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10/01/2019 | FRANCE | N°15/08864

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 10 janvier 2019, 15/08864


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRÊT DU 10 Janvier 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/08864 - N° Portalis 35L7-V-B67-BXCB6



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/13539





APPELANT

Monsieur X... B... Y... Y...

[...]

représenté par Me Daniel Z..., avocat au ba

rreau de PARIS, toque : B1024





INTIMÉES

SARL NOBEL SERVICE AMBULANCE

[...]

N° SIRET : 500 777 305 00029

représentée par Me Stéphane A..., avocat au barreau de PARIS, to...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRÊT DU 10 Janvier 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/08864 - N° Portalis 35L7-V-B67-BXCB6

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/13539

APPELANT

Monsieur X... B... Y... Y...

[...]

représenté par Me Daniel Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : B1024

INTIMÉES

SARL NOBEL SERVICE AMBULANCE

[...]

N° SIRET : 500 777 305 00029

représentée par Me Stéphane A..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1878

SARL AMBULANCE NOBEL

[...]

N° SIRET : 484 027 438 00015

représentée par Me Stéphane A..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1878

SARL AMBULANCES ISAC

[...]

N° SIRET : 789 996 600 00027

représentée par Me Stéphane A..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1878

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre

Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Conseiller

Madame Bérengère DOLBEAU, Conseiller

Greffier : Mme Anna TCHADJA-ADJE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

-mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, prorogé ce jour.

- signé par Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre et par Madame Anna TCHADJA-ADJE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE:

M X... B... Y... prétend avoir été engagé oralement par la société Nobel Services Ambulance à compter du mois de mars 2012 en qualité de Responsable du Personnel / Responsable des opérations.

A compter de décembre 2012, M B... Y... a été rémunéré par les sociétés Nobel Service Ambulance et la société Ambulances Nobel en qualité d'auxiliaire ambulancier en contrepartie d'un temps de travail de 75h78 pour chaque entreprise., puis d'un temps complet par la société Nobel Service Ambulance.

La convention collective applicable est celle des entreprises de transport routier et activités auxiliaires.

Par lettre recommandée du 29 mai 2013, M. B... Y... a été convoqué par la société Nobel Service Ambulance à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 12 juin 2013, accompagné mis à pied à titre conservatoire, avant d'être licencié pour faute grave par courrier recommandé du 18 juin 2013.

M. B... Y... a saisi le 3 septembre 2013 le conseil de prud'hommes de Paris à l'encontre des sociétés Nobel Service Ambulance , Ambulances Nobel et Ambulances Isac afin d'obtenir leur condamnation solidaire à lui verser diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 14 septembre 2015 par M. B... Y... contre le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 16 décembre 2014, notifié le 10 septembre 2015, qui s'est déclaré compétent, l'a débouté de ses demandes, a débouté les trois sociétés défenderesses de leur demande reconventionnelle et condamné M. B... Y... aux entiers dépens.

Aux termes de ses écritures développées oralement à l'audience, M B... Y... demande à la cour de :

-infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau

-condamner in solidum les trois sociétés au paiement de :

* 42.512,00 € à titre de rappel de salaires de mars à novembre 2012, outre les congés payés y afférents,

*38.008,32 € à titre de rappel de salaires de décembre 2012 à mai 2013, outre les congés payés y afférents,

* 73.415,20 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre les congés payés y afférents,

* 8.446,00 € à titre de rappel de salaires sur mise à pied conservatoire, outre les congés payés y afférents,

*22.524,00 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,

* 67.572,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

* 67.572,00 € à titre d'indemnité pour dissimulation partielle d'emploi salarié,

* 3.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner la remise sous astreinte des documents de fin de contrat rectifiés conformes

- dire que les sommes produiront Intérêts au taux légal capitalisés;

- condamner in solidum trois sociétés aux dépens.

S'agissant de l'existence d'une relation de travail de mars à novembre 2012, M B... Y... soutient qu'il a été embauché oralement en qualité de responsable du personnel / responsable des opérations à compter du mois de mars 2012, ce qui est confirmé par les diverses tâches qui lui ont été confiées durant cette période et corroboré par les attestations produites. Il ajoute que le gérant a tenté d'obtenir de faux témoignages des salariés et les a menacés.

Il fait valoir qu'il a ainsi été en charge par le gérant de la société Nobel Service Ambulance de l'évaluation du loyer commercial des locaux de l'entreprise et a été l'interlocuteur du conseil de la société, que cette dernière lors de l'entretien préalable a reconnu sa qualité de salarié. Il estime que le lien de subordination est établi par les attestations et le versement d'un salaire et de primes commerciales outre 12000€ en espèces, ce qui ne correspond pas au salaire d'un aide ambulancier. Il estime devoir percevoir un rappel de salaire sur la base d'un taux horaire de 41,76€.

En ce qui concerne la période de décembre 2012 à mai 2013, il fait valoir qu'une activité à temps partiel doit faire l'objet d'un contrat écrit portant répartition des jours de la semaine travaillés ou des semaines du mois, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, puisqu'il a seulement eu deux bulletins de salaire en décembre 2012 de la part de la société Nobel Service Ambulance pour 75h78 et de la société Ambulances Nobel pour la même durée de travail. Il soutient que la distinction entre les deux sociétés a été faite artificiellement par la société mère Nobel Service Ambulance , mais qu'il n'a eu que peu de contact avec la société Ambulances Nobel. Il en déduit que son salaire doit être décompté à temps plein à partir du même taux horaire que pour la période antérieure.

Il fait état par ailleurs de l'exécution de nombreuses heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées et qui sont étayées par les témoignages produits qui mettent en évidence l'exécution de 21 heures en moyenne par semaine.

S'agissant de la rupture du contrat de travail, il conteste l'existence d'une faute grave et rappelle qu'il n'était pas un simple aide ambulancier puisqu'il a perçu des primes commerciales en janvier, février et avril 2013.

Faute de bulletins de paie pour la période de mars 2012 à mai 2013, il soutient que l'intention de dissimuler son activité est parfaitement caractérisée et qu'il doit percevoir l'indemnisation égale à six mois de salaire à ce titre.

Aux vu de ses écritures développées oralement à l'audience, les sociétés Nobel Services Ambulance, Ambulances Nobel et Ambulance Isac demandent à la cour de

In limine litis,

* Se déclarer incompétente pour connaître du présent litige ;

En conséquence, à titre principal,

* Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il s'est déclaré compétent pour statuer sur les demandes de M. B... Y...;

A titre subsidiaire,

* Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause,

* Condamner M. B... Y... à payer à chacune d'entre elles la somme de 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* Condamner M. B... Y... aux dépens.

Les sociétés intimées font valoir que les relations entre elles et M. B... Y... ne peuvent s'analyser en une relation de travail, faute de lien de subordination ; qu'en conséquence, le conseil de prud'hommes était incompétent pour en connaître. Elles indiquent que M. B... Y... était en réalité dirigeant de fait, disposant des plus larges pouvoirs dans la gestion de la société, comme le montrent diverses attestations produites aux débats.

Elles relèvent que les seuls éléments qui sont produits par M. B... Y... relèvent d'une gestion et d'une administration de la société, exclusives de toute activité salariale ; que M. B... Y... a intégré à l'époque le groupe NOBEL en qualité d'investisseur et non de salarié, qu'au final il n'a pas apporté de capitaux dans la société.

Elles ajoutent que M B... Y... ne peut prétendre au paiement d'un rappel de salaire pour la période de décembre 2012 à mai 2013, sur la base d'un salaire au taux horaire de 41,76€ brut, alors qu'aucun salarié de la société fût-il directeur administratif, ne perçoit un salaire aussi élevé de 6.334,72 € par mois ; que ce taux horaire ne correspond à rien alors que le taux horaire d'un auxiliaire ambulancier est de 9,43 € et que ses salaires, calculés sur cette base, lui ont été intégralement payés.

En ce qui concerne les heures supplémentaires réclamées, les sociétés rétorquent que B... Y... n'exerçait pas une véritable activité opérationnelle au sein de la société du fait de sa qualité d'investisseur, qui lui permettait de se présenter dans les locaux en dehors de toute demande par le gérant, le responsable administratif ou le régulateur; qu'en outre il ne pouvait travailler pour les trois sociétés en même temps.

A titre subsidiaire, les sociétés intimées font valoir qu'ayant simplement à assurer des surcharges éventuelles de transports, M B... Y... s'est cru autorisé le 21 mai 2013 à imposer sa présence dans une ambulance, à la place du salarié programmé, ce qui était de nature à nuire à l'organisation de la société et justifie le licenciement pour faute grave. Elles ajoutent qu'en raison de son ancienneté, son indemnisation ne pourrait être effectuée qu'en fonction du préjudice subi lequel n'est pas démontré.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux écritures développées à l'audience.

MOTIFS :

- Sur la compétence de la juridiction prud'homale:

En application de l'article L1411 du code du travail, la juridiction prud'homale est compétente pour régler les différends qui peuvent s'élever à l'occasion d'un contrat de travail entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient.

Dès lors qu'une partie invoque l'existence d'un contrat de travail en alléguant des relations lui permettant de revendiquer la qualité de salarié, ce qui est le cas en l'espèce au regard des attestations et bulletins de salaire produits aux débats par M B... Y..., la juridiction prud'homale est compétente pour statuer sur l'existence du contrat de travail. En conséquence, l'exception d'incompétence soulevée par les sociétés intimées ne peut être accueillies, ce d'autant qu'elle ne désigne pas la juridiction qu'elles estiment compétente. Le jugement sera confirmé sur ce point.

- Sur l'existence d'un contrat de travail entre M. B... JOUNEGHANIet les sociétés intimés :

Il est constant que l'existence d'une relation de travail salariée ne dépend, ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

L'existence d'un contrat de travail suppose que soit établie l'exécution d'une prestation donnant lieu à une rémunération dans le cadre d'un lien de subordination. Ce dernier qui constitue l'élément déterminant du contrat est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En l'espèce, M. B... Y... revendique l'existence d'un contrat de travail à compter du mois de mars 2012 jusqu'à la date de son licenciement en mai 2013.

Il convient de relever que M. B... Y... ne verse aucune pièce de nature à accréditer l'existence d'une relation contractuelle avec la société Ambulance Isac, pour l'ensemble de cette période, de sorte que l'ensemble de ses demandes à l'encontre de cette société doit être rejeté et le jugement confirmé sur ce point.

S'agissant de la période de mars 2012 à décembre 2012, M. B... Y..., qui prétend avoir été engagé comme directeur commercial, ne verse aux débats aucune pièce émanant des société Nobel Ambulance ou Nobel Service Ambulances. En revanche il verse aux débats plusieurs attestations entre autres de Mme C..., M D..., M E... , M F..., M G..., M H..., Mme I... qui témoignent de sa présence au sein de la société Nobel Service Ambulance à compter du mois de mars 2012. Toutefois ses fonctions ne sont pas clairement identifiées, puisque lui sont imputées des fonctions de directeur commercial, de directeur du personnel ou de directeur des opérations, alors qu'il n'est pas discuté qu'il existe au sein de la société qui emploie seulement 27 salariés, un directeur d'exploitation M J.... Par ailleurs, M E... indique que M B... Y... avait toute autorité en cas d'absences du gérant, tandis que Mme K... et M L... précisent que M B... Y... leur a été présenté en qualité d'associé du gérant.

Au vu du caractère imprécis et contradictoire de ces attestations, de l'absence d'éléments concrets caractérisant l'exercice des fonctions qu'il invoque, M B... Y... manque à démontrer l'exécution de fonctions salariées sous la subordination des sociétés intimées, alors que ces dernières produisent une attestation de la responsable de la société La Licorne en contact avec l'appelant dans le cadre d'une recherche immobilière en septembre 2012, qui précise que celui-ci s'était présenté en tant que gérant et 'décisionnaire' de la société Nobel Ambulance. En outre M M... le régulateur-gestionnaire des plannings, comme M J... responsable d'exploitation de la société Nobel Service Ambulance attestent que M B... Y... n'était pas présent dans les effectifs de cette société avant décembre 2012, que celui-ci leur avait été présenté comme un futur investisseur, ne disposant d'aucune formation en tant qu'ambulancier. En conséquence, M. B... Y... doit être débouté de sa demande de voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail pour cette période. Le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant de la période de décembre 2012 à mai 2013, M B... Y... verse aux débats un bulletin de salaire pour le seul mois de décembre 2012 émanant de la société Ambulances Nobel, relatif à un emploi d'auxiliaire ambulancier d'une durée de 75h78, au taux horaire de 34,54€. Il produit un bulletin de paie émanant de la société Nobel Ambulance Service, pour le même emploi et une durée de travail identique au taux horaire de 36,38€ pour le mois de décembre 2012, ainsi que des bulletins de paie postérieurs de cette même société pour un emploi à temps plein d'auxiliaire ambulancier au taux horaire de 9,43€, le salaire étant majoré d'une prime commerciale. Il justifie également d'une déclaration d'embauche en contrat à durée indéterminée à temps partiel du 14 novembre 2012 de la société Nobel Service Ambulance ainsi que de relevés de tournées d'ambulance sur lesquels il apparaît comme membre de l'équipage.

Ces éléments créent une apparence de contrat de travail à l'égard des deux sociétés. Toutefois M. B... Y... admet lui-même dans ses écritures (page 8) qu'il n'y avait aucun contrat à temps partiel avec la société Ambulance Nobel. Il appartient en conséquence à la société Nobel Service Ambulance de rapporter la preuve de l'absence de lien de subordination de M. B... Y... à leur égard.

Or, sur ce point, elle se prévaut uniquement d'attestations rappelant la qualité de futur investisseur de M. B... Y... dans la société, ce qui en soit ne suffit pas à exclure l'existence d'un contrat de travail, ce d'autant que la société Nobel Service Ambulance ne justifie aucunement de ce que M. B... Y... détenait des pouvoirs de gestion et d'engagement de la société notamment sur un plan financier, relevant d'une gérance de fait, incompatibles avec une relation de travail salariée. Elle verse en effet uniquement une délégation en matière postale insuffisante pour démontrer une gestion de fait.

Si l' intimée prétend que l'émission de bulletins de paie était destinée à répondre aux exigences de la législation en matière de transport sanitaire, cette affirmation n'est de même corroborée par aucune pièce.

En outre, M M... comme M J... indiquent que M. B... Y... est entré en décembre 2012 dans l'effectif de la société en qualité d'auxiliaire ambulancier, fonction pour laquelle l'appelant avait reçu une formation en octobre 2012 et il est démontré par les tournées de transport produits qu'il était intégré dans les équipages.

En conséquence, l'existence d'un contrat de travail est établie entre l'appelant et la société Nobel Ambulance Service de décembre 2012 à la date du licenciement, en qualité d'auxiliaire ambulancier, M. B... Y... ne fournissant pas de justificatifs de prestations concrètes de nature à établir l'exercice effectif des fonctions de directeur commercial qu'il invoque. Le jugement sera réformé sur ce point.

- Sur la demande de rappels de salaire et d'heures supplémentaires:

*Pour la période de mars à novembre 2012:

A défaut de contrat de travail démontré pendant cette période, la demande de rappel de salaire et d'heures supplémentaires doit être rejetée. Le jugement sera confirmé.

*Pour la période de décembre 2012 à mai 2013:

M. B... Y... admettant ne pas avoir eu de contrat de travail à temps partiel avec la société Ambulance Nobel sa demande de rappel de salaire et d'heures supplémentaires contre cette société doit être rejetée.

L'appelant relève à juste titre que le contrat de travail à temps partiel, par application de l'article L 3123-14 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige doit être écrit et mentionner la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, sauf à faire présumer l'existence d'un contrat de travail à temps plein. En l'absence d'écrit et par suite de répartition d'horaire, le contrat de travail de M. B... Y... au sein de la société Nobel Service Ambulance est réputé à temps plein. L'employeur ne fournit pas d'éléments sur la réalité de son horaire et des jours de travail pour le mois de décembre 2012, un horaire de travail à temps plein doit lui être reconnu.

Les bulletins de salaire établis par la société Nobel Service Ambulance révèlent que M. B... Y... a été réglé sur la base d'un taux horaire de 36,38€ en décembre 2012, réduit à 9,43€ au mois de janvier à mai 2013, sans que l'employeur ne justifie du motif de cette différence, ni de l'acceptation du salarié, alléguant uniquement que le taux initial est très supérieur au minimum conventionnel ensuite appliqué, ce qui toutefois n'est pas prohibé. Dès lors, M. B... Y... est fondé à obtenir un rappel de salaire sur la base de 36,38€ de l'heure, ce qui représente pour la période en cause une somme de 24 485,14€ brut, outre 2448,51€ de congés payés afférents. Le jugement sera réformé en ce sens.

S'agissant de la demande au titre des heures supplémentaires, aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

En l'espèce, M. B... Y... ne produit aux débats aucun relevé précis de ses horaires de travail pendant cette période mais fonde sa demande sur des attestations, qui énoncent des horaires imprécis et contradictoires. Il s'en déduit que l'appelant ne justifie pas d'éléments de nature à étayer sa demande au delà des heures supplémentaires mentionnées sur les bulletins de paie et permettant à l'employeur de répondre. Sa demande sera en conséquence rejetée et le jugement confirmé.

-Sur le travail dissimulé :

En l'absence d'une relation de travail reconnue pour la période de mars à novembre 2012, d'heures supplémentaires impayées, la demande d'indemnité au titre d'un travail dissimulé ne peut être accueillie.

-Sur le bien fondé du licenciement:

M. B... Y... a été licencié pour faute grave le 18 juin 2013.

La faute grave , qui prive de salarié d'indemnités de préavis et de licenciement est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige et lie le juge, reproche à B... Y... le 21 mai 2013, alors qu'il n'était affecté à aucun équipage et sans instruction de la société d'avoir pris un véhicule destiné à M D... Jean-Christophe, lui interdisant de monter dans l'ambulance et prétextant que c'était à lui de la prendre. Elle lui fait également grief de ne pas avoir communiqué son adresse exacte afin de retarder la procédure à son encontre.

Si la société ne justifie pas du défaut de communication volontaire par M. B... Y... de son adresse qui diffère effectivement de celle mentionnée sur les bulletins de paie, afin que lui soit adressée sa mise à pied, le premier grief énoncé dans la lettre est en revanche caractérisé. En effet, M M... régulateur et chargé d'établir les plannings confirme que le salarié sur sa seule initiative et sans l'en avertir , a pris un véhicule destiné à un autre chauffeur et ainsi modifié l'équipage prévu. M. B... Y... qui ne discute pas qu'il n'était pas programmé pour conduire le véhicule en cause ne peut utilement invoquer l'attestation de M D... indiquant qu'il ne l'a pas forcé à descendre du véhicule, dès lors que celui-ci à l'instar de M N..., autre membre de l'équipage en cause, a indiqué avoir été manipulé par l'appelant et est revenu sur son attestation , confirmant que M. B... Y... lui avait interdit de monter dans l'ambulance et avait pris sa place.

Cette décision en l'absence de toute demande du régulateur, de toute surcharge de travail ou situation d'urgence, met en évidence une volonté de l'appelant de s'exempter du respect de l'organisation des transports mise en place par l'employeur et plus généralement un rejet manifeste des consignes données, que ne peut justifier sa qualité d'associé potentiel et qui ne permettait pas la poursuite de la relation de travail. En conséquence, le licenciement de M. B... Y... pour faute grave est justifié. Il sera débouté de ses demandes indemnitaires et de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire

La société Nobel Service Ambulance sera condamnée à remettre à M. B... Y... les bulletins de paie et des documents de fin de contrat rectifiés conformément à la présente décision.

L'équité commande que chaque partie conserve la charge de ses frais irrépétibles, les demandes à ce titre seront rejetées.

La société Nobel Service Ambulance sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour

Statuant publiquement, en dernier ressort, contradictoirement par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté M. B... Y... de sa demande de reconnaissance d'un contrat de travail avec la société Nobel Service Ambulance pour la période de décembre 2012 à mai 2013 et de la demande de rappel de salaire afférente à cette même période,

Statuant à nouveau sur ces deux seuls points,

Reconnaît l'existence d'un contrat de travail à temps plein en qualité d'auxiliaire ambulancier entre M. B... Y... et la société Nobel Service Ambulance à compter du 1er décembre 2012,

Condamne la société Nobel Service Ambulance à verser à M. B... Y... la somme de 24 485,14€ bruts de rappel de salaire, outre 2448,51€ de congés payés afférents,

Rappelle que les sommes de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation au bureau de conciliation,

Ordonne la remise par la société Nobel Service Ambulance de bulletins de paie et de documents de fin de contrat conformes à la présenté décision,

Déboute les parties de leurs demandes respectives de frais irrépétibles,

Condamne la société Nobel Service Ambulance aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 15/08864
Date de la décision : 10/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°15/08864 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-10;15.08864 ?
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