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11/12/2018 | FRANCE | N°13/07586

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 11 décembre 2018, 13/07586


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRÊT DU 11 Décembre 2018

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 13/07586 - N° Portalis 35L7-V-B65-BSDIR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/11701





APPELANTE

Madame [L] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date n

aissance 2] 1956 à ALGERIE

représentée par Me Emilie DENEUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1927 substituée par Me Sophie ATTIA RUBEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1658


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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRÊT DU 11 Décembre 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 13/07586 - N° Portalis 35L7-V-B65-BSDIR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Juin 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/11701

APPELANTE

Madame [L] [S]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

née le [Date naissance 2] 1956 à ALGERIE

représentée par Me Emilie DENEUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1927 substituée par Me Sophie ATTIA RUBEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1658

INTIMEE

SARL SAINT CLAIR

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

N° SIRET : 490 031 713 00012

représentée par Me Candice VIER CAZIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1837

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de Chambre

Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère

Madame Laurence SINQUIN, Conseillère

Greffier : Mme Sylvie FARHI, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de Chambre et par MadameValérie LETOURNEUR, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [L] [S] a travaillé pour la société SAINT CLAIR à compter du 23 juillet 2007. Un contrat de travail à durée déterminée a été signé entre les parties pour la période du 19 octobre 2007 au 18 janvier 2008 visant ses fonctions d'employée polyvalente,. Elle a conclu un contrat de travail à temps partiel à durée indéterminée à compter du 5 mai 2008.

Madame [S] a, le 12 septembre 2011, adressé à la société SAINT CLAIR la lettre suivante :

'Monsieur, j'ai un contrat avec vous depuis le 5 mai 2008 et vous ne l'avez pas respecté. Pour cela je vous informe que je quitte votre entreprise et je vous prie d'en prendre acte'.

Par jugement rendu le 18 juin 2013, le conseil de prud'hommes de Paris a pris acte de ce que la société SAINT CLAIR reconnaissait devoir à Madame [S] la somme de 3823,34 euros à titre de congés payés, a condamné la société en tant que de besoin au paiement de cette somme et débouté Madame [S] du surplus de ses demandes.

Madame [S] a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 31 juillet 2013

Par conclusions visées au greffe le 22 octobre 2018 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Madame [S] demande l'infirmation du jugement, voir dire que sa lettre en date du 12 septembre 2011 constitue une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause et sérieuse et la condamnation de La société SAINT CLAIR à lui régler les sommes suivantes:

À titre principal (salaire mensuel brut de 1 787,09 euros) :

-rappel de salaires pour heures non déclarées : 56 415, 80€

et congés payés afférents : 5 641,58€

-rappel pour jours fériés non payés : 3 470, 88€

et congés payés afférents : 347,08€

-rappel pour deux jours de repos hebdomadaires non octroyés : 24 508, 32€

et congés payés afférents : 2 450,83€

Indemnités consécutives au licenciement sans cause réelle et sérieuse :

-Indemnité légale de licenciement : 1 429,67€

-Indemnité de préavis : 3 574,18€

et congés payés afférents : 357, 41€

-Indemnité de congés payés non pris restant dus : 3 325, 02 €

-Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 10 722,54€

-Indemnités forfaitaires pour travail dissimulé : 10 722,54€

À titre subsidiaire (salaire mensuel brut de 805,90 euros) :

-rappel de salaires pour heures non déclarées : 56 415, 80€

et congés payés afférents : 5 641,58€

-rappel pour jours fériés non payés : 1 735, 44€

et congés payés afférents : 173, 54€

-rappel pour deux jours de repos hebdomadaires non octroyés : 11 052,96€

et congés payés afférents : 1 105, 29€

Indemnités consécutives au licenciement sans cause réelle et sérieuse :

-Indemnité légale de licenciement : 483,54€

-Indemnité de préavis : 1 611,80€

et congés payés afférents : 161,18€

-Indemnité de congés payés non pris restant dus : 3 325,02€

-Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 4 835,40€

-Indemnités forfaitaires pour travail dissimulé : 4 853,40€

200euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Voir dire que les créances à caractère salarial porteront intérêts à compter de la saisine du Conseil des Prudhommes et celles à caractère indemnitaire à compter du prononcé de la décision à intervenir.

Voir ordonner la remise des documents de fin de contrat : bulletins de paie et certificat de

travail, attestation de Pôle emploi conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 €

par jour et par document.

Par conclusions visées au greffe le 22 octobre 2018 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, La société SAINT CLAIR demande la confirmation du jugement, le rejet des demandes de Madame [S], voir constater qu'elle a déjà réglé la somme de 3823,34 euros,. Elle sollicite la condamnation de Madame [S] à lui régler la somme de 805,90 euros à titre d'indemnité de préavis non effectué ainsi que celle de 3000 € sur le fondement l'article 700 du code de procédure civile

La Cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

Il a été demandé à l'audience de voir retirer des débats les pièces 6 et 7 compte tenu de la tardiveté de leur communication.

MOTIFS

La procédure étant ici orale et les pièces 6 et 7 de l'appelante étant uniquement constituées d' une enveloppe fermée portant cachet de la poste et d' une enveloppe ouverte contenant un courrier du 21 juillet 2011 d'ores et déjà communiqué aux débats, il ne sera pas fait droit à la demande visant leur rejet;

-Sur l'exécution du contrat de travail

Madame [S] fait valoir qu'elle a effectué de nombreuses heures de travail supplémentaires non rémunérées sur la période s'étendant du 23 juillet 2007 au 23 juillet 2011 tandis que l'employeur s'est livré à du travail dissimulé sur cette période. Elle fait valoir qu'elle travaillait 40 heures par semaine;

Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ;

Le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;

Le contrat de travail à durée déterminée du 19 octobre 2007 retient que la durée hebdomadaire de travail de Madame [S] est de 25 heures cinq jours par semaine. Celui du 5 mai 2008 retient qu'elle travaille 70 heures par mois à raison de 18 heures hebdomadaires du lundi au samedi de 10 heures à 13 heures. Ces horaires ont été modifiés par un avenant du 10 mai 2008 passant de 13 h à 16 h du lundi au samedi à compter du 15 mai 2008.

La salariée produit aux débat sept attestations de clients de l'hôtel visant qu'elle travaillait dans les chambres tous les jours de la semaine, les jours fériés et les dimanches. Dans leurs attestations, Monsieur [E] et Madame [Y] énoncent que pendant trois mois , l'intéressée était également gardienne de nuit jusqu'à une heure du matin tandis que Madame [F] mentionne qu'elle nettoyait aussi les vêtements,

Ces éléments , rapportés en des termes circonstanciés, sont de nature à étayer la demande,

Au titre des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, la société SAINT CLAIR produit des attestations de clients et salariés visant l'irrégularité du travail de la femme de ménage, le réceptionniste ayant travaillé pour la période du 5 avril 2007 au 30 novembre 2008 mentionnant cependant que celle-ci travaillait de 13 heures à 16h30 du lundi au samedi ce qui ne correspond pas exactement aux termes contractuels en date des 5 mai et 10 mai 2008;

Il n'est cependant pas produit par l'employeur un relevé des horaires effectivement réalisés par la salariée.

Étant ici retenu, sans être démenti, que l'hôtel du château, hôtel social hébergeant pour des périodes longues des personnes socialement en difficulté, est composé de 20 chambres, il sera retenu, sur la base de 5 heures de travail par jour, une créance de Madame [S] au titre des heures supplémentaires d'un montant de 26'994,85 euros outre 2699 € au titre des congés payés afférents ce pour la période s'étendant du 23 juillet 2007 au 23 juillet 2011 et compte tenu d'heures effectuées soit sur instructions de l'employeur, à tout le moins avec son accord implicite pour faire face à la réalisation de la mission ;

Après réintégration des heures supplémentaires rémunérées, le salaire de référence est retenu au montant de 1239,60 euros ;

Etant relevé que de nombreuses heures n'ont pas été déclarées sur les bulletins de salaire pendant plusieurs années malgré un travail nécessairement connu de l'employeur qui se trouvait sur les lieux en même temps que l'intéressée, il sera alloué à Madame [S] des dommages-intérêts pour travail dissimulé à hauteur de 7437,60 euros ;

Les attestations des clients sont par ailleurs concordantes pour établir le travail de Madame [S] certains jours fériés tandis qu' aucune mention n'apparait sur ses bulletins de salaire relativement à leur rémunération ;

En l'absence de la justification de tels paiements et sur la base des jours fériés travaillés de 2008 à 2011 tels que ressortant des calendriers de chacune de ces années , la société SAINT CLAIR sera condamnée à lui régler la somme de 1446,48 euros;

S'agissant des congés payés, la cour retient qu'il n'y a pas lieu à contestation alors que l'employeur a réglé la somme de 3823,34 euros à ce titre;

S'agissant du respect des jours de repos hebdomadaire, il ressort des termes du contrat de travail, que Madame [S] travaillait du lundi 13h au samedi 16h sans autre mention et sans qu'il ne soit donc justifié du respect par l'employeur des termes de la convention collective stipulant en son article 21 §3 que les salariés ont droit à deux jours de repos successifs;

En conséquence, une somme de 17'000,16 euros outre congés payés afférents doit être mise à la charge de la société SAINT CLAIR de ce chef.

- Sur la rupture

Il est rappelé que le salarié qui reproche à l'employeur des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du travail peut prendre acte de la rupture de son contrat;

En l'espèce, il a été retenu par la cour que Madame [S] a été victime de travail dissimulé, que de nombreuses heures de travail ne lui ont pas été rémunérées;

Elle justifie également d'une déclaration de main courante du 27 juin 2011 aux termes de laquelle elle se plaint des cris constants de son employeur à son encontre et du harcèlement dont elle fait l'objet

Ces seuls éléments justifient de manquements suffisamment graves de l'employeur pour faire produire à la prise d'acte de la rupture du contrat de travail formalisée dans la lettre du 12 septembre 2011 les effets d'un licenciement abusif;

Sur la base d'un salaire de référence d'un montant de 1239,60 euros, l'indemnité légale de licenciement sera fixée à la somme de 991,68 euros,

L'indemnité compensatrice de préavis est d'un montant de 2479,20 euros outre congés payés afférents,

Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée , de son âge, de son ancienneté depuis le 23 juillet 2007, et des conséquences de la rupture à son égard, telles qu'elles résultent des pièces et des explications fournies, il lui sera alloué une somme de 7437,60 euros € à titre de dommages-intérêts.

La société SAINT CLAIR devra remettre à Madame [S] une attestation Pôle emploi, un certificat de travail et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt, les circonstances de l'espèce ne justifiant pas d'assortir cette obligation d'une astreinte.

Il est rappelé que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit en l'espèce le 6 septembre 2011 et que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la présente décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Rejette la demande visant à voir écarter les pièces 6 et 7 de l'appelante,

Infirme le jugement entrepris excepté s'agissant des sommes dues au titre des congés payés,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la prise d'acte de la rupture formalisée le 12 septembre 2011 a les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société SAINT CLAIR à payer à Madame [S] les sommes suivantes

-26 994,85 euros à titre rappel de salaires au titre des heures supplémentaires et 2699 euros au titre des congés payés afférents ,

- 1446,48 euros à titre de rappel pour jours fériés non payés et 144euros au titre des congés payés afférents

- 17000,16 euros à titre de rappel de salaire au titre des deux jours de repos hebdomadaires non octroyés et 1700 euros au titre des congés payés afférents,

- 991,68 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ,

- 2479,20 euros à titre d'indemnité de préavis et 247 euros au titre des congés payés afférents

- 7437,60 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 7437,60 euros à titre d'indemnités forfaitaires pour travail dissimulé

Dit que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter du 6 septembre 2011 et les créances indemnitaires à compter de la présente décision,

Ordonne à la société SAINT CLAIR de délivrer à Madame [S] une attestation Pôle emploi , un certificat de travail et une attestation Pole Emploi conformes à la présente décision,

Dit n'y avoir lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte,

Vu l'article 700 du code de procédure civile

Condamne La société SAINT CLAIR à payer à Madame [S] en cause d'appel la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne La société SAINT CLAIR aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 13/07586
Date de la décision : 11/12/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K3, arrêt n°13/07586 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-12-11;13.07586 ?
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