sur le quantum de l'indemnité conventionnelle de licenciement, en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [D] dénué de cause réelle et sérieuse, et en ce qu'il a condamné la société au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

DIT que le licenciement de Monsieur [D] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société FRANCE MELASSES à payer à Monsieur [D] la somme de :

- 28.357,79 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société FRANCE MELASSES à payer à Monsieur [D] la somme de 10.665,68 euros au titre de l'indemnisation du préjudice depuis le licenciement et jusqu'à l'expiration du délai de deux mois qui suit la notification de la décision annulant l'autorisation de licenciement,

DIT que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt,

AUTORISE la capitalisation des intérêts,

ORDONNE la remise par la société FRANCE MELASSES à Monsieur [D] de bulletins de paye, d'une attestation Pôle Emploi et d'un certificat de travail conformes au présent arrêt,

DIT n'y avoir lieu à prononcer une astreinte,

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société FRANCE MELASSES à verser à Monsieur [D] 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties du surplus des demandes,

LAISSE les dépens à la charge de la société FRANCE MELASSES.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 18/00981
Date de la décision : 12/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°18/00981 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-12;18.00981 ?
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