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16/10/2018 | FRANCE | N°17/01966

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 16 octobre 2018, 17/01966


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 2 - Chambre 1



ARRET DU 16 OCTOBRE 2018



(n° 421 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01966



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/12211



APPELANT



Monsieur Didier X...

[...]

[...]



Représenté par Me Richard Y..., av

ocat au barreau de PARIS, toque : C2404



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/003133 du 20/03/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)



INTIME

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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2 - Chambre 1

ARRET DU 16 OCTOBRE 2018

(n° 421 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/01966

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/12211

APPELANT

Monsieur Didier X...

[...]

[...]

Représenté par Me Richard Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : C2404

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/003133 du 20/03/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIME

L'AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

Bâtiment Condorcet - Télédoc 353

[...]

Représenté par Me Xavier C... de la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0141

Ayant pour avocat plaidant Me Alexandre Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : 585

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Juin 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

M. Christian HOURS, Président de chambre

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

Mme Anne LACQUEMANT, Conseillère

qui en ont délibéré,

un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Christian HOURS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Nadyra MOUNIEN

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Christian HOURS, Président de chambre et par Lydie SUEUR, Greffière présent lors du prononcé.

*****

Le 1er avril 1991, M. Didier X... a été embauché par la société Sofintel, filiale du groupe Lorieul Marée, en qualité de 'crédit man' et agent de recouvrement de créances.

Le 11 septembre 1992, date de la liquidation judiciaire de l'ensemble des sociétés du groupe Lorieul, il a été licencié, le terme de son préavis légal de licenciement étant fixé au 11 octobre 1992.

Le 27 octobre 1992, le juge commissaire, M. A..., a autorisé la cession des fonds de commerce du groupe Lorieul à la société Primel.

Le 3 novembre 1992, M. X... a été informé par le mandataire liquidateur, Me Gilles B..., de cette cession et de la reprise de son contrat de travail initial en vertu des dispositions de l'article L122-12 du code du travail.

Il a refusé de réintégrer la société au motif que les conditions de reprise de son contrat ne correspondaient en réalité plus à celles dont il bénéficiait auparavant.

Le 14 décembre 1992, il a engagé avec d'autres salariés une procédure prud'homale à l'encontre de la société Primel mais a été débouté de ses demandes par jugement du conseil des prud'hommes de Paris du 18 août 1994.

Par arrêt du 25 octobre 1996, la cour d'appel de Paris a infirmé ce jugement et lui a alloué la somme de 65 000 francs à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail.

M. X... a formé diverses demandes d'autorisation de prise à partie à l'encontre du juge commissaire ayant autorisé la cession, notamment le 4 décembre 2014, qui ont été rejetées, en dernier lieu par une ordonnance d'irrecevabilité de la première présidente de la cour d'appel de Paris, le 26 janvier 2015.

M. X..., estimant qu'il y a eu dysfonctionnement de la justice, le juge commissaire ayant selon lui commis une faute lourde en ordonnant la cession des fonds de commerce, le 27 octobre 1992, après la date d'expiration de son préavis de licenciement économique, a, le 15 juillet 2015, fait assigner l'Etat français en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire.

Par jugement du 9 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré M. X... irrecevable en son action comme prescrite ;

- débouté l'agent judiciaire de l'Etat de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. X... aux dépens qui seront recouvrés conformément à la loi sur l'aide juridictionnelle.

M. X..., qui a interjeté appel de cette décision par déclaration du 24 janvier 2017, demande à la cour, par dernières conclusions du 25 mai 2018, d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, et, statuant à nouveau, de :

- le déclarer recevable en son action ;

- condamner l'agent judiciaire de l'Etat à lui verser la somme totale de 917 434,23 euros en réparation de son préjudice financier ;

- appliquer les intérêts légaux, ainsi que la capitalisation des intérêts à compter de la première demande d'autorisation de prise à partie déposée le 24 février 1997 sur la somme de 759 968,14 euros représentant les pertes en salaires brut et la perte de chance d'effectuer une carrière de crédit manager ;

- condamner l'agent judiciaire de l'Etat à lui verser la somme de 1 euro en réparation de son préjudice moral et à payer à son conseil, Me Y..., la somme de 5 000 euros au titre des frais qu'il aurait supportés s'il n'avait pas été bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, en vertu des dispositions des articles 37 deuxième alinéa et 75 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières écritures du 19 juin 2017, l'agent judiciaire de l'Etat demande à la cour de :

- confirmer le jugement du 9 janvier 2017 en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en responsabilité introduite par M. X... contre l'Etat et le déclarer recevable et bien fondé en ses écritures ;

- à titre subsidiaire, juger qu'aucune faute lourde n'est caractérisée et qu'il n'existe aucun lien de causalité entre les fautes alléguées mais non démontrées et ses préjudices invoqués, que la responsabilité de l'Etat n'est pas engagée sur le fondement de l'article L 141-1 du code de l'organisation judiciaire,

- débouter M. X... de l'ensemble de ses demandes,

- en tout état de cause, le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la présente procédure d'appel.

Le ministère public, dans un avis du 5 février 2018, demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par la tribunal de grande instance de Paris le 9 janvier 2017;

- à titre subsidiaire, conclure à l'absence de faute lourde du juge commissaire.

SUR CE,

Considérant que l'agent judiciaire de l'Etat soutient que l'action en responsabilité de l'appelant est prescrite en ce que :

1) les actions contre l'Etat bénéficient d'un régime de prescription spécifique conformément aux dispositions de l'article 1er de la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968,

2) s'agissant des créances de dommages, la Cour de cassation considère que la déchéance quadriennale des créances de l'Etat, au sens de la loi du 31 décembre 1968, commence à courir le premier jour de l'année au cours de laquelle s'est produit le fait générateur du dommage allégué,

3) le point de départ du délai de prescription est la date de l'ordonnance du 27 octobre 1992 et la déchéance quadriennale était acquise au 1er janvier 1996,

4) en pensant qu'il peut valablement opposer l'interruption de la prescription par ses courriers adressés au ministère de la justice, l'appelant opère une confusion entre la procédure au fond qui s'est déroulée devant les juridictions statuant sur le fond et la procédure en responsabilité fondée sur l'article L 141-1 du code de l'organisation judiciaire; les courriers dont fait état le requérant ne sauraient être qualifiés d'interruptifs de prescription ;

Considérant que M. X... fait valoir en réponse que son action est recevable en ce que:

1) il y a rupture d'égalité entre les usagers du service public puisque rien ne justifie que le jugement attaqué accorde plus de droit à une créance certaine dont le délai de prescription commence à courir au 1er janvier de l'année suivante, et moins de droit à une action tendant à faire reconnaître l'existence d'une créance dont le délai de prescription commencerait à courir avant que le fait générateur ne se soit produit,

2) il existe des jurisprudences contraires concernant le point de départ de la prescription quadriennale qui placent le point de départ de la prescription au moment de la survenance du dommage,

3) le point de départ de la prescription devant commencer à courir le premier jour de l'année suivant le dommage, le courrier de réclamation du 28 juin 1996 a bien interrompu la prescription puisqu'il se trouve inclus dans le délai quadriennal,

4) ne pouvant assigner l'Etat avant d'assigner le juge commissaire, le préalable était donc la mise en cause du juge commissaire ;

Considérant que le point de départ de la prescription quadriennale commence à courir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle était intervenu le fait générateur du dommage;.

Considérant que cette prescription peut être interrompue par une lettre qui, sans réclamer le montant de la créance, rappelle néanmoins le fait générateur de la créance ainsi que le montant de celle-ci ;

Considérant en l'espèce que le fait générateur de la responsabilité recherchée de l'Etat, constituant le point de départ du délai de prescription, est l'ordonnance critiquée du 27 octobre 1992 par laquelle le juge commissaire a ratifié la cession du fond de commerce ;

Considérant que la déchéance quadriennale, au sens de la loi du 31 décembre 1968, a commencé à courir à compter du premier jour de l'année suivant laquelle s'est produit le fait générateur du dommage allégué, soit en l'espèce le 1er janvier 1993 ;

Considérant que M. X... a interrompu la prescription en adressant un courrier de réclamation le 28 juin 1996 adressé au Ministère de la justice, faisant état de l'engagement d'une procédure de prise à partie et fixant son préjudice à la somme de 210 000 francs ;

Considérant que M. X... a ensuite engagé une procédure de prise à partie pour faute lourde professionnelle devant le premier président de la cour d'appel de Paris le 24 février 1997 ; qu'il a ensuite formé un recours devant la Cour de cassation contre l'ordonnance rendue le 29 octobre 1997 par le premier président refusant de l'autoriser à prendre à partie M. A..., juge commissaire au tribunal de commerce de Créteil ; que ce pourvoi a été rejeté par arrêt du 17 novembre 1999 de la Cour de cassation ; qu'une nouvelle requête reçue le 15 septembre 1999 à la cour d'appel a donné lieu à une nouvelle ordonnance du 6 décembre 1999 de la première présidente de la cour d'appel de Paris, disant n'y avoir lieu à autoriser la prise à partie du juge-commissaire, M. A... ;

Considérant que suite à ces actes, la prescription interrompue a recommencé à courir le 1er janvier 2000, de sorte que l'action de Mme X... est prescrite depuis le 1er janvier 2004, son action n'ayant été engagée qu'à une date postérieure, le 15 juillet 2015 ;

Considérant que le jugement entrepris doit être confirmé ;

Considérant en équité qu'il n'y a pas lieu de condamner M. X... au paiement d'une indemnité pour frais irrépétibles à l'agent judiciaire de l'Etat ;

Considérant que M. X... doit être condamné aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement du 9 janvier 2017 en toutes ses dispositions ;

Déboute l'agent judiciaire de l'Etat de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. X... aux dépens d'appel.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 17/01966
Date de la décision : 16/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris C1, arrêt n°17/01966 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-16;17.01966 ?
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