RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRÊT DU 12 Décembre 2018
(n° , 07 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/08095 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3QH5
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Décembre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 14/09351
APPELANTE
Madame [W] [J]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 1]
comparante en personne,
assistée de Me Caroline BARADEL, avocat au barreau de PARIS, toque : R90
INTIMEE
SASU PETIT BATEAU
[Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : 542 880 125
représentée par Me Arnaud TEISSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020 substitué par Me Fadi SFEIR, avocat au barreau de PARIS, toque : K0020
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Véronique PAMS-TATU, Président de chambre
Madame Françoise AYMES-BELLADINA, conseiller
Madame Florence OLLIVIER, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 5 juillet 2018
qui en ont délibéré
Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, président de chambre et par Madame Valérie LETOURNEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu les conclusions de Madame [W] [J] et celles de la société SASU PETIT BATEAU visées et développées à l'audience du 17 octobre 2018.
EXPOSE DU LITIGE
La société PETIT BATEAU a engagé Madame [J] par un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2010, en qualité de chef de projet export, statut cadre, coefficient 400 de la convention collective de l'industrie textile.
Au moment de la rupture elle était «' Export Area Manager' » coefficient 500 moyennant une rémunération mensuelle de 3.535 euros brut, plus une part variable représentant 15% de son salaire de base annuel liée à des objectifs personnels et les résultats économiques de la société sur son périmètre de responsabilité.
Par lettre du 25 avril 2014, Madame [J] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 12 mai 2014 compte tenu des congés de la salariée au 5 mai et mise à pied à titre conservatoire' ; par lettre en date du 15 mai 2014, la société PETIT BATEAU a licencié Madame [J] pour faute grave, lui reprochant un manquement à l'obligation de confidentialité en diffusant sur son compte FACEBOOK une photographie de la nouvelle collection printemps/été 2015 et une insuffisance professionnelle.
Contestant le bien-fondé de la rupture de son contrat de travail, Madame [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 10 juillet 2014, qui, par jugement du 15 décembre 2015, a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse et a condamné la société PETIT BATEAU à lui verser les sommes suivantes sur la base d'un salaire mensuel moyen de 5.546,46 euros :
- 16.639,38 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,
- 1.663,93 euros à titre de congés payés afférents,
- 4.251,27 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
- 1.137,64 euros à titre de salaire durant la période de la mise à pied conservatoire,
- 113,76 euros au titre des congés payés afférents,
Lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation et jusqu'au jour du paiement,
Rappelé l'exécution provisoire de droit à titre provisoire dans la limite de neuf mois de salaires,
- 700 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.
Le conseil a ordonné la remise des bulletins de paye, de l'attestation Pôle emploi et du certificat de travail conformes à la décision,
Madame [J] a été déboutée du surplus de ses demandes notamment de sa demande en nullité de la convention de forfait-jours et des heures supplémentaires, de contrepartie au repos et d'indemnité pour travail dissimulé et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en licenciement brutal et vexatoire.
La société PETIT BATEAU a été déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée aux dépens.
Par déclaration du 10 février 2016, Madame [J] a régulièrement interjeté appel et sur réinscription par lettre datée du 27 mars 2017 elle demande à la cour de dire que la convention de forfait est nulle, que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de confirmer le jugement sur les sommes allouées et y ajoutant de condamner la société PETIT BATEAU les sommes de' :
- 88.743,36 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 11.092,92 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,
- 33.278,76 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
- 44.598,68 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires,
- 4.459,82 euros brut à titre de congés payés afférents,
- 13.745,50 euros à titre de contrepartie obligatoire en repos,
- 1.374,53 euros à titre de congés payés afférents,
Ces sommes portant intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil de prud'hommes,
- 4.000 euros sur le fondement de l'article de 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens et d'ordonner la remise sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir d'un bulletin de salaire, d'une attestation Pôle emploi et d'un certificat de travail conformes.
La société PETIT BATEAU demande à la cour de :
constater que le licenciement repose sur une faute grave,
constater la validité de la convention de forfait jours,
en conséquence,
- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a jugé que le licenciement de Madame [J] ne repose pas sur une faute grave, de débouter Madame [J] de ses demandes et de la condamner à lui verser une somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel.
SUR CE,
Sur le licenciement
Madame [J] a été licenciée pour faute grave le 15 mai 2014, en ces termes' :
«' Vous occupez actuellement le poste d'export Area Manager sur la zone Scandinavie (depuis septembre 2013), Amérique du Sud, Balkans et Afrique.
A ce titre, vous êtes en charge de d'assurer la gestion commerciale et l'optimisation du portefeuille clients dans votre zone géographique de responsabilité, et ce afin d'augmenter le chiffre d'affaires de l'entreprise. Vos fonctions vous donnent ainsi accès à des informations sensibles sur la stratégie commerciale et opérationnelle de l'entreprise.
Nous sommes pourtant au regret de constater que vous avez gravement manqué à l'obligation de confidentialité qui résulte de votre contrat de travail.
Le mardi 22 avril 2014, vous avez assisté à la présentation de la collection Printemps/Eté de 2015 qui sera en vente dans nos magasins d'ici un an.
Cette présentation était organisée au bénéfice exclusif des commerciaux de Petit Bateau dont vous faites partie, afin que ceux-ci puissent s'approprier la collection à venir.
Or nous sommes alertés sur le fait que, ce même jour, vous avez publié une photographie de la nouvelle collection sur votre compte de réseau social Facebook, ce dont nous avons pu nous rendre compte par nous-même.
En divulguant cette photographie, vous avez violé votre obligation contractuelle de confidentialité inscrite à l'article 12 de votre contrat de travail «' Madame [W] [J] s'engage formellement à ne divulguer à qui que ce soit aucun renseignement ni document sur l'entreprise de marque Petit Bateau se déclarant à cet égard lié par le secret professionnel le plus absolu. Cette obligation de secret demeurera même après la fin du présent contrat quelle qu'en soit la cause' ».
Occupant des fonctions commerciales au sein de la société, vous savez pourtant parfaitement que le contenu de la future collection est strictement confidentiel et ne doit être divulgué sous aucun prétexte, en particulier à des personnes étrangères à la société.
Le caractère confidentiel des collections à venir vous a en tout état de cause rappelé par un courrier de votre manager [H] [S], le 25 octobre 2013' ; ce courriel interdisait expressément toute diffusion de photographies de futures collections.
Vous saviez également parfaitement que toute utilisation de la marque Petit Bateau sur les réseaux sociaux par les salariés est interdite afin de maîtriser la communication et de préserver l'image de notre société.
En agissant de la sorte vous avez pris le risque de perturber nos actions de communication sur une collection future et de dévoiler notre future collection à la concurrence. Vous comptez d'ailleurs dans votre réseau d'amis Facebook des nombreux professionnels de la mode et de la distribution appartenant à des entreprises telles que Kenzo, Jacadi, H&M et Zalando.
Ces agissements sont gravement préjudiciables à Petit Bateau qui fait face à une concurrence de plus en plus rude sur son marché.
La faute que vous avez commise se double d'une insuffisance professionnelle caractérisée. Il résulte ainsi de votre dernière évaluation que votre performance sur l'année 2013 est très insuffisante.
La progressive dégradation de vos relations avec certains de nos partenaires (Brésil, Croatie) tout au long de l'année 2013 a finalement conduit à la demande desdits partenaires de ne plus travailler avec vous, obligeant ainsi votre manager à reprendre en direct certains de vos dossiers. Cette attitude a été néfaste pour l'entreprise, qui a failli voir ses relations avec des partenaires clés compromises.
Vous avez également failli à développer notre présente dans certains pays comme en Turquie, où aucun contrat avec plan d'ouvertures n'était signé en 2013 contrairement à l'objectif qui vous était fixé.
Concernant l'atteinte des objectifs chiffrés, vos résultats de prise d'ordre'qui mesurent votre performance directe sont en décroissance de 23 % depuis 2011 alors que l'ensemble de la zone export affiche au global une croissance de 36 % au cours de la même période. Ainsi vos résultats de prise d'ordre sont de 1544 K€ en 2011, 1229 K€ en 2012 et de 1193 K€ en 2013' ;
Dans ce contexte vous vous autorisez à enfreindre vos engagements contractuels et les règles en vigueur au sein de l'entreprise en diffusant des images de notre défilé interne.
L'ensemble des faits exposés rendent impossible la poursuite de notre collaboration.
Lors de l'entretien préalable, vous n'avez pas nié avoir mis en ligne les photos du défilé Printemps Eté 2015 sur votre compte Facebook. Pour autant vous n'avez pas souhaité donner d'explications à votre comportement ' nous avons décidé de vous licencier pour faute grave'' »
Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à l'employeur d'établir la réalité des griefs qu'il formule. La lettre de licenciement fixe les limites du litige.
Il doit être rappelé que seul le premier grief peut fonder une faute grave, l'insuffisance professionnelle invoquée ne pouvant justifier qu'un licenciement pour cause réelle et sérieuse.
Madame [J] ne conteste ni l'obligation de confidentialité incluse à l'article 12 de son contrat de travail rappelée dans la lettre de licenciement, ni avoir reçu un courriel de Monsieur [S] le 25 octobre 2013, dont elle était destinataire, rappelant l'interdiction de diffusion de photographies de futures collections, la société produisant aussi le message du 25 octobre 2012 de la directrice internet de la société sur la maîtrise de l'image Petit Bateau et l'interdiction de toute page sur les réseaux sociaux émanant de salariés, partenaires et clients, message adressé notamment à Monsieur [S] pour diffusion à ses équipes, ni avoir reçu le 3 février 2014 la charte informatique dont elle a pris connaissance qui prévoit notamment en son article 7.2 l'interdiction de diffuser des informations sur le groupe via des sites internet, des forums, des groupe d'information ou des conversations en ligne en dehors des cas limitativement autorisés par le service communication prévu à l'article 7.3.
Nul ne peut ignorer que Facebook, qui est un réseau accessible par connexion internet, ne garantit pas toujours la confidentialité nécessaire.
Et c'est vainement que Madame [J] prétend que l'interdiction ne concernerait que le compte Instagram ou tout autre site internet accessible au public et que la photographie diffusée par elle n'aurait été mise en ligne que sur son compte Facebook et uniquement auprès de ses amis, arguant d'un procédé déloyal pour accéder à sa page personnelle, d'une intrusion abusive et illicite dans sa vie privée et de l'absence de trouble au sein de l'entreprise, alors que' :
- ses «' amis' » sont plus de 200 et sont des professionnels de la mode travaillant pour Petit Bateau sans avoir eu accès au défilé du 22 avril 2014 confidentiel et destiné aux commerciaux, ou travaillant auprès d'entreprises concurrentes tels que ceci ressort des pièces produites sur les profils professionnels de certains «' amis' » de Mme [J],' ce qui dépasse la sphère privée ;
- la salariée ne peut garantir l'absence de diffusion dans un cercle encore plus large par ces «' amis' » dans un secteur très concurrentiel où l'employeur justifie d'agissements de contrefaçon' ;
- il n'est nullement justifié d'une pratique admise au sein de la société, le mail d'octobre 2013 démontrant l'inverse' ;
- l'employeur n'a commis aucun fait illicite ou procédé déloyal d'atteinte à la vie privée, ayant été informé de cette diffusion par un des «' amis' » de Madame [J] travaillant au sein de la société tel que ceci résulte du courriel de Madame [P] du 24 avril 2014 à la direction qui a joint la photographie litigieuse représentant une prise de vue du défilé adulte en «' avant 1ère' » avec six tenues différentes sur la mode de l'été suivant, celle-ci s'étonnant à juste titre de trouver sur Facebook une photographie de la future collection' ;
- l'employeur a fait procéder à un constat d'huissier pour contrecarrer la contestation initiale de Madame [J] sur le fait que le compte Facebook ne serait pas peut être pas le sien' et il est sans intérêt que ce constat ait été effectué après le licenciement, l'employeur ayant dès la sanction des éléments suffisamment probants sur l'auteur et les conséquences de cette diffusion ;
- il importe peu que les modèles en cause dans lesquels apparaissaient un imprimé inédit n'aient pas été copiés ou que la société ait choisi de diffuser quelques articles de la nouvelle collection dès juillet 2014 dans le salon mode Who's Next avec d'autres professionnels, la société Petit Bateau étant maître de son image et de sa communication' ;
- enfin, il importe peu que cette communication par Madame [J] soit le fruit d'une négligence et non d'une intention frauduleuse, le non-respect de l'obligation de confidentialité par Madame [J] est établi et ce malgré un rappel en octobre 2013.
Au regard de l'interdiction de la société sur une communication extérieure rappelée en 2012 et 2013 et ciblant les réseaux sociaux, Madame [J] a commis une faute grave en violant l'obligation de confidentialité imposée par l'employeur particulièrement justifiée par le secteur de la société dans laquelle la salariée travaillait depuis quatre ans à un poste important' ; la mise à pied à titre conservatoire était justifiée compte tenu des circonstances, et il n'est nullement justifié de conditions brutales et vexatoires ; en conséquence le jugement sera infirmé et Madame [J] déboutée de ses demandes au titre de la rupture sans qu'il soit besoin d'examiner le second grief.
Sur le forfait jour, les heures supplémentaires, la contrepartie obligatoire en repos et le travail dissimulé
Madame [J] prétend à la nullité du forfait jour contenu dans son contrat de travail au motif qu'il s'agit d'une convention individuelle, et que le nombre de jours travaillés n'est pas précisé' et produit diverses pièces sur les heures supplémentaires effectuées ; l'employeur soutient que la convention de forfait est valide, que depuis son engagement en 2010 la salariée connaissait le nombre de jours travaillés puisqu'ils étaient portés sur les bulletins de paye ainsi que les jours de RTT, qu'il produit à cet effet les plannings au nom de la salariée et ajoute qu'il existait un entretien annuel permettant d'appréhender la charge de travail, que Madame [J] ne s'est jamais plainte de devoir effectuer des heures supplémentaires et produit une attestation d'une collègue de travail selon laquelle Madame [J] n'effectuait pas d'heures supplémentaires.
Pour recourir au forfait en jours, des conditions doivent être réunies :
' ' une convention ou un accord collectif doit autoriser expressément le recours à ce type de forfait,
' ' chaque salarié concerné doit donner son accord' matérialisé par la signature d'une convention individuelle de forfait.
En l'espèce, la convention collective nationale de l'industrie textile prévoit expressément la possibilité du recours aux appointements forfaitaires pour les cadres' ; le contrat de travail mentionne l'absence d'horaire précis en considération de la large initiative et indépendance dans l'exercice de ses fonctions' ; mais ni la convention collective, ni le contrat de travail ne précisent le nombre de jours travaillés alors que la convention collective indique que l'horaire servant de base à l'établissement du forfait (les bases de l'horaire forfaitaire et les conditions de ses variations) devra être précisé dans la lettre d'engagement ou dans une notification ultérieure.
Le 18 janvier 2012 un accord collectif d'entreprise a organisé la mise en 'uvre du forfait jour en prévoyant notamment certaines obligations de repos quotidien et hebdomadaire et de contrôle des jours travaillés mais n'a pas fixé un nombre de jours annuel ou un nombre d'heures.
Toutefois cet accord est postérieur à l'engagement de la salariée et aucune notification n'est intervenue à cette période, de sorte que la convention de forfait est nulle, ce dont il résulte que le temps de travail du salarié était soumis au droit commun applicable, c'est-à-dire à l'article L. 3121'10 du code du travail qui fixe à 35 heures la durée hebdomadaire légale de travail.
Madame [J] est fondée à réclamer le paiement d'heures supplémentaires.
Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande. Les heures supplémentaires doivent avoir été effectuées à la demande de l'employeur ou à tout le moins avec son accord implicite et les heures supplémentaires doivent être nécessaires à la réalisation de sa mission.
Madame [J] produit notamment deux tableaux établis pour les besoins de la procédure' : un tableau sur le nombre de jours travaillés et d'heures mensuelles sans qu'aucune année ne soit mentionnée sur les feuilles produites et un autre tableau par an et par semaine ainsi qu'un relevé de ses vols en avion qui fait état de nombreux déplacements.
Or les tableaux produits sans aucun horaire d'arrivée et de départ ne permettent pas à l'employeur de pouvoir répliquer précisément' ; de plus la société PETIT BATEAU justifie d'erreurs de la salariée notamment lorsqu'elle sollicite des heures supplémentaires des jours où elle est en RTT et produit une attestation d'une salariée, Mme [A] qui occupait le bureau voisin du sien en 2013 et atteste qu'elles arrivaient et partaient en même temps et bénéficiaient de pauses déjeuner et qu'elles ne faisaient pas d'heures supplémentaires ; l'employeur démontre aussi que certains déplacements indiqués dans le relevé des vols d'avion étaient des déplacements personnels ou que des déplacements mentionnés par elle ne correspondent au relevé de vols qu'elle produit' ; la cour observe en outre que ce relevé ne mentionne aucun horaire d'avion' ; enfin aucune des attestations produites par la salariée et émanant de ses anciens supérieurs hiérarchiques n'évoquent des heures supplémentaires ou au moins un temps de travail important et aucune pièce et notamment des courriels durant la relation contractuelle ne permet de déduire une surcharge de travail et l'accomplissement d'heures supplémentaires.
En conséquence non seulement l'employeur contredit utilement les pièces produites par Madame [J] mais démontre l'absence de sincérité des tableaux présentés.
Au regard des éléments communiqués par les parties, la cour a la conviction que les quelques heures supplémentaires accomplies par la salariée ont été récupérées par elle en récupération ou en jours de RTT et que celles sollicitées par la salariée ne sont pas justifiées, et n'étaient ni nécessaires à l'exercice de sa mission, ni effectuées à la demande de l'employeur, ni même avec son accord implicite.
En conséquence, Madame [J] sera déboutée de ses demandes étant rappelé en outre que concernant l'indemnité pour travail dissimulé, il appartient au salarié de caractériser une intention frauduleuse de l'employeur, laquelle ne se déduit pas du seul fait que l'employeur applique un forfait jours annulé.
L'équité et la solution du litige conduisent à condamner Madame [J] qui a interjeté appel à payer à la société PETIT BATEAU une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirmant le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Dit que le licenciement pour faute grave est fondé,
Déboute Madame [W] [J] de ses demandes au titre de la rupture,
Dit que la convention de forfait est nulle,
Déboute Madame [J] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, contrepartie obligatoire en repos, et travail dissimulé,
Condamne Madame [J] à payer à la société SASU PETIT BATEAU la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [J] aux entiers dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT