Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 08 OCTOBRE 2018
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/26014
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Novembre 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/18652
APPELANTE
Madame Laurence X...
demeurant [...]
Représentée par Me Isabelle C..., avocat au barreau de PARIS, toque: C2557
INTIME
MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS
Pôle Juridictionnel Judiciaire, Pôle Fiscal Parisien 1
Ayant ses bureaux [...]
Représenté par Me Guillaume Y..., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque: PC430
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Juin 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, président et par Mme Cyrielle BURBAN, greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par acte authentique des 22 et 24 juillet 1997, les consorts Z... ont consenti a M.Laurent X... une promesse de vente portant sur un appartement d'une superficie totale de 294,56 mètres carrés, ainsi qu'un garage, une cave et trois chambres de service, situés [...] , moyennant le prix de 5000000 francs.
Par acte sous seing privé du 12 septembre 1997, i1 a été constitué une Sci [...], dont le capital fixé à la somme de 1524,49 euros était réparti entre, d'une part, une SCI Galliéni a hauteur de 98 parts et, d'autre part, M. X... et son épouse, Mme Laurence A..., à hauteur d'une part chacun, étant précisé que M. A..., père de Mme X..., désigné comme gérant de 1a Sci [...], était également gérant et associe a hauteur de 98% de la SCI Galliéni.
Selon acte authentique du 20 novembre 1997, 1a Sci [...], se substituant à M. X..., a acquis les lots en question au prix convenu, au moyen d'un emprunt d'un montant de 5100000 francs, outre un second emprunt d'un montant de 950000 francs destiné au financement de travaux, consentis par 1a société Crédit du Nord, avec pour garanties, notamment, les cautions de M. A..., de M. et Mme X... et de la Sci Galliéni, ainsi que le nantissement d'un contrat d'assurance-vie souscrit par M. X....
Par acte sous seing prive des 3 mars et 15 juillet 1998, enregistré 1e 20 jui11et 1998, 1a SCI Galliéni à consenti a M. et Mme X... une promesse irrévocable de vente portant sur les 98 parts qu'elle détenait dans la SCI [...], moyennant 1e prix de 19600 francs et sous la condition suspensive suivante :
«Le promettant ayant formé le projet d'acquérir lot par lot, la totalité de l'immeuble sis [...] , mais s'étant trouvé obligé de réaliser définitivement l'acquisition du Ier étage sur rue, entend renoncer à son projet s'il ne pouvait le réaliser au moins à hauteur de 50%.
En conséquence, si dans le délai imparti et prévu par l'article 8 (au plus tard le 31 décembre 2007), le promettant n'avait pas acquis l'intégralité dudit immeuble, la présente condition suspensive serait levée et la promesse de vente deviendrait ferme et définitive, sans qu'il soit besoin d'aucune mise en demeure ni formalité judiciaire».
Par courrier du 4 avril 2005, 1a SCI Galliéni a informé M. et Mme X... qu'elle souhaitait leur céder la totalité des parts qu'e11e détenait dans la Sci [...], précisant : «La SCI Galliéni n'a pas réalisé son projet d'acquisition d'autres lots de l'immeuble sis à [...] , de [...], et n'a pas l'intention de réaliser avant le délai imparti à l'article 8 de la dite convention, soit le 31 décembre 2007. Au contraire, la SCI Galliéni, a depuis 2004, commencé à se désengager de ses opérations immobilières et ne peut plus assurer les charges relatives à cet investissement».
Selon acte authentique du 13 mai 2005, la Sci Galliéni a cédé à M. et Mme X... les 98 parts qu'elle détenait au capital de la Sci [...] moyennant le prix de 2 988 euros, correspondant a la contre-valeur en euros du prix de 19 600 francs stipulé à la promesse de cession des 3 mars et 15 juillet I998.
Considérant que cette cession, à un prix fortement minoré des parts sociales de la Sci [...] détenues par la SCI Galliéni constituait une donation indirecte consentie par M. A... à sa fille et a son gendre, l'administration fiscale a, aux termes de deux propositions de rectification des 11 et 21 février 2008, estimé que M. et Mme X... avaient bénéficié d'un avantage correspondent a la valeur réelle des parts diminuée de la valeur déclarée dans l'acte, soit une somme de 1489455 euros, entraînant un rappel de droits pour Mme X... à hauteur de 77751 euros, outre 42684 euros d'intérêts de retard et pour M. X... à hauteur de 222816 euros, outre 122325 euros d'intérêts de retard et de majoration.
Dans sa séance du 7 avril 2009, la commission départementale de conciliation de Paris a émis 1'avis de fixer 1a valeur vénale des parts à la somme de 1047709 euros.
Les impositions supplémentaires ont été mises en recouvrement a 1'encontre de Mme X....
Mme X... a formé une réclamation contentieuse par courrier du 10 février 2010. Par décision du 8 décembre 2015,1'administration fiscale a partiellement admis cette réclamation, constatant notamment que l'imposition supplémentaire avait été déterminée à tort selon la base retenue dans la réponse aux observations du contribuable et non selon la valeur retenue par la commission de conciliation, prononçant par conséquent un dégrèvement, au titre de la donation, d'un montant de 32 589 euros en droits, 5344 euros en intérêts de retard et 13035 euros de majoration, et, au titre de la cession de parts, d'un montant de 6583 euros en droits, 981 euros en intérêts de retard et 2633 euros de majoration.
Par exploit d'huissier du 21 décembre 2015, Mme X... a fait assigner le directeur des services fiscaux des Hauts de Seine aux fins d'annulation de la proposition de rectification et de dégrèvement du rappel de droit dont elle avait fait l'objet.
Par jugement rendu le 18 novembre 2016, le tribunal de grande instance de Paris a débouté Mme Laurence A... épouse X... de 1'ensemble de ses demandes, confirmé la décision d'admission partielle du 8 décembre 2015, condamné Mme Laurence X... aux dépens et rappelé que le présent jugement était exécutoire par provision.
Mme Laurence A... épouse X... a relevé appel de ce jugement le 22 décembre 2016.
Par conclusions signifiées le 14 février 2017, Mme Laurence A... épouse X... demande à la cour de la recevoir en son appel d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de prononcer la décharge des rappels de droits auxquels elle a été assujettie à raison d'une prétendue donation déguisée issue de l'acte en date du 3 mai 2005 et de condamner Monsieur le directeur départemental des Hauts de Seine à lui payer la somme de 5000 euros au titre de l'article de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de procédure
Par conclusions signifiées le 13 avril 2017, Monsieur le directeur départemental des Hauts de Seine demande à la cour de débouter Madame Laurence A... épouse X... de toutes ses demandes et de confirmer le jugement déféré et de condamner Mme X... aux entiers dépens de première instance et d'appel et à verser à l'Etat la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
Sur la régularité de la procédure
Mme Laurence X... considère que les impositions supplémentaires relèvent de l'abus de droit visé par les dispositions de l'article L. 64 du LPFet qu'en cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, a' l'avis du comite' consultatif pour la répression des abus de droit. Or, contrairement à ce que soutient l'appelante, l'administration fiscale ne se fonde pas sur l'abus de droit au sens de l'article L 64 du livre des procédure fiscales qui, en cas de désaccord et à la demande du contribuable, conduit à la saisine pour avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit puisqu'elle n'évoque ni même ne sous-entend aucune manoeuvre frauduleuse mais demande uniquement de restituer à l'acte, en l'occurrence la cession par la SCI Galliéni le 13mai 2015 aux époux X... des 98 parts sociales de la SCI [...], sa véritable portée fiscale, en l'occurrence, une mutation à titre gratuit à hauteur de la minoration constatée.
- Sur le bien fondé de l'imposition
Madame X... soutient l'absence de toute intention libérale dans la conclusion de l'acte litigieux qui est la conséquence de l'absence de réalisation de l'aléa, convenu par les parties lors de la signature de la promesse synallagmatique des 3 mars et 15 juillet 1998, date à laquelle l'intention des parties doit être analysée. Elle précise qu'à cette date, le prix des parts cédées correspondait très exactement à leur valeur et n'a pas été minorée ; que la condition suspensive ne s'étant pas réalisée, l'accord des parties sur la cession des titres de la SCI [...] est réputé être intervenu rétroactivement à la date de souscription en 1998, date certaine puisque figurant dans l'acte enregistré ; que l'intention libérale du donateur ne peut résulter de donations antérieures ou concomitantes ; que la valeur retenue pour le prix de cession des parts sociales ayant correspondu à leur valeur vénale, le donateur n'a subi aucun dessaisissement. Elle précise que son époux et elle-même sont devenus propriétaires de l'intégralité des titres de la SCI et ont occupé gracieusement l'appartement mais ont dû rembourser le prêt bancaire et les charges de copropriété.
L'administration fiscale considère que les contions d'une donation indirecte sont réunies justifiant l'imposition contestée.
Ceci étant exposé, c'est par de justes motifs que la cour adopte que les premiers juges ont parfaitement caractérisé le fait que l'acte de cession intervenu entre la SCI Galliéni et les époux X... le 13 mai 2005 portant sur 98 parts sociales de la SCI [...] au prix de 2988 euros avait constitué une donation indirecte au sens de l'article 894 du code civil ; que ces parts correspondaient à un appartement de 294,56 mètres carrés situés [...] avec garage et trois chambres de service, la valeur réelle des 98 parts ayant été estimée à 1047709 euros par la commission départementale de conciliation dans un avis émis le 10 avril 2009 avec application d'un abattement de 10% pour absence de liquidité.
Les premiers juges ont justement écarté l'argumentation de Mme X... selon laquelle l'acte du 13 mai 2005 aurait constitué la suite de la promesse de vente conclue les 3 mars 1998 et 15 juillet 1998 entre les mêmes parties sous condition suspensive et que la condition suspensive ne s'étant pas réalisée, la vente de 2005 aurait nécessairement été conclue dans les mêmes termes avec effet rétroactif.
En effet la vente du 13 mai 2005 ne se réfère aucunement à la promesse de vente contenue dans l'acte des 3 mars et 15 juillet 1998 ; que de plus la non réalisation de la condition suspensive relative à l'acquisition par M. A... de l'intégralité de l'immeuble apparaît purement potestative puisqu'il n'est justifié d'aucune diligence pour y parvenir, le courrier de M. B... versé aux débats selon lequel il aurait acquis l'appartement du rez-de-chaussée en mai 2000 n'étant aucunement pertinent, M. A... disposant d'un délai expirant le 31 décembre 2007 pour procéder à l'acquisition de l'immeuble en son entier ; que ce dernier, dans la mise en demeure qu'il a adressée aux époux X... le 4 avril 2005, précise que la SCI Galliéni qu'il représente n'a plus l'intention de poursuivre l'acquisition de l'immeuble en entier avant le 31 décembre 2007, la SCI ayant décidé de se désengager de ses opérations immobilières. Le prix des parts sociales retenu en 1998 ne s'imposant aucunement en 2005.
La vente du 13 mai 2005 à des conditions aussi manifestement défavorables a nécessairement appauvri Monsieur A..., son gérant détenteur des parts des part cédées; l'intention libérale se déduisant de la qualité du cédant, père et beau père des cessionnaires.
L'appauvrissement irrévocable de M. A..., par la SCI Gallinéni interposée, est ainsi caractérisé ainsi que son intention libérale. L'acceptation des bénéficiaires se déduit de ce qu'ils ont acquis lesdites part. Les conditions de la donation indirecte sont ainsi réunies justifiant le bien fondé des impositions dont les montants ne font pas l'objet de contestations spécifiques.
Le jugement déféré sera dès lors confirmé en toutes ses dispositions.
Mme X... succombant en son appel sera condamnée aux dépens de la présente procédure et déboutée de sa demande d'indemnité de procédure. Elle sera condamnée, sur ce même fondement, à à payer à l'administration fiscale, la somme de 2000 euros.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 18 novembre 2016 en toutes ses dispositions ,
CONDAMNE Madame Laurence A... épouse X... aux dépens d'appel ;
DEBOUTE Madame Laurence A... épouse X... de sa demande d'indemnité de procédure ;
CONDAMNE Madame Laurence A... épouse X... à payer à Monsieur le directeur général des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris la somme de 2000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS