Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2018
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/22162 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZ6IB
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2016 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 14/10099
APPELANTE
SAS CONCEPTUS
Ayant son siège social [...]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Stéphane Y..., avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
Représentée par Mme Armelle Z..., avocate au barreau des HAUTS DE SEINE
INTIMEES
LA DIRECTION REGIONALE DES DOUANES DE ROISSY EN FRANCE, prise en la personne de son Receveur Régional sis [...]
Ayant ses bureaux [...]
Représentée par Mme Cécile X..., inspectrice des douanes en vertu d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 Octobre 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, président et par Mme Cyrielle BURBAN, greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La société Conceptus importe en France des dispositifs médicaux pour stérilisation, sous la dénomination' Essure', qui sont achetés à sa société mère, la société Conceptus Inc. dont le siège social est situé à [...]. Les produits sont distribués en Europe à des hôpitaux et cliniques et à des distributeurs.
En 2013, le bureau de contrôle des douanes de Roissy a procédé à la vérification de 9 déclarations d'importation entre mars et juillet 2011.
Les marchandises ont été déclarées comme des implants pour contraception avec cathéter à la position tarifaire [...], qui est exempte de droits de douane et bénéficiant d'un taux réduit de TVA à 5,5%.
La direction régionale des douanes a confirmé le classement des marchandises comme des implants relevant du libellé NC 9018, mais a estimé que le CANA V86 qui s'appliquait aux appareils pour incontinence urinaire, ne s'appliquait pas aux implants de contraception.
Par lrar du 8 août 2013, la société Conceptus a reçu un avis de résultat de contrôle; dans cet avis, était relevé une fausse déclaration d'espèce et le rejet l'utilisation du CANA V086.
Selon procès verbal du 22 octobre 2013, le service régional d'enquête de la direction régionale des douanes de Roissy a notifié deux infrations : une fausse déclaration d'espèce, quant à l'uti1isation du CANA V086 et l'application du taux réduit de TVA de 5,5% à l'importation en France des dispositifs médicaux Essure prévu par l'article 278-0 bis du code général des impôts. La société Conceptus n'a pas formulé de contestation dans le délai de 30 jours.
Un AMR a été émis le 8 novembre 2013, pour un montant de 1089305 euros, avec une TVA de 19,6%, qui a été rectifié à la somme de 783633 euros.
Le 10 janvier 2014, la société Conceptus a contesté l'AMR. Elle a saisi le tribunal de grande instance de Bobigny.
Par jugement rendu le 13 octobre 2016, le tribunal de grande instance de Bobigny a statué comme suit :
- déboute Conceptus de ses demandes tendant à obtenir l'annulation de l'avis de recouvrement n° 783/13/S56 du 8 novembre 2013 ;
- déclare infondé le procès-verbal de notification du 22 octobre 2013 n° 1312D11883 ; déclare infondé la décision implicite de rejet du 10 juillet 2014 de la Direction Régionale des Douanes et des Droits Indirects de Roissy ;
- dit n'avoir lieu à lever la garantie bancaire et procéder au remboursement à Conceptus des frais engendrés pour sa mise en place ;
- dit n'avoir lieu à l'a1location d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Conceptus a interjeté appel.
Dans ses dernières conclusions la société Conceptus demande à la cour de :
Vu les articles 1599 E et 317 duodecies de l'annexe II au CGI, 1599 J du CGI (dans leur version en vigueur sur la période concernée) ;
- infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bobigny du 13 octobre 2016 en ce qu'il a rejeté les demandes de Conceptus
- accueillir la demanderesse dans son recours contre l'avis de mise en recouvrement n°788/559/13/DNA/054 du 6 août 2013 ;
- annuler l'avis de mise en recouvrement n° 788/559/13/DNA/054 du 6 août 2013 ;
- déclarer infondé le procès-verbal de notification d'infraction du 24 juillet 2013 ;
- déclarer infondée la décision implicite de rejet du ler avril 2014 de la Direction Régionale des Douanes et Droits Indirects de Paris Ouest ;
- dire que la garantie bancaire est levée, et qu'il soit procédé au remboursement à la société Conceptus des frais engendrés pour sa mise en place ;
- condamner l'administration fiscale à verser la somme de 9000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La direction des douanes demande de :
- Confirmer le jugement rendu le 13 octobre 2016 du tribunal de grande instance de Bobigny
- Condamner la société Conceptus à payer la sommede 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
Sur le montant du taux de TVA applicable
Selon la société Conceptus, le taux de TVA applicable est de 5,5% comme indiqué dans l'article 278 -O bis du code général des impôts.
Elle fait valoir que l'article 278-0 bis du CGI est rédigé de telle sorte, que ce sont tous les produits mentionnés au titre III de la LPP (liste des produits et prestations) qui sont concernés par le taux de 5,5%, puisque ceux-ci sont a priori destinés aux handicapés.
En appliquant appliqué un taux de TVA de 19,6% , l'administration des douanes excède les pouvoirs qui lui sont attribués ; l'application sélective du taux réduit de TVA implique le respect de 2 conditions : qu'elle ne porte pas atteinte au principe communautaire de neutralité fiscale et qu'elle ne soit pas de nature à entraîner une distorsion de concurrence,compte tenu du caractère spécifique des marchés sur lesquels ces produits ou services sont proposés ; le titre III de la LPP s'intitule 'Dispositifs médicaux implantables, implants issus de dérivés d'origine humaine ou en comportant et greffons tissulaires d"origine humain'. Or, les produits visés par le titre III concernent essentiellement, selon l'administration fiscale, des prothèses internes inertes et des prothèses internes actives.
La liste du titre III inventorie en grande majorité des prothèses, généralement employées à l'usage exclusif des personnes handicapées.En réalité, c'est la notion de 'prothèses', inscrites ou non au titre III de la LPP qui conditionne l'application du taux réduit.
Le service des Douanes ajoute une condition supplémentaire en exigeant que la société Conceptus prouve que les dispositifs médicaux Essure sont utilisés par des personnes handicapées après importation.
Le législateur français a voulu que le taux de TVA applicable soit directement corrélé à sa potentielle prise en charge ou non par la sécurité sociale. Cette méthode pragmatique permet aux administrations fiscale et douanière de ne pas avoir à déterminer par elles-mêmes, sur la base de connaissances médicales imparfaites, le taux de TVA applicable.
En réponse, le service des Douanes estime que les produit Essure doivent être soumis à la TVA au taux normal dans la mesure où la société Conceptus n'a pas pu présenter un extrait valable de la LPP applicable au moment du dédouanement des marchandises du fait de la fin officielle du remboursement des produits Essure à compter 15 juillet 2007.
Elle déclare être compétente pour déterminer l'espèce tarifaire d'une marchandise et l'application des codes additionnels nationaux lorsqu'une position tarifaire peut bénéficier du taux normal ou du taux réduit, les CANA permettent de solliciter le taux dont relève le produit importé ; en l'espèce, le CANA V86 utilisé par le déclarant est applicable aux appareils de recueil pour incontinents, aux sondes urinaires, dès lors l'implant contraceptif ne peut rentrer dans ce cadre.
Selon les conditions posées par l'article 278-0 bis, la TVA au taux de 5, 5 % est perçue pour les appareillages pour handicapés ; les conditions d'application au taux réduit suppose deux conditions cumulatives : les produits doivent être destinés à des personnes handicapées et être repris au titre III de la LLP. La TVA de 5,5% est applicable pour le biens destinés à des personnes handicapées et les implants contraceptifs 'Essure' destinés aux femmes souhaitant une stérélisation permanente ne peuvent constituer un appareillage pour handicapés.
Ceci exposé,
Concernant la sphère de compétence de l'administration de douanes, la cour adopte les motifs du tribunal en ce qu'il a rappelé que l'administration des douanes a toute compétence pour déterminer l'espèce tarifaire d'une marchandise, c'est à dire la dénomination attribuée à la marchandise importée ou exportée.
Si la détermination du taux de TVA relève à titre principal de la direction générale des finances publiques, le service des douanes peut avoir une compétence accessoire en matière de TVA lors qu'il doit la rattacher à la marchandise concernée.
En l'espèce, les parties divergent sur les conditions d'application de l'article 278-0 bis, du code général des impôts qui prévoit sous certaines conditions l'application d'un taux réduit.
L'article 278-0 bis, du code général des impôts dispose que : 'la TVA au taux réduit de 5,5% est perçue pour les appareillages, équipements et matériels suivants : appareils pour handicapés mentionnés aux chapitres I et III à VII du titre II et IV de la liste des produits remboursables prévue à l'article 165 -1 du code de sécurité sociale'.
Ainsi que l'a justement retenu le tribunal les dispositions précitées supposent la réunion de deux conditions : les produits doivent être destinés à des personnes handicapées et être repris aux chapitres I et III à VII du titre II et IV de la liste des produits remboursables prévue à l'article 165 -1 du code de sécurité sociale.
L'analyse de la phrase : 'appareils pour handicapés' implique nécessairement que la destination de l'appareil s'adresse restrictivement aux personnes handicapées, alors que les implants contraceptifs de la société Conceptus s'appliquent à toutes personnes.
Contrairement à ce qui est soutenu, l'administration des douanes n'a pas ajouté une condition supplémentaire, mais a fait une application stricte de la lettre de l'article, qui exige le cumul de deux conditions.
S'agissant de la position de l'administration fiscale, qui divergerait de celle de l'administration de douanes, il n'est pas démontré par la société Conceptus que la direction générale des finances publiques se soit prononcée sur l'éligibilité des implants contraceptifs 'Essure' au taux réduit, en tenant compte des dispositions de l'article dans sa première branche ; en effet le courrier de l'administration fiscale sur lequel elle s'appuie, indique : les produits Essure sont inscrits au titre III de la LLP, ils réunissent ainsi les conditions pour bénéficier du taux réduit à 5,5%, en application de l'article 278-0 bis, du code général des impôts, sans évoquer les appareils pour handicapés.
Or, la notion de handicap est indéniablement un élément majeur pour pouvoir bénéficier du taux de TVA réduit et la société Conceptus ne remplit pas la première condition de l'article.
Au surplus, les implants Essure inscrits au titre III chapitre Ier de la LPP par arrêté du ministre de la santé et de la famille, en date du 14 janvier 2005 avaient pour date limite de remboursement le 15 juillet 2007.
La société Conceptus n'a obtenu son renouvellement qu'à la date du 31 octobre 2012, dès lors la société Conceptus reconnaît qu'elle n'a pu justifier de l'inscription de l'inscription des produits Essure sur la LLP au moment du contrôle.
Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions.
Il paraît équitable d'allouer à l'administration de douanes la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE la société Conceptus à payer à l'administration de douanes la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS