La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2018 | FRANCE | N°17/17610

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 18 octobre 2018, 17/17610


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS








COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 4 - Chambre 7





ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2018





(n° , 10 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/17610





Décisions déférées à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2016 -Juge de l'expropriation de CRETEIL - RG n° 15/00017


Arrêt de la Cour d'appel de Paris du 26 janvier 2017- RG n° 1

6/04016








DEMANDEUR AU RECOURS EN REVISION





L'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMÉNAGEMENT ORLY RUNGIS SEINE AMONT


N°SIRET 499 084 283 00021


[...]


Représentée par Me Miguel X..., avocat au barrea...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2018

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/17610

Décisions déférées à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2016 -Juge de l'expropriation de CRETEIL - RG n° 15/00017

Arrêt de la Cour d'appel de Paris du 26 janvier 2017- RG n° 16/04016

DEMANDEUR AU RECOURS EN REVISION

L'ETABLISSEMENT PUBLIC D'AMÉNAGEMENT ORLY RUNGIS SEINE AMONT

N°SIRET 499 084 283 00021

[...]

Représentée par Me Miguel X..., avocat au barreau de PARIS, toque : C2608

DÉFENDEURS AU RECOURS EN REVISION

Monsieur Michel, Jacques, Marie Y...

né le [...] [...]

[...]

Représenté par Me Jean-claude Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

Ayant pour avocat plaidant, Me Dominique D... , avocat au barreau de PARIS, toque : G0838

Monsieur Claude, Henri, Marie A...

né le [...] [...]

[...]

Représenté par Me Jean-Claude Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

Ayant pour avocat plaidant, Me Dominique D... , avocat au barreau de PARIS, toque : G0838

Monsieur André, Lucien, Marie A...

né le [...] à Constantine (Algérie)

[...]

Représenté par Me Jean-claude Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

Ayant pour avocat plaidant, Me Dominique D... , avocat au barreau de PARIS, toque : G0838

Monsieur Jean, Henri B...

né le [...] [...]

[...]

Représenté par Me Jean-Claude Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

Ayant pour avocat plaidant, Me Dominique D... , avocat au barreau de PARIS, toque : G0838

Monsieur Jean-Pierre, Edouard A...

né le [...] [...] Maritime

[...]

Représenté par Me Jean-claude Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0945,

Ayant pour avocat plaidant, Me Dominique D... , avocat au barreau de PARIS, toque : G0838

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL DE MARNE

[...]

Défaillante, bien que régulièrement convoquée et destinataire des conclusions

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Monsieur Hervé LOCU, Président

Mme Sophie MACE, Conseillère

Mme Marie MONGIN, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Isabelle THOMAS

LE MINISTÈRE PUBLIC

La communication de ce dossier a été faite le 21 septembre 2017 et le Ministère public a fait connaître son avis le 27 mars 2018.

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, et par Isabelle THOMAS, Greffière présente lors du prononcé.

Exposé :

Par arrêté préfectoral du 31 janvier 2013, les acquisitions foncières par l'Etablissement public d'aménagement Orly-Rungis-Seine-Amont (en abrégé l'EPA ORSA), en vue de la réalisation de la ZAC du Triangle des Meuniers sur le territoire de la commune de Chevilly-Larue (94) ont été déclarées d'utilité publique.

Parmi les terrains concernés se trouvent les parcelles sises [...] sur la commune de Chevilly-Larue, cadastrées section [...] et [...], mesurant respectivement 6914 m² et 33 m², appartenant à Mme Isabelle Y..., aux droits de laquelle vient son époux, M.Henri B..., ainsi qu'à MM.Claude A..., André A..., Michel Y... et Jean-Pierre A... (les consorts Y... A...), sur lesquelles se trouvent divers bâtiments loués à la société Garenne Surplus Automobile Américain (GSAA), en vertu d'un bail commercial renouvelé le 2 décembre 2005, pour y exercer une activité de vente et location de véhicules automobiles, de vente de pièces détachées automobiles, de stockage et de réparation.

Faute d'accord des consorts Y... A... sur sa proposition d'indemnisation, l'EPA ORSA a saisi le juge de l'expropriation du Val de Marne, le 25 février 2015.

L'ordonnance d'expropriation est du 18 mai 2015.

Par jugement du 11 janvier 2016, le juge de l'expropriation du Val-de-Marne a fixé de la façon suivante les indemnités revenant aux consorts A... Y...:

- indemnité principale : 2 378 040 euros,

- terrain : 1945160 euros ;

(6 947 m² x 400 euros le m² x 0,7 pour encombrement)

- constructions : 2 018 240 euros ;

(2 968 m² x 680 euros le m²),

avec sur le tout un abattement de 40 % pour occupation commerciale ;

- indemnité de remploi : 238804 euros ;

- indemnité au titre des clôtures : 0 ;

- indemnité pour perte de loyers : 90000 euros ;

- indemnité pour frais irrépétibles : 2 500 euros ;

l'expropriante étant condamnée à supporter les dépens.

Par arrêt du 26 janvier 2017, la cour de céans a:

- confirmé ledit jugement sauf en ce qui concerne le montant de l'indemnité principale d'expropriation et celui de l'indemnité de remploi;

- statuant à nouveau sur ces points, fixé de la façon suivante l'indemnisation des consorts Y... A..., sur la base d'une surface de 3388 m²:

- pour M. Claude A... :

- 160 000 euros au titre de l'indemnité principale;

- 17000 euros au titre du remploi;

- pour les autres consorts Y... A...:

- 2069626 euros au titre de l'indemnité principale;

- 207785 euros au titre du remploi;

- y ajoutant, condamné l'EPA ORSA à payer aux consorts Y... A..., ensemble, la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel et à supporter les dépens d'appel.

L'EPA ORSA a formé un recours en révision contre cet arrêt le 19 septembre 2017.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

- déposées au greffe par l'EPA ORSA, le 19 septembre 2017, notifiées le 21 septembre 2017 (AR du 26 septembre 2017), le 19 mars 2018, notifiées le 19 mars 2018 (AR du 21 mars 2018) et le 11 juin 2018, notifiées le 11 juin 2018 (AR du 13 juin 2018), aux termes desquelles il demande à la cour de:

- déclarer recevable son recours en révision contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2017;

- rétracter ledit arrêt sur l'indemnisation de dépossession allouée aux consorts Y... A...;

- statuant à nouveau:

- à titre principal, condamner solidairement les consorts Y... A... à lui restituer une partie de l'indemnité d'expropriation à hauteur de 231583euros définie comme suit:

- 209580eurossur le total de l'indemnité principale;

[499m² de différence de surfacex 700 euros x 40% pour occupation]

- 21958eurossur le montant du remploi;

- à titre subsidiaire, fixer l'indemnité à revenir aux consorts Y... A... sous la forme alternative comme suit:

- première branche de l'alternative, 2264856euros, sur la base d'une surface bâtie de 2889m², se décomposant comme suit:

- 2307532euros au titre de l'indemnité principale, soit:

- 1094152 euros au titre du terrain;

[6947m² x 375 euros x 0,7 x 0,6]

- 1213380 euros au titre des constructions;

[2889m² x 700euros x 0,6]

- 231753au titre du remploi;

$gt; soit, en raison de la déclaration de valeur opérée par M. Claude A..., la répartition suivante:

- pour M. Claude A...:

- 160000euros au titre de l'indemnité principale;

- 17000 euros au titre du remploi;

- pour les autres indivisaires, auxquels la déclaration n'est pas opposable, 74/90ème de 2539285euros :

- 1897304euros au titre de l'indemnité principale;

- 190552euros au titre du remploi;

- seconde branche de l'alternative, 2453270euros, sur la base d'une surface bâtie de 3 385m², se décomposant comme suit:

- 2515 852euros au titre de l'indemnité principale, soit:

- 1094152 euros au titre du terrain;

[6947m² x 375 euros x 0,7 x 0,6]

- 1421 700 euros au titre des constructions;

[3 385m² x 700euros x 0,6]

- 252 585au titre du remploi;

$gt; soit, en raison de la déclaration de valeur opérée par M. Claude A..., la répartition suivante:

- pour M. Claude A...:

- 160000euros au titre de l'indemnité principale;

- 17000 euros au titre du remploi;

- pour les autres indivisaires, auxquels la déclaration n'est pas opposable, 74/90ème de 2539285euros :

- 2068589euros au titre de l'indemnité principale;

- 207 681 euros au titre du remploi;

- à titre infiniment subsidiaire, rectifier l'erreur matérielle contenue dans l'arrêt du 26 janvier 2017 relative à la surface des constructions, et, en conséquencefixer à revenir aux consorts Y... A... comme suit:

- 2515 852euros au titre de l'indemnité principale, soit:

- 1094152 euros au titre du terrain;

[6947m² x 375 euros x 0,7 x 0,6]

- 1421 700 euros au titre des constructions;

[3 385m² x 700euros x 0,6]

- 252 585au titre du remploi;

$gt; soit, en raison de la déclaration de valeur opérée par M. Claude A..., la répartition suivante:

- pour M. Claude A...:

- 160000euros au titre de l'indemnité principale;

- 17000 euros au titre du remploi;

- pour les autres indivisaires, auxquels la déclaration n'est pas opposable, 74/90ème de 2539285euros :

- 2068589euros au titre de l'indemnité principale;

- 207 681 euros au titre du remploi;

- en tout état de cause, condamner les consorts Y... A..., in solidum, à lui rembourser les indemnités trop perçues, avec intérêt au taux légal à compter de la date du recours en révision;

- condamner les consorts Y... A... à lui payer une indemnité de 6000euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamner les consorts Y... A... aux dépens de la présente procédure;

- déposées au greffe par les consorts Y... A..., le 24 novembre 2017, notifiées le 27 novembre 2017 (AR du 29 novembre 2017) et le 28 mars 2018, notifiées le 28 mars 2018 (AR des 03 et 05 avril 2018), aux termes desquelles ils demandent à la cour de:

- déclarer irrecevable le recours en révision exercé par l'EPA ORSA;

- juger qu'il appartenait à l'EPA ORSA de procéder par voie de délivrance d'une assignation à leur encontre;

- juger, quand bien même l'introduction de la procédure par mémoire serait recevable, qu'en l'absence de notification de ce mémoire à l'ensemble des parties à l'arrêt, le recours est irrecevable;

- juger en outre que l'EPA ORSA ne démontre pas le respect du délai de deux mois imparti pour exercer un recours en révision;

- subsidiairement, au visa des dispositions de l'article 595 du code de procédure civile, juger que l'EPA ORSA ne démontre en aucun cas de l'existence d'une quelconque fraude qui leur serait imputable;

- juger en outre que l'attestation de surface incriminée n'était en aucun cas constitutive d'une pièce décisive, puisque la contestation opposant les parties ne concernait pas la surface stricto sensu des biens expropriés , mais la prise en considération ou non, au titre des constructions, d'un bâtiment dont seule la nature de la qualification opposait les parties;

- débouter en tout état de cause l'EPA ORSA des fins de son recours en révision;

- la condamner au paiement d'une somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;

- la condamner au paiement d'une somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance;

Conformément à l'article 600 du code de procédure civile, par avis du 27 mars 2018, notifiées le 27 mars 2018 (AR du 29 mars)le Ministère public demande à la cour de:

- à titre principal, déclarer irrecevable le recours en révision en raison de son caractère tardif;

- à titre subsidiaire, rejeter le recours en révision, aucune des causes limitativement prévues par la loi ne paraissant établie, en l'état des pièces produites;

Motifs de l'arrêt :

-sur l'irrecevabilité

Les consorts Y... A... font valoir que:

- le mémoire en révision ne leur a pas été transmis et ils n'ont été informés de l'existence du recours qu'au moyen d'une convocation à l'audience; le mémoire de l'EPA ORSA a exclusivement été notifié à Maître Z..., avocat postulant dans le cadre de la procédure d'expropriation, par LRAR;

- les formalités de notification des mémoires produits devant la chambre de l'expropriation, qui ont pour objet, en assurant le caractère contradictoire des débats, de sauvegarder les droits des parties en maintenant l'égalité entre elles, présentent un caractère substantiel (Civ.3ème, 20 juin 1978 et autres);

- l'EPA ORSA ne leur a jamais notifié son mémoire introductif, ni son mémoire en réponse, malgré des demandes réitérées, en violation des dispositions des articles 15 et 16 du code de procédure civile et 6.1 de la CESDH;

- à défaut d'assignation, de notification du recours à leur encontre et à l'encontre du commissaire du gouvernement et de preuve du respect du délai de 2 mois, le recours a été exercé en méconnaissance des dispositions des articles 596, 597 et 598 du code de procédure civileet est donc irrecevable;

Le Ministère public fait valoir que :

- l'EPA ORSA doit être réputé avoir eu connaissance de la cause de révision qu'il invoque le 05 juillet 2017, date à laquelle est établie la note de synthèse en cause, et, en conséquence, que son recours introduit le 21 septembre 2017, doit être déclaré irrecevable car tardif;

- concernant les défauts d'assignation et de notification invoqués, la procédure est conforme aux articles 598 et 597 du code de procédure civile;

L'EPA ORSA réplique que:

- si l'article 598 du code de procédure civile impose une citation, il n'impose aucunement une assignation; par ailleurs, en matière d'expropriation, sans représentation obligatoire, un mémoire en saisine, en première instance, ou un mémoire d'appel, suffit à saisir la juridiction, y compris dans le cadre d'un recours en révision(CA Paris, 29 juin 2017, RG n°16-23468)

- l'article 597 du code de procédure civile impose quant à lui que toutes les parties soient appelées à l'instance en révision et non que le recours soit notifié individuellement à chacune des parties par le requérant; or, en matière d'expropriation, c'est le greffe qui procède aux notifications des éléments de la procédure aux parties en cause (article 936 du code de procédure civile)et les expropriés ne contestent pas avoir reçu ces éléments du greffe;

- la note de synthèse n°1 établie par l'expert C..., ayant déclenché la procédure, a été transmise le 20 juillet 2017; le délai de 2 mois de l'article 596 du code de procédure civile est ainsi respecté,dès lors que la procédure a été engagée le 19 septembre 2017;

SUR CE

1°absence de délivrance d'une assignation

Aux termes de l'article 598 du code de procédure civile le recours en révision est formé par citation.

Toutefois, s'il est dirigé contre un jugement produit au cours d'une autre instance entre les mêmes parties devant la juridiction dont émane le jugement, la révision est demandée suivant les formes prévues pour la présentation des moyens de défense.

Les consorts A... Y... indiquent qu'en l'absence de texte spécifique définissant la citation, seule l'assignation en justice doit être utilisée pour introduire un recours en révision.

Cependant même si aucune définition n'est donnée du terme citation, si le recours en révision peut-être effectuée par assignation , ce mode introductif d'instance n'est pas applicable à l'ensemble des procédures judiciaires, notamment dans une matière où la représentation par avocat n'est pas obligatoire.

En effet sont comprises dans la qualification de citation, les requêtes ou déclarations auprès des juridictions concernées et en matière d'expropriation, le juge de l'expropriation n'est pas saisi par voie d'assignation, mais par voie de requête par mémoire en saisine en application de l'article R311-9 du code de l'expropriation, et il en va de même en appel en application de l'article R311-26 du code de l'expropriation.

En l'espèce l'EPA ORSA a procédé par voie de dépôt d'un mémoire en révision du 19 septembre 2017 au greffe de la cour d'appel pôle 4 chambre 7, et le greffe a informé les défendeurs de l'existence de ce recours au moyen d'une convocation par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 septembre 2017 pour l'audience de plaidoirie du jeudi 29 mars 2018 conformément à l'article R311-26 du code de l'expropriation.

2°absence de notification du recours à l'encontre des parties à l'arrêt rendu le 26 janvier 2017

Les consorts A... Y... indiquent qu'en application de l'article 597 du code de procédure civile toutes les parties au jugement attaqué doivent être appelées à l'instance en révision par l'auteur du recours à peine d'irrecevabilité, les mémoires devant être régulièrement notifiées au visa des dispositions de l'article R311'26 du code de l'expropriation.

L'article 597 du code de procédure civile dispose que toutes les parties au jugement attaqué doivent être appelées à l'instance en révision.

En l'espèce le mémoire en révision a été notifié à Me Z... conseil des consorts A... Y..., par pli recommandé avec accusé de réception du 21 septembre 2017, posté le 25 septembre 2017 et le recours en révision a donc été notifié à chacun des défendeurs par la convocation du greffe de la cour d'appel de Paris adressée en la forme recommandée.

La procédure est donc conforme aux exigences de l'article 598 du code de procédure civile, elle a respecté le principe du contradictoire et les droits de la défense sans violation des articles 15 et 16 du code de procédure civile et 6. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme.

3°absence de démonstration du respect du délai de deux mois

Les consorts A... Y... au visa des dispositions de l'article 596 du code de procédure civile indiquent que l'EPA ORSA n'apporte aucune précision dans son mémoire introductif permettant de vérifier qu'elle a bien respecté le délai de 2 mois qui lui est imparti.

Cependant l'EPA ORSA verse aux débats (pièce numéro 7) l'attestation établie par le conseil de la société GSSAA, ancien locataire des consorts A... Y..., contre laquelle ceux-ci ont engagé une action en déplafonnement de loyer, qui atteste avoir transmis le 20 juillet 2017 au conseil de l'EPA ORSA la note de synthèse numéro un établi par l'expert C... , élément dont se prévaut l'EPA ORSA pour engager la procédure en révision le 19 septembre 2017, soit dans le délai de 2 mois de l'article 596 du code de procédure civile.

En conséquence il convient de débouter les consorts A...- Y... de leurs moyens d'irrecevabilité et de déclarer le recours en révision de l'EPA ORSA recevable.

- sur le fond

L'EPA ORSA soutient sur le fond que:

- l'article 593 du code de procédure civile dispose que 'le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit'; l'arrêt du 26 janvier 2017 n'ayant pas fait l'objet d'un pourvoi en cassation, il est passé en force de chose jugée;

- l'article 595 prévoit la fraude et la rétention de pièces décisives comme cas d'ouverture du recours en révision; or, les consorts Y... A... ont obtenu une indemnité supérieure à celle à laquelle ils pouvaient prétendre, parce qu'ils ont volontairement dissimulé un certificat de mesurage réalisé en mars 2016, dans le cadre d'une procédure les opposant à leur ancien locataire, concomitamment à la déclaration d'appel du 15 février 2016; cette attitude constitue à la fois d'une fraude (article 595, 2°) et d'une rétention de pièces décisives;

- les consorts Y... A... reconnaissent qu'il est 'exact que (...) l'attestation de surface n'a pas été versée aux débats', ce qui constitue un aveu judiciaire; ils prétendent que la question de la surface à retenir n'a pas été débattue, ni devant le premier juge, ni en appel, si bien qu'aucune fraude n'a été commise; pourtant, il avait bien dénoncé l'absence de production par les intimés d'un certificat de mesurage; le caractère frauduleux de cette absence de production est patent;

- la décision de la cour a été surprise par la dissimulation volontaire d'informations essentielles et décisives qui auraient eu une influence sur le litige; par cette pièce, il est découvert que l'installation litigieuse n'a pas été réalisée par les consorts Y... A..., mais par le preneur lui-même et, par conséquent, que les consorts ne pouvaient revendiquer le bénéfice de l'indemnisation d'une telle installation ne lui appartenant pas; par ailleurs, dès lors qu'il existe une contestation sérieuse sur l'application de la règle de l'accession, il y a lieu de se prononcer par la voie alternative dans l'attente de l'issue de la procédure engagée sur ce point (L.311-8 du code de l'expropriation);

- dès lors que les consorts Y... A... ont volontairement dissimulé une telle pièce, l'exercice du droit de recours en révision n'a nullement dégénéré en abus du droit d'agir; en tout état de cause, le préjudice n'est pas démontré;

Les consorts Y... A... répliquent que:

- lors de la procédure d'expropriation, le différend concernait exclusivement la nature des biens à retenir sous le vocable 'constructions'; au regard de cette seule contestation, l'attestation de surface n'a pas été versée aux débats , mais son existence n'a jamais été niée et l'EPA ORSA pouvait faire intervenir un géomètre-expert;

- dès lors que ce n'était nullement une difficulté de superficies qui opposait les parties, mais bien la qualification d'une construction, l'attestation de surface n'aurait pas été de nature à modifier la décision rendue; l'expert judiciaire, aux termes de son rapport déposé le 28 décembre 2017, a intégré cette surface de 496 m² au titre des constructions;

- l'EPA ORSA se trouve dans l'impossibilité de rapporter la preuve de la prétendue fraude qu'elle leur impute;

Le Ministère public soutient que:

- aucune cause d'ouverture de l'article 595 du code de procédure civile ne paraît établie;

- l'EPA ORSA ne rapporte par la preuve de la prétendue fraude qu'elle impute à la charge des consorts Y... A...; les consorts Y... A... avaient d'ailleurs proposé à la cour, aux termes de leurs conclusions, d'ordonner une expertise si elle s'estimait insuffisamment informée; dès lors, aucune intention frauduleuse ne saurait être imputable aux consorts Y... A...;

- il ne s'agit pas d'une pièce décisive de nature à modifier la décision rendue; en effet, la cour, avisée de la contestation opposant les parties au moment où elle a statué, était en possession de tous les éléments lui permettant d'appréhender les surfaces;

SUR CE

Aux termes de l'article 593 du code de procédure civile le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.

En l'espèce il n'est pas contesté que l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 26 janvier 2017 est passé en force de chose jugée, puisqu'aucun pourvoi n'a été formé par l'une des parties.

L'article 595 du code de procédure civile, relatif aux différents cas d'ouverture du recours en révision dispose que le recours en révision n'est ouvert que pour l'une des causes suivantes :

1° s'il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;

2° si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d'une autre partie.

L'EPA ORSA fait état de la découverte d'une note de synthèse établie le 5 juillet 2017 par José C..., expert immobilier désigné dans le cadre du litige opposant les consorts Y... A... à leur ancien locataire faisant mention d'une attestation de surface réalisée en mars 2016 par le cabinet E... et F... qui retient une superficie de 2889 m² ; cependant il ressort des conclusions des parties, que la surface à retenir pour le montant de l'indemnité de dépossession faisait l'objet d'une divergence entre elles, s'agissant non pas de la superficie du terrain ou de celle des constructions édifiées sur ce terrain, mais de la prise en compte ou non, d'une construction de 80 m² en fond de parcelle.

L'EPA ORSA et le commissaire du gouvernement soutenaient devant le premier juge qu'elle ne pouvait être prise en considération au titre des constructions, puisque s'agissant d'une tente de stockage, alors que les consorts Y... A... indiquaient que ce grand hangar justifiait que sa surface soit prise en compte en qualité de construction.

Ainsi le premier juge avait retenu une surface de 2968m², les appelants, les consorts Y... A... faisaient valoir dans leurs conclusions une omission d'une construction située en fonds de parcelle, d'une surface au sol de 420 m², ce qui justifiait que l'indemnité demandée soit désormais fondée sur une surface totale de 3388m².

Le commissaire du gouvernement dans son mémoire d'appel au titre « description sommaire des biens » a procédé à une description précise des biens au vu d'un « rapport Boide et devis déménageurs bailly », faisant apparaître une surface « du bâti fermé » de 1594+1374=2968 m², ce descriptif incluant précisément en numéro 13 une « tente de stockage de 420 m² ».

Les consorts Y...- A... ont versé aux débats (pièce numéro 10 : extrait devis Bailly) les documents évoqués par le commissaire du gouvernement et pour attester de leur bonne foi, ils ont proposé à la cour aux termes de leurs conclusions, d'ordonner une expertise confiée à un géomètre expert, si elle s'estimait insuffisamment informée.

En conséquence la preuve n'est pas rapportée par l'EPA ORSA d'une intention frauduleuse imputable aux consorts Y...- A....

Dans son arrêt du 26 janvier 2017 la cour a retenu la surface de 3388 m² « considérant que, sans qu'il soit besoin de recourir à une mesure d'expertise, il apparaît que la différence des superficies revendiquées par les parties correspond à la contenance d'un local, qui apparaît ancré dans le sol et qui contient des racks supportant des jeep et des carcasses de Jeeps ou des matériaux, de sorte qu'il doit être considéré comme construction ».

La cour avisée de la contestation opposant les parties au moment où elle a statué, en possession de tous les éléments lui permettant d'appréhender les surfaces, a ainsi décidé d'intégrer, dans les surfaces construites, celle de 420 m², justifiant une surface totale de 3388 m².

En conséquence la communication de l'attestation de surface du cabinet Poulaud n'était pas de nature à modifier cette contestation, ni la décision de la cour et cette pièce ne peut donc être considérée comme une pièce décisive retenue par les consorts Y... A..., de nature à modifier la décision rendue par la cour.

L'EPA ORSA sera donc déboutée de sa demande de révision.

- Sur la demande en rectification d'une erreur matérielle

L'EPA ORSA demande à titre infiniment subsidiaire de rectifier l'arrêt de la cour d'appel sur le fondement de l'article 462 du code de procédure civile, la surface totale s'élevant à 3385 m² et non à 3388 m².

Si l'expert C... propose de retenir une surface de 3385 m², l'EPA ORSA ne rapporte pas la preuve d'une erreur matérielle contenue dans l'arrêt de la cour.

L'EPA ORSA sera donc débouté.

- Sur les dommages et intérêts

Les consorts Y...- A... sollicitent la condamnation de l'EPA ORSA à une somme de 15'000 € pour procédure abusive.

Il n'est pas démontré que l'exercice par l'EPA ORSA de son droit de déposer une requête en révision a dégénéré en droit d'agir.

.

En conséquence les consorts Y...- A... seront déboutés de cette demande.

- sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de débouter l'EPA ORSA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner sur ce fondement à verser aux consorts A... la somme de 2000 euros.

- sur les dépens

L'EPA ORSA perdant le procès sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS, la cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Déboute M. Jean- Pierre A..., M. Jean B..., M. André A..., M. Michel Y... et M. Claude A... de leur demande de voir déclarer irrecevable le recours en révision exercé par l'EPA ORSA à l'encontre de l'arrêt rendu le 26 janvier 2017 par la cour d'appel de Paris Pole 4 Chambre 7 RG N°16/04016.

Déboute l'EPA ORSA de sa demande principale de révision.

Déboute l'EPA ORSA de sa demande subsidiaire de rectification d'erreur matérielle.

Déboute M. Jean- Pierre A..., M. Jean B..., M. André A..., M. Michel Y... et M. Claude A... de leur demande de voir condamner l'EPA ORSA à leur payer une somme de 15000 euros pour procédure abusive.

Déboute l'EPA ORSA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'EPA ORSA à verser à M. Jean B..., M. André A..., M. Michel Y... et M. Claude A... ensemble la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'EPA ORSA à supporter les dépens de cette instance.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 17/17610
Date de la décision : 18/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G7, arrêt n°17/17610 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-18;17.17610 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award