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06/02/2019 | FRANCE | N°16/15869

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 06 février 2019, 16/15869


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 06 Février 2019

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15869 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2IYD



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Décembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° 16/274





APPELANTES

Société de fait (SDF) STEF SELARL BRAUN ARDUZ NAHAVANDY DA

[Adresse 1]

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N° SIRET : 408 485 829

représentée par Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136





INTIMEE

Madame [K] [K] EPOUSE [W]

[Adresse 2]

[Localité 2]

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 06 Février 2019

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15869 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2IYD

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Décembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY RG n° 16/274

APPELANTES

Société de fait (SDF) STEF SELARL BRAUN ARDUZ NAHAVANDY DA

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 408 485 829

représentée par Me Olivier BONGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0136

INTIMEE

Madame [K] [K] EPOUSE [W]

[Adresse 2]

[Localité 2]

présente à l'audience, représenté par Me Sylvie CHATONNET-MONTEIRO de la SCP MONTEIRO/BONNIER, avocat au barreau d'ESSONNE

PARTIE INTERVENANTE :

Société NAHAVANDY DANA , agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Sanja VASIC de la SELARL DUBAULT/BIRI, avocat au barreau d'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Novembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Graziella HAUDUIN, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Graziella HAUDUIN, Présidente

Madame Carole CHEGARAY, Conseillère

Madame Séverine TECHER, Vice-Présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Fanny MARTIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

- signé par Madame Graziella HAUDUIN, Président et par Madame Amélie FERRARI, Greffier placé, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement en date du 5 décembre 2016 par lequel le conseil de prud'hommes d'Évry, statuant dans le litige opposant Mme [K] [K] à son ancien employeur, la société de fait Stef SELARL [B], et les SELARL [B], a :

- dit que la société de fait Stef SELARL [B], la SELARL [C] et la SELARL Nahavandy Dana n'ont pas respecté les dispositions légales,

- dit que le contrat de travail de la salariée est un contrat à temps plein conclu avec la société de fait,

- dit que ce contrat n'a pas été transféré mais qu'à compter du 1er juillet 2015 les SELARL [B] sont devenues co-employeurs avec la société de fait, suite à la signature du protocole d'accord du 30 juin 2015 réduisant le périmètre de leur association mais maintenant l'ensemble des activités et la gestion d'une masse commune par la société de fait Stef SELARL [B]a,

- condamné la société de fait Stef SELARL [B] à verser à Mme [K] 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société de fait de lui remettre des bulletins conformes depuis le mois de juillet 2015,

- débouté la salariée du surplus de ses demandes, la société de fait et les SELARL de leurs demandes reconventionnelles,

- mis les dépens à la charge de la société de fait ;

Vu l'appel interjeté le 19 décembre 2016 par la SELARL [C] et la société de fait Stef SELARL [B] de cette décision ;

Vu l'ordonnance de fixation de calendrier du 6 avril 2017 et de clôture différée au 10 octobre 2018 ;

Vu les conclusions des parties auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

Aux termes de conclusions transmises le 4 octobre 2018 par voie électronique, la SELARL [C] et la société de fait Stef SELARL [B] ont demandé à la cour :

- in limine litis : de déclarer irrecevables les demandes nouvelles de Mme [K] tendant à obtenir la condamnation de la société de fait Stef [B] ou subsidiairement et solidairement des SELARL [B] au paiement de différentes sommes au titre de la nullité du licenciement, du préavis et des congés payés y afférents et d'un rappel de complément d'indemnités journalières et de tous les dépens y compris les frais d'exécution par voie d'huissier par application des articles 10 et 12 de la loi du 8 mars 2001 ainsi que les frais de timbres fiscaux à hauteur de 35 euros,

- au fond : de débouter Mme [K] de ses demandes nouvelles,

- d'infirmer le jugement entrepris-en ses dispositions relatives au transfert du contrat de travail à compter du 1er juillet 2015, au co-emploi, à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et à la remise des bulletins de paie,

-de juger que le contrat de travail a été valablement transféré en application de l'article L.1224-1 du code du travail le 1er juillet 2015 de la société de fait Stef [B] vers les SELARL [B],

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [K] de toutes ses demandes,

- de la condamner à payer solidairement à la SELARL [C] et à la société de fait Stef [B] 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens avec distraction au profit de la SELARL OPB avocats ;

Aux termes de conclusions transmises le 2 octobre 2018 par voie électronique aux termes desquelles la SELARL Nahavandy Dana, appelant incident, sollicite pour sa part que :

-la décision déférée soit infirmée,

-les demandes nouvelles de Mme [K] soient déclarées irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile,

- de juger que le contrat de travail a été transféré partiellement de plein droit à la SELARL Nahavandy Dana,

- de dire que la société de fait Stef [B] n'est plus employeur,

- à titre subsidiaire de débouter Mme [K] de sa demande en nullité du licenciement et des conséquences financières afférentes, de sa demande de complément d'indemnités journalières et de la condamner à lui payer 2 000 euros d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la SELARL Nahavandy Dana et de la société de fait Stef [B] et à supporter les entiers dépens ;

Aux termes de conclusions transmises le10 octobre 2018 par voie électronique par lesquelles la salariée, appelante à titre incident, sollicite la confirmation du jugement entrepris qui a prononcé le maintien de son contrat de travail avec la société de fait et l'absence de transfert aux SELARL et à la remise des bulletins de paie avec astreinte, son infirmation en ce qu'il a rejeté ses demandes de dommages-intérêts pour harcèlement moral et résistance abusive, la condamnation de la société de fait Stef [B] ou subsidiairement et solidairement des SELARL [B] à lui verser les sommes suivantes :

- dommages-intérêts pour harcèlement moral : 20 000 euros,

- dommages-intérêts pour résistance abusive : 10 000 euros,

- nullité du licenciement : 41 500 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 4 672,80 euros,

- congés payés afférents : 467,28 euros,

- rappel de complément d'indemnités journalières : 85,72 euros,

- article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros,

et enfin la condamnation de la société de fait Stef [B] ou subsidiairement et solidairement des SELARL [B] à tous les dépens y compris les frais d'exécution par voie d'huissier par application des articles 10 et 12 de la loi du 8 mars 2001 ainsi que les frais de timbres fiscaux à hauteur de 35 euros ;

SUR CE, LA COUR :

Attendu que Mme [K] [K] a été engagée le 13 septembre 2000 en qualité de secrétaire médicale par la société de fait Drs Nahavandy et Braun-Arduz suivant contrat de travail à durée indéterminée écrit à temps plein (169 heures par mois) ;

Que le 30 juin 2015, les SELARL [B] ont proposé à Mme [K] de signer avec chacune un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel (50% du temps complet antérieur), ce que la salariée a refusé ;

Qu'elle a saisi le 3 février 2016 le conseil de prud'hommes d'Évry de demandes tendant à voir juger que son contrat de travail avec la société de fait composée des SELARL [B] a été maintenu depuis le 1er juillet 2015 et à obtenir l'indemnisation du harcèlement moral et de la résistance abusive ;

Qu'après le jugement rendu par la juridiction prud'homale le 5 décembre 2016 et l'appel interjeté le 19 décembre suivant, la salariée a été parallèlement convoquée par les SELARL [B] à deux entretiens préalables à un éventuel licenciement, puis licenciée pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement par lettres recommandées avec demande d'avis de réception des 3 et 6 novembre 2017 ;

Sur la recevabilité des demandes formées pour la première fois en appel par Mme [K] :

Attendu qu'il résulte de l'article 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud'homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail que la suppression de l'article R. 1542-7 du code du travail, qui autorisait les demandes nouvelles en appel, n'est entrée en vigueur que pour les instances introduites devant les conseils de prud'hommes à compter du 1er août 2016 ; que la salariée ayant saisi le conseil de prud'hommes d'Évry le 3 février 2016, ses demandes nouvelles relatives notamment à la contestation du licenciement de surcroît survenu postérieurement à l'appel, sont recevables ;

Sur le transfert du contrat de travail :

Attendu que les premiers juges, après avoir rappelé les dispositions de l'article L.1224-1 du code du travail aux termes desquelles il y a transfert de plein droit entre le nouvel employeur et les salariés des contrats de travail en cours au jour de la modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, ont par une exacte appréciation des éléments de fait et de preuve qui leur étaient soumis, à bon droit considéré que les conditions légales n'étaient pas réunies ; qu'en effet, il résulte notamment du protocole signé par les deux SELARL le 30 juin 2015 que celui-ci est destiné à réduire le périmètre de leur association et à réorganiser leur cabinet en scindant leurs activités de dermatologie d'une part des activités d'épilation et de puvathérapie, spécialité relevant également de la dermatologie, d'autre part et qui demeurent pour ces dernières toujours gérées par la société de fait ; que cette opération avait pour but d'exclure les honoraires de consultation de dermatologie générés par chacun des médecins, [C] et [I], de la masse commune pour permettre à l'un des praticiens de ralentir son rythme de travail ; qu'aussi, il convient d'observer que le protocole ne prévoit pas un transfert, même partiel d'une activité, chacun conservant son activité propre de consultation comme auparavant, avec un simple partage du matériel entre les deux SELARL, en l'espèce le laser KTP utilisé en dermatologie, par jour ou demi-journée et s'agissant de Mme [K] son affectation au service de chacun des deux médecins de manière égale à hauteur de 50% de son temps plein ; qu'au surplus, si Mme [K] exerçait l'essentiel de son activité en dermatologie, elle était également amenée avant et après la conclusion du protocole, comme elle le soutient sans être contredite, à intervenir aussi dans le cadre de l'activité de puvathérapie, indissociable de la dermatologie, activité qui n'était pas confiée aux autres salariées de la société de fait ; qu'enfin, les tâches effectuées par l'intéressée pour chacun des médecins, soit celle de secrétariat (réception téléphonique et accueil, création et suivi de dossier patients, établissement et contrôle des dossiers de remboursement et application de la procédure qualité), ne peuvent, nonobstant la répartition des jours de travail mentionnée dans le seul contrat proposé à sa signature par la SELARL Nahavandy Dana, être dissociées dans les faits, Mme [K] soutenant sans être utilement contredite avoir dû assurer notamment et pendant un certain temps la prise de rendez-vous pour les deux praticiens de manière continue, de surcroît avec un numéro d'appel téléphonique identique, le fait qu'ensuite un message d'accueil préenregistré permette de joindre l'un ou l'autre des secrétariats étant insuffisant à séparer sérieusement les deux activités ;

Qu'en conséquence, la jugement sera confirmé ce qu'il a considéré qu'à défaut de transfert du contrat de travail, Mme [K] est demeurée salariée de la société de fait Stef [B] ; qu'il convient de constater que la salariée a sollicité la confirmation de cette seule disposition et non celle par laquelle la juridiction prud'homale a retenu l'existence d'un co-emploi ; que le jugement sera aussi confirmé ce qu'il a condamné la société de fait à remettre à la salariée les bulletins de paie conformes à partir du mois de juillet 2015, sans toutefois que la nécessité du prononcé d'une astreinte ne soit justifiée ;

Sur la résistance abusive de l'employeur :

Attendu que l'absence de rétablissement du contrat de travail par la société de fait, suspendue à la résolution du litige pendant entre les parties sur les conditions d'application de l'article L.1224-1 du code du travail, ne peut être dans les circonstances de la présente espèce être considérée comme constitutive d'une résistance abusive de la part de cette société, ni des SELARL, si bien que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande indemnitaire formée principalement par la salariée de ce chef et que la demande formée subsidiairement contre les SELARL sera pour le même motif également rejetée ;

Sur le harcèlement moral :

Attendu qu'aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Que selon l'article L.1154-1 du même code le salarié a la charge de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe ensuite à la partie défenderesse de prouver que les faits qui lui sont imputés ne sont pas constitutifs de harcèlement et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Attendu qu'il ressort des pièces versées au débat par Mme [K] que ses horaires de travail ont été modifiés par les deux médecins le 21 octobre 2014 et aussi le 19 août 2015 par la SELARL Nahavandy, qu'alors que le planning établi le 21 octobre 2014 avait modifié les horaires de travail, il lui a été demandé le 4 novembre 2014 de rester à son domicile le 6 novembre en raison de l'absence d'un des deux médecins et de récupérer les heures correspondantes ; que les deux SELARL ont fait le choix en suite de la régularisation du protocole précité et de leur nouvelle organisation imposée de conserver Mme [N], salariée embauchée récemment un contrat de travail à temps plein et de vouloir imposer à Mme [K], dont l'ancienneté était ancienne (septembre 2000), deux contrats à temps partiel ; qu'il a été reproché par la SELARL Dana Nahavandy par lettre du 2 septembre 2015 d'avoir travaillé au profit de l'autre médecin notamment de prenant les appels de ses patients un lundi où la salariée doit en principe travailler pour le compte de la SELARL Dana Nahavandy, ce qui illustre la difficulté dénoncée par Mme [K] pour ce qui concerne l'utilisation par les patients du standard d'un médecin quand l'autre ne répond pas ; que par lettre du 24 février 2016 M. [I] lui a demandé de ne plus ouvrir son courrier ; que par lettre du 16 mars 2016 la salariée a vainement sollicité le docteur [C] aux fins de remplir déclaration d'accident du travail à la suite de son admission aux urgences le 14 mars précédent, celle-ci lui répondant que ce jour-là elle n'a constaté aucun accident du travail, que Mme [K] lui a seulement indiqué se sentir mal et qu'elle se rendait aux urgences et qu'elle travaillait alors pour le compte de l'autre médecin à qui elle lui indique de s'adresser pour cette déclaration ; qu'au terme du certificat établi le 14 mars 2016, le docteur [X] [G] a constaté que Mme [K] était en pleurs à son arrivée, soutenue par son mari et présentait une gêne respiratoire avec sensation d'étouffement, des vertiges, de transpiration, de tremblement musculaire et des bouffées de chaleur ; que durant l'arrêt de travail qui a suivi, la salariée n'a pu percevoir des indemnités journalières dans un premier temps à défaut d'établissement de la déclaration d'accident du travail et aussi du document complet et signé exigé par la CPAM sur les éléments de salaire et ensuite les a perçues avec retard ; que le médecin du travail a rendu un avis d'aptitude pour reprise le 15 juin 2017 à temps partiel (1/4 de temps complet) pendant six mois, avec l'indication d'éviter à la salariée de travailler seule ; qu'ensuite, Mme [K] a reçu une lettre de Mme Braun-Arduz du 13 juin lui indiquant de se présenter le mardi de 14h à 18h20 et qu'elle sera chargée de la frappes de courriers et de classement de documents puis une lettre du 16 juin lui précisant que les horaires seront le mardi et le jeudi de 14h à 18h20, une lettre de la SELARL Nahavandy du 14 juin l'invitant à se présenter les jeudis de 8h à 12h20, puis celle du 19 juin le lundi de 13h à 17h20 et le jeudi de 8h à 12h20 ; qu'à la date de la reprise, soit le jeudi 15 juin 2017, aucun des deux employeurs n'est présent, ce que confirme Mme [R], membre du CHSCT et aucune directive n'a été donnée à la secrétaire présente ; qu'ensuite, il a été reproché le 26 juin 2017 par Mme Braun-Arduz à la salariée de ne pas s'être présentée les mardi et jeudi et de n'avoir pas repris le travail alors que reprise programmée et cabinet organisé pour la recevoir ; que les deux médecins ont envoyé successivement à la salariée des courriers contradictoires sur les horaires à réaliser, alors que l'avis d'aptitude pour la reprise au 15 juin 2017 mentionnait avec précision la durée du travail à accomplir, soit un quart de temps complet correspondant à 8h75 par semaine, d'où il ressort que le reproche susvisé de Mme Braun-Arduz était infondé ; qu'il résulte du certificat du 14 avril 2016 du docteur [Y], médecin psychiatre, que la salariée a présenté un syndrome anxio-dépressif, de celui du 8 juillet suivant la prise de psychotropes (anti-dépresseurs, anxiolytiques et hypnotiques), de visites tous les 15 jours et d'un état dépressif majeur ; que le docteur [O] a constaté dans son certificat du 7 juillet 2016 un amaigrissement associé à un syndrome anxio dépressif nécessitant la prise d'anxiolytique ; qu'enfin le médecin du travail a, dans son avis du 4 octobre 2017, constaté l'inaptitude de Mme [K] à son poste de secrétaire médicale, celle-ci pouvant toutefois occuper une activité similaire dans un environnement différent, c'est à dire dans un autre établissement ; que pris dans leur ensemble ces éléments de fait laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au travail qui a abouti à une dégradation des conditions de travail de la salariée dans des conditions susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale et a abouti à la constatation de son inaptitude physique à occuper son emploi ; que les dénégations des médecins employeurs, l'affirmation de ce que la salariée a feint le malaise du 14 mars 2016 et a proféré des accusations mensongères dans ses courriers, l'absence de justification de la nécessité des modifications d'horaires et/ou de jours travaillés autre que le rappel de ce que ces modifications relèvent du pouvoir de direction de l'employeur, la réponse de M. [I] faite aux difficultés de la salariée de scinder son temps de travail d'inviter les patients à laisser un message sur l'autre ligne ou à rappeler ultérieurement, les mauvaises conditions de reprise du travail et l'appréciation erronée du temps de travail fixé par le médecin du travail ne sont pas de nature à démontrer que les décisions, actes ou agissements répétés des employeurs, révélateurs d'un abus d'autorité, étaient justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement ;

Qu'il s'ensuit que le jugement sera infirmé sur ce point et il sera alloué à Mme [K] des dommages-intérêts pour harcèlement moral à hauteur de 10 000 euros ;

Attendu qu'il résulte des constatations précédentes que l'inaptitude de la salariée a trouvé son origine dans le harcèlement moral, si bien que le licenciement consécutif est frappé de nullité ;

Que Mme [K], qui ne sollicite pas sa réintégration, est ainsi en droit d'obtenir à ce titre des dommages-intérêts d'un montant au moins égal à l'indemnité minimum prévue par l'article L 1235-3 du code du travail, quel que soient son ancienneté et l'effectif de l'entreprise';

Qu'en considération notamment de son âge, de sa formation, de ses capacités à retrouver un nouvel emploi, de son ancienneté, des circonstances du licenciement, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer la réparation qui doit lui être allouée à la salariée à la somme de 30 000 euros ;

Attendu que l'intéressée est également fondée à obtenir paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents, non contestés dans leur montant même subsidiairement, à hauteur de 4 672,80 euros et de 467,28 euros ;

Attendu pour ce qui concerne la demande en paiement d'un complément d'indemnités journalières restant dû selon la salariée pour 85,72 euros, qu'il résulte du tableau produit par la SELARL Nahavandy récapitulant pour la période d'arrêt de travail de mars 2016 à octobre 2017 les indemnités reçues par la salariée de la CPAM et l'organisme de prévoyance et en considération du maintien de salaire à 100% un reliquat dû par cette SELARL de 41,03 euros, dont le paiement a été justifié à l'occasion de la rupture comme figurant sur le reçu pour solde de tout compte du 11 décembre 2017 ;

Que la demande de Mme [K] sera en conséquence rejetée ;

Attendu que les SELARL [B], qui succombent, seront déboutées de leurs demandes reconventionnelles ;

Attendu que la société de fait Stef [B], qui succombe, sera condamnée à supporter les dépens comprenant les frais d'exécution par voie d'huissier par application des articles 10 et 12 de la loi du 8 mars 2001 et les frais de timbres fiscaux à hauteur de 35 euros et à verser à Mme [K] une indemnité procédurale pour l'ensemble de la procédure de 2 500 euros ;

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'absence de transfert du contrat de travail de Mme [K] [K] aux SELARL [B], à la condamnation de la société de fait Stef [B] à la remise de bulletins de paie conformes à partir du mois de juillet 2015, au débouté de la demande de dommages-intérêts pour résistance abusive formée par Mme [K] et des demandes reconventionnelles de la société de fait et des SELARL [B] et à la charge des dépens ;

L'INFIRME pour le surplus et statuant à nouveau :

DÉCLARE recevables les nouvelles demandes de Mme [K] [K] ;

DIT le licenciement pour inaptitude physique de Mme [K] nul ;

En conséquence, condamne la société de fait Stef [B] à lui verser les sommes suivantes :

- dommages-intérêts pour harcèlement moral : 10 000 euros,

- dommages-intérêts pour licenciement nul : 30 000 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 4 672,80 euros,

- congés payés afférents : 467,28 euros ;

DÉBOUTE Mme [K] de sa demande de paiement d'un rappel de complément d'indemnités journalières ;

REJETTE toutes autres demandes ;

CONDAMNE la société de fait Stef [B] aux dépens d'appel comprenant les frais d'exécution par voie d'huissier par application des articles 10 et 12 de la loi du 8 mars 2001 et que les frais de timbres fiscaux à hauteur de 35 euros et à verser à Mme [K] 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/15869
Date de la décision : 06/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°16/15869 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-06;16.15869 ?
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