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14/12/2018 | FRANCE | N°16/04164

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 14 décembre 2018, 16/04164


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 14 Décembre 2018



(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/04164 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYM3Y



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Février 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 14-02725/B





APPELANT

Monsieur [V] [W]

[Adresse 1]

[Localité 1]
>bénéficie de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 octobre 2016, décision numéro 2016/034005 délivrée par le BAJ de PARIS

comparant en personne, assisté de Me Manuella METOUDI, avocat au b...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 14 Décembre 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/04164 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYM3Y

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Février 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 14-02725/B

APPELANT

Monsieur [V] [W]

[Adresse 1]

[Localité 1]

bénéficie de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 octobre 2016, décision numéro 2016/034005 délivrée par le BAJ de PARIS

comparant en personne, assisté de Me Manuella METOUDI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1137

INTIME

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE SAINT DENIS

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS

SAS CALBERSON PARIS

[Adresse 3]

[Localité 3],

représentée par Me Martine RIOU, avocat au barreau de PARIS, toque : P0053

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 4]

[Localité 4],

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Claire CHAUX, présidente de chambre

Madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère

Monsieur Lionel LAFON, conseiller

Qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Claire CHAUX, présidente de chambre, et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [W] [V] d'un jugement rendu le 11 février 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de BOBIGNY dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis et à la société CALBERSON France .

FAITS , PROCEDURE , PRETENTIONS DES PARTIES

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard .

Il suffit de rappeler que M. [N] [W] était employé en qualité d'ouvrier manutentionnaire au sein de la société CALBERSON depuis 1983.

Le [Date décès 1] 2007, il a été victime d'un accident dont il est décédé .

Le certificat de décès mentionne que le décès a été provoqué par un arrêt cardiaque brutal, de cause inconnue sur le lieu de travail.

M. [V] [W], frère de la victime, a sollicité la prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle.

Le 28 novembre 2007, l'employeur a complété une déclaration d'accident du travail en ces termes:

Date et heure de l'accident : [Date décès 1] 2007 à 16h

Horaires de travail le jour de l'accident: 14h - 17 h / 17h30 - 21h 30

Lieu : Aire de manutention Goulotte 14

Circonstances détaillées de l'accident: les SST ont déclaré être intervenus après avoir été prévenus par un collaborateur qui a retrouvé la victime à terre. Ils ont prévenu les pompiers et dispensé les gestes de premiers secours ( massage cardiaque , bouche à bouche).

- siège des lésions : coeur

- nature des lésions : à déterminer

- accident constaté le [Date décès 1]07 par l'employeur .

- un rapport de police a été établi par le commissariat de police du 17ème arrondissement

- L'accident a t- il été causé par un tiers' Non

Après avoir diligenté une instruction, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis ( ci - après la caisse ) par décision du 26 février 2008 a refusé de prendre en charge cet accident au titre de la législation professionnelle au motif que M. [W] [V] n'a pas donné suite aux différents courriers qui lui ont été adressés et qu'il a placé la caisse dans l'impossibilité d'apprécier le caractère professionnel des faits invoqués.

M. [W] [V] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable laquelle, par décisions des 7 avril 2010 et 22 septembre 2010 a rejeté son recours.

M. [W] a dès lors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny qui par jugement du 11 février 2016 a :

- déclaré irrecevables le recours de M. [T] [W], [U] [W] et Mme [E] [W] ,

- dit que le caractère professionnel du décès de M. [N] [W] n'a pas été implicitement reconnu par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis ,

- dit que la présomption d'imputabilité est écartée pour absence de transmission du rapport d'autopsie par les ayants droit ,

- dit que M. [V] [W] ne rapporte pas la preuve du lien de causalité entre le décès de [N] [W] et son travail ,

- débouté M. [V] [W] de l'intégralité de ses demandes,

- confirmé la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis du 7 avril 2010 ,

- condamné M. [V] [W] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis la somme de 44,59€ , correspondant aux frais de citation par huissier de la société Calberson,

- débouté les parties de leurs plus amples demandes.

M. [W] [V] fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions invitant la cour à le dire, en tant qu'ayant droit, recevable et bien fondé au titre de son appel et de ses demandes, d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, dire que l'accident qui a provoqué le décès de [N] [W] le [Date décès 1] 2007 doit être qualifié accident du travail et enjoindre à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis d'en tirer les conséquences telles que prévues par les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale, de condamner la caisse primaire aux entiers dépens en ce compris les dépens de première instance.

Il fait valoir qu'il y a eu reconnaissance implicite du caractère professionnel de l'accident du seul fait que la caisse n'a pas répondu dans le délai de 30 jours prévu par les dispositions de l'article R 441- 10 du code de la sécurité sociale , que les articles 640 et suivants du code de procédure civile ne s'appliquent pas au calcul d'un délai fixé par un organisme de sécurité sociale. Sur le fond , il ajoute que les pièces du dossier permettent de conclure au caractère professionnel de l'accident , le lien entre le décès et le travail effectué étant manifeste.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes.

Elle expose qu'il n'y a pas eu prise en charge implicite de l'accident , le calcul du délai de 30 jours devant se faire par application des dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile, qu'il appartient à la victime ou à ses ayants droit d'apporter la preuve que les éléments constitutifs d'un accident du travail sont réunis, que M. [W] ne justifie d'aucune impossibilité légale ou matérielle de communiquer le rapport d'autopsie, que son abstention doit être analysée comme un refus d'autopsie, qu'il lui incombe dès lors de rapporter, outre la matérialité, la preuve du lien de causalité entre l'accident et le décès, ce qu'il ne fait pas.

La société CALBERSON PARIS fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la cour de déclarer recevable mais mal fondé l'appel de M. [W], de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de le condamner aux entiers dépens.

Elle fait valoir que le calcul des délais impartis à la caisse dans le cadre de l'instruction de l'accident du travail est effectué conformément aux dispositions des articles 641 et 642 du code de procédure civile, de sorte qu'il n'y a pas eu reconnaissance implicite de l'accident du travail par la caisse, que la présomption d'imputabilité doit être écartée du fait de la non transmission du rapport d'autopsie et de l'existence d'un état pathologique antérieur retenu à juste titre par les premiers juges, qu'aucun élément ne permet d'établir un lien entre le décès et les circonstances de travail.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions .

SUR CE , LA COUR ,

Aux termes des dispositions de l'article R 441- 10 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige " la caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration d'accident ( ...) pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident " .

Il ressort des pièces produites que la caisse a reçu la déclaration d'accident du travail le 29 novembre 2007 .

M. [W] soutient que la caisse aurait du lui adresser sa décision au plus tard le 28 décembre 2007 mais que c'est seulement par un courrier du 27 décembre 2007, envoyé le 31 décembre 2007 et donc hors délai , que la caisse l' informé de la nécessité de recourir à un délai complémentaire d'instruction, qu'il y a donc eu prise en charge implicite au titre de la législation professionnelle de l'accident suivi du décès. Il ajoute que les modalités de calcul retenues par la caisse qui a exclu le jour de la réception de la déclaration d'accident du travail ne sont pas conformes, les dispositions des articles 640 et suivants du code de procédure civile ne s'appliquant pas au calcul d'un délai fixé par un organisme de sécurité sociale.

Le délai de 30 jours litigieux n'est pas fixé par un organisme de sécurité sociale mais par des dispositions réglementaires et à ce titre, il est régi par les dispositions des articles 640 et suivants du code de procédure civile.

Le délai de l'article R 441 - 10 du code de la sécurité sociale étant fixé en jours, il ne doit pas être tenu compte du jour de réception . En effet , l'article 641 du code de procédure civile prévoit que "lorsqu'un délai est exprimé en jours , celui de l'acte , de l'événement, de la décision ou de la notification qui le fait courir ne compte pas. "

La caisse ayant reçu la déclaration d'accident du travail le 29 novembre 2007 , le délai de 30 jours a commencé à courir à compter du 30 novembre 2007 et expirait donc le 29 décembre 2007.

Le 29 décembre 2007 étant un samedi, le délai de 30 jours était prorogé au lundi 31 décembre 2007, premier jour ouvrable suivant .

En effet, l'article 642 du code de procédure civile dispose que " le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé au premier jour ouvrable suivant. "

En conséquence, la caisse avait jusqu'au 31 décembre 2007 pour notifier sa décision. C'est par courrier daté du 27 décembre 2007, envoyé le 31 décembre 2007 que la caisse a informé M. [W] de la nécessité de recourir à un délai complémentaire d'instruction.

Elle a donc parfaitement respecté les délais d'instruction auxquels elle était tenue.

C'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu que M. [W] ne pouvait valablement soutenir que la caisse avait implicitement pris en charge l'accident de [W] [N] suivi de son décès au titre de la législation professionnelle.

Sur le caractère professionnel de l'accident suivi du décès de [N] [W]:

Aux termes de l'article L 411 - 1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail, à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise .

Ainsi, toute lésion survenue au temps et au lieu de travail doit être considérée comme trouvant sa cause dans le travail, sauf s'il est rapporté la preuve que cette lésion a une cause étrangère au travail.

Aux termes de l'article L 442- 4 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, la caisse doit, si les ayants droit de la victime le sollicitent ou avec leur accord si elle l'estime elle- même utile à la manifestation de la vérité, demander au tribunal d'instance dans le ressort duquel l'accident s'est produit de faire procéder à l'autopsie dans les conditions prévues aux articles 232 et suivants du code de procédure civile. Si les ayants droits de la victime s'opposent à ce qu'il soit procédé à l'autopsie demandée par la caisse , il leur incombe d'apporter la preuve du lien de causalité entre l'accident et le décès.

En l'espèce, une autopsie a été réalisée dans le cadre de l'enquête de police qui a été ouverte.

La caisse et la commission de recours amiable ont en vain demandé à M. [W] de leur communiquer le rapport d'autopsie.

M. [W] est mal fondé à se prévaloir du refus que lui a opposé le procureur de la République de Paris par courrier du 3 septembre 2013 pour justifier l'absence de communication du rapport d'autopsie. En effet, le Parquet de Paris a indiqué à M. [W] que cette demande devait être présentée par son médecin traitant accompagnée d'un pouvoir de sa part et d'une photocopie de pièce d'identité.

M. [W] n'ayant pas effectué ces démarches, son abstention doit être analysée en un refus d'autopsie de sa part . Il se trouve donc privé du bénéfice de la présomption d'imputabilité la caisse ayant estimé qu'au regard des antécédents cardiaques de la victime, le rapport d'autopsie était de nature à déterminer les causes du décès.

Dès lors , il appartient à M. [W] de rapporter, outre la matérialité , la preuve du lien de causalité entre le travail et le décès .

L'enquêteur de la caisse mentionne, qu'au moment du malaise, [N] [W] travaillait avec un intérimaire qu'il formait, que cela lui occasionnait une surcharge de travail, qu'il n'avait jamais évoqué de problèmes particuliers au travail avec sa famille, qu'il n'avait pas de problèmes de santé particuliers.

L'enquêteur ne fait que rapporter les propos que M. [W] lui a tenus mais n'a pas constaté ces éléments par lui - même.

En outre, devant les services de police, le docteur [S] , médecin traitant de [N] [W] avait indiqué que celui - ci était suivi pour des raisons médicales qui semblaient ne pas avoir de lien direct avec son décès. Dès lors , il apparaît que la victime faisait l'objet d'un suivi médical.

Le fait d'assurer la formation d'un intérimaire ne provoque pas nécessairement une surcharge de travail puisque ce salarié est avant tout destiné à apporter une aide dans le travail et son recrutement est lié à ses compétences professionnelles . Il n'est pas démontré que cela a provoqué stress et efforts physiques supplémentaires à la victime.

En conséquence, le lien de causalité entre le travail et le décès n'est pas démontré.

Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [V] [W] de sa demande de reconnaissance d'accident du travail.

Il sera rappelé que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale est gratuite et sans frais avec néanmoins condamnation de l'appelant qui succombe au paiement du droit fixe d'appel .

PAR CES MOTIFS ,

LA COUR ,

Confirme le jugement entrepris

Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;

Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144 - 10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au 10ème du montant mensuel du plafond prévu par l'article L 241 - 3 et condamne M. [V] [W] au paiement de ce droit s'élevant à 331,10€ .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 16/04164
Date de la décision : 14/12/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°16/04164 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-14;16.04164 ?
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