Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2019
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/20371 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4MS5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Septembre 2017 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 16/10951
APPELANT
MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS
Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire
Ayant son siège social [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
INTIMEE
SA LAUDIS, société de droit luxembourgeois
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Vincent MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : K0163
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Décembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La société Laudis Sa est une société de droit luxembourgeois.
Elle est propriétaire en France de biens immobiliers, soit directement soit indirectement, par l'intermédiaire de la SCI Park Central et de la SCI Josyne.
L'administration fiscale lui a adressé un courrier daté du 11 juin 2012, par lequel elle lui a indiqué, en substance, que :
- La société Laudis Sa pouvait bénéficier de l'exonération de la taxe de 3 % sur les immeubles détenus en France mais qu'elle n'avait pas déposé la nécessaire demande d'exonération ;
- Si la société Laudis Sa souscrivait une déclaration dans les 30 jours de la réception du courrier, le paiement de la taxe de 3 % ne sera pas exigé, s'agissant d'une première infraction.
La société Laudis Sa n'a pas souscrit la déclaration considérée.
Par un courrier du 06 décembre 2012, l'administration fiscale a donc adressé à la société Laudis une proposition de rectification au titre des années 2009 à 2012.
Les impositions suivantes, assorties de 1'intérêt de retard et de la majoration de 40 %, ont été mises en recouvrement :
- année 2009 : Avis de mise en recouvrement n° 05112 du 31 mai 2013, visant un moment total de 17 830 euros ;
- année 2010 : Avis de mise en recouvrement n° 05112 du 31 mai 2013, visant un montant total de 56 332 euros ;
- année 2011 : Avis de mise en recouvrement n° 05113 du 31 mai 2013, visant un montant total de 55 691 euros ;
- année 2012 : Avis de mise en recouvrement n° 05113 du 31 mai 2013, visant un montant total de 51 688 euros.
La société Laudis a saisi le tribunal de grande instance de Bobigny d'une demande de dégrèvement desdites impositions.
* * *
Vu le jugement prononcé le 21 septembre 2017, par le le Tribunal de Grande Instance de Bobigny qui a :
- Annulé l'avis de mise en recouvrement n° 05112 du 31 mai 2013, visant un montant total de 17 830 euros adressé à la société Laudis au titre de l'année 2009 ;
- Annulé l'avis de mise en recouvrement n° 05112 du 31 mai 2013, visant un montant total de 56 332 euros adressé à la société Laudis au titre de l'année 2010 ;
- Annulé l'avis de mise en recouvrement n° 05113 du 31 mai 2013, visant un montant total de 55 691 euros adressé à la société Laudis au titre de 1'année 2011 ;
- Annulé l'avis de mise en recouvrement n° 05113 du 31 mai 2013, visant un montant total de 51 688 euros adressé à la société Laudis au titre de 1'année 2012 ;
- Prononcé, en conséquence, le dégrèvement, au titre des années 2009 à 2012, des impositions mises à la charge de la société Laudis , par ces avis de mise en recouvrement, au titre de la taxe de 3 % sur la valeur vénale des immeubles détenus en France ;
- Condamné la Direction Générale des Finances Publiques à payer la somme de 3 000 euros à la société Laudis Sa au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamné la Direction Générale des Finances Publiques aux dépens.
Vu l'appel de la DRFIP le 6 novembre 2017,
Vu les conclusions signifiées le 15 novembre 2018 par le DRFIP,
Vu les conclusions signifiées le 26 novembre 2018 par la société Laudis Sa,
Le DRFIP demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Recevoir le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris en son appel et l'y déclarer fondé ;
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* Déclaré irrégulière la procédure suivie par l'administration ;
* Prononcé l'annulation des deux avis de mise en recouvrement émis le 31 mai 2013 ;
* Prononcé le dégrèvement au titre des années 2009 à 2012 des impositions mises à la charge de la société Laudis par ces avis ;
* Mis à sa charge les dépens ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau :
- Dire régulière la procédure de rectification ;
- Confirmer la décision de rejet du 16 juillet 2013 ;
- Rejeter la demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du CPC pour les frais irrépétibles d'appel.
La société Laudis demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
- Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 21 septembre 2017
- Recevoir la société Laudis en ses demandes et de la déclarer bien fondée ; et, en conséquence :
- Prononcer le dégrèvement, au titre des années 2009, 2010, 2011, 2012 des impositions mises à sa charge au titre de la taxe de 3 % sur la valeur vénale des immeubles détenus en France.
- Condamner l'Administration fiscale à verser à la société Laudis la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- Condamner l'Administration fiscale aux dépens.
SUR CE,
1°) Sur le respect du principe du contradictoire devant le premier juge la procédure d'instruction
Considérant que l'administration fiscale soutient que le principe du contradictoire n'aurait pas été respecté devant le premier juge et qu'elle n'a pas eu connaissance en première instance de l'argumentaire relatif à la régularité de la procédure sur lequel les premiers juges se sont fondés pour prononcer le dégrèvement des impositions ;
Mais considérant que cette contestation est inopérante puisque la nullité du jugement n'est pas demandée et que, en toute hypothèse, la cour est saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif de l'appel ;
2°) Sur la régularité de la procédure de taxation d'office
Considérant que l'article L 66 du livre des procédures fiscales dispose que :
« Sont taxés d'office :
(...) 4° aux droits d'enregistrement et aux taxes assimilées, les personnes qui n'ont pas déposé une déclaration ou qui n'ont pas présenté un acte à la formalité de l'enregistrement dans le délai légal, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L. 67 (...) .. » que, selon l'article L 67 du livre des procédures fiscales :
« La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. (...) ».
Considérant que la société Laudis expose qu'elle n'a jamais reçu le courrier du 11 juin 2012, qu'aucune date ne précise à quel moment le pli a été déposé à la société Laudis, la case 'remis' n'ayant pas été cochée ; que la signature du réceptionnaire serait illisible et son nom ne serait pas indiqué ; que la procédure de recouvrement des années 2009, 2010, 2011 et 2012 serait donc irrégulière ;
Mais considérant que l'administration est bien fondé à s'opposer à cette contestation ; qu'en effet est versé aux débats le courrier daté du 11 juin 2012 adressé à la société Laudis, [Adresse 2] ; que sur cet envoi recommandé RK 45 357 878 5 FR figure l'avis du bureau des postes du Luxembourg attestant de la remise du courrier le 15 juin 2012 avec signature d'un représentant de la société Laudis, l'ensemble ayant été retourné à l'administration fiscale le 20 juin 2012 ; que si la case 'remise' n'est pas cochée cette omission est indifférente puisque figure sur le document postal la signature du destinataire ; qu'il est ainsi justifié de la notification de la mise en demeure selon les termes de l'article l'article L 67 du livre des procédures fiscales ; que la date du 15 juin 2012 constitue ainsi le point de départ du délai de 30 jours prévu par le même article ; qu'aucune réponse n'ayant suivi, la procédure de rectification a ainsi été adressée à la société Laudis le 06 décembre 2012 ;
Considérant que la procédure de taxation d'office est ainsi régulièrement intervenue ; que le jugement déféré doit être infirmé ;
3°) Sur le bien fondé des impositions
Considérant que l' article 990 E-3°a) du code général des impôts dispose que :
'La taxe prévue à l'article 990 D n'est pas applicable :
3° Aux entités juridiques : personnes morales, organismes, fiducies ou institutions comparables qui ont leur siège en France, dans un Etat membre de l'Union européenne ou dans un pays ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ou dans un Etat ayant conclu avec la France un traité leur permettant de bénéficier du même traitement que les entités qui ont leur siège en France :
a) Dont la quote-part du ou des immeubles situés en France ou des droits réels détenus directement ou indirectement portant sur ces biens est inférieure à 100 000 euros ou à 5 % de la valeur vénale desdits biens ou autres droits ; '
Considérant que la société Laudis Sa est propriétaire de biens immobiliers détenus en France, soit directement, soit par l'intermédiaire de la société SCI Park Central (que la Laudis Sa détient à concurrence de 96,67 %) soit par l'intermédiaire de la société SCI Josyne (que la Laudis Sa détient à concurrence de 96,67 %) ; qu'il convient d'examiner la situation respective de chacun des biens soumis à contestation tout en rappelant que selon les dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales applicable aux taxations d'office, 'la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition'.
a) Considérant que la société Laudis est propriétaire de 25 emplacements situés au 2ème sous-sol d'un ensemble immobilier sis au [Adresse 3] ;
Considérant que la société Laudis prétend que ses emplacements de parking ont une valeur vénale inférieure à 100 000 euros et, se trouveraient ainsi exonérés de la taxe de 3 % ; qu'elle expose que le 2ème sous-sol dans lequel sont situées les places de parking a fait l'objet d'un arrêté préfectoral du 17 mai 2006 portant interdiction d'occupation pour des raisons de sécurité ; qu'ils n'étaient pas exploitables pendant la période en litige couvrant les années 2009 à 2012 ; qu'elle expose par ailleurs que les éléments de comparaison fournis par l'administration ne seraient pas pertinents étant donné qu'ils concerneraient des box et non pas des places de parking ;
Mais considérant que l'administration fiscale n'est pas tenue de verser des éléments de comparaison portant sur des biens strictement identiques mais comparables ; que selon les éléments de comparaison qu'elle fournit la valeur vénale de ces emplacements se chiffre ainsi qu'il suit :
1er janvier 2009 : 378 125 euros
1er janvier 2010 : 415 000 euros
1er janvier 2011 : 427 500 euros
1er janvier 2012 : 482 500 euros
Considérant que la société Laudis n'apporte aucun éléments permettant de caractériser l'impact de l'arrêté préfectoral d'interdiction de stationnement abrogé le 28 mars 2014 sur la valeur vénale des emplacements pendant la période considérée ; que les contestations présentées à ce titre par la société Laudis doivent être écartées;
b) Considérant que la société Laudis détient 29 parts sur 30 de la SCI Park Central qui est propriétaire des 32 emplacements de parking suivants :
* 26 emplacements situés [Adresse 4], acquis le 25/07/2002 pour 496 832 euros ;
* 6 emplacements situés [Adresse 4], acquis le 25/07/2002 pour 132 000 euros.
Considérant que la société Laudis prétend que l'ensemble des 32 emplacements de parkings détenus par la SCI Park Central représente 1.952/100.000 ème de la copropriété, soit 1,952 % de l'ensemble immobilier, le pourcentage de détention étant inférieur à 5 % de la valeur vénale de l'ensemble du bien ; que la société Laudis serait exonérée de la taxe de 3 %, conformément aux dispositions de l'article 990 E 3° du Code général des impôts ;
Mais considérant que les biens ayant été valorisés au 1er janvier 2010 à 716 657 euros, au 1er janvier 2011 à 835 228 euros et au 1er janvier 2012 à 866 163 euros, les 3 années en litige, leur valeur vénale étant supérieure à 100 000 euros ; que la société laudis détenant 29 des 30 parts sociales de la SCI Park est infondée à invoquer le seuil de 5 % prévu à l'article 990 E-3°a) du code général des impôts
c) Considérant que la société Laudis détient 29 parts sur 30 de la SCI Josyne qui est propriétaire notamment d'un appartement de type F2, situé au [Adresse 5] acquis le 26/09/2002 pour 50 300 euros, seul bien immobilier en litige ;
Considérant que la société Laudis prétend que cet appartement nécessitant des travaux qui représentant une somme d'environ 30 000 euros ; que sa valeur vénale serait ainsi inférieure à 100 000 euros au 1er janvier des années 2010 et 2011 ;
Mais considérant que le bien a été vendu le 14 novembre 2011 pour un montant de 125 000 euros ; que la société Laudis ne justifie pas d'une valeur vénale inférieure à celle fixée dans la proposition de rectification du 06 décembre 2012 soit 100 494 euros au 1er janvier 2010 et 106 195 euros au 1er janvier 2011 ; que la société Laudis ne prouve aucunement que les travaux auraient été réalisés avant la cession du 14 novembre 2011 ; que les contestations ainsi soulevées par la société Laudis doivent être écartées ;
Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que le jugement déféré doit être infirmé en toutes ses dispositions; que la procédure doit être déclarée régulière avec confirmation de la décision de rejet du 16 juillet 2013.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant de nouveau ;
DIT la procédure régulière ;
CONFIRME la décision de rejet du 16 juillet 2013 ;
CONDAMNE la société Laudis à verser au directeur régional des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE la société Laudis aux dépens.
LE GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS