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25/01/2019 | FRANCE | N°19/00025

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 12, 25 janvier 2019, 19/00025


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 2 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 25 JANVIER 2019



(n° 24 , 4 pages)





N° du répertoire général : N° RG 19/00025 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7DI2



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 19/10



L

'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 24 Janvier 2019



Décision RÉPUTÉE CONTRADICTOIRE



COMPOSITION



Mme Clarisse GRILLON, Conseillère, agissant par délégati...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 25 JANVIER 2019

(n° 24 , 4 pages)

N° du répertoire général : N° RG 19/00025 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7DI2

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 Janvier 2019 -Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 19/10

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 24 Janvier 2019

Décision RÉPUTÉE CONTRADICTOIRE

COMPOSITION

Mme Clarisse GRILLON, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président,

assistée de Mme Patricia PUPIER, Greffière

et en présence de Mme Laure de Choiseul, avocate générale,

APPELANT

M. LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TGI DE FONTAINEBLEAU

demeurant [Adresse 1]

représenté par Mme Laure de Choiseul, avocate générale,

INTIMÉS

1° M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE NEMOURS,

demeurant [Adresse 2]

non comparant, non représenté

2° Mme [Q] [W] (personne faisant l'objet des soins)

née le [Date naissance 1] 1964 à [Localité 1]

demeurant [Adresse 3]

actuellement en fugue du centre hospitalier de [Localité 2]

non comparante en personne, représentée par Maître GONZALEZ Sophie, avocat au barreau de Paris, toque n° D1855

TIERS

Madame [D] [I] EPOUSE [N]

[Adresse 4]

non comparante, non représentée

Par décision du 17 mai 2018, le directeur du centre hospitalier de [Localité 2] a prononcé, sur le fondement des articles L.3212-1 et suivants du code de la santé publique, l'admission en soins psychiatriques de [Q] [W], à la demande de sa fille, [D] [I] épouse [N].

Depuis cette date, [Q] [W] a fait l'objet d'une hospitalisation complète au sein du centre hospitalier de [Localité 2], d'où elle a été déclarée en fugue le 20 juillet 2018.

Par requête du 2 janvier 2019, le directeur du centre hospitalier a régulièrement saisi le juge des libertés et de la détention de Fontainebleau aux fins de poursuite de l'hospitalisation complète de [Q] [W] au-delà de six mois.

Par ordonnance du 16 janvier 2019, le juge des libertés et de la détention de Fontainebleau a ordonné la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de [Q] [W], considérant notamment 'qu'il ne peut être établi que sont réunies les deux conditions du consentement impossible et surtout de la constatation médicale actualisée d'un état mental imposant des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante, justifiant une hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l'article L.3222-1 du code de la santé publique'.

Par courriel du 17 janvier 2019, réceptionné et enregistré par le greffe de la cour le même jour, le procureur de la République de Fontainebleau a régulièrement interjeté appel de cette ordonnance.

Les parties ainsi que le directeur de l'établissement ont été convoqués à l'audience du 24 janvier 2019.

L'audience s'est tenue, au siège de la juridiction, en audience publique.

Madame l'avocate générale poursuit l'infirmation de la décision et le maintien de la mesure d'hospitalisation complète. Au soutien de son appel, elle fait valoir que la fugue de [Q] [W] a placé le psychiatre dans l'impossibilité de décrire les troubles persistants et qu'il convient dès lors de se référer aux certificats médicaux précédant la fugue, décrivant précisément les troubles psychiatriques justifiant le maintien de la mesure.

Le conseil représentant [Q] [W] sollicite la confirmation de l'ordonnance entreprise, en développant oralement ses conclusions écrites, par lesquelles il considère, d'une part que l'hospitalisation complète est irrégulière en l'absence d'avis médical produit 48h avant l'audience, d'autre part qu'elle est privée de base légale en l'absence d'information actualisée concernant l'état de santé clinique et les éventuels troubles du comportements de l'intéressée.

MOTIFS

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure

N'ayant pas été soulevé in limine litis, ce moyen sera déclaré irrecevable.

Sur le fond

Aux termes de l'article L.3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L.3222-1 du même code que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L.3211-2-1.

Aux termes de l'article L.3211-12-1 du même code, l'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement, n'ait statué sur cette mesure avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision par laquelle le directeur de l'établissement a prononcé son admission ou modifié la forme de la prise en charge du patient en procédant à son hospitalisation complète ; que cette saisine est accompagnée d'un avis motivé rendu par le psychiatre de l'établissement.

[Q] [W] a été hospitalisée à la demande de sa fille le 17 mai 2018 et a été déclarée en fugue de l'établissement le 20 juillet 2018. Elle est injoignable à ce jour.

Il résulte des certificats médicaux joints à la procédure, établis par les Docteurs [A] et [H], que [Q] [W] présentait au moment de son hospitalisation des troubles du comportement à type d'envahissement psychotique massif, avec trouble de la conscience, anosognosie, survenant quelque temps à peine après sa sortie de l'hôpital et nécessitant des soins immédiats.

Par ordonnances en date des 20 juin 2018 et 17 juillet 2018, le juge des libertés et de la détention a rejeté les demandes de mainlevée de la mesure sollicitée par [Q] [W], au constat notamment d' avis médicaux témoignant d'une persistance des troubles avec des idées délirantes enkystées, et d'une absence d'adhésion aux soins, [Q] [W] devant s'inscrire dans la poursuite de soins somatiques nécessitant une intervention chirurgicale.

Le certificat médical du Docteur [A], établi le 18 juillet 2018 soit deux jours avant la fugue de [Q] [W], fait état d'un état clinique stationnaire avec un déni des troubles.

Au vu des derniers certificats médicaux en date des 13 et 18 juillet 2018, [Q] [W] a démontré, par sa fugue, qu'elle n'a nullement conscience de la gravité de ses troubles et de leur dangerosité pour elle-même et pour autrui ; qu'elle est en outre dans une totale opposition à la poursuite des soins nécessités par son état, malgré des idées délirantes définies comme étant chroniques. Ainsi, le 24 juillet 2018, elle a interjeté appel de la décision rendue le 17 juillet 2018 par le juge des libertés et de la détention, ayant rejeté sa demande de mainlevée de la mesure. Elle justifiait alors sa fugue par des difficultés administratives (ayant été radiée de Pôle Emploi, elle souhaitait régulariser sa situation et reprendre un travail), et précisait qu'elle se sentait bien et prenait son traitement.

Par ordonnance du 27 juillet 2018, la présente cour a maintenu [Q] [W] sous hospitalisation complète, en se fondant notamment sur un certificat médical de situation du 23 juillet 2018 rappelant l'absence totale de conscience de la patiente de la gravité de sa pathologie et la nécessite de poursuivre les soins.

Dans son avis motivé du 2 janvier 2019, le Docteur [B] rappelle l'absence d'information actualisée concernant l'état de santé clinique et les éventuels troubles du comportement de [Q] [W]. Dans son avis motivé du 16 janvier 2019, le Docteur [A] confirme la nécessité de la poursuite des soins en hospitalisation complète.

[Q] [W] a fugué de l'hôpital alors qu'elle était dans le déni total de ses troubles et s'opposait à la poursuite des soins, sans avoir conscience de la gravité de sa pathologie. Aucun nouvel élément clinique ne permet d'affirmer que son état se serait amélioré et qu'elle ne présenterait plus les troubles ayant justifié son admission en soins psychiatriques, puis le maintien de la mesure. La fugue de l'intéressée ne peut à elle seule établir que les conditions de son hospitalisation sans consentement ne sont plus remplies, mais illustre au contraire le refus des soins et l'absence totale de conscience de son état. Il ne saurait donc être reproché au(x) psychiatre(s) ayant établi les certificats médicaux postérieurs de n'avoir pas décrit les troubles affectant le comportement de l'intéressée depuis sa fugue.

Les éléments ainsi réunis justifiant la poursuite de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte, l'ordonnance entreprise sera infirmée et il sera ordonné le maintien de la mesure en soins psychiatriques sous le régime de l'hospitalisation complète concernant [Q] [W].

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par décision réputée contradictoire,

Rejette le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure,

Infirme l'ordonnance déférée,

Statuant à nouveau,

Ordonne le maintien en hospitalisation complète de [Q] [W],

Laisse les dépens à la charge de l'État.

Ordonnance rendue le 25 JANVIER 2019 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA MAGISTRATE DÉLÉGUÉE

Une copie certifiée conforme notifiée le 25 janvier 2019 par fax à :

X patient à l'hôpital

ou/et X par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

X tiers par LRAR

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris

X parquet près le TGI de Fontainebleau


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 19/00025
Date de la décision : 25/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris D3, arrêt n°19/00025 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-25;19.00025 ?
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