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28/11/2018 | FRANCE | N°15/07619

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 28 novembre 2018, 15/07619


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 28 Novembre 2018

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/07619 et 15/08127- N° Portalis 35L7-V-B67-BWYB7



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 13/00581





APPELANTE

Madame [Z] [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]

née le [Date na

issance 1] 1959 à [Localité 3]

comparante en personne,

assistée de Me Julien BOUZERAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0570





INTIMEE

SA CLINIQUE DE L'[Localité 4]

[Ad...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 28 Novembre 2018

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/07619 et 15/08127- N° Portalis 35L7-V-B67-BWYB7

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 13/00581

APPELANTE

Madame [Z] [I]

[Adresse 1]

[Localité 2]

née le [Date naissance 1] 1959 à [Localité 3]

comparante en personne,

assistée de Me Julien BOUZERAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0570

INTIMEE

SA CLINIQUE DE L'[Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168 substitué par Me Aymeric DE LAMARZELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre

Françoise AYMES-BELLADINA, Conseillère

Madame Florence OLLIVIER, vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 05 juillet 2018

Greffier : Madame Sylvie FARHI, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre et par Madame Sylvie FARHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu les conclusions de Madame [Z] [I] et celles de la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] SA développées à l'audience du 3 octobre 2018.

EXPOSE DU LITIGE

La société SA MATERNITE a employé Madame [I] par contrat à durée déterminée à temps partiel en qualité d'infirmière à compter du 1erjuin 2005 ; après la fusion de la société MATERNITE et de la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] un contrat de travail à durée déterminée et à temps partiel a été conclu à compter du 1ermars 2007, puis un contrat à durée interminée à compter du 1erjuin 2007 ; par avenant du 1erdécembre 2010, la durée du travail a été porté à temps plein soit 35 heures par semaine.

La convention collective applicable était celle de l'hospitalisation privée à but lucratif du 18 avril 2002 et la société employait plus de 10 salariés.

Par une lettre datée du 31 mars 2013 remise en main propre, Madame [I] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 8 avril suivant avec mise à pied conservatoire.

Elle a été licenciée pour faute grave par lettre du 12 avril 2013 pour avoir introduit des médicaments et stupéfiants au sein de la clinique à l'intention des patients et d'avoir administré le 21 mars 2013 un comprimé d'ATARAX 100 mg à un patient alors que la pharmacie de la clinique était en rupture depuis le 17 janvier 2012 et que la production de cette molécule était arrêtée, l'employeur lui reprochant une mise en danger des patients.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, Madame [I] a saisi le 17 juin 2013 le conseil de prud'hommes de Longjumeau qui, par jugement du 29 juin 2015 a :
- Requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- Dit que la moyenne mensuelle des salaires était de 2.725,92 euros,
- Condamné la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] au paiement des sommes suivantes :
 1.199,51euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire, 
- 119,95 euros à titre de congés payés afférents, 
- 5.451,84 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 
- 545,18 euros à titre de congés payés afférents,  
- 4.245,11 euros à titre d'indemnité de licenciement, 
- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Lesdites sommes avec intérêts au taux légal à compter du 12 septembre 2013 jour de la convocation devant le bureau de conciliation, excepté la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui portera intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

- Rappelé l'exécution provisoire de la décision en application de l'article R 1454-28 du code du travail,

- Débouté Madame [I] de ses autres demandes, et la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] de sa demande reconventionnelle,

- Condamné la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] aux dépens comprenant les frais de timbre de 35 euros.

Par déclaration du 23 juillet 2015 Madame [I] a interjeté appel de cette décision et par déclaration du 3 août 2015, la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] a fait de même dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas discutées.

Par conclusions régulièrement communiquées, Madame [I] demande à la Cour de :
- infirmer le jugement, excepté sur les sommes allouées au titre du préavis, de l'indemnité de licenciement et du rappel de salaire sur la mise à pied à titre conservatoire,

- dire que la société LA CLINIQUE DE L'[Localité 4] ne prouve pas les griefs, que la plainte pénale a été classée sans suite, et qu'elle n'a fait l'objet d'aucune sanction, et de juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse

- condamner la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] à lui verser les sommes de :

- 54.579,96 € soit 18 mois de salaires à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 
- 27.289,98 € à titre de dommages et intérêts pour circonstances abusives et vexatoires soit 9 mois de salaire,

lesdites sommes portant intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,- 3 600 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 

Par conclusions régulièrement communiquées, la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] demande à la Cour :

de dire que le licenciement est fondé sur une faute grave, et d'infirmer le jugement de ce chef,

Et statuant à nouveau,

de débouter Madame [I] de ses demandes,

A titre reconventionnel,

de condamner Madame [I] au paiement de la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

 

SUR CE,

Sur la jonction

Madame [I] a régulièrement interjeté appel le 23 juillet 2015 du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 29 juin 2015 ; la société CLINIQUE DE L'[Localité 4] a également interjeté appel le 3 août 2015 du même jugement rendu entre les mêmes parties.

Deux dossiers ont été ouverts sous les numéros 15-07619 et 15-08127 ; il convient dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice d'ordonner la jonction des deux dossiers et de dire qu'ils porteront désormais le numéro 15-07619.

Sur le licenciement

Par lettre du 12 avril 2013, Madame [I] a été licenciée pour faute grave pour les faits suivants :

« Le 31 mars 2013, nous avons procédé à l'ouverture de deux sacs non identifiés entreposés dans un local technique au cours de laquelle nous avons pu constater que ces sacs vous appartenaient et contenaient des médicaments non disponibles au sein de la clinique ainsi que des stupéfiants à l'intérieur de l'un d'entre eux.

Ces substances ont également été constatées par la police. Par la suite nous avons procédé à votre mise à pied à titre conservatoire.

Compte tenu de vos fonctions d'infirmière, il vous appartient d'entretenir des relations de qualité avec les patients, de respecter les clauses du règlement intérieur, qui imposent des règles d'hygiène, de sécurité et de discipline.

Lors du contrôle nous avons pu constater que vous stockiez de votre propre initiative et sans que nous le sachions des médicaments dont certains sont extérieures à la clinique de l'[Localité 4] et d'autres des stupéfiants.

Au cours de l'entretien préalable vous avez reconnu rapporter certains produits non disponibles dans la clinique de l'[Localité 4] pour vos services de nuit.

Une telle pratique ne peut être admise au sein de notre établissement.

Plus grave encore, ces médicaments et stupéfiants étaient destinés aux patients de la clinique.

Le 21 mars 2013, une infirmière a signalé à la directrice des soins infirmiers que lors de la préparation de prémédications des opérés du jour, vous aviez préparé une cupule pour un patient où se trouvait un comprimé d'Atarax 100 mg. Or au sein de l'établissement, la pharmacienne a diffusé une note signalant qu'il y avait une rupture d'Atarax 100 mg depuis le 17 janvier 2012 ; La production de cette molécule (Atarax 100 mg) est arrêtée. Le comprimé destiné à ce patient ne pouvait donc provenir de la Pharmacie de la Clinique.

Un tel comportement, parfaitement inadmissible, peut avoir de graves conséquences pour la clinique de l'[Localité 4] tant au regard de sa réputation que des soins que nous nous devons de prodiguer aux patients.

Vous avez délibérément mis en danger certains patients en leur administrant certaines substances dont vous ne pouviez présager les effets ' ».

La société CLINIQUE DE L'[Localité 4] se prévaut d'une faute grave ; constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; en présence d'un licenciement pour faute grave, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve des faits reprochés et de leur gravité, ceux-ci étant contestés par le salarié ; la lettre de licenciement fixe les limites du litige.

L'employeur produit notamment :

une lettre adressée aux collaborateurs signée par Madame [I] le 15 décembre 2010 sur les bonnes pratiques en matière de médicaments (administration, tenue du chariot et commandes),

des documents relatifs à la gestion des médicaments et stupéfiants, de leur stockage et de leur délivrance de février et septembre 2013, et de janvier et février 2014 selon le numéro de version,

une lettre du 21 février 2013 adressée aux établissements de santé concernant la rupture de stock depuis le 17 janvier 2012 du médicament Atarax 100 mg et de l'arrêt de la commercialisation, mais la poursuite de l'Atarax 25 mg et un document indiquant que la dernière distribution au service de ce médicament a eu lieu le 25 mars 2012,

la liste des médicaments découverts dans le sac le 31 mars 2013 signée par le pharmacien qui ont été emmenés par les policiers,

le procès-verbal d'audition du directeur de la clinique, Monsieur [P] et une attestation de celui-ci qui a été prévenu par Mme [R], pharmacienne, sur la découverte du sac appartenant à Madame [I], sac qu'il n'a pas vu car les policiers l'avaient emmené, et qui rappelle l'interdiction d'introduire des médicaments de l'extérieur, de faire des réserves, d'entreposer des médicaments dans un placard non fermé à clef et accessible à tous, de la dangerosité de certains médicaments contenus dans le sac et de l'incident survenu avec la délivrance d'un comprimé d'Atarax 100 mg par Madame [I],

une lettre de l'architecte de la Clinique du 27 mai 2014 qui atteste qu'aucun incinérateur n'a été installé dans l'établissement,

une attestation de Madame [B] infirmière sur l'absence d'incinérateur au sein de la Clinique et l'absence de procédure autorisant les soignants à éliminer les médicaments provenant de l'extérieur,

une attestation de la pharmacienne, Madame [R] qui a été alertée lors de la découverte des sacs et a informé le directeur et appelé le commissariat et qui témoigne des pratiques au sein de la clinique et le refus rappelé aux équipes d'introduire tout médicament provenant de l'extérieur et la désinvolture de Madame [I] à ce sujet et son refus de se plier à la discipline ; le procès-verbal d'audition de la pharmacienne qui relate la découverte des sacs, précise qu'ils contenaient essentiellement des somnifères, anxiolytiques, antalgiques de classe 2 (dérivés morphines), confirme la liste faite, affirme que certains ne proviennent pas du stock de la pharmacie et ont donc été introduits de l'extérieur et qu'un médicament trouvé dans le sac est périmé alors que le stock de la pharmacie est contrôlé ; elle ajoute qu'au mépris des règles d'hygiène le sac contenait aussi des ampoules cassées d'Atarax et que le sac de Madame [I] contenait 90 comprimés alors que le stock de service est entre 5 à 10 comprimés de somnifères par semaine, et qu'il est interdit d'avoir un sac personnel, le matériel étant conservé dans le service selon des règles précises,

une attestation de Madame [D], infirmière, qui a été avertie par des collègues de la présence de deux sacs dans un placard servant de local technique, et de leur appel à la pharmacienne en raison du plan vigipirate, puis de l'arrivée de la police et de l'inventaire des sacs fait en présence de tous ainsi que de la prémédication concernant l'Atarax 100mg préparé par Madame [I] qu'elle savait être hors pharmacie, évènement dont elle avait averti le cadre et la pharmacienne ; un procès-verbal d'audition qui précise qu'elle a été appelée par des aides-soignantes qui avaient trouvé deux sacs sous une couverture dans un placard et que le sac noir était ouvert et qu'il y avait des ampoules cassées, confirmant le témoignage de Madame [V],

une attestation de Madame [V], aide-soignante relatant les mêmes faits sur les sacs, et le procès-verbal de son audition dans lequel elle indique avoir découvert la présence du sac dans le local technique non fermé en présence d'autres collègues sous une couverture sale et affirme que personne n'a fouillé le sac en attendant la police,

un procès-verbal d'audition de Madame [I] qui reconnaît la présence à la clinique des deux sacs lui appartenant, un étant son sac personnel et l'autre son sac de garde, qui reconnaît que le local n'était pas fermé à clef et donc accessible à tous et qui ajoute qu'elle fait comme cela depuis 20 ans et qu'elle n'est pas la seule, et que ceci lui évite des allers retours avec la pharmacie de service, et qu'elle donne les médicaments sur prescription écrite ou orale ; elle reconnait le sac présenté par la police et la plupart des médicaments comme lui appartenant à elle ou à son fils, dit que trois médicaments n'étaient pas dans son sac et accuse des personnes mal intentionnées d'avoir rajouté des médicaments pour la faire accuser.

Madame [I] conteste la présentation des faits ; elle soutient que si les sacs lui appartiennent, un contenait des médicaments qu'elle avait rapportés car elle déménageait et qu'elle destinait à la destruction par le biais de la collecte dans l'établissement, et que l'autre sac était son sac de garde qui lui permettait d'avoir les médicaments utiles la nuit lorsqu'elle effectuait son service alors que la pharmacie de la clinique est fermée et ajoutant qu'il s'agit d'une pratique courante ; elle soutient que le règlement intérieur ne prévoit aucune interdiction quant à l'introduction de médicaments personnels et que certains médicaments ne lui appartenaient pas, que les sacs ont été trouvés alors qu'elle n'était plus en service et que son sac a été ouvert sans témoin avant l'arrivée du directeur et de la police ; elle affirme qu'elle ne donnait les médicaments que sur prescription médicale écrite ou orale et que c'est la raison pour laquelle on a pu la voir administrer des médicaments sans prescription écrite et que le directeur a reconnu l'existence de cette pratique ; elle indique que les médicaments administrés provenaient de la clinique ou éventuellement des patients ; elle conteste avoir administré de l'Atarax 100 mg qui ne repose que sur la déclaration de Madame [D] ainsi que la présence de stupéfiants dans son sac, ajoutant que la plainte a d'ailleurs été classée sans suite ;

Elle produit notamment :

le règlement intérieur de la clinique qui précise que les médicaments sont acheminés vers le service de soins, dans des armoires de transfert spécifiques sécurisées, sous la responsabilité des infirmières et sont stockées dans des armoires fermées à clé dans la salle de soin et que les chariots d'urgence sont scellés avec une traçabilité quotidienne,

plusieurs attestations d'aides-soignantes déclarant que la salariée faisait un excellent travail et qu'elle était très professionnelle et n'avait jamais pris la décision de donner un médicament sans prescription (Mme [T], Mme [J], Mr [A] [X], Mme [S], Mme [Y]), ainsi que d'infirmières (Mme [C], Mme [W]) et de patients (Monsieur [M], Mme [O], Mme [F], Mme [L]),

une attestation de Mme [Q] qui assistait à l'entretien préalable dont elle donne un compte rendu et qui atteste que le reproche évoqué était la présence de médicaments dans un local technique ou placard non fermé à clé, que Madame [I] avait reconnu qu'il s'agissait de médicaments personnels y compris périmés et qu'elle destinait à l'incinérateur et que le directeur lui répliquait qu'elle ne pouvait amener ses médicaments pour les jeter et qu'il existait des pharmacies pour cela ; la salariée reconnaissait aussi, en l'absence d'une pharmacie ouverte la nuit, prendre des médicaments dans les boites de patients, ce qui soulevait l'étonnement du directeur répondant « c'est des procédures dont je n'ai pas connaissance, vous êtes à la seule personne à me dire ça », de même qu'elle indiquait que son sac était ouvert et accessible à tous sur le chariot de soin ce qui était la preuve qu'elle n'avait rien à cacher ; quant aux prescriptions par téléphone, le directeur reconnaissait qu'elles existaient et que ce n'était pas illégal.

S'il existe un doute sur la prémédication d'Atarax 100 mg qui ne repose que sur l'attestation de Madame [D], laquelle aurait averti la surveillante qui ne témoigne pas, en revanche la réalité des faits concernant l'introduction de médicaments de l'extérieur, l'existence d'un sac de garde et la présence de ces deux sacs dans un local technique non fermé à clef ne sont pas contestées.

De plus, il apparaît que Madame [I] qui destinait les médicaments de son propre sac à la destruction les avaient laissés dans ce local alors même qu'elle avait quitté son service sans s'inquiéter de les mettre dans le système de collecte ou à tout le moins en sécurité ; enfin même si trois médicaments n'ont pas été reconnus par la salariée, les autres médicaments essentiellement des anxiolytiques, ou somnifères justifient le licenciement de Madame [I] compte tenu de la présence d'un tel stock accessible à tous.

En outre, Madame [I] reconnaît qu'elle avait un sac de garde contenant des médicaments pour lui éviter de faire des allers retours à la pharmacie de service alors qu'aucun des témoins de Madame [I] n'atteste que le prétendu sac de garde était un usage courant ; au contraire, l'attestation de Mme [S] du 19 septembre 2014 produite pas Madame [I] indique que lorsqu'il n'y avait plus de médicaments dans le chariot de soins, elle devait aller les chercher à la pharmacie du poste de soins ; ainsi la détention par Madame [I] d'un sac de garde qu'elle avait constitué de sa propre initiative en dehors de toute procédure, de toute mesure d'hygiène et de traçabilité et de sécurité ainsi que l'administration aux patients de leurs propres médicaments lorsqu'elle n'en disposait pas, justifient un licenciement pour faute grave, de telles circonstances ne permettant pas la poursuite du contrat de travail compte tenu des risques et des conséquences de cette attitude, revendiquée par la salariée, pour la clinique.

En conséquence, le licenciement pour faute grave sera jugé fondé et le jugement infirmé.

Madame [I] sera déboutée de ses demandes y compris de celle relative aux circonstances abusives et vexatoires du licenciement qui ne sont pas démontrées au regard des faits de l'espèce et de la procédure menée par l'employeur.

Succombant, Madame [I] sera condamnée aux dépens ; l'équité justifie que les parties conservent la charge de leurs frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Ordonne la jonction des dossiers portant les numéros 15-07619 et 15-08127et dit que désormais, ils porteront le numéro 15-07619,

Infirme le jugement sur le licenciement et les sommes allouées,

Dit que le licenciement est fondé sur une faute grave,

Déboute Madame [Z] [I] de ses demandes,

Déboute la société SA Clinique de l'[Localité 4] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame [I] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 15/07619
Date de la décision : 28/11/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°15/07619 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-28;15.07619 ?
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