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07/11/2018 | FRANCE | N°17/09817

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 07 novembre 2018, 17/09817


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2018



TIERCE OPPOSITION



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/09817 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3KHZ



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 14 Décembre 2016 - Cour d'Appel de PARIS (pôle 5 - chambre 4) - RG n° 14/14207, rendu suite à un appel formé à l'encontre d'un jugement du Tribunal

de Commerce de LYON du 24 Juin 2014 - RG n° 2014J00105





APPELANTE



SAS CARREFOUR PROXIMITE FRANCE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adress...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 07 NOVEMBRE 2018

TIERCE OPPOSITION

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/09817 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3KHZ

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 14 Décembre 2016 - Cour d'Appel de PARIS (pôle 5 - chambre 4) - RG n° 14/14207, rendu suite à un appel formé à l'encontre d'un jugement du Tribunal de Commerce de LYON du 24 Juin 2014 - RG n° 2014J00105

APPELANTE

SAS CARREFOUR PROXIMITE FRANCE

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 345 130 488 (CAEN)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant : Me Pascal COSSE de la SCP BARON - COSSE & GRUAU, avocat au barreau d'EURE

INTIMÉES

- SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE, dont le sigle est D.C.F.

Ayant son siège social : [Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 428 268 023 (SAINT-ETIENNE)prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Ayant pour avocat plaidant : Me Sébastien SEMOUN de la SCP LEXCASE, avocat au barreau de LYON, toque : 851

- SARL [A] DISTRIBUTION

Ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : [A] (CAEN)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Florence GUERRE de la SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant : Me Bertrand CHARLET de la SELARL BEDNARSKI - CHARLET & ASSOCIES, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Septembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Laure COMTE, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Irène LUC, Présidente de chambre

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère,

Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée, rédacteur,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société Distribution Casino France, ci-après la société Casino, détient l'ensemble des activités hypermarchés, supermarchés et petits commerces de détails du groupe Casino en France, à l'exception des points de ventes sous enseignes Monoprix. À ce titre, elle exploite notamment les points de vente de proximité du groupe sous enseignes Spar.

La société [A] Distribution exploite un point de vente à prédominance alimentaire, sis [Localité 1].

La société Carrefour Proximité France, filiale à 100 % de la société Carrefour SA, société à la tête du groupe Carrefour, est chargée du réseau de magasins de proximité sous enseignes de Carrefour, et notamment des magasins sous enseigne Carrefour Contact.

La société Distribution Casino France, venant aux droits de la société Medis, a signé le 28 avril 2008 un contrat de franchise sous enseigne Spar, avec la société [A] Distribution, déjà franchisée de l'enseigne depuis 1996. Ce contrat a fait l'objet d'un avenant du 4 juin 2010, ayant prolongé sa durée jusqu'au 1er juin 2017.

La société [A] Distribution a envisagé avec la société Casino un passage sous l'enseigne « Supermarché Casino » et plusieurs rencontres ont eu lieu au cours du premier trimestre 2013.

Courant avril 2013, M. [A], gérant de la société [A] Distribution, a informé la société Casino de ce que le projet de changement d'enseigne était abandonné et a fait part de son souhait de vendre le fonds de commerce ou les parts sociales qu'il détenait, au cours de l'année 2014.

Invoquant des anomalies du logiciel informatique « Gold », utilisé depuis avril 2010 suite aux préconisations du franchiseur, ayant conduit à des ventes à perte, à des erreurs de TVA et à la réduction de sa marge d'exploitation, la société [A] Distribution a mis en demeure la société Casino, par lettre du 10 décembre 2013, signifiée par huissier de justice, de lui fournir un autre logiciel informatique dans un délai de 15 jours, sous peine d'application de la clause résolutoire stipulée à l'article 13 du contrat de franchise. Dans ce même courrier, la société [A] Distribution a fait grief à la société Casino d'avoir installé des enseignes du groupe dans sa zone de chalandise sans l'avoir informée.

La société Casino a répondu à cette mise en demeure par trois courriers, entre les 16 et 18 décembre 2013, proposant un nouveau logiciel à la société [A] Distribution.

La société [A] Distribution a répondu à la société Casino par courrier du 23 décembre 2013 afin de manifester son mécontentement à propos des solutions apportées par elle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 décembre 2013, la société [A] a revendiqué le bénéfice de la clause résolutoire, et signifié la résiliation immédiate du contrat aux torts exclusifs de la société Casino ainsi que le retrait de l'enseigne avec tous les éléments de signalétique.

Estimant que la société [A] Distribution a cherché un prétexte pour quitter l'enseigne Spar au profit d'une enseigne concurrente, la société Casino a contesté, par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 décembre 2013, le bien fondé et la régularité de cette résiliation, et a mis en demeure la société [A] Distribution de poursuivre le contrat de franchise jusqu'à son terme, ce qui a été refusé par celle-ci, le 6 janvier 2014.

Dans ce contexte, la société [A] Distribution a procédé à la dépose de la signalétique « Spar » et l'a remplacée par l'enseigne « Carrefour Contact », début janvier 2014.

Par courrier du 29 janvier 2014, la société [A] Distribution a informé la société Casino que les parts sociales détenues par M. [A], avaient été cédées à la société Carrefour Proximité France, suivant acte sous seing privé du 31 décembre 2013 et lui a fait sommation interpellative, le même jour, d'indiquer si elle agréait le nouveau dirigeant, ce à quoi la société Casino a répondu, le 4 février 2014, « qu'elle n'avait pas, à ce stade, à se prononcer au sujet d'un éventuel agrément de la société Carrefour en qualité de franchisé », en l'état notamment de la poursuite forcée du contrat ordonnée le 21 janvier 2014 et de la validité de la cession de parts sociales contestée judiciairement pour violation de son droit de préemption contractuel.

Par acte du 17 janvier 2014, la société Casino a assigné la société [A] Distribution devant le tribunal de commerce de Lyon, à titre principal, au titre de la résiliation unilatérale abusive du contrat, aux fins de reprise ou de maintien des relations contractuelles et, à titre subsidiaire, au titre d'une rupture brutale des relations commerciales établies au sens de l'article L442-6, I, 5º du code de commerce, pour défaut de respect d'un préavis suffisant.

Par jugement du 24 juin 2014, le tribunal de commerce de Lyon a, sous le régime de l'exécution provisoire :

- écarté des débats la pièce n°57 produite par la société Distribution Casino France,

- dit recevable mais mal fondée l'exception d'incompétence rationae loci formée par la société [A] Distribution, et en conséquence, s'est déclaré compétent pour connaître du présent litige,

- rejeté la demande de la société [A] Distribution tendant à voir annuler le contrat de franchise du 28 avril 2008,

- dit que la clause résolutoire stipulée à l'article 13b du contrat de franchise du 28 avril 2008 n'a pas été mise en oeuvre de bonne foi par la société [A] Distribution,

- rejeté la demande formée par la société [A] Distribution tendant au sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal de commerce de Marseille saisi d'une demande au titre de l'abus de dépendance économique,

- rejeté la demande formée par la société [A] Distribution tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de franchise du 28 avril 2008,

- ordonné à la société [A] Distribution la reprise des relations contractuelles avec la société Distribution Casino France résultant du contrat de franchise du 28 avril 2008 et de son avenant du 4 juin 2010 jusqu'à son terme, à savoir le 1er juin 2017, ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision et par infraction,

- s'est réservé la faculté de liquider l'astreinte ainsi prononcée,

- rejeté tous autres prétentions, fins et moyens des parties,

- condamné la société [A] Distribution au paiement de la somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [A] Distribution aux entiers dépens de la présente instance.

Saisie de l'appel formé par la société [A] Distribution, la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 14 décembre 2016, confirmé en tous points le jugement du 24 juin 2015 et, y ajoutant, a, d'une part, déclaré irrecevable la demande en nullité du contrat fondée sur l'abus de dépendance économique et, d'autre part, rejeté les demandes de la société [A] Distribution fondées sur la rupture brutale des relations commerciales établies et le déséquilibre significatif.

Par acte du 9 mai 2017, la société Carrefour a formé une tierce opposition à l'encontre de l'arrêt précité.

Par arrêt du 30 mai 2018, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société [A] Distribution à l'encontre de l'arrêt du 14 décembre 2016.

La procédure devant la cour a été clôturée le 4 septembre 2018.

LA COUR

Vu les conclusions du 31 août 2018 par lesquelles la société Carrefour Proximité France invite la cour, au visa des articles 583 et suivants du code de procédure civile, à :

- constater l'opposabilité à la société Distribution Casino France du contrat d'enseigne Carrefour Contact, en conséquence,

- dire bien fondée la tierce-opposition de la société Carrefour Proximité France contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2016,

en conséquence,

- rétracter l'arrêt du 14 décembre 2016 en ce qu'il a confirmé le jugement du 24 juin 2014 pour la partie de son dispositif ayant « ordonné à la société [A] DISTRIBUTION la reprise des relations contractuelles avec la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE résultant du contrat du 24 août 2008 et de son avenant du 4 juin 2010 jusqu'à son terme, à savoir le 1er juin 2017, ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision et par infraction »,

- débouter la société Distribution Casino France de toutes ses demandes,

- condamner la société Distribution Casino France au versement à la société Carrefour Proximité France d'une indemnité de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens de la présente instance ;

Vu les conclusions du 28 août 2018 par lesquelles la société Casino demande à la cour, au visa des articles 122, 582, 583 et suivants du code de procédure civile, 1134, 1165, 1351, désormais 1355, et 1382 anciens du code civil :

à titre principal, sur les irrecevabilités :

- constater que la société Carrefour Proximité France est associé unique et dirigeant de la société [A] depuis le 31 décembre 2013, date à laquelle elle a notamment acquis les parts sociales de Monsieur [A] en violation du droit de préemption de la société Distribution Casino France comme cela a été jugé par le tribunal de commerce de Lyon le 27 juillet 2015,

- constater que la société Carrefour Proximité France, quand elle l'a estimé nécessaire, est intervenue volontairement dans certaines procédures dès la première instance :

* dès le 15 mai 2014, devant le juge de la liquidation d'astreinte,

* dès le 11 mars 2014 devant le tribunal de commerce de Marseille,

- constater que depuis le début de l'instance ayant donné lieu au jugement du tribunal de commerce de Lyon du 24 juin 2014 puis à l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2016, la société [A], filiale à 100 % de la société Carrefour Proximité France, s'oppose à la reprise forcée du contrat de franchise Spar en mettant en avant notamment son appartenance au réseau Carrefour,

- dire, en conséquence, que la société Carrefour Proximité France, associé unique et dirigeant de la société [A] depuis le 31 décembre 2013, était dès lors « représentée » au sens de l'article 583 du code de procédure civile dans le cadre tant de l'instance ayant donné lieu au jugement du tribunal de commerce de Lyon du 24 juin 2014 que celle ayant donné lieu à l'arrêt confirmatif de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2016,

en conséquence,

- déclarer irrecevable la société Carrefour Proximité France en ses prétentions et demandes conformément aux dispositions de l'article 583 du code de procédure civile,

et à défaut,

- constater qu'à l'occasion de la procédure en liquidation de l'astreinte attachée à l'ordonnance en date du 21 janvier 2014 qui s'est récemment déroulée devant la cour d'appel de Lyon, la société Carrefour Proximité France a repris, à l'identique, les arguments qu'elle a présenté devant la cour d'appel de céans pour justifier du prétendu bien-fondé de sa tierce opposition à savoir la prétendue opposabilité de son prétendu « contrat » d'enseigne non écrit avec la société [A] Distribution,

- constater que dans le cadre de cette procédure devant la cour d'appel de Lyon, la société [A], filiale à 100% du groupe Carrefour depuis le 31 décembre 2013, a également repris à son compte les mêmes arguments que la société Carrefour Proximité France,

- constater que la cour d'appel de Lyon dans son arrêt en date du 20 février 2018 face à cette même argumentation a considéré que :

« Attendu que la SARL [A] DISTRIBUTION fait état de ses obligations contractées avec la société CARREFOUR en évoquant à cet égard comme à l'égard du défaut d'agrément, une situation inextricable ; Que cette situation, toutefois, résulte d'une collusion entre les sociétés [A] DISTRIBUTION et CARREFOUR pour s'affranchir de la clause de préférence du contrat au bénéfice de la SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE, en résiliant abusivement le contrat avant son terme, comme l'a jugé le tribunal de commerce de LYON dans son jugement du 24 juin 2014 puis, la cour d'appel de PARIS dans son arrêt confirmatif du 14 décembre 2016 »,

en conséquence,

- déclarer irrecevable la société Carrefour Proximité France en ses prétentions et demandes,

à titre subsidiaire et en tout état de cause :

- constater que chacun des prétendus moyens propres avancés par la société Carrefour Proximité France dans son assignation en tierce opposition contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 14 décembre 2016, à savoir :

* la prétendue « acquisition sans faute des parts sociales de la société [A] »,

* « le contrat d'enseigne consenti par CARREFOUR PROXIMITE France » aurait « pris effet à une date où la société [A] DISTRIBUTION était libérée de ses obligations avec DISTRIBUTION CASINO France »,

* « la société CARREFOUR PROXIMITE France serait bien fondée à se prévaloir de son opposabilité de ses relations contractuelles avec la société [A] DISTRIBUTION »,

a, en réalité, été amplement débattue devant la cour d'appel de Paris préalablement à l'arrêt du 14 décembre 2016,

- constater que dans son jugement du 27 juillet 2015, après avoir relevé que :

« Attendu qu'il ne peut être sérieusement soutenu que la société CARREFOUR PROXIMITÉ FRANCE SAS ait ignoré l'existence du pacte de préférence existant au profit de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE SAS, à telle enseigne qu'elle a même envisagé en octobre 2013 d'évaluer à 740 000 euros les conséquences financières de sa transgression (pièce 14 du demandeur) ; Qu'il résulte des pièces produites que l'intention de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE SAS de s'en prévaloir étaient à ce point connue et évidente que Monsieur [T] [A] et la société CARREFOUR PROXIMITÉ FRANCE SAS ont précisément décidé d'avoir recours à un stratagème pour éviter que cela se réalise ; Que le tribunal considère en effet que les man'uvres organisées de concert avec Monsieur [T] [A] ont eu pour unique objet de les exonérer ensemble des obligations du contrat de franchise en organisant sa résiliation dans des conditions d'une particulière mauvaise foi déjà relevée tant par le tribunal de céans que par la cour d'appel de Paris ; Attendu que la société CARREFOUR PROXIMITÉ FRANCE SAS, qui ne peut ignorer l'existence des clauses de préemption, puisqu'elle-même les impose également à ses propres franchisés, et qu'il s'agit d'une pratique courante dans la grande distribution ; Qu'elle a manifestement aidé la société [A] DISTRIBUTION à s'exonérer de ses obligations, puis a sciemment favorisé le viol de sa clause de non concurrence contractuelle, et a ainsi causé par sa complicité un préjudice certain à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE SAS en désorganisant son réseau, en jetant le trouble dans sa clientèle et en portant atteinte à son image ' »

le tribunal de commerce de Lyon a jugé que :

« La société CARREFOUR PROXIMITE France s'est rendue coupable de complicité en favorisant la rupture de mauvaise foi par la société [A] DISTRBUTION du contrat de franchise en fraude de ses obligations contractuelles »,

- constater que la société [A] a prétendu, dans le cadre des procédures l'ayant opposée à la société Distribution Casino France, et à l'inverse de ce que prétend la société Carrefour Proximité France dans son assignation en tierce opposition que :

« Aujourd'hui, la société [A] DISTRIBUTION est donc détenue à 100 % par une filiale de CARREFOUR S.A. et exploite donc le magasin sous enseigne CARREFOUR CONTACT, non pas en réseau franchisé mais en réseau intégré, en sorte que bien évidemment et dans ce contexte, le respect des dispositions de la loi Doubin est totalement hors sujet !... »,

- constater que la cour d'appel de Lyon dans son arrêt du 20 février 2018 a considéré que :

« Attendu que la SARL [A] DISTRIBUTION fait état de ses obligations contractées avec la société CARREFOUR en évoquant à cet égard comme à l'égard du défaut d'agrément, une situation inextricable ; Que cette situation, toutefois, résulte d'une collusion entre les sociétés [A] DISTRIBUTION et CARREFOUR pour s'affranchir de la clause de préférence du contrat au bénéfice de la SAS DISTRIBUTION CASINO FRANCE, en résiliant abusivement le contrat avant son terme, comme l'a jugé le tribunal de commerce de LYON dans son jugement du 24 juin 2014 puis, la cour d'appel de PARIS dans son arrêt confirmatif du 14 décembre 2016. »,

en conséquence, et en tout état de cause

- débouter la société Carrefour Proximité de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

reconventionnellement :

- constater le caractère particulièrement abusif de la procédure initiée par la société Carrefour Proximité France et condamner la société Carrefour Proximité France au paiement d'une somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société Carrefour Proximité France au paiement d'une somme de 50.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance ;

Vu les conclusions du 24 août 2018 par lesquelles la société [A] Distribution demande à la cour, au visa des articles 584 et 591 du code procédure civile, de statuer ce que de droit sur le mérite de la tierce opposition formée par la société Carrefour Proximité France ;

SUR CE

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.

Rappel des autres procédures opposant les parties 

Plusieurs procédures judiciaires ont été engagées dans le cadre du litige qui oppose les parties.

La procédure d'heure à heure

Par acte du 13 janvier 2014, la société Casino a saisi d'heure à heure le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon aux fins de voir ordonner sous astreinte la reprise et le maintien des relations contractuelles jusqu'à ce qu'une décision intervienne au fond s'agissant du caractère licite ou non de la rupture du contrat de franchise par la société [A] Distribution.

Par ordonnance du 21 janvier 2014, le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon a ordonné sous astreinte à la société [A] Distribution la reprise et le maintien de ses relations contractuelles avec la société Casino telles qu'elles résultent du contrat de franchise et de son avenant jusqu'à ce qu'une décision au fond intervienne s'agissant de la rupture dudit contrat. Le juge des référés s'est réservé le pouvoir de liquider l'astreinte.

Cette décision a été confirmée en toutes ses dispositions par la cour d'appel de Paris dans un arrêt du 10 février 2015 (R.G. n°14/02110), devenu définitif, suite à la radiation du pourvoi formé par la société [A] Distribution.

La procédure en liquidation de l'astreinte

Par exploit du 15 avril 2014, la société Casino a assigné la société [A] devant le président du tribunal de commerce de Lyon afin de faire procéder à la liquidation de l'astreinte prononcée par l'ordonnance du 21 janvier 2014. La société Carrefour est intervenue volontairement dans ladite procédure, à titre accessoire.

Par ordonnance du 20 juin 2014, le président du tribunal de commerce de Lyon a condamné la société [A] Distribution au paiement d'une somme de 3.100.000 euros au titre de la liquidation d'astreinte.

Par arrêt du 20 février 2018, la cour d'appel de Lyon a confirmé le principe de liquidation de l'astreinte en cause mais en a réformé sur le quantum en condamnant la société [A] Distribution à payer à la société Casino la somme de 1.390.000 euros.

La procédure aux fins de constatation de la violation du droit de préemption

Par exploit du 7 février 2014, la société Casino a de nouveau saisi le tribunal de commerce de Lyon et a fait assigner les sociétés [A] Distribution et Carrefour Proximité ainsi que M. [A] en nullité de l'acte de cession intervenu en fraude de ses droits et en réparation des préjudices subis.

Par jugement du 27 juillet 2015, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Lyon a notamment dit que la clause résolutoire insérée dans le contrat de franchise n'avait pas été mise en 'uvre de bonne foi, dit que M. [A] et la société [A] Distribution ont commis une faute faisant dégénérer en abus leur droit de rompre le contrat, dit que le contrat restait en vigueur jusqu'à son terme contractuel, sauf nouvelle dénonciation par l'une ou l'autre partie, constaté que le contrat de franchise a prévu dans son article 12, en cas de projet de cession du fonds de commerce du franchisé, une obligation d'information du franchiseur et un pacte de préférence à son profit, dit que M. [A] et la société [A] Distribution sont ensemble responsables du non-respect par le franchisé de ses obligations contractuelles résultant de l'article 12 du contrat de franchise, rejeté la demande d'annulation des parts sociales, condamné M. [A] et la société Carrefour, complice de la rupture de mauvaise foi du contrat de franchise, au paiement à la société Casino de diverses sommes en réparation des préjudices subis et de la violation de la clause de non-concurrence (article 14), et débouté les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions, les condamnant à verser in solidum à la société Casino, une indemnité de procédure de 50 000 euros.

La société [A] Distribution, M. [A] et la société Carrefour ont relevé appel de ce jugement devant la cour d'appel de céans où l'instance est actuellement pendante sous les numéros R.G. 15/17988, 15/18123 et 15/18128.

La société [A] Distribution, M. [A] et la société Carrefour ont sollicité la suspension de l'exécution provisoire attachée au jugement du 27 juillet 2015 devant le Premier Président de la cour d'appel de Paris. Par trois ordonnances du 12 mai 2016, le Premier Président de la cour d'appel de Paris, faisant droit à la seule demande de la société [A] Distribution, a ordonné l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement entrepris à l'encontre de la société [A] Distribution et a rejeté les demandes de la société Carrefour et de M. [A] en arrêt de l'exécution provisoire de la décision précitée.

La procédure à bref délai devant le tribunal de commerce de Carcassonne initiée par la société Carrefour

Par acte du 23 mai 2014, la société Carrefour, cessionnaire des parts sociales de la société [A] Distribution, a fait assigner, à bref délai, la société Casino et la société [A] Distribution, devant le tribunal de commerce de Carcassonne, au visa de l'article 1382 ancien du code civil, afin de dire que la société Casino avait commis une faute en demandant la liquidation de l'astreinte fixée par l'ordonnance du 21 janvier 2014, alors qu'elle avait refusé de donner son agrément à la cession et de la condamner à lui payer une indemnité de 100.000 euros, en réparation du comportement déloyal.

Par jugement du 8 septembre 2014, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Carcassonne, après avoir rejeté les exceptions d'incompétence et de connexité, a dit que la société Casino a commis une erreur en demandant la liquidation de l'astreinte alors qu'elle avait refusé de donner son agrément à l'acquéreur des parts sociales de la société [A] Distribution, a condamné la société Casino à garantir la société [A] Distribution du montant de la condamnation retenu par le juge de la liquidation d'astreinte, ou, en cas de substitution, par la société Carrefour, garantir cette dernière, et a condamné la société Casino au paiement d'une indemnité de 50.000 euros à la société [A] Distribution et à l'acquéreur des parts sociales de cette dernière.

Saisie sur appel de la société Casino, par arrêt du 29 novembre 2016, la cour d'appel de Montpellier a infirmé le jugement du 8 septembre 2014 en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau, a notamment débouté la société Carrefour de l'ensemble de ses demandes, dit que les demandes de la société [A] Distribution tendant à constater l'impossibilité d'exécuter le contrat de franchise ainsi que l'ordonnance de référé du 21 janvier 2014 rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon, confirmée par arrêt de la cour d'appel de Paris le 10 février 2015, et à constater la caducité dudit contrat, sont irrecevables, débouté la société [A] Distribution de sa demande en paiement de dommages et intérêts, fondée sur l'ancien article 1382 du code civil.

Par arrêt du 30 mai 2018, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la société [A] Distribution et la société Carrefour à l'encontre de l'arrêt du 29 novembre 2016.

La procédure devant le tribunal de commerce de Marseille pour abus de dépendance économique dont appel

Par acte du 11 février 2014, la société [A] Distribution a assigné la société Casino devant le tribunal de commerce de Marseille afin que la résiliation du contrat de franchise soit acquise et que celle-ci soit condamnée au paiement de dommages et intérêts pour abus de dépendance économique, arguant notamment à ce titre d'une pratique d'imposition de prix de revente dont se serait rendue coupable la société Casino.

La société Carrefour et M. [A] sont ensuite intervenus volontairement à cette instance, respectivement à titre principal et à titre accessoire.

Par jugement du 3 mars 2016, le tribunal de commerce de Marseille a, sous le régime de l'exécution provisoire :

- joint les instances enrôlées sous les numéros 2014F00984 et 2014F01327, par application des dispositions de l'article 367 du code de procédure civile,

- dit qu'il n'y a pas lieu de se dessaisir au profit de la cour d'appel de Paris,

- déclaré recevable la société [A] Distribution en ses demandes,

- pris acte de l'intervention volontaire de M. [T] [A] et l'a reçu en son intervention volontaire,

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Carrefour Proximité France,

en conséquence,

- pris acte de l'intervention volontaire de la société Carrefour Proximité France et l'a reçu en son intervention volontaire,

- constaté que le tribunal de commerce de Carcassonne dans son jugement du 8 septembre 2014 a prononcé la caducité du contrat de franchise et de ses avenants,

en conséquence,

- dit sans objet la demande de la société [A] Distribution tendant à la résiliation du contrat de franchise,

- constaté une situation de dépendance économique de la société [A] Distribution envers la société Distribution Casino France,

- constaté que la société Distribution Casino France a commis des manquements qui caractérisent, en vertu des articles L.442-6 et L.420-2 du code de commerce un abus de dépendance économique envers la société [A] Distribution, obligée de respecter strictement la politique commerciale de la société Distribution Casino France,

- condamné la société Distribution Casino France à payer à la société [A] Distribution la somme de 15.000 euros (quinze mille euros) à titre de dommages et intérêts,

- condamné la société Distribution Casino France à payer à la société [A] Distribution la somme de 42.309,45 euros (quarante-deux mille trois cent neuf euros et quarante-cinq centimes) au titre des ristournes pour 2013, ainsi que celle de 10.000 euros (dix mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclaré nulle la clause de non-concurrence post contractuelle insérée au contrat de franchise du 28 avril 2008,

- condamné la société Distribution Casino France à payer à la société Carrefour Proximité France la somme de 1.000 euros (mille euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Distribution Casino France à payer à Monsieur [T] [A] la somme de 600 euros (six cents euros) au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile,

- condamné la société Distribution Casino France aux dépens,

conformément aux dispositions de l'article 515 du code de procédure civile,

- rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du jugement.

Par déclaration du 7 mars 2016, la société Casino a relevé appel de ce jugement. La procédure devant la cour a été clôturée par ordonnance du 19 juin 2018. L'affaire a été plaidée le 4 juillet 2018 et mise en délibéré au 3 octobre 2018.

La recevabilité de la tierce opposition formée par la société Carrefour

La société Carrefour fait valoir qu'elle est recevable à former tierce opposition à l'égard de l'arrêt du 14 décembre 2016 aux motifs que, si elle reconnaît avoir été représentée devant la cour d'appel de Paris qui a rendu l'arrêt du 14 décembre 2016 par la société [A] Distribution, cette décision lui fait grief en ce qu'elle a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 24 juin 2014 qui a notamment ordonné à la société [A] Distribution la reprise des relations contractuelles avec la société Casino, et partant, a anéanti le contrat d'enseigne que la société Carrefour a consenti à la société [A] Distribution. Elle explique que le contrat qu'elle invoque existe bien qu'il ne soit pas formalisé par un écrit et que ce contrat est valable pour avoir été souscrit après la fin des relations contractuelles entre la société [A] et la société Casino. Elle conclut qu'elle dispose d'un moyen propre, se prévalant dans son intérêt du contrat d'enseigne conclu avec la société [A] Distribution, dont l'opposabilité a été méconnue par le jugement du 24 juin 2014 confirmé par l'arrêt du 14 décembre 2016, rendu par la cour d'appel de Paris. Elle soutient enfin que sa tierce-opposition ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 20 février 2018, arguant du fait que :

- cet arrêt est une décision prononcée en référé qui est en conséquence dépourvue de l'autorité de la chose jugée au principal, et

- le dispositif de l'arrêt n'a pas statué sur une demande de sa part relative à l'opposabilité du contrat d'enseigne « Carrefour Contact », celle-ci n'étant intervenue qu'en qualité d'intervenante volontaire accessoire.

Elle souligne enfin que le contrat d'enseigne dont il est question est opposable et qu'il n'est pas intervenu en fraude des droits de la société Casino.

En réplique, la société Casino explique que la société Carrefour a été « représentée » au sens de l'article 583 alinéa 1 du code de procédure civile par la société [A] Distribution, sa filiale à 100%, dans le cadre de l'affaire ayant abouti à l'arrêt du 14 décembre 2016. Elle relève dès lors que la société Carrefour est irrecevable à former une tierce opposition à l'encontre de cet arrêt, ayant été représentée dans le cadre de l'instance principale, la société Cabale Distribution étant sa filiale à 100% depuis le 31 décembre 2013. Elle estime par ailleurs que la société Carrefour ne dispose d'aucun moyen propre, la société [A] Distribution s'étant également prévalue du contrat d'enseigne « Carrefour Contact » pour s'opposer à la demande d'exécution forcée du contrat Spar. Enfin, elle soutient que les arguments de la société Carrefour sont irrecevables dans le cadre de la présente instance puisqu'ils se heurtent à l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Lyon dans son arrêt du 20 février 2018 au sens de l'article 1351 ancien du code civil.

***

L'article 583 du code de procédure civile dispose notamment que :

« Est recevable à former tierce opposition toute personne qui y a intérêt, à la condition qu'elle n'ait été ni partie ni représentée au jugement qu'elle attaque.

Les créanciers et autres ayants cause d'une partie peuvent toutefois former tierce opposition au jugement rendu en fraude de leurs droits ou s'ils invoquent des moyens qui leur sont propres. »

La cour d'appel de Paris dans son arrêt du 14 décembre 2016 a notamment confirmé le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il a ordonné à la société [A] Distribution la reprise des relations contractuelles avec la société Distribution Casino France résultant du contrat de franchise du 28 avril 2008 et de son avenant du 4 juin 2010 jusqu'à son terme, à savoir le 1er juin 2017, ce sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente décision et par infraction.

Le magasin étant exploité sous enseigne Carrefour, la société Carrefour a un intérêt à agir, l'arrêt ordonnant la reprise des relations contractuelles avec la société Distribution Casino, ce qui n'est pas contesté par la société Casino.

En outre, il est constant en l'espèce que la société Carrefour Proximité France est l'associée unique et est le dirigeant de la société [A] Distribution depuis le 31 décembre 2013, date de la cession des parts sociales. La société Carrefour ne pouvait dès lors ignorer l'existence de cette action judiciaire engagée par acte du 17 janvier 2017, celle-ci ne contestant d'ailleurs pas avoir été représentée devant la cour d'appel de Paris qui a rendu son arrêt le 12 décembre 2016.

Mais, par application des dispositions précitées, la tierce opposition est ouverte à la personne, qui normalement serait considérée comme représentée, dans la mesure où elle fait valoir un moyen qui lui est personnel.

Il convient donc de déterminer si la société Carrefour fait valoir un moyen propre pour que sa tierce opposition soit recevable.

La société Carrefour invoque le contrat d'enseigne qu'elle aurait souscrit avec la société [A] Distribution, alors qu'elle était cessionnaire des parts sociales de M. [T] [A] et nouveau dirigeant de la société [A].

Or, l'analyse des différentes décisions définitives rendues dans les différents litiges opposant les parties permettent de considérer comme acquis :

- « la précipitation de la société [A] et notamment la cession des parts de Monsieur [A] au profit de la société Carrefour Proximité dès le 31 décembre 2013, le changement d'enseigne étant intervenu dès janvier 2014, alors que la société Casino était informée du souhait de M. [A] de vendre son affaire et lui avait proposé un candidat. Dès lors, la mise en 'uvre de la clause résolutoire, tout à fait opportune dans ce contexte, apparaissait comme une façon de s'affranchir de la clause de préférence du contrat au bénéfice de Casino, en résiliant le contrat de cession » jugé par l'arrêt du 14 décembre 2016 de la cour d'appel de Paris devenu définitif ;

- « la société Carrefour est infondée à se prévaloir d'un défaut d'agrément la concernant, alors que son exercice par la société Casino supposait préalablement que celle-ci soit en mesure d'exercer son droit de préemption et qu'ainsi la réponse faite le 4 février 2014 était légitime et ne pouvait pas, comme il est prétendu, empêcher la poursuite du contrat jusqu'à son terme avec la société [A], nonobstant la cession des parts sociales au profit de la société Carrefour et encore moins entraîner la caducité ou l'extinction du contrat » jugé par l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 29 novembre 2016, définitif à l'égard de la société Carrefour, celle-ci étant partie dans la cause ;

- « la société [A] Distribution fait état de ses obligations contractées avec la société Carrefour en évoquant à cet égard comme à l'égard du défaut d'agrément, une situation inextricable. Cette situation, toutefois, résulte d'une collusion entre les sociétés [A] Distribution et Carrefour pour s'affranchir de la clause de préférence du contrat au bénéfice de la société Distribution Casino, en résiliant abusivement le contrat avant son terme » jugé par l'arrêt de la cour d'appel de Lyon du 20 février 2018, définitif à l'égard de la société Carrefour, celle-ci étant partie dans la cause.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments, que la société Carrefour invoque un contrat d'enseigne qui, à supposer la preuve de son existence rapportée, a été conclu après que cette dernière ait acquis les parts sociales de M. [T] [A] de la société [A] Distribution, ce qui a conduit à la dépose de l'enseigne Casino et à l'exploitation du magasin sous l'enseigne Carrefour City, alors que, d'une part, l'ensemble de ces actes a été sciemment commis en fraude des droits de la société Casino, tant par la société [A] que par la société Carrefour, et que, d'autre part, le contrat de franchise n'a pas connu d'interruption, puisque depuis l'ordonnance de référé du 21 janvier 2014, la reprise ou le maintien du contrat a été ordonné, confirmée au fond par le jugement du tribunal de commerce confirmé par la cour d'appel de Paris dans son arrêt du 14 décembre 2016.

Les droits propres invoqués par la société Carrefour, ayant été acquis frauduleusement à l'égard de la société Casino, en collusion avec la société [A], pour s'affranchir du droit de préférence de la société Casino sur le magasin dont il est question, ne peuvent être valablement opposés pour lui ouvrir la voie de la tierce opposition, dans le cadre du litige relatif justement aux conséquences de cette fraude.

Dans ces conditions, il y a lieu de déclarer la société Carrefour irrecevable en sa tierce opposition.

Les dommages-intérêts pour procédure abusive

L'exercice d'une action en justice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi, ou s'il s'agit d'une erreur grave équipollente au dol. L'appréciation inexacte qu'une partie se fait de ses droits n'est pas constitutive en soi d'une faute.

La société Distribution Casino France ne rapporte pas la preuve de ce que l'action de la société Carrefour Proximité France aurait dégénéré en abus. Elle doit donc être déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La société Carrefour Proximité France doit être condamnée aux dépens de la tierce opposition, ainsi qu'à payer à la société Distribution Casino France la somme supplémentaire de 50.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par la société Carrefour Proximité France.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

DÉCLARE la tierce opposition de la société Carrefour Proximité France irrecevable ;

DÉBOUTE la société Distribution Casino France de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la société Carrefour Proximité France aux dépens de la tierce opposition, ainsi qu'à payer à la société Distribution Casino France la somme supplémentaire de 50.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

Le Greffier La Présidente

Cécile PENG Irène LUC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 17/09817
Date de la décision : 07/11/2018
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°17/09817 : Déclare la demande ou le recours irrecevable


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-07;17.09817 ?
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