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30/11/2018 | FRANCE | N°16/15077

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 30 novembre 2018, 16/15077


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 30 Novembre 2018



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15077 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2EJB



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Octobre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-01535



APPELANTE

C.I.P.A.V.

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me

Stéphanie PAILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : R132 substituée par Me Elise PARMENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R132



INTIMÉE

Madame [V] [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

rep...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 30 Novembre 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15077 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2EJB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Octobre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-01535

APPELANTE

C.I.P.A.V.

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Stéphanie PAILLER, avocat au barreau de PARIS, toque : R132 substituée par Me Elise PARMENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R132

INTIMÉE

Madame [V] [O]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Dimitri PINCENT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0322

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Adresse 3]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre, et

M. Lionel LAFON, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère

M. Lionel LAFON, Conseiller

Greffier : Mme Typhaine RIQUET, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- délibéré du 09 Novembre 2018 prorogé au 23 Novembre 2018 puis au

30 Novembre 2018, prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (ci-après la CIPAV) d'un jugement rendu le

24 octobre 2016 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à Mme [V] [O].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.

Il suffira de rappeler que Mme [V] [O] s'est vu refuser par la CIPAV le bénéfice de la liquidation de sa pension de retraite de base avec effet progressif et de retraite complémentaire au motif qu'elle n'était pas à jour de ses cotisations, son chèque de paiement de 4.406€ ayant été volé et encaissé par un tiers.

Mme [O] a saisi la commission de recours amiable le 8 février 2016, sollicitant la liquidation des pensions ainsi que la production de l'arrêté de débet venant sanctionner le comportement du comptable public de la CIPAV relativement à des détournements de chèques.

En l'absence de réponse dans le délai réglementaire requis d'un mois, Mme [O] a formé un recours contre la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris.

Par jugement du 24 octobre 2016, ce tribunal a :

-débouté la CIPAV de toutes ses demandes,

-dit que la caisse devra créditer le compte de retraite complémentaire de Mme [O] de la somme de 4.406€ au titre de l'année 2010, valider les trimestres et les points de retraite correspondants et liquider la retraite complémentaire à compter du 1er octobre 2014 avec effet progressif, et à compter du 1er avril 2016, à taux majoré avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er avril 2014 avec capitalisation des intérêts,

-condamné la CIPAV à payer à Mme [O] la somme de 10 .000€ de dommages et intérêts et 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Retenant que les cotisations que Mme [O] entendait payer avec le chèque volé devaient être considérées comme encaissées en raison de la faute de la CIPAV dans sa gestion comptable.

C'est le jugement attaqué par la CIPAV qui fait déposer et soutenir par son conseil des conclusions écrites invitant la cour à :

-infirmer le jugement déféré,

et statuant à nouveau,

-rejeter les demandes de Mme [O]

-confirmer la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable Et, à titre reconventionnel,

-condamner Mme [O] au paiement de la somme de 4.406 € restant due au titre du régime complémentaire,

A l'appui de son appel, la CIPAV fait valoir que Mme [O] n'a pas saisi la commission de recours amiable de toutes les demandes faites devant la cour, que la pension de base de cette dernière a été liquidée avec effet au 1er avril 2014, qu'une nouvelle liquidation à taux majoré a été effectuée le 1er avril 2016, que la contestation afférente est donc sans objet, que sa retraite complémentaire n'a pu être réglée, Mme [O] n'étant pas à jour de ses cotisations puisque son chèque de 4.406€ a été détourné et ne lui est jamais parvenu ; qu'il lui appartient d'engager la responsabilité de sa banque qui a procédé au paiement d'un chèque falsifié.

Mme [O] fait déposer et soutenir par son conseil des conclusions écrites invitant la cour à :

-déclarer ses demandes recevables,

-confirmer le jugement déféré,

Y ajoutant,

-condamner la CIPAV à liquider à compter du 1er octobre 2014 avec effet progressif et à taux majoré à compter du 1er avril 2016 la pension de retraite complémentaire sur la base de ces points de retraite complémentaire avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250€ par jour de retard,

A titre subsidiaire,

-condamner la CIPAV à liquider à compter du 1er octobre 2014 avec effet progressif et à taux majoré à compter du 1er avril 2016 la pension de retraite complémentaire sur la base de ces points de retraite complémentaire correspondant aux cotisations versées et non détournées avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250€ par jour de retard,

En tout état de cause,

-confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la CIPAV à lui payer la somme de 10.000€ de dommages et intérêts,

-condamner la CIPAV à lui verser la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que ses demandes sont recevables au regard de la saisine de la commission de recours amiable ; que la CIPAV qui dispose de deux titres exécutoires, contre son agent comptable d'une part et contre les deux personnes condamnées pénalement d'autre part, doit être considérée comme ayant été réglée ; que celle-ci est fautive dans le détournement de plusieurs centaines de chèques, dont le sien ; que le quantum des cotisations restant dues est erroné.

Il sera rappelé que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale est gratuite et sans frais avec néanmoins condamnation de l'appelant qui succombe au paiement du droit fixe d'appel.

SUR CE,

-Sur la recevabilité des demandes de Mme [O] :

Mme [O] n'aurait pas contesté devant la commission de recours amiable le montant des cotisations qui resteraient dues pour la retraite complémentaire ; or elle a bien contesté devant la dite commission le refus de liquidation de cette pension opposé par la CIPAV; la contestation du montant des cotisants dues ne constitue qu'un moyen à l'appui de la demande dont a été saisie la commission de recours amiable; de plus les demandes indemnitaires échappent à la règle de saisine de la commission de recours amiable; les demandes de Mme [O] sont parfaitement recevables.

-Sur la liquidation des pensions de retraite de Mme [O] :

Mme [O] a été affiliée à la CREA du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2003 puis à la CIPAV à compter du 1er janvier 2004, date de l'absorption de la CREA, au 30 septembre 2011, en qualité de formatrice à titre libéral ;

En raison de l'état de santé de son mari, elle a demandé le 27 mars 2013 une retraite progressive ;

La CIPAV a refusé de procéder à la liquidation de ces pensions au motif que l'intégralité des cotisations n'avait pas été réglée ;

La pension de base de Mme [O] a été liquidée, avec effet au 1er avril 2014, environ sept mois après la demande de l'intéressée. Ce retard est fautif, les statuts de la CIPAVne prévoyant pas que la liquidation de la pension de base ne puisse être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée. Ce retard s'inscrit d'ailleurs dans un contexte, constaté par la Cour des comptes, d'incurie de cette caisse qui ne fournit en l'espèce aucune explication.

Le retard de liquidation a entraîné un préjudice certain pour la bénéficiaire résultant du défaut de moyens de subsistance. Ce préjudice sera en conséquence réparé à hauteur de 5.000€ de dommages et intérêts.

Le litige porte donc encore sur le refus de la CIPAV de liquider la pension de retraite complémentaire de Mme [O].

L'article 3.16 des statuts du régime de retraite complémentaire dispose en effet que 'la liquidation de la pension ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension, ne soit acquittée.

En cas de paiement tardif, la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régulation...'

Il résulte des faits que Mme [O] a envoyé en avril 2010 un chèque à la CIPAV d'un montant de 4.406€ représentant le solde encore du selon la caisse, soit 2.959€ au titre de la retraite de base, 380€ de cotisations invalidité-décès, 313€ de régularisation au titre de la retraite de base 2008 et 754€ de cotisations de retraite complémentaire de classe 5; que ce chèque s'est révélé avoir été volé, falsifié et encaissé par un tiers ; que la CIPAV a demandé à plusieurs reprises à Mme [O] paiement des cotisations manquantes, ce que cette dernière a refusé de faire en raison de l'encaissement du chèque.

Si le moment auquel le chèque a été dérobé est contesté, il apparaît néanmoins que la CIPAV a été jugée fautive par la Cour des comptes si, en raison de son incurie dans la gestion comptable et de l'absence de fiabilité du circuit de paiement, plusieurs centaines de chèques ont pu être détournés pour un montant de 800.000€.

Par ailleurs, il apparaît que la CIPAV s'est constituée partie civile dans l'affaire correctionnelle au cours de laquelle un prévenu a été reconnu coupable de recel de 158 chèques volés à son préjudice notamment ; que les coauteurs ont été condamnés solidairement à indemniser les parties civiles à hauteur de 260.289€ à titre de dommages et intérêts.

Dés lors, la CIPAV ne peut sans contradiction se déclarer victime du vol du chèque de

M. [W] et en demander à nouveau le règlement au cotisant ; elle ne démontre pas que ce chèque n'était pas visé dans la procédure ni à tout le moins qu'elle n'aurait pas été indemnisée de ce fait.

Enfin, il apparaît que le ministère chargé des affaires sociales a pris un arrêté de débet pour la somme de 800.000€ à l'encontre de l'agent comptable de la CIPAV, dont la responsabilité a été établie pour n'avoir pas exercé toutes les diligences qui lui

incombaient ; la caisse ne fournit d'ailleurs aucun argumentaire sur cette situation.

La faute et la mauvaise foi de la CIPAV justifient que soient allouée à Mme [O] la somme de 5.000€ de dommages et intérêts au titre du refus de liquidation de la pension de retraite complémentaire.

Il y a donc lieu de confirmer la décision des premiers juges qui a considéré que le paiement des cotisations devait être considéré comme intégralement effectué, sans qu'il y ait lieu de refaire le calcul du montant des cotisations ;

Compte tenu de l'ancienneté des faits, une astreinte sera prononcée.

Il parait inéquitable de laisser à la charge de Mme [O] l'intégralité des frais irrépétibles; il lui sera alloué la somme de 2.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déclare l'appel recevable mais non fondé,

Déclare les demandes de Mme [V] [O] recevables,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a considéré que le paiement des cotisations avait été intégralement effectué et en ce qu'il a condamné la CIPAV à payer à Mme [V] [O] la somme de 10.000€ de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau,

Dit que la CIPAV devra créditer les comptes de Mme [V] [O] de la somme de 4.406€, à raison de 2.959 € au titre de la retraite de base, 380€ de cotisations invalidité-décès, 313€ de régularisation au titre de la retraite de base 2008 et 754€ de cotisations de retraite complémentaire de classe 5.

Condamne la CIPAV à liquider à compter du 1er octobre 2014 avec effet progressif et à taux majoré à compter du 1er avril 2016 la pension de retraite complémentaire sur la base de ces points de retraite complémentaire avec versement des arrérages correspondants et intérêts au taux légal à compter du 1er octobre 2014 et capitalisation des intérêts, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et passé ce délai sous astreinte de 250€ par jour de retard.

Déboute la CIPAV de toutes ses demandes

Condamne la CIPAV à verser à Mme [V] [O] la somme de 2.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144 - 10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au 10ème du montant mensuel du plafond prévu par l'article

L 241 - 3 et le condamne au paiement de ce droit s'élevant à 331,10€.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 16/15077
Date de la décision : 30/11/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L4, arrêt n°16/15077 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-30;16.15077 ?
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