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05/02/2019 | FRANCE | N°17/06517

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 05 février 2019, 17/06517


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS











COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 6 - Chambre 11





ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2019





(n° , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06517 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3IFE





Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 13/11842








APPELANT





Monsieur Patrick X...


[...]





Représenté par Me Anne Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : L0047











INTIMEE





SAS HORIZON SOFTWARE


[...]





Représentée par Me Joao...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 05 FÉVRIER 2019

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/06517 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3IFE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Septembre 2016 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 13/11842

APPELANT

Monsieur Patrick X...

[...]

Représenté par Me Anne Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : L0047

INTIMEE

SAS HORIZON SOFTWARE

[...]

Représentée par Me Joao Z..., avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Décembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne HARTMANN, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme HARTMANN, présidente

M.BACONNIER, conseiller

M.MALINOSKY, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Caroline GAUTIER

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Anne HARTMANN, Présidente de chambre et par Nadia TRIKI, Greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PRETENTIONS

Suivant contrat à durée indéterminée du 9 février 2011, Monsieur Patrick X... a été engagé par la société Horizon Software en qualité de directeur commercial Europe/Middle East.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils.

Après convocation à un entretien préalable qui s'est tenu le 30 mai 2013, Monsieur Patrick X... a été licencié pour insuffisance professionnelle suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juin 2013.

Contestant le bienfondé de son licenciement , Monsieur Patrick X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 29 juillet 2013 d'une demande tendant à le voir jugé sans cause réelle et sérieuse et à obtenir les indemnités qui en découlent.

Par jugement rendu le 09 septembre 2016, en formation de départage le conseil de prud'hommes de Paris a statué comme suit:

-Déboute Monsieur Patrick X... de l'intégralité de ses demandes.

-Rejette la demande de la société Horizon Software au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

-Condamne Monsieur Patrick X... aux entiers dépens de l'instance.

Cette décision a été frappée d'appel par Monsieur X... le 27 avril 2017.

Par ordonnance rendue le 24 novembre 2017, confirmée en déféré, les conclusions de la société Horizon Software ont été déclarées irrecevables.

Selon des écritures déposées à la cour par voie électronique le 04 juillet 2017, Monsieur X... demande à la cour de:

-Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

-Dire et juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour insuffisance professionnelle de Monsieur X....

-Condamner la société Horizon Software au paiement des sommes suivantes:

-370 € à titre de rappel de rémunération variable sur 2012.

-37 € au titre des congés payés y afférents.

-59.060 € à titre de rappel de rémunération variable sur 2013.

-5.906 € au titre des congés payés y afférents.

-290.000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive.

-145.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral.

-3.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile (pour la première instance).

-3.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile (pour l'instance d'appel).

-Assortir les condamnations de l'intérêt légal.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 novembre 2018.

La Cour se réfère aux conclusions de l'appelant pour un plus ample exposé des faits, des moyens et de ses prétentions.

SUR CE, LA COUR:

Aux termes des dispositions de l'article 472, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime, régulière, recevable et bien fondée et, en cause d'appel, lorsque les conclusions de l'intimé ont été déclarées irrecevables, il doit examiner les mérites de l'appel au regard des motifs retenus par les premiers juges.

En outre, il est de droit que les pièces sont écartées des débats lorsque les conclusions au soutien desquelles elles sont communiquées sont déclarées irrecevables.

En conséquence, en l'espèce, les pièces de la société intimée sont écartées des débats.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est libellée en ces termes:

«Pour faire suite à notre entretien du 30 mai 2013 et après avoir écouté attentivement vos arguments, nous sommes au regret de vous confirmer votre licenciement pour insuffisance professionnelle.

Les motifs du licenciement sont ceux qui vous ont été exposés lors de l'entretien préalable:depuis votre arrivée dans la société en mars 2011, vous n'avez pas été à la hauteur du poste et de ses responsabilités. Vous ne maîtrisez pas nos produits, ni les besoins de nos clients, vous n'avez pas su organiser et motiver vos équipes et vous vous n'avez pas une compréhension suffisante de notre marché.

Jusqu'à fin 2010 les ventes de notre société se sont faites essentiellement par le réseau développé dans les années antérieures par notre Président. Après la crise de 2008 et 2009, nous devions élargir notre champ et avons décidé de vous recruter en mars 2011 pour prendre le poste de Directeur Commercial Europe, Middle-east. Vous aviez une longue expérience de vente de logiciels financiers sur cette région et vous vous êtes présenté comme un professionnel de haut rang, bénéficiant d'un important réseau, de solides connaissances techniques et fonctionnelles ainsi que d'une bonne connaissance des exigences de la fonction.

Nous vous avons sélectionné pour ce poste clé qui reçoit la rémunération la plus importante de la société et qui de ce fait implique des responsabilités non seulement de vente, mais de participation au développement stratégique de l'entreprise.

Dans les mois qui ont suivi nous avons constaté à plusieurs reprises votre méconnaissance de nos produits et par conséquent votre incapacité à les présenter à nos clients et prospects. Nous vous avons souvent invité à vous rapprocher des équipes produits pour vous former et depuis cette année nous avons expressément prévu la possibilité de consacrer une demi-journée par mois à votre formation. Mais même avec cette mesure, vous n'avez jamais pris l'initiative de vous former à nos produits.

Cette méconnaissance vous a amené à proposer aux clients des solutions inadéquates et a obligé les équipes produit à travailler dans l'urgence, ce qui a fortement dégradé la qualité du processus de livraison. De ce fait nous avons perdu depuis début 2012 plusieurs prospects importants.

A l'époque vous avez longuement débattu de ces échecs avec la Direction et vous étiez au courant de notre déception et de nos attentes pour que cela ne se reproduise plus. Au fil des discussions, il est apparu que vous prétendiez plus de responsabilité et de marge de manoeuvre pour réussir dans vos fonctions.

La Direction vous a donc attribué en juillet 2012 la responsabilité de l'équipe Clients Services chargé de l'analyse des besoins, de l'intégration du produit chez les clients et du support utilisateurs. Ceci allait vous permettre d'être le seul responsable de toute la chaîne en contact avec les clients.

Cette mesure, qui s'est accompagnée d'une augmentation de salaire de 30%, se voulait un facteur de motivation pour vous suite aux échecs de début d'année.

Mais vos erreurs de méthode et de jugement ont continué à contribuer à une dégradation importante du chiffre d'affaires de la société et à l'absence de nouveaux clients depuis votre arrivée.

Plusieurs réunions ont eu lieu au cours desquelles il vous a été demandé de redresser la barre, mais elles n'ont pas été suivies d'actions concrètes pouvant modifier la situation qui est aujourd'hui préoccupante.

En décembre 2012, vous avez signé un contrat avec la filiale d'une banque déjà notre cliente en Asie , qui voulait déployer notre solution dans la filiale aux Etats-Unis.

La mise en oeuvre de ce contrat a été difficile pour les mêmes raisons que les échecs précédents. Du fait de votre méconnaissance du métier de nos clients, de leurs besoins spécifiques et de nos produits, le projet d'intégration de ce client a pris du retard et a engendré des coûts exorbitants.

En 2012, afin d'assurer la survie de la société, nous avons été contraints de restructurer et réduire les équipes Clients Services. Ceci a entraîné du mécontentement auprès d'un nombre croissant de clients. Vous n'avez pas su travailler dans cette nouvelle organisation et demander à vos collaborateurs de créer des relations étroites avec les équipes produits. De ce fait, notre plus gros client envisage aujourd'hui de développer une solution concurrente à la nôtre, pour à terme nous remplacer.

Votre manque de leadership dans cette équipe a souvent amené les salariés à remonter leurs problèmes directement au Président sans passer par vous. Dans ces cas également vous n'avez pas su réagir promptement et de façon professionnelle telle que votre fonction et votre niveau le requièrent.

Après plus de deux ans dans l'entreprise, votre connaissance de nos produits reste toujours en dessous de ce qu'elle devrait être au vue de votre profil. Vous avez vous-même avoué ne pas être en mesure de présenter ou faire une démo de nos produits, ni de pouvoir répondre aux questions pointues des traders. Vous prétendez pourtant avoir une longue expérience dans le domaine de l'édition de logiciels et vous devriez savoir combien la maitrise du produit est importante pour pouvoir l'expliquer au client et le convaincre de sa valeur ajoutée.

Nous regrettons également que votre connaissance superficielle de nos produits et des métiers de nos clients, vous rende incapable de fournir les éléments nous permettant de faire évoluer nos logiciels en ligne avec les demandes du marché. L'absence de remontée d'informations de votre part empêche de fait l'amélioration de nos produits face à la concurrence.

Lors des réunions hebdomadaires auxquelles vous participez avec les équipes produits, ainsi que lors du comité de direction mensuel, la Direction a toujours clairement indiqué les axes de développement stratégique de la société. Nous regrettons que vous n'ayez jamais retransmis ces informations à votre équipe commerciale qui de ce fait a reçu des informations contradictoires. Cette attitude n'a pas manqué d'entraîner d'importantes répercussions sur la motivation et l'engagement de vos collaborateurs commerciaux qui ont tous démissionné entre 2012 et 2013.

Au vu de toutes ces difficultés, nous vous avons demandé en avril 2013 de préparer un bilan de votre activité commerciale et surtout un plan d'action pour nous rassurer sur les démarches que vous alliez entreprendre pour relancer les ventes. Le document que vous nous avez préparé non seulement présentait plusieurs erreurs et imprécisions, mais surtout était largement insuffisant compte-tenu de l'absence de propositions concrètes visant à la signature de nouveaux clients. Ce plan est indigne d'un responsable de votre niveau.

Nous regrettons également votre manque de professionnalisme et de loyauté vis-à-vis de votre employeur. Nous pouvons évoquer à ce sujet un incident lors de la remise de la convocation à l'entretien préalable:dès le lendemain de la remise du courrier, vous vous êtes empressé de contacter un partenaire de la société avec lequel vous savez qu'une négociation délicate est en cours. Et non seulement vous les avez informé de votre départ (à ce moment-là pas encore confirmé), mais vous leur avez parlé d'autres salariés de la société en donnant à ce moment-là erronées. Cet incident n'a fait que confirmer que vous n'avez jamais pris la mesure des responsabilités de votre fonction de Directeur au sein de la société.

Nous avons attiré votre attention à plusieurs reprises sur ces carences, mais votre attitude n'a pas changé et votre seule réponse a été de reporter la faute sur d'autres.

Nous sommes contraints de conclure que vous n'avez ni les compétences, ni la volonté pour trouver des solutions. L'avenir de la société ne pouvant être compromis davantage nous nous voyons contraints de mettre fin à votre contrat de travail pour insuffisance professionnelle.

Votre contrat de travail prendra fin à l'issue d'un préavis de trois mois à compter de la présentation du présent courrier. Nous vous informons cependant que nous avons décidé de vous dispenser de ce préavis. En conséquence, vos fonctions prennent fin dès réception de la présente lettre et vous recevrez dans les jours qui viennent l'indemnité compensatrice de préavis (pour les trois mois) ainsi que votre solde de tout compte.(...)» »

La lettre de licenciement reproche donc en substance à Monsieur X...:

-une méconnaissance des produits de la société entrainant une inadéquation des solutions proposées aux clients,

-un manque de leadership de son équipe,

-un plan d'action commercial en 2013 insuffisant, indigne d'un responsable de ce niveau.

Selon l'article L1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles; si un doute persiste, il profite au salarié.

Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Ceux-ci seront examinés, comme il a été rappelé plus haut, compte-tenu de l'irrecevabilité des conclusions de l'employeur, au regard tant de la lettre de licenciement que des motifs retenus par les premiers juges.

Pour infirmation du jugement entrepris, Monsieur X... fait tout d'abord valoir que son licenciement serait irrégulier en la forme pour avoir été décidé avant même l'organisation de l'entretien préalable puisque le jour de la rédaction de sa lettre de licenciement son successeur a été engagé, que dès le début du mois de mai 2013 il a été évincé d'un déplacement professionnel au Brésil et le 23 mai 2013 de mettre en copie au PDG tous ses échanges de courriels.

Sur le fond, il fait observer que les motifs de la lettre de licenciement sont imprécis, que c'est à tort que l'employeur lui a reproché d'avoir concentré son action de prospection sur les petites structures.

Il réplique d'abord qu'il a bénéficié de deux revalorisations de sa rémunération ce qui démontre son implication et qu'il n'a jamais fait l'objet de rappel à l'ordre. Il précise ensuite qu'il a été chargé de représenter l'entreprise à la place du PDG. Il rappelle en outre qu'il travaille depuis 15 ans sur les produits et le segment de la société Horizon Software raison pour laquelle il a été débauché par cette dernière. Il ajoute qu'il n'était pas de sa mission d'effectuer des «demo» des produits vendus puisque celles-ci étaient assurées par des techniciens avant-vente qui au besoin accompagnaient les commerciaux. Il conteste avoir bénéficié d'une quelconque formation.

Le conseil de prud'hommes a notamment relevé qu' «au vu des différentes pièces versées aux débats par les parties , outre le fait qu'il résulte des nombreux échanges de courriels ainsi que des attestations établies tant par les salariés de la société Horizon Software que par d'autres personnes ayant été amenées à collaborer avec Monsieur Patrick X... dans l'exercice de ses fonctions, que ce dernier rencontrait des difficultés dans le cadre de ses relations avec les clients s'agissant notamment des réponses apportées aux besoins et problématiques spécifiques de ces derniers en lien avec un déficit de connaissance des aspects fonctionnels des logiciels financiers proposés, ces difficultés ayant notamment entraîné la perte d'un certain nombre de clients, force est également de relever au vu des différentes pièces comptables et financières versées aux débats que la situation commerciale n'a cessé de se dégrader au cours de la relation de travail, le chiffre d'affaires généré sur sa zone d'attribution ayant connu une baisse constante notamment liée au très faible niveau des nouveaux contrats signés dans le cadre de la stratégie commerciale orientée vers des organisations et sociétés plus petites et spécialisées, lesquelles n'ont finalement pas donné suite à l'issue de la période d'essai des produits, sans que le salarié n'ait réussi à gérer les implications organisationnelles et techniques engendrées par cette nouvelle stratégie, étant enfin relevé que les objectifs annuels fixés dans le cadre des plans de commissionnement n'ont jamais été atteints.»

*

L'irrégularité de la procédure de licenciement invoquée par Monsieur X... n'est pas établie. Il affirme sans le prouver que son départ aurait été annoncé début mai 2013, par sa hiérarchie à l'occasion d'un déplacement à Londres. Il ne peut en outre être déduit du remplacement rapide de l'intéressé (dont il n'est au demeurant pas justifié) ou du seul fait qu'il ait été écarté d'un voyage au Brésil au début du mois de mai 2013 que la décision de le licencier était déjà prise avant même la tenue de l'entretien préalable.

*

L'insuffisance professionnelle, qui se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié d'exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, constitue une cause légitime de licenciement.

Si l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal, l'insuffisance alléguée doit toutefois reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur.

Pour justifier le licenciement, les griefs formulés doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l'entreprise ou être préjudiciable aux intérêts de celle-ci.

En l'espèce, le conseil de prud'hommes s'appuie sur des courriels et des attestations, écartés à hauteur de cour, ces dernières établies tant par les salariés de la société Horizon Software que par d'autres personnes rapportant que Monsieur Patrick X... rencontrait des difficultés dans le cadre de ses relations avec les clients s'agissant notamment des réponses apportées aux besoins et problématiques spécifiques de ces derniers en lien avec un déficit de connaissance des aspects fonctionnels des logiciels financiers proposés.

Il n'est ainsi pas possible à la cour d'apprécier, sur la base d'éléments concrets et vérifiables, que les manquements invoqués dans la lettre de licenciement de méconnaissance des produits par Monsieur X... était réelle, d'autant que celui-ci fait observer avec pertinence qu'il n'a pas fait l'objet de rappel à l'ordre sur ce point, qu'il a au contraire bénéficié de deux augmentations de sa rémunération fixe pendant sa période d'embauche, qu'il démontre travailler dans le domaine depuis plus de 15 années et que la perte de certains clients et le fait que certains petites entreprises (dont la cible n'a pas été contestée) n'ont pas donné suite à la période d'essai des produits sont liées aux difficultés posées par les produits eux-mêmes (notamment de configuration).

Le conseil de prud'hommes se fonde également sur des pièces comptables et financières établissant que la situation commerciale n'aurait cessé de se dégrader, le chiffre d'affaire sur la zone d'attribution ayant connu une baisse constante, or la cour ne dispose que du Bilan intitulé Sales team & clients services EMAE/Americas mars 2011-avril 2013 élaboré en juin 2013 certes par Monsieur X... et produit en annexe 34, dont il ressort que si l'année 2012 a connu la perte de certains clients et une baisse des «consultings» liée à un contexte de «trading» difficile, l'année 2011 avait connu une belle progression du chiffre d'affaire et que l'année 2013 présentait plusieurs opportunités de vente en Europe et au Brésil à concrétiser peut-être juin 2013.

Le conseil de prud'hommes retient pour finir que «les insuffisances répétées du salarié ayant perturbé le bon fonctionnement de l'entreprise, ce malgré le temps et les moyens nécessaires alloués par l'entreprise» alors que Monsieur X... produit des attestations de collaborateurs qui se sont félicités du travail accompli sous ses ordres et de son management (Monsieur A... pièce 12, Monsieur B... pièce 14 et Monsieur C... pièce 16)et qu'il conteste par ailleurs avoir pu bénéficier d'une quelconque formation.

Le caractère réel et sérieux des insuffisances professionnelles alléguées, n'est donc pas établi et la décision déférée sera réformée de ce chef.

Même s'il est justifié au dossier que les tractations relatives aux plans de commissionnement ont pendant toute la durée de la relation contractuelle posé débats et que pour l'exercice 2012, il a été évoqué la possibilité pour Monsieur X... d'y renoncer ce à quoi il s'est refusé, rien ne permet au dossier de retenir que le licenciement tendait à se défaire d'un salarié devenu trop coûteux.

Monsieur X... qui est en droit de prétendre à la réparation du préjudice subi, sollicite la somme de 290.000 € (correspondant selon lui à 12 mois de salaire) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En réalité, le salaire moyen de référence de Monsieur X..., au vu des fiches de salaire des 12 derniers mois travaillés, doit être fixé à un montant de 19.065 €.

Il indique avoir été prise en charge par Pôle Emploi pendant 9 mois après la rupture de son contrat.

Il verse aux débats une attestation Pôle Emploi (pièce 65), datée du 16 octobre 2014, faisant apparaître qu'il a perçu l'allocation de retour à l'emploi du 2 décembre 2013 jusqu'au 30 septembre 2014.Il précise avoir retrouvé un emploi en mai 2015.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Monsieur X... de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour est en mesure de lui allouer la somme de 115.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L.1235-3 du code du travail.

En application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail, il sera ordonné le remboursement par la société Horizon Software à Pôle Emploi des indemnités de chômage éventuellement versées à Monsieur X... depuis son licenciement dans la limite de 2 mois d'indemnités.

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral distinct

Pour infirmation du jugement qui l'a débouté de ce chef de prétention, Monsieur X... réclame une somme de 145.000 € à titre de réparation du préjudice moral qu'il a subi du fait qu'il a été mis en quarantaine avant son licenciement, dont la procédure a ensuite été menée sans ménagement ni respect. Il dénonce à ce titre essentiellement que son remplaçant a été engagé le jour de la rédaction de sa lettre de licenciement, lequel licenciement avait déjà été annoncé lors d'un déplacement du directeur général à Londres avant qu'il ne soit prononcé. Il déplore avoir du restituer le matériel en sa possession alors qu'il était en période de préavis.

Outre le fait que Monsieur X... ne rapporte pas la preuve de la précipitation ayant entouré la décision de son licenciement voire celle de son annonce, et que la demande de restitution du matériel en sa possession pendant le préavis dont il avait été dispensé n'était pas en soi inappropriée, la Cour retient que comme les premiers juges qu'aucune attitude vexatoire ne peut être reprochée à l'employeur et que c'est à bon droit que Monsieur X... a été débouté de ce chef demande. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappels de commissions

Pour infirmation du jugement déféré qui l'a débouté de ce chef de prétentions, Monsieur X... réclame un rappel de commission au titre de l'année 2012 à hauteur de 1.970 € ainsi qu'un rappel de commission pour l'année 2013 à hauteur de 59.060 €.

Le conseil de prud'hommes a rejeté cette demande au motif que le solde réclamé pour l'année 2012 correspondait à une facture réglée postérieurement au licenciement et que s'agissant des commissions sur l'année 2013 «au vu du plan de commissionnement et de l'atteinte partielle de ses objectifs par le demandeur, il apparaît que compte-tenu de la somme déjà perçue lors de son départ dans le cadre de l'établissement du solde de tout compte, Monsieur X... a été réglé de l'ensemble des sommes auxquelles il pouvait prétendre.».

A l'appui de ses demandes, Monsieur X... se borne à se rapporter à des tableaux versés en annexes 30-1 à 30-23 dont certaines sont illisibles (30-7 et 30-8) et dépourvues d'explications.

Ainsi pour le rappel de commissions pour 2012, il renvoie à l'annexe 30-12 sur les modalités de calcul sans expliciter le montant réclamé par rapport au plan de commissionnement pour 2012 figurant en annexe 30-23. De la même façon, pour réclamer un solde de commissions pour l'année 2013 d'un montant de 59.060€(alors que les sommes mises en compte présentent un total de 56.060€), il se rapporte dans ses écritures (page 53) au tableau figurant en pièce 30-21, lequel rapproché du plan de commission pour 2012 (en l'absence d'un tel plan pour 2013) ne présente aucune rubrique commune étant observé en outre qu'il ne déduit pas la somme de 28.848,18€ qu'il a perçue à ce titre dans le cadre du solde de tout compte et qu'il évoque lui-même dans ses conclusions.

Il résulte de ce qui précède que la cour n'est pas en mesure d'apprécier les mérites de la demande de rappels de commissions présentée par l'appelant, qui a été à juste titre débouté de ses prétentions de ce chef. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur le surplus

Partie perdante la société Horizons Software est condamnée aux dépens d'instance et d'appel, le jugement déféré étant infirmé sur ce point ainsi que sur les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à Monsieur X... une somme de 1.500€ au titre de la première instance et une somme de 2.000€ à hauteur d'appel au titre des frais irrépétibles exposés par lui et non compris dans les dépens par application de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

- ECARTE des débats les pièces de la SAS Horizon Software irrecevable à conclure.

-CONFIRME le jugement déféré en ce qui concerne le rejet des rappels de commissions pour 2012 et 2013 et le rejet des demandes d'indemnité pour préjudice moral distinct et l'INFIRME quant au surplus;

Et statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant:

-JUGE que le licenciement de Monsieur Patrick X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

-CONDAMNE la SAS Horizon Software à payer à Monsieur Patrick X... la somme de 115.000€ à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.

-ORDONNE le remboursement par la SAS Horizon Software à Pôle emploi des indemnités versées à Monsieur Patrick X... abusivement privé de son emploi dans la limite de 2 mois d'indemnités.

-CONDAMNE la SAS Horizon Software à payer à Monsieur Patrick X... la somme de 1.500€ au titre de la première instance et la somme de 2.000 € au titre de l'instance d'appel par application de l'article 700 du code de procédure civile.

-CONDAMNE la SAS Horizon Software aux entiers dépens d'instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 17/06517
Date de la décision : 05/02/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°17/06517 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-02-05;17.06517 ?
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