Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRÊT DU 20 DECEMBRE 2018
(n° , 15 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/00245 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B4L3U
Sur renvoi après cassation, selon l'arrêt rendu le 06 juillet 2017 par la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation (pourvoi n° K 16 ), de l'arrêt rendu le 16 février 2016 par le pôle 4 chambre 4 de la cour d'appel de paris (RG 14/20013 ), sur appel d'un jugement rendu le 06 août 2014 par le Tribunal d'instance de [...] (RG /11-14-000095)
DEMANDEUR À LA SAISINE
SCOP ACOME -
SIRET: 562 123 513 00045
Agissant poursuites et diligences de son représentant légal y domicilié [...]
Représentée ayant pour avocat plaidant par Me Jérôme A... , avocat au barreau de PARIS, toque : W15
DÉFENDERESSE À LA SAISINE
Madame Annick SAINT Z... X...
Née le [...] à MORTAIN (50140)
[...]
Représentée ayant pour avocat plaidant Me Olivier Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : G0125
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Pascale WOIRHAYE, conseillère, M. Philippe JAVELAS, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Daniel FARINA, Président
M. Philippe JAVELAS, Conseiller
Mme Pascale WOIRHAYE, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Viviane REA
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Daniel FARINA, Président et par Viviane REA, Greffière présente lors de la mise à disposition.
***
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
En 1975, la société Acome a donné à bail un appartement dépendant d'un immeuble sis [...] à Mme Saint Z... X..., moyennant un loyer mensuel de 136,74 euros.
En dépit de l'absence de clause d'échelle mobile, le loyer était régulièrement indexé par la bailleresse de 1975 à 1993, puis à nouveau à compter de 2010, sans opposition de la locataire, et s'élevait à 920,81 euros en janvier 2014.
Soutenant que le loyer était manifestement sous-évalué, la société Acome a, le 30 juillet 2013, signifié à Mme X... une offre de renouvellement de bail pour un loyer mensuel porté à la somme de 1 600 euros.
La commission départementale de conciliation ayant constaté le désaccord des parties, la bailleresse, le 22 janvier 2014, a assigné la locataire en fixation du loyer à la somme mensuelle de 1 242 euros, avec indexation.
Par voie reconventionnelle, Mme Saint Z... X... a demandé le remboursement des indexations indûment pratiquées pendant la période non prescrite.
Par un jugement du 6 août 2014, le tribunal d'instance de [...] arrondissement) a déclaré nulle l'offre de renouvellement du bail en raison de son imprécision. Il a, par ailleurs, condamné la société Acome à rembourser à la locataire la somme de 44 790,89 euros au titre de la répétition de l'indu.
Par arrêt du 16 février 2016, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement entrepris et, y ajoutant, a condamné la société Acome à rembourser à Mme Saint Z... X... la somme de 2 352,21 euros au titre de l'indexation indûment perçue de juillet à septembre 2014.
La société Acome s'est pourvue en cassation le 29 avril 2016.
Par arrêt du 6 juillet 2017, la Cour de cassation a cassé et annulé en toutes ses dispositions l'arrêt rendu le 16 février 2016 par la cour d'appel de Paris et renvoyé les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, en jugeant que si le preneur à bail d'habitation qui a acquitté un loyer indexé, alors que le bail ne prévoyait aucune indexation, peut agir en restitution du trop-perçu il ne peut, par l'effet de la prescription, contester le jeu de l'indexation plus de cinq ans avant sa demande s'il a acquitté le loyer indexé et que, partant, la cour d'appel de Paris avait violé l'article 2224 du code civil en calculant la créance de restitution sur la base du loyer initial hors indexation, celle-ci devant être calculée sur la base du loyer acquitté à la date du point de départ de la prescription.
La Cour de cassation a également jugé que la cour d'appel ne pouvait annuler l'offre de renouvellement du loyer, motif pris de son imprécision, sans rechercher si les irrégularités invoquées, qui constituent des irrégularités de forme, avaient été corrigées par la bailleresse ni vérifié si le grief retenu par le premier juge persistait en cause d'appel, qu'enfin la cour d'appel avait ajouté des conditions à la loi en annulant l'offre de renouvellement, motif pris de ce cette offre ne mentionnait pas la base de calcul de la sous-évaluation du loyer, ne faisait pas état du décret de blocage spécifique à la région parisienne et qu'il existait une incertitude sur le métrage de l'appartement.
Dans ces dernières conclusions après cassation, notifiées par la voie électronique le 4 octobre 2018, la société ACOME, appelante, demande à la Cour de renvoi de :
- se déclarer incompétente pour statuer sur la demande de caducité formée par Mme SAINT Z... X..., et, subsidiairement, rejeter cette demande ;
Sur le fond
- Infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 6 août 2014 et statuant à nouveau
- 1) sur l'offre de loyer : déclarer valable l'offre de renouvellement du bail avec fixation d'un nouveau loyer notifiée par la société ACOME à Mme SAINT Z... X...,
- fixer à la somme de 1 600 euros avant application du décret de modération, le montant du nouveau loyer devant être acquitté par Mme SAINT Z... X... à compter du 1er février 2014,
- dire que l'augmentation ne peut excéder la moitié de la différence entre le montant du nouveau loyer et celui de l'ancien loyer, soit la somme de 816, 96 euros,
- dire que la hausse de 816, 96 euros ainsi fixée judiciairement s'appliquera par sixièmes annuels à compter du 1er février 2014, date de renouvellement du contrat de bail,
- dire que la présente décision vaudra bail aux clauses et conditions du bail expiré non contraires,
2) Sur l'action en répétition de l'indu
- infirmer le jugement et limiter la répétition de l'indu à la somme de 5 776, 71 euros,
3) Sur la demande de dommages et intérêts
- dire que Mme SAINT Z... X... ne peut faire revivre frauduleusement une prescription applicable à son action en répétition de l'indu en formulant une demande de dommages et intérêts,
- constater que l'attitude déloyale et la mauvaise foi de la société ACOME ne sont pas démontrées,
- débouter Mme SAINT Z... X... de sa demande de dommages et intérêts,
4) Sur les autres dispositions
- condamner Mme SAINT Z... X... aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,
- condamner Mme SAINT Z... X... au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Mme SAINT Z... X..., intimée, dans le dispositif de ses dernières conclusions, notifiées par la voie électronique le 3 octobre 2018, demande à la Cour de renvoi de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- déclarer la société ACOME mal fondée en son appel et la débouter de l'intégralité de ses demandes,
In limine litis
- constater la caducité de l'appel formé par la société ACOME sur le fondement de l'article 1037-1 du Code de procédure civile,
- déclarer caduc l'appel formé par la société ACOME
A défaut et y ajoutant
A titre principal
- condamner la société ACOME à payer à Mme SAINT Z... X... une somme de 2 352, 18 euros au titre des sommes indument perçues par la bailleresse pour la période du 1er juillet 2014 au 1er septembre 2014, terme de septembre 2014 inclus,
A titre subsidiaire
- 1) Sur l'offre de renouvellement : fixer à la somme mensuelle de 648, 85 euros le montant du nouveau loyer devant être acquitté par Mme SAINT Z... X... à compter du 1er février 2014, pour une durée de six ans,
- dire que la hausse de 648, 85 euros ainsi fixée judiciairement s'appliquera par sixièmes annuels à compter du 1er février 2014, date de renouvellement du contrat de bail,
2) Sur la réparation du préjudice financier de Mme SAINT Z... X...
- condamner la société ACOME à payer à Mme SAINT Z... X... une somme de 41 366, 36 euros, arrêtée au 1er septembre 2014, échéance du mois de septembre 2014 incluse, en réparation du préjudice subi du fait de l'attitude déloyale de la bailleresse,
En tout état de cause
- condamner la société ACOME aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,
- condamner la société ACOME à payer à Mme SAINT Z... X... une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 4 octobre 2018.
MOTIFS DE LA DECISION
I) Sur la caducité de l'appel
La société ACOME fait valoir que la société ACOME n'ayant pas notifié la déclaration de saisine de la cour d'appel dans le délai de dix jours figurant sur l'avis de fixation du 18 septembre 2018, cette saisine est caduque, au visa de l'article 1037-1 du Code de procédure civile.
La société ACOME réplique que :
- la Cour devra se déclarer incompétente pour connaître de cette demande qui relève exclusivement de la compétence du conseiller de la mise en état, en application de l'article 914 du Code de procédure civile,
- à titre subsidiaire, la Cour a respecté les dispositions de l'article 1037-1 du Code de procédure civile, dès lors qu'elle a signifié, de manière anticipée avant l'envoi de l'avis de fixation de l'affaire la déclaration de saisine émanant de la cour d'appel de Paris.
Sur ce
Aux termes de l'article 1037-1 du Code de procédure civile, en cas de renvoi devant la cour d'appel, lorsque l'affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai dans les conditions de l'article 905. En ce cas, les dispositions de l'article 1036 ne sont pas applicables. La déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation. Ce délai est prescrit à peine de caducité de la déclaration, relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président.
Il résulte de ces dispositions que la Cour n'est pas compétente pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de la caducité encourue du fait de la violation des dispositions de l'article 1037-1 du Code de procédure civile, dès lors qu'il appartenait à l'intimée de former sa demande devant le conseiller de la mise en état et que la Cour n'a pas, en l'espèce, soulevé d'office la fin de non-recevoir invoquée par Mme SAINT Z... X....
II) Sur la régularité de l'offre de renouvellement du bail avec un nouveau loyer
La société ACOME, qui demande à la Cour de renvoi de dire l'offre de renouvellement faite à Mme SAINT Z... X... régulière, fait valoir que :
- si le loyer de base indiqué dans l'offre de renouvellement était celui appliqué en juin 2011 au lieu de juin 2013, cette erreur ne cause pas grief à Mme SAINT Z... X... dès lors qu'elle connaît le loyer appliqué devant servir de base, le dernier loyer de référence ayant été corrigé dans le cadre des débats de la présente procédure,
- l'offre de renouvellement n'a pas à prendre en considération le décret de blocage des loyers et le défaut de mention de ce décret dans l'offre ne cause pas grief à la locataire qui a été en mesure de discuter les effets de ce texte d'ordre public,
- contrairement à ce que soutient l'intimée, la superficie de l'appartement - 86 mètres carrés - est certaine et la loi n'impose pas de mentionner la superficie du logement objet de l'offre de nouveau loyer. Au surplus, ce défaut de mention ne fait pas grief à Mme SAINT Z... X..., qui, vivant dans les lieux depuis 1975, ne peut prétendre ignorer leur superficie,
- les irrégularités et incohérences alléguées par l'intimée ont été corrigées par la bailleresse au cours de la procédure,
- les références de logements comparables fournies par la bailleresse répondent aux exigences des articles 17 et 19 de la loi du 6 juillet 1989 et ont été corrigées pour répondre à la situation du bien.
Mme SAINT Z... X... conclut à la nullité de l'offre de renouvellement en faisant valoir que :
- le montant du loyer fixé dans l'offre est faux car, premièrement, elle repose sur l'application d'une indexation illicite et qui n'a aucune raison d'être, en raison de l'absence de clause d'indexation dans le bail du 25 janvier 1975, deuxièmement, le prix du loyer proposé par la société ACOME comporte, en outre, une erreur dans son montant, troisièmement, le loyer après décret figurant dans l'offre de renouvellement n'a pas été régularisé par la société ACOME et est également faux ; il s'ensuit que l'offre de renouvellement du 30 juillet 2013 est nulle pour avoir été établie sur la base d'un loyer dont le montant est erroné et Mme SAINT Z... X... n'ayant pu apprécier le sérieux de l'offre ni vérifier les calculs de la société ACOME,
- l'offre de renouvellement n'a jamais été régularisée puisque le loyer proposé en renouvellement repose encore aujourd'hui sur une indexation illicite,
- le montant du loyer proposé est erroné,
- les six références retenues dans l'offre de renouvellement ne sont pas pertinentes en ce qu'elles ne portent pas sur des logements comparables, notamment en ce qu'elles portent sur des biens d'une surface notablement inférieure à celle du logement occupé par Mme SAINT Z... X..., permettant ainsi à la bailleresse d'obtenir une moyenne de loyer plus élevée que la moyenne des références dotées d'une surface comparable,
- Mme SAINT Z... X... ne peut connaître la surface du bien qu'elle occupe, son bail ne comportant aucune indication de la surface habitable et la note datée de 1971 versée aux débats par la bailleresse n'a aucune valeur probante dès lors qu'elle n'est pas signée et ne comporte aucun numéro de lot. Mme SAINT Z... X... estime la surface du bien qu'elle occupe à 73, 97 mètres carrés ; du fait des incertitudes existant sur la surface, il est impossible de déterminer la valeur locative de l'appartement et la nullité de l'offre est encourue,
- l'offre de renouvellement litigieuse comporte, en outre, des incohérences qui ont fait obstacle à ce que Mme SAINT Z... X... soit informée sur la proposition de fixation du loyer qui lui a été signifiée : le montant du loyer mentionné dans l'offre est de 1 600 euros par an, alors que l'assignation indique fait état d'un loyer mensuel de 1 600 euros, la bailleresse a tenté d'imposer à sa locataire une modification unilatérale du contrat de bail en intégrant à l'offre de renouvellement du 31 juillet 2013 une clause de révision.
Sur ce
L'article 17c de la loi du 6 juillet 1989, dans sa version antérieure à celle issue de la loi du 24 mars 2014, applicable à la présente instance , disposait :
'Lors du renouvellement du contrat, le loyer ne donne lieu à réévaluation que s'il est manifestement sous-évalué.
Dans ce cas, le bailleur peut proposer au locataire, au moins six mois avant le terme du contrat et dans les conditions de forme prévues à l'article 15, un nouveau loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des
logements comparables dans les conditions définies à l'article 19.
Lorsque le bailleur fait application des dispositions du présent c, il ne peut donner congé au locataire pour la même échéance du contrat.La notification reproduit intégralement, à peine de nullité, les dispositions des alinéas du présent c et mentionne le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant
servi à le déterminer.
En cas de désaccord ou à défaut de réponse du locataire quatre mois avant le terme du contrat, l'une ou l'autre des parties saisit la commission de conciliation.
A défaut d'accord constaté par la commission, le juge est saisi avant le terme du contrat. A défaut de saisine, le contrat est reconduit de plein droit aux conditions antérieures du loyer éventuellement révisé. Le contrat dont le loyer est fixé
judiciairement est réputé renouvelé pour la durée définie à l'article 10, à compter de la date d'expiration du contrat. La décision du juge est exécutoire par provision.
La hausse convenue entre les parties ou fixée judiciairement s'applique par tiers ou par sixième selon la durée du contrat.
Toutefois, cette hausse s'applique par sixième annuel au contrat renouvelé, puis lors du renouvellement ultérieur, dès lors qu'elle est supérieure à 10 p. 100 si le premier renouvellement avait une durée inférieure à six ans.
La révision éventuelle résultant du d ci-dessous s'applique à chaque valeur ainsi définie.'
L'article 19, qui traite des références de loyers dont doit justifier le bailleur et ne prévoit pas de dispositions à peine de nullité, était ainsi rédigé :
'Pour l'application de l'article 17, les loyers servant de références doivent être représentatifs de l'ensemble des loyers habituellement constatés dans le voisinage pour des logements comparables, situés soit dans le même groupe d'immeubles, soit
dans tout autre groupe d'immeubles comportant des caractéristiques similaires et situé dans la même zone géographique. Un décret en Conseil d'Etat définit les éléments
constitutifs de ces références.
Le nombre minimal des références à fournir par le bailleur est de trois. Toutefois, il est de six dans les communes, dont la liste est fixée par décret, faisant partie d'une agglomération de plus d'un million d'habitants.
Les références notifiées par le bailleur doivent comporter, au moins pour deux tiers, des références de locations pour lesquelles il n'y a pas eu de changement de locataire depuis trois ans.'
Il résulte de ces textes que le bailleur doit adresser au locataire une proposition de renouvellement obéissant au même formalisme que la procédure de congé prévue à l'article 15, soit la notification par lettre recommandée avec accusé de réception ou la signification par huissier. L'article 17-2-II impose que la notification reproduise intégralement les dispositions de l'article 17-2-II et mentionne le montant du loyer ainsi que la liste des références ayant servi à le déterminer.
En l'espèce, la société ACOME a, par acte d'huissier de justice du 30 juillet 2013, fait signifier à Mme SAINT Z... X... une offre de renouvellement de son bail pour une durée de six ans à compter du 1er février 2014 reproduisant intégralement le texte des articles 17 C ET 19 de la loi du 6 juillet 1989 et proposant un nouveau loyer "annuel" de 1 600 euros. Cette offre comportait une liste de six références ayant servi à déterminer le nouveau loyer proposé.
Cette offre respectait les conditions de formes prescrites par les textes cités plus haut.
Mme SAINT Z... X..., fait valoir, en premier lieu, que l'offre de renouvellement du 30 juillet 2013 encourerait la nullité, du fait que le montant du loyer de référence qu'elle acquittait, reposant sur une indexation illégale, le bail consenti ne comportant aucune clause d'indexation, était erroné.
Toutefois, l'erreur alléguée ne peut être sanctionnée par la nullité de l'offre dès lors que l'article 17 c n'exige pas, à peine de nullité de l'offre, que la proposition de nouveau loyer mentionne la base de calcul de la sous-évaluation du loyer qu'elle invoque.
Il est vrai que le montant du nouveau loyer indiqué par la bailleresse dans son offre, est erroné, puisque la somme de 1 600 euros constitue le loyer mensuel et non annuel comme indiqué par erreur sur l'offre de renouvellement litigieuse. Toutefois, cette erreur, constitutive d'un vice de forme, n'est pas de nature à entraîner, en l'espèce, la nullité de l'offre de renouvellement, dès lors que la bailleresse a régularisé cette erreur et qu'elle n'a causé aucun grief à Mme SAINT Z... X..., qui, ainsi que le souligne la bailleresse, ne pouvait ignorer, compte tenu du montant du loyer qu'elle acquittait et du fait que la démarche de la bailleresse avait pour objectif d'obtenir une augmentation du loyer"manifestement sous-évalué", que l'adjectif " annuel" accolé au terme loyer et au chiffre de 1 600 euros, ne pouvait résulter que d'une erreur de plume.
Par ailleurs, le fait que la bailleresse ait proposé une indexation du loyer dans son offre de renouvellement demeure sans incidence sur la régularité de cette offre.
En deuxième lieu, Mme SAINT Z... X... conteste la pertinence des termes de comparaison ayant permis de déterminer le nouveau loyer.
A cet égard, il y a lieu de relever que les références communiquées répondent aux exigences des articles 17 c et 19 de la loi du 6 juillet 1989.
En effet, elles sont au nombre de six comme le prescrit la loi ; elles concernent pour plus des deux tiers d'entre elles des logements dont les locataires n'ont pas changé depuis trois ans, répondant ainsi aux conditions d'ancienneté requises par la loi applicable à la présente instance, qui n'exigeait pas que le bailleur produisît des offres concernant des baux aussi anciens - plus de quarante ans - que celui dont bénéficie Mme SAINT Z... X....
L'intimée soutient que les offres quatre et cinq portent sur des logements trop éloignés, plus de deux kilomètres en l'occurrence, de celui qu'elle occupe.Il apparaît toutefois que le logement mentionné dans l'offre numéro 5, sis [...] , est situé à 850 mètres à pied de l'immeuble dans lequel réside l'intimée et que la référence n°6 est relative à un logement sis [...] , soit à 1, 1 km du logement de l'intimée. Il n'y a donc pas lieu d'écarter ces références, au motif qu'elles ne se situeraient pas dans le voisinage du bien donné à bail.
Au surplus, il y a lieu de relever que trois des six références concernent des logements situés dans la même rue que l'immeuble de l'intimée, que la bailleresse a communiqué, dans le cadre de la procédure, le listing complet de l'OLAP portant sur des logements comparables, et, surtout, que la bailleresse a proposé un loyer à 18, 60 euros par mètre carré soit d'un montant sensiblement inférieur à la moyenne des six loyers de référence, soit 22, 03 euros, et même des trente huit références du fichier de l'OLAP pour tenir compte de la situation de Mme SAINT Z... X....
Enfin, il est précisé, pour chacun des logements de référence : l'adresse du bien, l'époque de construction de l'immeuble, l'étage du logement, la présence d'un ascenseur, la surface habitable et le nombre de pièces.
A cet égard, les différence de superficie entre le logement de Mme SAINT Z... X... (86 mètres carrés) et celui des logements de référence - 66 mètres carrés, 70 métres carrés, 72 mètres carrés, 75 métres carrés, 82 mètres carrés, 85 mètres carrés,
n'est pas suffisante pour qu'il soit jugée que les références ne correspondraient pas aux critères légaux de la comparabilité, la preuve n'étant pas au surplus rapportée par l'intimée que cette différence, compte tenu de son importance, entraînerait nécessairement une hausse du prix au mètre carré.
Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du défaut de pertinence des logements de comparaison ne peut être retenu.
M. SAINT Z... X... fait valoir, en troisième lieu, que l'offre de renouvellement encourerait la nullité du fait du défaut de mention de la superficie de son logement qui l'a empêchée de disposer de tous les éléments nécessaires à la parfaite connaissance de l'offre qui lui a été transmise.
Cependant, le défaut de mention de la superficie du logement dans l'offre de renouvellement n'est pas de nature à entraîner la nullité de cette offre, dès lors que cette mention n'est pas requise par la loi et que ce défaut de mention n'a nullement fait grief à Mme SAINT Z... X..., en l'empêchant d'appréhender l'offre de renouvellement qui lui était faite, dès lors qu'elle connaissait cette surface pour habiter les lieux depuis 1975, que la bailleresse a précisé au cours de la procédure que cette surface était de 86 mètres carrés, et que Mme SAINT Z... X... ne saurait utilement contester cette surface en faisant valoir qu'elle serait de 73, 97 mètres carrés, au moyen d'un calcul reposant sur le prix au mètre carré résultant de la moyenne arithmétique des loyers de référence, alors même que la bailleresse a, en fait, retenu un prix inférieur à cette moyenne.
Par suite, le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a déclaré irrégulière et nulle l'offre de renouvellement du bail notifiée le 30
juillet 2013 à Mme SAINT Z... X... et, statuant à nouveau, la cour de renvoi validera cette offre.
III) Sur le bien-fondé de la procédure de révision de loyer intentée par la société ACOME et les conséquences qu'elle emporte sur le montant du loyer
La société ACOME fait valoir que :
- il existe une différence de 73, 76 % entre le loyer proposé par le bailleur et le dernier montant de loyer acquitté par Mme SAINT Z... X..., en sorte que ce dernier loyer est manifestement sous-évalué,
- les références visées dans l'offre et celles produites ultérieurement aux débats permettent de retenir, hors les effets du décret de blocage des loyers, un nouveau loyer mensuel de 1 600 euros,
- le nouveau loyer doit être fixé à la somme de 1 600 euros et la hausse résultant de la différence entre ce nouveau loyer et le montant du loyer indexé à la date de renouvellement (783, 04 euros) devra s'appliquer par sixièmes annuels à compter du 1er février 2014, date du renouvellement du contrat de bail.
Mme SAINT Z... X... demande à la Cour, à titre principal, de juger que le loyer qu'elle acquitte n'est pas manifestement sous-évalué en exposant que :
- les références mentionnées dans l'offre de renouvellement ne portent pas sur des biens comparables,
- la superficie de l'appartement n'est pas établie de manière certaine,
- la société ACOME n'a réalisé aucun travaux dans l'appartement depuis près de 40 ans et l'appartement présente de nombreux signes de vétusté ; Mme SAINT Z... X... a fait procéder au changement des radiateurs et poser une porte blindée ; les parties communes de l'immeuble sont également très dégradées.
A titre subsidiaire, Mme SAINT Z... X... demande à la Cour de fixer le loyer dont elle est redevable à partir de celui dont elle aurait dû réellement s'acquitter, soit 136, 75 euros, du fait de l'absence de clause d'indexation dans le bail qui lui a été consenti.
Sur ce
l'article 17 c de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au présent litige dispose que : « Lors du renouvellement du contrat, le loyer ne donne lieu à réévaluation que s'il est manifestement sous-évalué...".
Par ailleurs, selon les dispositions du décret du 27 août 2009, la hausse du nouveau loyer ne peut excéder la moitié de la différence entre le loyer déterminé conformément à l'article 17 c) de la loi du 6 juillet 1989 et le loyer à la date du renouvellement.
Pour les motifs développés ci-avant, Mme SAINT Z... X... est mal fondée à soutenir que les six références fournies par la bailleresse ne seraient pas pertinentes.
En outre, la bailleresse a versé aux débats les 38 références contenues dans le fichier de l'OLAP. La moyenne arithmétique des prix au mètre carré pour ces 38 références ressort à 19, 46 euros du mètre carré.
Or le dernier loyer exigible, compte tenu de la prescription, soit 783, 04 euros, fait apparaître un prix au mètre carré de 9, 10 euros.
Il en résulte que le loyer exigible de Mme SAINT Z... X... est manifestement inférieur à ceux pratiqués dans le voisinage.
Comme il a été dit ci-avant, l'intimée est, par ailleurs, mal fondée à soutenir que la surface de l'appartement serait indéterminée, alors même qu' occupant les lieux depuis 1975, elle ne produit aucun élément de nature à démontrer que la surface de 86 mètres carrés annoncée par la bailleresse serait inexacte.
L'état de vétusté qu'elle invoque pour contester l'application d'un nouveau loyer, n'est pas établi au vu des clichés photographiques qu'elle produit et Mme SAINT Z... X... ne saurait, pour s'opposer à toute revalorisation de son loyer, exciper utilement d'un défaut d'entretien du logement durant 40 ans ni faire grief à sa bailleresse de l'avoir ainsi contrainte à exposer des dépenses qui ne lui incombaient pas - remplacement d'un radiateur, pose d'une porte métallique en 1994 - alors même qu'elle a engagé ces dépenses de son propre chef et sans informer préalablement ni solliciter l'intervention de la société ACOME.
La Cour dispose, au vu de l'ensemble des références produites par la bailleresse, de données d'appréciation suffisantes pour retenir le prix de 18, 60 euros par mètre carré.
Le nouveau loyer s'établira, en conséquence, à 1 600 euros (18, 6 x 86 m²).
Après application de la limitation réglementaire, le loyer effectif sera de :
1 600 -783, 04 (ancien loyer exigible compte tenu des effets de la prescription) = 816,96 euros.
816,96 /2 = 408, 48 euros (montant calculé au titre de la limitation réglementaire)
783,04 euros + 408, 48 euros = 1 191, 52 euros, étant précisé que l'augmentation de 408, 48 euros sera étalée sur six ans.
Mme SAINT Z... X... est mal fondée à solliciter, à titre subsidiaire, que l'ancien loyer retenu soit le loyer originel, soit 136, 75 euros, dès lors qu'un locataire, qui n'a pas contesté en temps utile l'application d'une indexation non prévue dans le bail, est déchue du droit de la remettre en question pour la période prescrite.
IV) Sur les demandes reconventionnelles de Mme SAINT Z... X...
A) Répétition de l'indu
Mme SAINT Z... X... demande à la cour de renvoi de confirmer, nonobstant l'arrêt de la Cour de cassation du 6 juillet 2017, de condamner la société ACOME sur la base du montant du loyer initial prévu dans le bail en raison de l'absence de clause d'indexation.
Elle fait valoir, au soutien de sa demande, que :
- l'article L. 112-2 du Code monétaire et financier consacre la nullité des indexations illicites concernant les baux d'habitation et , s'agissant d'une nullité d'ordre public, la clause litigieuse ne peut être considérée comme acquise par le simple jeu de la prescription quinquennale,
- la Cour de cassation considère que la fraude interdit de se prévaloir de la prescription, et, en l'espèce, le préjudice de Mme SAINT Z... X... résulte de manoeuvres dolosives tendant à faire croire à la locataire qu'elle était redevable d'une indexation,
- la prescription quinquennale ne s'applique pas au processus de l'indexation qui est une simple modalité de calcul.
La société ACOME réplique que l'argumentaire développé par Mme SAINT Z... X... porte atteinte au jeu de la prescription, qui interdit de contester le montant du loyer pour la période prescrite, et demande à la cour de renvoi d'infirmer le jugement déféré et de faire droit à sa demande de limitation du montant à restituer en répétition de l'indu à la somme de 5 776, 71 euros représentant le trop-perçu sur la période non prescrite calculé à partir, non du loyer d'origine, mais du dernier loyer indexé à la date du point de départ de la prescription extinctive.
Sur ce
la prescription du rappel d'indexation doit s'appliquer au loyer actualisé à la date du point de départ du délai quinquennal et non au loyer d'origine. En effet, le preneur, par l'effet de la prescription, ne peut contester le jeu de l'indexation plus de cinq ans avant sa demande, dès lors qu'il a acquitté le loyer indexé et il il en résulte que seul le dernier loyer actualisé à la date du point de départ de la prescription doit être pris en compte
Le caractère d'ordre public des règles posées par le Code monétaire et financier relativement aux indexations illicites, s'il permet au preneur de demander qu'une clause d'indexation illicite soit réputée non écrite, ne peut faire obstacle au jeu de la prescription extinctive. En effet, la demande en restitution des sommes payées en application de la clause d'indexation litigieuse, s'analyse en une demande de restitution de l'indu ; les sommes versées en application d'une clause d'indexation ont la même nature que les loyers auxquels elles sont afférentes. Dès lors, la prescription quinquennale est applicable.
Par ailleurs, la fraude et les manoeuvres dolosives imputées à la société ACOME ne sont pas établies et ne peuvent être caractérisées par la seule mise en oeuvre d'une indexation illicite, et le courrier adressé par la bailleresse à sa locataire, le 28 janvier 2010, pour l'informer de la revalorisation de son loyer et la convier à une rencontre en vue de fixer un "loyer réel", de sorte que la société ACOME ne saurait se voir privée du droit de se prévaloir de la prescription, comme le soutient l'intimée.
Les erreurs invoquées par l'intimée dans le calcul de l'indexation illicite, sont également couvertes par la prescription quinquennale.
Par suite, la somme à restituer doit être calculée par différence entre les loyers payés par Mme SAINT Z... X... durant la période non prescrite, et le dernier loyer applicable cinq ans avant sa demande, en juin 2009, soit 783, 04 euros.
L'application de cette règle, selon décompte versé aux débats par la bailleresse, fait apparaître un trop-payé de 5 776, 71 euros sur la période allant du 1er janvier 2010 au mois d'avril 2014.
Mme SAINT Z... X... sollicite, en outre, le remboursement d'un trop-payé pour les mois de juillet, août et septembre 2014 en faisant valoir que la société ACOME a continué d'appeler, pour cette période de trois mois, un loyer de 920,81 euros.
Toutefois, les avis d'échéance que Mme SAINT Z... X... verse aux débats ne valant pas quittances et n'apportant donc pas la preuve du paiement des loyers appelés sur la période considérée, l'intimée sera déboutée de sa demande complémentaire en remboursement du trop-payé sur cette période.
La société ACOME sera, en conséquence, condamnée à restituer la somme de 5 776, 71 euros à sa locataire.
B) Dommages et intérêts
Mme SAINT Z... X... sollicite la condamnation de sa bailleresse à lui payer la somme de 41 366, 36 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice financier subi, après déduction des sommes restituées au titre de la répétition de l'indu, du fait de l'attitude déloyale de la bailleresse, qui a fait pression sur elle pour lui imposer une indexation illicite.
La société ACOME conclut au débouté de cette demande de dommages et intérêts en faisant valoir que l'intimée est mal fondée à contourner les règles de la prescription par le biais d'une demande de dommages et intérêts et que cette demande est mal fondée, la mauvaise foi et le caractère déloyal de la bailleresse n'étant pas caractérisés.
Sur ce
Mme SAINT Z... X... est mal fondée à solliciter, sous couvert d'une demande de dommages et intérêts, le paiement d'une créance de loyer prescrite, en faisant valoir qu'elle a subi, du fait de l'indexation illicite pratiquée par la société ACOME, un préjudice financier (Cass. chambre sociale, 9 octobre 2013, n°12-21.603).
Par ailleurs, et comme il a été dit ci-avant, le caractère déloyal de la bailleresse est insuffisamment caractérisé par la seule mise en oeuvre d'une indexation illicite, et le courrier adressé par la bailleresse à sa locataire, le 28 janvier 2010, pour l'informer de la revalorisation de son loyer et la convier à une rencontre en vue de fixer un "loyer réel". En effet, la société ACOME, qui n'est pas un professionnel de l'immobilier, a pu, entre 1975 et 1993, se méprendre sur l'étendue de ses droits en indexant illicitement le loyer, puis, en 2010, à l'occasion du renouvellement du bail et le loyer n'ayant plus été indexé entre 1993 et 2010, souhaiter rencontrer sa locataire, en vue de faire inscrire une telle clause dans le bail, la présence d'une clause d'indexation dans les baux d'habitation étant usuelle.
En conséquence, Mme SAINT Z... X... sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
V) Sur les demandes accessoires
Mme SAINT Z... X..., qui succombe pour l'essentiel, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement,
Se déclare incompétente pour statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par Mme Annick SAINT Z... X... ;
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau
Déclare valable l'offre de renouvellement du bail notifiée le 30 juillet 2013 à Mme Annick SAINT Z... X... ;
Fixe le nouveau loyer mensuel à compter du 1er février 2014 à la somme de 1 600 euros avant l'application des dispositions du décret n °2009-1042 du 27 août 2009 qui limite le montant de la hausse du loyer ;
Fixe à la somme de 1 191,52 euros le loyer effectif mensuel à compter de cette même date;
Dit que la hausse du loyer s'appliquera par sixièmes annuels à compter du 1er février 2014;
Dit que la présente décision vaut bail aux clauses et conditions du bail expiré non contraires;
Condamne la société ACOME à payer à Mme Annick SAINT Z... X... une somme de 5 776, 71 euros ;
Déboute Mme Annick SAINT Z... X... du surplus de de ses demandes en réparation de son préjudice financier, ainsi que de ses autres demandes ;
Vu l'article 700 du Code de procédure civile, condamne Mme Annick SAINT Z... X... à payer à la société ACOME une indemnité de 3 000 euros ;
Condamne Mme Annick SAINT Z... X... aux dépens de première instance et d'appel et dit que les dépens de la procédure d'appel pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT