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09/01/2019 | FRANCE | N°16/15853

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 09 janvier 2019, 16/15853


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 09 Janvier 2019

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15853 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2ITL



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Novembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° F 13/16007





APPELANT

M. [Z] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date nais

sance 1] 1967 à [Localité 2]

représenté par Me Vianney FERAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1456





INTIMEE

SARL REPORTERS ECONOMIQUES ASSOCIES - REA

[Adresse 2]

[Localité 1...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 09 Janvier 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15853 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2ITL

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Novembre 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° F 13/16007

APPELANT

M. [Z] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1967 à [Localité 2]

représenté par Me Vianney FERAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1456

INTIMEE

SARL REPORTERS ECONOMIQUES ASSOCIES - REA

[Adresse 2]

[Localité 1]

N° SIRET : 322 19 0 9 500

représentée par Me Sophie BINDER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0449

PARTIE INTERVENANTE :

Syndicat UNION LOCALE CGT DU 11ÈME ARRONDISSEMENT

[Adresse 3]

[Localité 1]

non représenté

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 Octobre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Graziella HAUDUIN, Présidente

Madame Sandra ORUS, Présidente

Madame Séverine TECHER, Vice-Présidente Placée

qui en ont délibéré

Greffier : Fanny MARTIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Graziella HAUDUIN, Président et par Madame Amélie FERRARI, greffier placé à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu le jugement en date du 28 septembre 2016 par lequel le conseil de prud'hommes de [Localité 3], statuant dans le litige opposant M. [Z] [Z] à son employeur, la SARL R.E.A, a débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes en paiement de primes d'ancienneté, treizième mois, RTT, rappel de salaires et dommages-intérêts pour comportement fautif de l'employeur et discrimination syndicale et en contestation de deux avertissements et d'une mise à pied disciplinaire et l'a condamné aux dépens ;

Vu l'appel interjeté le 19 décembre 2016 par M. [Z] de cette décision qui lui a été notifiée le 28 novembre précédent ;

Vu l'ordonnance de fixation de calendrier du 22 mars 2017 et de clôture différée au 12 septembre 2018 ;

Vu le renvoi accordé à la demande des parties lors de l'audience du 10 octobre 2018 ;

Vu les conclusions des parties auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

Vu l'accord des parties sur la révocation de l'ordonnance de clôture du 12 septembre 2018, la révocation de l'ordonnance de clôture, et la clôture nouvellement fixée au 31 octobre 2018 ;

Aux termes de conclusions transmises le 26 octobre 2018 par voie électronique, le salarié appelant fait valoir que bien que relevant depuis le 1er octobre 1994 de la convention collective des journalistes, aucun contrat de travail écrit ne lui a été remis et ses bulletins de paie n'ont pas mentionné jusqu'en février 2011 son coefficient, que ces carences ont permis à son employeur de prétendre que ses primes d'ancienneté et de treizième mois étaient incluses dans son salaire de base et de lui appliquer le coefficient 110 pourtant inapplicable, s'oppose au moyen de prescription invoqué par la société intimée s'agissant des demandes salariales formées pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010 en considération de la saisine du conseil de prud'hommes le 5 novembre 2013, soutient que la convention collective des journalistes qui lui est applicable depuis le 1er octobre 1994 doit conduire à lui reconnaître le bénéfice d'une prime d'ancienneté à partir du 1er octobre 1999 de 5%, augmentée de 5% tous les cinq ans, qu'il n'a pas été rempli de ses droits à ce titre même quand cette prime est apparue sur les bulletins de paie en mars 2011, revendique aussi le rappel de treizième mois conventionnel qui est apparu sur le bulletin de paie de mars 2012 de manière aussi fictive que la prime d'ancienneté, fait valoir subsidiairement à sa demande en paiement de la prime d'ancienneté et du treizième mois que l'employeur ne pouvait unilatéralement baisser son salaire de base pour faire apparaître cette prime et treizième mois et donc est redevable du rappel de salaires correspondant outre les congés payés y afférents, conteste aussi la légitimité des avertissements et de la mise à pied disciplinaire dont il réclame l'annulation aux motifs que ces sanctions sont infondées et n'étaient pas prévues par un règlement intérieur communiqué à l'inspection du travail après avis des IRP et que ce règlement devait être mis en place au moins après les élections du 26 mai 2011, date à laquelle les effectifs ont atteint 20 salariés, demande en conséquence à la cour de dire la demande relative au rappel de primes pour la période du 1er décembre 2008 et le 1er décembre 2010 recevables et de condamner la société intimée à lui verser les sommes suivantes telles que figurant dans le dispositif de ses écritures :

- 5 000 euros : dommages-intérêts pour non-remise du contrat de travail et de bulletins de paie conformes,

- 38 733,13 euros et 3 873,31 euros : rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2018,

- 3 227,76 euros : treizième mois sur ce rappel,

ou subsidiairement,

- 29 093,31 euros et 2 909,33 euros : rappel de prime d'ancienneté et congés payés y afférents du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2018,

-2 424,44 euros : treizième mois sur ce rappel,

- 29 094,12 euros : rappel de prime de treizième mois du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2018,

subsidiairement,

- 68 080,12 euros et 6 808,02 euros : rappel de salaire de décembre 2008 à septembre 2018,

à lui remettre sous astreinte de 100 euros par jour passé un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir les bulletins de paie rectifiés pour chacun des mois entre décembre 2008 et février 2017, à annuler les trois sanctions disciplinaires des 11 et 28 janvier 2016 et du 19 février 2015, à condamner la société intimée à lui payer 593,78 euros et 59,38 euros de rappel de salaire et congés payés y afférents au titre de la mise à pied annulée, de la condamner aux entiers dépens, au paiement d'une indemnité de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'assortir les rappels de prime et de treizième mois "d'intérêts au taux légal à compter des mois au cours desquels ils auraient dû être payés" par l'employeur ;

Aux termes de conclusions transmises le 29 octobre 2018 par voie électronique, la SARL R.E.A invoque l'irrecevabilité pour cause de prescription des demandes de rappel de primes et de treizième mois pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010, fait valoir pour le surplus qu'à défaut d'arrêté d'extension les dispositions de la convention collective des journalistes relative à l'activité des agences photographiques (SAPHIR) ne sont pas applicables et que seules les dispositions relatives à l'activité de la presse d'information spécialisée ont été étendues, contestant avoir appliqué volontairement les dispositions non étendues revendiquées par le salarié, soutenant que le barème conventionnel appliqué est celui de la presse d'information spécialisée, que le salaire de l'appelant est composé du salaire de base, de la prime de treizième mois et le cas échant de la prime d'ancienneté, que les dispositions conventionnelles n'exigent pas le versement d'une prime d'ancienneté spécifique mais uniquement une revalorisation du salaire minimum en fonction de cette ancienneté, que M. [Z] a acquis le statut de journaliste professionnel le 5 mai 1999, que la modification postérieure de cette date par la commission de la carte d'identité des journalistes professionnels (CCIJP) n'aurait eu en tout état de cause aucune incidence sur la rémunération forfaitaire et que le salarié a perçu un salaire forfaitaire supérieur au minimum conventionnel augmenté de la prime d'ancienneté et a été ainsi rempli de ses droits, faisant valoir que le salarié a été aussi rempli de ses droits au titre du treizième mois réglé par douze mensualités tout d'abord incluses dans le salaire forfaitaire jusqu'en mars 2012 largement supérieur au minimum conventionnel, puis de manière séparée pour la période postérieure, subsidiairement soutenant que s'agissant de la période du 1er septembre 2008 au 1er décembre 2010 le salarié a été pareillement rempli de ses droits par la perception d'une rémunération composée du salaire de base incluant la prime d'ancienneté et du treizième mois et ainsi largement supérieure au minimum conventionnel, s'opposant également à la demande relative au point de départ des intérêts contraire à l'article L.1231-6 du code civil, à la demande subsidiaire en paiement de rappel de salaires au demeurant prescrite pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010 au motif que le salaire de base n'a pas été contrairement à ce que le salarié soutient réduit, soutenant que la mise à pied disciplinaire a été régulièrement notifiée, qu'elle n'employait pas à la date de cette sanction plus de 20 salariés en sorte qu'aucun règlement intérieur la prévoyant n'était obligatoire, que la mise à pied pouvait être prononcée dès lors que l'autorisation de licenciement avait été refusée et qu'elle était proportionnée à la gravité des faits reprochés, que de même les deux avertissements de janvier 2016 étaient également réguliers et fondés sur des faits fautifs établis, faisant valoir enfin que le salarié faute d'avoir été engagé initialement en qualité de journaliste ne peut se prévaloir de l'exigence de l'écrit exigé par l'article 20 de la convention collective, que les bulletins de salaire étaient conformes et qu'il ne justifie d'aucun préjudice, et subsidiairement que l'établissement de ces bulletins est sous-traité à un cabinet d'expertise comptable, demande à la cour de constater l'abandon par le salarié des demandes en paiement du rappel de salaire et des congés payés y afférents pour 5 171,11 euros et 571,11 euros, de rappel de RTT pour les années 2010/2013 pour 5 388,73 euros et 538,87 euros de congés payés et de 10 000 euros de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, de déclarer irrecevables pour cause de prescription les demandes de rappels de prime d'ancienneté, de treizième mois et de congés payés y afférents pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010, de débouter M. [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, en conséquence de confirmer le jugement entrepris et de condamner la partie appelante à lui verser 5 000 euros d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens ;

Vu l'échec de la tentative de médiation à la suite du point-information confié au médiateur lors de l'audience du 31 octobre 2018 ;

SUR CE, LA COUR :

Attendu que M. [Z] [Z], engagé par la société R.E.A (Reporters Économiques Associés), agence de presse photographique, à compter du 1er décembre 1989 en qualité d'éditeur stagiaire sans contrat écrit, employé ensuite comme rédacteur polyvalent à partir du 1er octobre 1994, a été élu délégué du personnel suppléant en juin 2011 et n'a pas été réélu aux élection suivantes en juin 2015 ; que M. [Z] a saisi le 5 novembre 2013 le conseil de prud'hommes de [Localité 3] de diverses demandes en paiement de rappels de prime d'ancienneté et de treizième mois ; que la société employeur a sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de le licencier qui lui a été refusée le 28 janvier 2015 ; que M. [Z] a été sanctionné le 19 février suivant d'une mise à pied disciplinaire de cinq jours, puis les 11 et 26 janviers 2016 pour deux autres comportements fautifs ;

Sur l'irrecevabilité des demandes pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010 :

Attendu qu'en application de l'article L.3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 14 juin 2013, l'action en paiement du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer et la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ; que pour les prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de cette loi, la durée totale de la prescription ne peut excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit cinq années ;

Qu'en l'espèce, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de [Localité 3] le 5 novembre 2013, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi de 14 juin 2013 ; qu'à la date de promulgation de cette loi, soit le 17 juin 2013, la prescription quinquennale sur la demande de rappel de prime et treizième mois formée du 1er décembre 2008 n'était pas acquise, en sorte que le nouveau délai de trois ans a commencé à courir, sans toutefois que la durée de la prescription puisse excéder la duré de cinq années prévue par la loi antérieure ; qu'il en résulte que l'action en paiement des primes, treizième mois et congés payés y afférents exigibles au 1er décembre 2008 engagée le 5 novembre 2013, soit moins de cinq années après, n'est pas prescrite et les demandes formées de ces différents chefs seront donc jugées recevables ;

Sur le bien-fondé de ces demandes :

Attendu qu'en application de l'article 23, en vigueur étendu, de la convention collective des journalistes, les barèmes minima des traitements se trouvent majorés d'une prime d'ancienneté calculée en fonction d'une part de l'ancienneté acquise dans la profession en qualité de journaliste professionnel et d'autre part de celle acquise dans l'entreprise en cette même qualité ; que M. [Z] a été titulaire d'une carte de journaliste tout d'abord comme stagiaire depuis le 5 février 1994, a été rédacteur polyvalent à partir du 1er octobre 1994, puis a été titularisé en qualité de journaliste professionnel à compter du 5 février 1996, comme le certifie le président de la CCIJP qui précise d'ailleurs que les informations données en 2011 à la société étaient erronées en raison d'une confusion commise par lui ; que si l'ancienneté à prendre en considération est celle incluant la période de stage à défaut de mention que seuls les journalistes titularisés pourront y prétendre et comme il ressort au demeurant des différents accords sur les salaires annexés à la convention précitée qui précisent tous "stage compris", aucune autre définition de la prime d'ancienneté ne permet de retenir que celle-ci doit être versée de manière différenciée ; qu'ainsi, il convient seulement de vérifier si la rémunération totale versée par l'employeur est au moins équivalente au barème minimum augmenté de la prime d'ancienneté égale pour M. [Z], dans les limites de sa revendication, à 5% (3+2) à compter du 1er octobre 1999, à 10% (6+4) à compter du 1er octobre 2004, à 15% (9+6) à compter du 1er octobre 2009, puis à 20% (11+9) à compter du 1er octobre 2014 ;

Qu'aussi, l'article 22, en vigueur étendu, de la convention collective stipule que les barèmes de salaire expriment des minima sans discrimination d'âge, de sexe ou de nationalité, qu'en raison de la disparité des catégories d'entreprises de presse, il est convenu que le salaire minimum national est fixé pour chaque forme de presse, que les grilles hiérarchiques correspondant aux qualifications professionnelles, par forme de presse, sont annexées à la présente convention et que le salaire correspondant à ces qualifications doit être majoré, s'il y a lieu, de la prime d'ancienneté ; que le choix de l'employeur de faire apparaître sur les bulletins de paie de M. [Z] l'emploi de rédacteur polyvalent, existant dans la grille de classification des agences de presses photographiques d'information et de reportage (SAPHIR) et non dans celle de la presse d'information spécialisée, démontre l'application volontaire de la première grille, comme le revendique le salarié, étant au surplus observé que le coefficient 110 qui apparaîtra encore plus tardivement sur les bulletins de paye, s'il ne correspond pas à celui attribué à l'emploi de rédacteur polyvalent, n'est pas davantage en rapport avec les emplois auxquels la classification annexée à l'accord de la presse d'information spécialisée, soit rédacteur graphiste, reporter, reporter dessinateur, reporteur photographe, rewriter ou encore secrétaire de rédaction ;

Qu'en considération des salaires minima prévus pour l'emploi de rédacteur polyvalent, soit 1 911,02 euros à compter du 1er septembre 2008, 1 939,68 euros à compter du 1er avril 2011, 1968,78 euros à compter du 1er janvier 2012, 1988,46 euros à compter du 1er juin 2012 et 1998,41 euros à compter du 1er janvier 2015, du montant de la prime d'ancienneté fixé à 5% (3+2) à compter du 1er octobre 1999, à 10% (6+4) à compter du 1er octobre 2004, à 15% (9+6) à compter du 1er octobre 2009, puis à 20% (11+9) à compter du 1er octobre 2014 et des sommes effectivement perçues par l'intéressé à partir du mois de décembre 2008, il convient de constater que ce dernier a perçu, par l'application de taux horaire successifs très supérieurs à ceux dont le salarié revendique l'application, un salaire de base largement plus élevé que le cumul du salaire minimum et de la prime d'ancienneté conventionnelle, y compris à partir du mois de mars 2011 où l'employeur a versé spécifiquement une prime d'ancienneté pour se conformer à la demande de l'inspection du travail du 19 février 2011 et ce même si celle-ci apparaît sur les bulletins de paie pour un montant inférieur à celui auquel le salarié pouvait prétendre ;

Qu'il s'en déduit que le salarié a été rempli de ses droits au titre de la prime d'ancienneté depuis le mois de décembre 2008 et ainsi le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande ;

Attendu en revanche que pour ce qui concerne le treizième mois prévu par l'article 25 de la convention collective, qui est égal à un mois du salaire de décembre et doit être versé en une seule fois, il est apparu sur le bulletin de salaire du mois de mars 2012 à hauteur de 209,09 euros ; qu'en l'absence de toute stipulation conventionnelle permettant l'inclusion du treizième mois dans le salaire de base et de tout élément établissant qu'avant le mois de mars 2012 le salarié avait été informé par son employeur que son salaire de base incluait non seulement la prime d'ancienneté, ce qu'il pouvait faire ainsi qu'il l'a été démontré ci-dessus, mais également le treizième mois et avait aussi donné son accord pour que le paiement du treizième mois soit fractionné et non versé en une seule fois, et alors que la comparaison entre le bulletin de paie de février 2012 et celui de mars suivant révèle que la "prime 13ème mois" est apparue de manière artificielle par suite de la diminution du taux horaire de 17,9222 euros à 16,543 euros, il convient de retenir, contrairement aux premiers juges, que M. [Z] n'a pas été rempli de ses droits au titre du treizième mois et de lui allouer en conséquence, par infirmation du jugement entrepris, la somme de 29 094,12 euros ;

Sur les sanctions :

Attendu qu'il ressort de l'application combinée des articles L.1311-2 et L.1321-1 du code du travail que dans les entreprises employant habituellement au moins 20 salariés, l'employeur a l'obligation d'établir un règlement intérieur et ne peut au surplus sanctionner un salarié, autrement que par le licenciement, que dans le cas où la sanction est prévue par le règlement intérieur ; que la circulaire ministérielle DRT 5-83 du 15 mars 1983 propose que le délai à retenir pour apprécier si le seuil d'effectif est atteint soit celui de six mois ;

Qu'en l'espèce, si les procès-verbaux des élections des délégués du personnel, membres titulaires et membres suppléants, du 26 mai 2011 versés au débat, font état de 20 électeurs inscrits, les procès-verbaux établis à l'occasion de ces mêmes élections les 5 juin et 19 juin 2015 mentionnent quant à eux 17 électeurs inscrits ; qu'il n'est pas démontré que l'effectif de l'entreprise est demeuré au moins pendant une durée de six mois égal ou supérieur à 20 salariés dans des conditions obligeant la société à établir un règlement intérieur ; que la mention sur les bulletins de salaire de cotisations au fonds national d'aide au logement (FNAL) 20 salariés et plus apparaissant au vu des bulletins de paie produits à compter du mois de décembre 2015 ne permet pas davantage d'établir que cet effectif avait été atteint depuis six mois ou au moins l'avait été à la date de la mise à pied du 19 février 2015 ou enfin à celles des avertissements des 11 et 26 janvier 2016 ;

Qu'en conséquence, les sanctions notifiées à M. [Z], soit le 19 février 2015 et les 11 et 26 janviers 2016, ne peuvent encourir l'annulation du fait de l'absence de règlement intérieur ;

Attendu qu'il convient de constater que le salarié se borne à critiquer le bien-fondé des trois sanctions ; que les faits sanctionnés par la mise à pied disciplinaire, soit de s'être emparé le 8 décembre 2014 d'un document confidentiel appartenant à la société constitué d'un courrier contenant des données personnelles sur des salariés de l'entreprise et classé par erreur dans un des registres dont il avait demandé la communication et d'avoir refusé de le restituer pour enfin le froisser et le jeter en direction de Mme [E], d'avoir dit à M. [Y] de la fermer et d'avoir fait preuve de violence physique et verbale envers plusieurs salariés (Mme [E], MM. [H], [G] et [J]), tous faits nécessitant l'intervention de la police, sont établis par les auditions concordantes effectuées par les services de police et/ou également les attestations de plusieurs salariés, Mme [X] épouse [E], directrice administrative, M. [Y], assistant de gestion, M. [J], photographe et délégué du personnel titulaire de M. [Z], Mme [W], rédactrice en chef-journaliste, Mme [T], journaliste, MM. [H], chargé de diffusion, [G], directeur commercial et Lertisseur, commercial et aussi par le courriel envoyé par Mme [N] responsable des relations publiques au sein de Chronopost le 16 décembre 2014 à M. [G] lui demandant des nouvelles à la suite de l'interruption de leur conversation téléphonique à cause de cris résonnant autour de lui ; que douze salariés, soit huit des salariés précités et quatre autres, MM. [O], [L] et [C] et Mme [F], ont signé une pétition demandant l'éviction de M. [Z], désigné notamment comme créateur d'un risque psycho social intolérable ; que l'incident du 8 décembre a d'ailleurs fait l'objet d'une question du délégué du personnel lors de la réunion du 19 décembre suivant, ce dernier faisant état de ce qu'il a recueilli les plaintes de plusieurs salariés souffrant de troubles du sommeil et de stress et de la demande de mise en place d'une plate forme de soutien ; que l'enquête RPS, diligentée en suite de l'alerte de M. [J], DP, avec intervention du médecin du travail, a révélé le soulagement de plusieurs salariés, MM. [Y] et [L], Mme [F] de ne plus être en présence de M. [Z] ; que toutes ces circonstances justifiaient la mise à pied ; que pour ce qui a trait aux avertissement des 11 et 26 janvier 2016, il est établi pour le premier que M. [Z], malgré la procédure applicable dans l'entreprise et le rappel qui lui en a été fait le 15 décembre par courriel, puis le 16 décembre 2015 par lettre recommandée avec accusé de réception, s'est abstenu d'entrer dans le logiciel kelio de contrôle et suivi des temps de travail ses absences des 22 et 23 décembre , et pour le second qu'il a lors d'une réunion du19 janvier 2016 eu un comportement inapproprié au regard des propos tenus envers la chef des informations, du ton employé et des critiques paralysant le déroulement de la réunion destinée à rappeler les instructions et procédures inhérentes à la qualité des photographies enregistrées dans la base de données de la société et partant accessibles aux clients, ce dont attestent de manière concordante tant M. [H], DP suppléant, que M. [V], directeur commercial ayant assisté à la réunion ;

Que le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la contestation élevée par M. [Z] sur la légitimité des trois sanctions précitées et les demandes indemnitaires subséquentes ;

Sur l'établissement d'un contrat de travail écrit et l'absence de mentions conformes sur les bulletins de salaire :

Attendu que la convention collective des journalistes du 1er novembre 1976, refondue le 27 octobre 1987 et étendue par arrêté du 2 février 1988 dans ses dispositions relatives à l'engagement prévoit dans son article 20 que chaque collaborateur devra recevoir au moment de son engagement une lettre stipulant en particulier son emploi, sa qualification professionnelle, la convention collective applicable, le barème de référence, la date de sa prise de fonctions, le montant de son salaire et le lieu d'exécution du contrat de travail et qu'un échange de lettres sera nécessaire chaque fois qu'interviendra une modification du contrat de travail ; que l'article 27 prévoit quant à lui les mentions devant figurer sur le bulletin de paie, notamment la ventilation du salaire (traitement de base correspondant à sa qualification, primes d'ancienneté, de langue, de nuit et compléments personnels de salaire) ainsi que la dénomination exacte de l'emploi conforme au barème en vigueur dans la catégorie à laquelle se rattache le titre de la publication, ou dans l'entreprise lorsque celui-ci est plus favorable ;

Qu'en l'espèce, M. [Z], qui n'a pas été engagé en qualité de journaliste le 1er décembre 1989 mais d'éditeur stagiaire, ne peut revendiquer l'application de ces dispositions conventionnelles dès cette date et donc plus particulièrement l'établissement d'un écrit ; que cependant, à partir du 5 février1994, date à laquelle il a obtenu sa carte en qualité de stagiaire journaliste, comme le certifie le président de la CCIJP le 3 novembre 2017, ou à tout le moins à partir du 1er octobre 1994, date de la modification de son emploi, soit d'éditeur stagiaire à rédacteur polyvalent-journaliste, la société employeur aurait dû établir un écrit ou au moins échanger les lettres susvisées pour tenir compte de la modification du contrat de travail ; qu'il a été démontré ci-dessus que si le salarié n'a pas été privé de ses droits en matière de prime d'ancienneté, il l'a été en revanche s'agissant du treizième mois ;

Que la carence de l'employeur dans l'établissement d'un contrat écrit et l'absence d'indication sur les bulletins de paye durant une longue période de la prime d'ancienneté et du treizième mois n'ont pas permis à l'intéressé de déterminer la réalité et l'étendue de ses droits tirés de la convention collective, si bien qu'il a subi de ce fait un préjudice qui sera valablement réparé par l'allocation d'une somme de 2 000 euros ;

Sur les autres demandes :

Attendu qu'il convient de condamner la société intimée à remettre à M. [Z] un bulletin de salaire rectifié conforme au présent arrêt, sans astreinte, dont la nécessité n'est ni explicitée, ni justifiée ;

Attendu que la société intimée, qui succombe principalement, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et condamnée en application de l'article 700 du code de procédure civile à verser à M. [Z] 2 500 euros ;

PAR CES MOTIFS :

Déclare recevables les demandes en paiement formée pour la période du 1er décembre 2008 au 1er décembre 2010 ;

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions relatives ayant rejeté les demandes formées au titre de la prime d'ancienneté et des sanctions ;

L'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Condamne la SARL R.E.A à payer à M. [Z] [Z] 29 094,12 euros de rappel de prime de treizième mois du 1er décembre 2008 au 30 septembre 2018 avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et 2 000 euros de dommages-intérêts pour non-remise d'un contrat de travail écrit et de bulletins de paie conformes ;

Condamne la SARL R.E.A à remettre à M. [Z] un bulletin de salaire rectifié conforme au présent arrêt ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la SARL R.E.A à supporter les dépens de première instance et d'appel et à payer à M. [Z] 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/15853
Date de la décision : 09/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°16/15853 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-09;16.15853 ?
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