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31/10/2018 | FRANCE | N°16/00071

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 31 octobre 2018, 16/00071


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 31 Octobre 2018

(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/00071 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BXYMK





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F14/01922





APPELANT



Monsieur [P] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date

naissance 1] 1976 à [Localité 2] (Bangladesh)

représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B1024



INTIMÉE



SARL CANTINA NAPOLITAINE

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SI...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 31 Octobre 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/00071 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BXYMK

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 06 Octobre 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F14/01922

APPELANT

Monsieur [P] [C]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 2] (Bangladesh)

représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B1024

INTIMÉE

SARL CANTINA NAPOLITAINE

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 505 02 8 0 811

non comparante, non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Graziella HAUDUIN, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Graziella HAUDUIN, président

Madame Carole CHEGARAY, conseiller

Madame Séverine TECHER, vice-président placé

Greffier : Mme Fanny MARTIN, lors des débats

ARRET :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Graziella HAUDUIN, Président et par Madame Laurie TEIGELL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

Vu le jugement en date du 6 octobre 2015 par lequel le conseil de prud'hommes de Paris, statuant dans le litige opposant M. [P] [C] à son ancien employeur, la SARL Cantina napolitaine, a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail au 30 novembre 2013, condamné l'employeur au paiement des sommes suivantes au titre de l'exécution et de la rupture de ce contrat :

- 5 393,49 euros : indemnité de congés payés,

- 493,96 euros : rappel de prime TVA,

- 49,39 euros : congés payés y afférents,

- 5 110 euros : indemnité compensatrice de préavis,

- 511 euros : congés payés y afférents,

- 2 321 euros : indemnité de licenciement,

avec intérêts de droit à compter de la date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation,

- 5 200 euros : indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

avec intérêts de droit à compter du jugement,

a aussi ordonné la remise de l'attestation destinée à pôle emploi modifiée sous astreinte, condamné la société à verser au profit de Maître Ravez, intervenant au titre de l'aide juridictionnelle totale, une indemnité de 1 000 euros au titre de l'article 700.2° du code de procédure civile, ordonné la capitalisation des intérêts et l'exécution provisoire, les parties étant déboutées de leurs plus amples demandes et la société condamnée enfin aux entiers dépens ;

Vu l'appel interjeté le 4 janvier 2016 par M. [C] à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 21 décembre 2015 précédent ;

Vu le renvoi contradictoire au 5 septembre 2018 accordé lors de l'audience du 31 mai 2017 avec calendrier de procédure ;

Vu les conclusions et observations orales de M. [C] à l'audience des débats du 5 septembre 2018 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

Vu les conclusions enregistrées au greffe le 25 novembre 2016 , soutenues oralement à l'audience, par lesquelles le salarié appelant, soutenant n'avoir pas bénéficié de visite médicale d'embauche, non plus été rempli de ses droits au titre des congés payés, de la compensation en congés au titre des cinq jours fériés annuels garantis conventionnellement, de la prime TVA et des heures supplémentaires, faisant valoir avoir été victime de violences physiques et verbales de la part d'un dirigeant de la société M. [Q] le 26 octobre 2013 puis de nouveau le 16 novembre suivant et avoir été renvoyé à son domicile dans des conditions justifiant le prononcé d'une résiliation judiciaire de son contrat de travail au 28/02/2014, date à partir de laquelle l'employeur n'a plus établi de bulletin de salaire, ou au 31 mai 2017, invoquant subsidiairement avoir été licencié verbalement en novembre 2013, sollicite la confirmation du jugement entrepris en ses dispositions relatives à l'indemnité de congés payés, aux indemnités de rupture, aux congés payés sur préavis et à la somme de 1 000 euros allouée sur le fondement de l'article 37 de la loi sur l'aide juridictionnelle, son infirmation pour le surplus et la condamnation de la SARL Cantina napolitaine à lui payer :

- 158 410 euros et 15 841 euros : salaires de décembre 2013 au 31 mai 2017 et congés payés y afférents,

-ou 7 665 euros et 766,50 euros : salaires de décembre 2013 à février 2014 et congés payés y afférents,

- 15 330 euros : dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 477,33 euros : prime TVA,

- 147,73 euros : congés payés afférents,

- 1 500 euros : dommages-intérêts pou non-respect de la visite médicale d'embauche,

- 2 196,50 euros : indemnité compensatrice des 5 jours fériés annuels,

- 31 340 euros : heures supplémentaires,

- 3 134 euros : congés payés afférents,

- 2 555 euros : dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

- 5 000 euros : dommages-intérêts pour non remise de l'attestation pôle emploi,

- 15 330 euros : indemnité pour travail dissimulé,

- 2 500 euros : article 700 du code de procédure civile,

à lui remettre les documents sociaux sous astreinte, à supporter les entiers dépens ainsi que les intérêts au taux légal avec anatocisme ;

La SARL Cantina napolitaine n'a ni comparu, ni personne pour la représenter, si bien que l'arrêt sera réputé contradictoire la concernant ;

SUR CE, LA COUR :

Attendu que M. [P] [C] a été engagé le 1er mai 2009 en qualité de pizzaiolo suivant contrat à durée indéterminée à temps plein par la SARL Cantina napolitaine ; qu'estimant que son employeur avait gravement manqué à son égard à ses obligations contractuelles et légales, il a notamment saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 6 février 2014 d'une demande tendant à voir prononcer la résiliation de son contrat de travail avec tous les effets attachés à un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Attendu que statuant par jugement du 6 octobre 2015, dont appel, le conseil de prud'hommes s'est prononcé comme indiqué précédemment ;

Sur l'exécution du contrat de travail :

Attendu que le salarié n'invoque au soutien de sa demande de dommages-intérêts pour absence d'organisation de visite médicale d'embauche aucun préjudice particulier, si bien que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a écarté cette demande ;

Attendu que la disposition du jugement entrepris relative à l'indemnité compensatrice de congés payés pour la période de mai 2009 à octobre 2013, non remise en cause et correspondant aux droits du salarié, sera confirmée ;

Attendu qu'en application de l'article 11 de l'avenant du 5 février 2007 à la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants, "dans les établissements permanents, tous les salariés comptant 1 an d'ancienneté dans le même établissement et/ou entreprise, bénéficient, en plus du 1er Mai, de 8 jours fériés par an, selon le calendrier ci-dessous :

- 5 jours fériés garantis à compter de la date d'application du présent avenant ;

- 2 jours fériés à compter du 1er juillet 2007 ;

- 1 jour férié à compter du 1er janvier 2008.

En tout état de cause, il est accordé au salarié 5 jours fériés garantis. Ainsi, le salarié bénéficie de 5 jours fériés ou chômés et payés ou compensés en temps ou indemnisés même si le salarié est en repos ces jours fériés considérés" ;

Qu'il ne ressort pas des bulletins de paie produits au débat que le salarié a bénéficié des dispositions précédentes alors qu'il a travaillé de nombreux jours fériés durant toute sa période d'emploi, le fait qu'il ait été payé double à ces occasions ne permettant pas de retenir que l'employeur a ainsi respecté les dispositions conventionnelles ;

Que le jugement sera en conséquence infirmé sur ce point et il sera alloué à M. [C] la somme revendiquée par lui de 2 196,50 euros ;

Attendu que le salarié est en droit de prétendre à la prime conventionnelle dite de TVA prévue par l'avenant du 15 décembre 2009 étendu à compter du 1er mai 2010, soit à la date à laquelle son ancienneté était d'une année, et jusqu'au 16 novembre 2013, date selon lui de son dernier jour de travail, d'un montant de 2% de son salaire de base annuel dans la limite de 500 euros par an ;

Qu'il convient en conséquence en considération d'un salaire de base annuel de 30 120 euros, de la durée de travail précitée et de la somme de 293,50 euros déjà perçue au titre de la prime, d'allouer au salarié le montant revendiqué de 1 477,29 euros et 147,73 euros de congés payés afférents, et d'infirmer le jugement en cette mesure ;

Attendu que s'il résulte de l'article L.3171-4 du code du travail que la preuve des heures supplémentaires effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge les éléments de nature à étayer sa demande ;

Que par ailleurs, de l'application des articles L.3121-10 et L.3121-20 du code du travail ,il ressort que les heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de 35 heures réalisées et décomptées par semaine civile, sauf dérogation conventionnelle ou réglementaire ;

Qu'en l'espèce, les mentions figurant sur les bulletins de salaire, notamment le nombre d'indemnités de repas perçues, et le courrier adressé le 27 novembre 2013 par la contrôleur du travail sont de nature à étayer sa demande en paiement d'heures supplémentaires réalisées au-delà des heures de la 36 à la 39ème heures rémunérées régulièrement ;

Qu'en l'absence de tout élément produit par l'employeur sur les horaires réels du salarié, il sera en conséquence fait droit à la demande en paiement formée au titre des heures supplémentaires et des congés payés y afférents ;

Attendu cependant qu'aucun élément ne permet d'imputer à l'employeur une volonté manifeste de dissimuler le travail accompli par l'intéressé, celui-ci ayant par ailleurs été embauché sous contrat à durée indéterminée écrit et sans qu'il soit argué d'une quelconque défaillance dans l'accomplissement des diverses formalités relatives à l'embauche, si bien que la demande formée au titre de l'indemnité pour travail dissimulé sera rejetée ;

Sur la rupture des relations contractuelles :

Attendu que lorsque les manquements de l'employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis et d'une gravité suffisante et s'ils ont été de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être accueillie, avec effet à la date de la décision la prononçant, lorsqu'à cette date le contrat de travail est toujours en cours ;

Que le non-respect des dispositions conventionnelles en matière de prime de TVA et de congés payés, ainsi que le non-paiement des heures supplémentaires et les violences commises sur le salarié le 26 octobre 2013 attestées par M. [O], autre salarié de la société, caractérisent des manquements d'une gravité suffisante pour justifier le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, avec tous les effets attachés à un licenciement sans cause réelle et sérieuse à effet au 28 février 2014, date à laquelle le contrat de travail avait dans les faits pris fin puisque l'employeur a cessé d'émettre à partir de cette date des bulletins de salaire et que le salarié lui-même dans ses écritures a précisé avoir cessé de travailler dès le 16 novembre 2013 ;

Que le jugement entrepris sera confirmé dans cette mesure ;

Attendu que produisant tous les effets d'un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse, la résiliation judiciaire ouvre droit pour le salarié aux indemnités de rupture ainsi qu'à des dommages-intérêts ;

Que le conseil de prud'hommes a exactement fixé l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents et l'indemnité de licenciement, au demeurant non contestées devant la cour, et évalué les dommages-intérêts devant être alloués au titre de l'illégitimité de la rupture du contrat de travail sur le fondement de l'article L.1235-5 du code du travail, dont l'application n'est pas utilement remise en cause, en considération de la situation particulière du salarié et eu égard notamment à son âge, à l'ancienneté de ses services, à sa formation et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi et a à bon droit rejeté la demande formée au titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement qui ne peut être sollicitée en cas de rupture dont l'initiative a été prise par le salarié ;

Que le jugement sera ainsi confirmé sur ces différents chefs ;

Attendu que le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet au 28 février 2014 commande d'allouer à M. [C] les salaires et congés payés revendiqués par lui pour les mois de décembre 2013 à février 2014 durant lesquels il n'a pas été rempli de ses droits, soit 7 665 euros et 766,50 euros ;

Attendu que le jugement sera aussi confirmé en ce qu'il a ordonné à la société employeur de remettre à M. [C] l'attestation destinée à pôle emploi sans qu'il y ait toutefois lieu d'assortir cette remise d'une astreinte ;

Attendu que le salarié ne justifie pas au soutien de sa demande de dommages-intérêts pour non-remise de l'attestation pôle emploi avoir été empêché de s'inscrire auprès de cet organisme, si bien qu'en l'absence de preuve d'un préjudice particulier, cette demande indemnitaire sera écartée ;

Attendu que les intérêts échus produiront intérêts à compter du jour de la demande expressément présentée en première instance, dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Attendu que le jugement sera confirmé pour le surplus de ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles ;

Attendu qu'en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10juillet 1991 relative à l'aide juridique, il sera alloué à l'avocat du salarié appelant, qui bénéficie de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 1 000 euros au titre des frais et honoraires non compris dans les dépens que le bénéficiaire aurait exposés en l'absence de cette aide, à charge pour l'avocat, s'il recouvre tout ou partie de cette somme, de renoncer à percevoir tout ou partie de la part contributive de l'État dans les conditions de ce texte ;

Attendu que la SARL Cantina napolitaine sera condamnée à supporter les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

Infirme partiellement le jugement ;

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [P] [C] avec la SARL Cantina napolitaine à effet au 28 février 2014 ;

Condamne la SARL Cantina napolitaine à payer à M. [C] les sommes suivantes :

- 2 196,50 euros : indemnité compensatrice des 5 jours fériés annuels,

- 1 477,33 euros : prime TVA,

- 147,73 euros : congés payés afférents,

- 7 665 euros : salaires de décembre 2013 à février 2014,

- 766,50 euros : congés payés y afférents ;

Dit n'y avoir lieu à assortir la remise de l'attestation destinée à pôle emploi d'une astreinte ;

Confirme le jugement déféré pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL Cantina napolitaine à payer à M. [C] :

- 31 340 euros : heures supplémentaires,

- 3 134 euros : congés payés afférents ;

Dit que les intérêts échus produiront intérêts dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière, et ce à compter de la demande de capitalisation ;

Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la SARL Cantina napolitaine à payer à Me Ravez, avocat de M. [P] [C], la somme de 1 000 euros euros en application et dans les conditions de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10juillet 1991 relative à l'aide juridique et à supporter les dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/00071
Date de la décision : 31/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°16/00071 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-31;16.00071 ?
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