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11/02/2019 | FRANCE | N°17/12348

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 11 février 2019, 17/12348


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2019



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/12348 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3SJF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 14/02290



APPELANTE



SELAFA 'MJA', prise en la personne de Me [A] [R], ès qualités d

e liquidateur judiciaire de la société MOBIWIRE venant aux droits de la société DSV AIR & SEA et de la société UTI FRANCE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 11 FÉVRIER 2019

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/12348 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3SJF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2017 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 14/02290

APPELANTE

SELAFA 'MJA', prise en la personne de Me [A] [R], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MOBIWIRE venant aux droits de la société DSV AIR & SEA et de la société UTI FRANCE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 440 672 509

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentée par Me Sandra HAZAN de la SELEURL SHA AVOCAT, avocate au barreau de PARIS

Représentée par Me Luc MANNEVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0426

INTIME

MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS [Établissement 1], agissant sous l'autorité du Directeur Général des Douanes

Ayant ses bureaux [Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Mme [M] [N], inspectrice des douanes, en vertu d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Du 3 novembre 2010 au 5 janvier 2011, la société UTI France a réalise, en qualité de commissionnaire en douane, 37 déclarations d'importations de liseuses électroniques pour le compte de la société Mobiwire sous la position tarifaire 84 71 41 00 90 sans droits de douane.

Estimant cette position tarifaire erronée puisque celles-ci auraient dû être déclarées sous la position tarifaire 84 71 41 00 90,et qu'il y avait eu de fausses déclarations de valeur à l'importation , l'administration des douanes a établi un procès-verbal de constat, daté du 17 juillet 2012, faisant état d'une fausse déclaration d'espèce et de valeur à l'importation et indiquant que des droits et taxes ont été éludés pour un montant total de 174 210 euros dont 28 262 euros de TVA.

Un avis de mise en recouvrement a été émis en date du 27 juillet 2012 et notifié à la société UTI.

La société UTI a formé une demande de remboursement et de remise sur le fondement des articles 236 et 239 du code des douanes communautaires qui a été rejetée le 7 novembre 2013 par l'administration des douanes.

Par acte d'huissier du 6 février 2014, la société UTI France a assigné l'administration des douanes, [Établissement 1] et M. le Receveur régional [Établissement 1] devant le Tribunal de grande instance de Bobigny.

L'administration des douanes a rejeté la contestation de l'avis de mise en recouvrement le 22 septembre 2016.

Par acte d'huissier du 25 novembre 2016, la société DSV AIR & SEA, venant aux droits de la société UTI France, a assigné l'administration des douanes, la Direction régionale des douanes et droits indirects de [Établissement 1] et M. le Receveur régional [Établissement 1] devant le tribunal de grande instance de Bobigny.

Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction à l'audience du 23 février 2017.

La société Selafa MJA, liquidateur de la société Mobiwire, venant aux droits de la société DSV Air & Sea venant elle-même aux droits de la société UTI aux fins de remise de la créance douanière, a ensuite poursuivi la procédure.

Par jugement du 1er juin 2017, le tribunal de grande instance de Bobigny a rejeté l'ensemble des demandes formées par la Selafa et condamnée cette dernière, ès qualités de liquidateur de la société Mobiwire à payer à la direction régionale [Établissement 1] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Selafa MJA, ès qualités, a relevé appel de ce jugement le 20 juin 2017.

Par conclusions soutenues à l'audience, la société Selafa MJA, ès qualités, demande à la cour, au visa des articles 67 A, 352et 367 du code des douanes national, 220, 236 et 239 du code des douanes communautaires et 19-2 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, de :

- annuler le jugement entrepris ;

- constater que la réclamation de l'administration des douanes établie par procès-verbal du 17 juillet 2012 n'est pas fondée ;

- en conséquence, dire que le procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 27 juillet 2012 sont annulés ;

- dire que la somme de 174 210 euros initialement versée par la société UTI à l'administration soit remboursée à la société Selafa MJA, suite à la subrogation conventionnelle ;

- en tout état de cause, condamner l'administration des douanes et droits indirects à lui verser une somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du « nouveau » code de procédure civile ;

- dire que selon l'article 367 du code des douanes l'instruction est verbale et sans frais de justice à répéter de part et d'autre.

Par conclusions soutenues à l'audience, l'administration des douanes prise en la personne de M. le directeur régional [Établissement 1] et en la personne de M. le receveur régional [Établissement 1] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes formées par la société SELAFA MJA et de condamner cette dernière à lui verser une indemnité de procédure de 15 000 euros et de dire que l'instruction est verbale et sans frais de justice à répéter de part et d'autre (article 367 du code des douanes).

SUR CE,

La recevabilité de la Selafa MJA prise en la personne de Maître [A] [R] agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mobiwire, venant aux droits, par effet d'une subrogation conventionnelle de la société DSV Air & Sea et venant aux droits de la société UTI France n'est pas contestée par l'intimée et est justifiée notamment par la subrogation conventionnelle du 09 décembre 2016 produite.

Sur la demande de nullité du jugement

Aucun moyen n'est développé par l'appelante au soutien de sa demande de nullité du jugement entrepris. Cette demande sera dès lors rejetée.

Sur la demande de nullité du procès-verbal et de l'AMR

La Selafa MJA ne sollicite plus la remise de la créance douanière d'un montant de 174 210 euros mais la nullité du procès-verbal du 17 juillet 2012 et de l'avis de mise en recouvrement du 27 juillet 2012. Elle invoque deux moyens, à savoir le fait que la codification douanière n'était pas stable à l'époque des faits d'une part et la non-rétroactivité d'un règlement communautaire d'autre part.

La Selafa MJA fait valoir qu'au moment des faits, il n'existait pas de classement tarifaire concernant les liseuses électroniques et que l'importateur étant dans l'impossibilité de déterminer avec certitude la position tarifaire de ces marchandises, nouvelles sur le marché.

Elle expose que la société UTI, à la demande de la société Mobiwire a, par demande du 20 mai 2010 sollicité de l'administration des douanes, un avis de classement pour les livres numériques qui n'a pas répondu dans le délai de trois mois mais fait connaître à la société UTI qu'elle n'était pas en mesure de lui délivrer cette réponse puis communiquant sa réponse le 3 août 2011 postérieurement au règlement communautaire du 29 juillet 2011 classant les biens à la position tarifaire 85 43 70 90 qui a permis aux autorités françaises de délivrer tardivement leur décision de classement. Elle soutient que cette incapacité de l'administration des douanes d'émettre une décision de classement sur le produit démontre la difficulté réglementaire pour le classement d'un tel appareil.

Elle indique que la société UTI a décidé alors de retenir le classement sous la codification 84 71 41 00 dont la désignation est :

« Machines automatiques de traitement de l'information et leurs unités ; lecteurs magnétiques ou optiques, machines de mise d'informations sur support sous forme codée et machines de traitement de ces informations, non dénommés ni compris ailleurs », puisque le livre électronique est doté d'un processeur particulièrement puissant permettant de traiter l'information, en l'occurrence, à partir de signaux électroniques, d'afficher un texte en mode lecture et que cette position tarifaire avait été confirmée par l'administration des douanes pour un produit similaire, à savoir une tablette tactile ce qu'est une liseuse électronique.

La société Selafa MJA soutient que l'administration des douanes a appliqué de manière rétroactive le règlement communautaire du 29 juillet 2011 et que le procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement sont nuls.

L'administration des douanes soutient que le présent litige ne résulte pas de l'application rétroactive d'une décision administrative mais bien de l'application de règles de classement tarifaire existantes au moment des importations litigieuse ; que le règlement communautaire est venu acter la position tarifaire des livres électroniques ; qu'elle ne s'est pas livrée à une application rétroactive d'un texte nouveau, aucune décision administrative n'ayant été prise par ailleurs. Elle ajoute que les infractions relevées à l'encontre de la société UTI France n'ont donné lieu à aucune sanction, ni administrative, ni pénale et que seule une procédure de recouvrement des droits et taxes dus a été initiée par l'administration, à travers l'émission de l'AMR contesté. Elle soutient que le procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 27 juillet 2012 sont fondés.

Ceci étant exposé, il est établi que sur la période concernée les liseuses électroniques ne faisant l'objet, compte tenu de leur nouveauté sur le marché d'aucune tarification explicite au niveau interne et au niveau européen antérieurement au règlement communautaire du 29 juillet 2011 publié au Journal officiel de l'Union européenne le 1er août suivant ; que la demande de classement de la société UTI en date du 20 mai 2010 restée sans réponse jusqu'au 3 août 2011 est fondée sur ce nouveau règlement.

Le classement tarifaire d'un produit s'effectue au moment de son importation. Or, il ressort des termes du procès-verbal de notification d'infraction pour fausse déclaration d'espèce à l'importation du 17 juillet 2012 que celui-ci vise 19 déclarations régularisées sur la période allant du 15 novembre 2010 au 5 janvier 2011 et a pour fondement, outre les règles générales d'interprétation de la nomenclature combinée, « le règlement de classement UE n° 7623/2011 » ainsi que le règlement tarifaire contraignant 2010-00894. Or, le règlement d'exécution de la commission n° 7623/2011 est en date du 29 juillet 2011 et porte classement du livre électronique la position tarifaire 85 43 70 90. Ce règlement prévoit en son article 3 une entrée en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne. Le règlement tarifaire contraignant 2010-00894 est daté du 3 août 2011, soit postérieurement aux déclarations d'importation et postérieurement au dit règlement communautaire du 29 juillet 2011.

Le procès-verbal d'infraction est donc fondé juridiquement sur le règlement communautaire de classement tarifaire non encore en vigueur au moment des importations et du renseignement tarifaire contraignant postérieur aux déclarations d'importations et lui-même basé sur ce règlement. En conséquence, le procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement seront annulés, peut importe, contrairement à ce que soutient l'administration des douanes que la société Selafa MJA ne conteste pas, et n'a pas contesté l'infraction de fausse déclaration de valeur relevée également à l'encontre de la société UTI France dès lors qu'aucune distinction des sommes dues n'est faite entre celles relevant de la fausse déclaration d'espèce et celles relevant de la fausse déclaration de valeur à l'importation.

En outre un procès verbal de constat doit être motivé et encourt la nullité si le visa des textes qu'il retient est erroné.

Le jugement entrepris sera dès lors infirmé en toutes ses dispositions et la nullité du procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 27 juillet 2012 sera prononcée.

L'administration des douanes sera condamnée à payer à la Selafa MJA ès qualités la somme de 174 210 euros versés par la société UTI le 30 novembre 2016.

L'administration des douanes sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure et condamnée à payer à la SELA MJA ès qualités, sur ce fondement, la somme de 4 000 euros.

En application de l'article 367 du code des douanes, il n'y a pas lieu à condamnation aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

DEBOUTE la SELAFA MJA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Mobiwire de sa demande de nullité du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bobigny le 1er juin 2017 ;

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau ;

PRONONCE la nullité du procès-verbal du 17 juillet 2012 et l'avis de mise en recouvrement du 27 juillet 2012 ;

CONDAMNE l'administration des douanes à payer à la Selafa MJA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Mobiwire la somme de 174 210 euros ;

DEBOUTE l'administration des douanes de sa demande d'indemnité de procédure ;

CONDAMNE l'administration des douanes à payer à la SELAFA MJA ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Mobiwire la somme de 4 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DIT n'y avoir lieu à condamnation aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/12348
Date de la décision : 11/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°17/12348 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-11;17.12348 ?
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