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04/10/2018 | FRANCE | N°18/00403

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 04 octobre 2018, 18/00403


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 04 OCTOBRE 2018



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 18/00403



Décision déférée à la Cour : Ordonnance rendue par le juge de la mise en état du 30 Novembre 2017 du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 16/03508





APPELANTE



Madame Véronique X...

née le [...] à

Troyes (10000)

[...]

Représentée par Me Stéphane Y... N... M... AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075, avocat postulant

Représentée par Me Philippe Z..., avocat au barr...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 04 OCTOBRE 2018

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 18/00403

Décision déférée à la Cour : Ordonnance rendue par le juge de la mise en état du 30 Novembre 2017 du Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 16/03508

APPELANTE

Madame Véronique X...

née le [...] à Troyes (10000)

[...]

Représentée par Me Stéphane Y... N... M... AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075, avocat postulant

Représentée par Me Philippe Z..., avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMEE

Madame Anne A...

née le [...] à Angers (49100)

[...]

Représentée par Me Cécile B..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1743, avocat postulant

comparante en personne et assistée de Me François Xavier JUGUET, avocat au barreau d'ANGERS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 mai 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Madame Catherine MÉTADIEU, Président

Madame Soleine C... FALCK, Conseiller appelé à compléter la chambre par ordonnance de roulement en date du 05 janvier 2018

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller, en remplacement de Madame Catherine MÉTADIEU, Président empêché et par Madame FOULON, Greffier.

**********

Statuant sur l'appel interjeté par Véronique X... à l'encontre d'une ordonnance rendue le 30 novembre 2017 par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de CRÉTEIL qui a notamment :

- prononcé la requalification du contrat intitulé «de collaboration» conclu le 28 juin 2013 entre Véronique X... et Anne A... en contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail

- déclaré le tribunal de grande instance de CRÉTEIL incompétent matériellement pour statuer sur les demandes formées par Véronique X... à l'encontre d'Anne A...

- désigné le conseil de prud'hommes de CRÉTEIL pour connaître du litige né de l'exécution et de la rupture dudit contrat opposant Véronique X... et Anne A...

- condamné Véronique X... au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions déposées le 11 mai 2018 sur le RPVA par Véronique X... qui demande à la cour d'infirmer l'ordonnance déférée et, en conséquence, de :

- déclarer le tribunal de grande instance de CRÉTEIL compétent pour connaître du litige opposant les parties

- déclarer le tribunal de grande instance de CRÉTEIL compétent matériellement pour statuer sur les demandes qu'elle forme à l'encontre d'Anne A...

En tout état de cause

- condamner Anne A... au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions déposées le 23 mai 2018 sur le RPVA par Anne A... qui demande à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise et, y ajoutant, de condamner Véronique X... au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 mai 2018 ;

SUR CE, LA COUR

Faits et procédure

Véronique X... et Anne A... sont psychomotriciennes.

Le 28 juin 2013, elles ont conclu un «contrat de collaboration» auquel Anne A... a mis fin par une lettre recommandée du 21 mars 2015, à effet au 30 juin 2015.

Reprochant à Anne A... d'avoir désorganisé le cabinet et détourné sa patientèle, Véronique X... l'a, par acte d'huissier en date du 8 avril 2016, fait assigner devant le tribunal de grande instance de CRÉTEIL afin d'obtenir des dommages-intérêts.

Anne A... a saisi le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de CRÉTEIL aux fins de voir requalifier le contrat liant les parties en un contrat de travail et dire compétent le conseil de prud'hommes de CRÉTEIL.

C'est dans ces conditions qu'a été rendue l'ordonnance déférée ;

Motivation

Aux termes de l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions de ce même code entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient.

Il règle les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

Il résulte des articles L. 1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination, lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

L'existence d'un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur.

L'existence d'un lien de subordination n'est pas incompatible avec une indépendance technique dans l'exécution de la prestation.

En l'absence d'écrit ou d'apparence de contrat, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Aux termes du «contrat de collaboration» conclu par les parties, Véronique X... a déclaré choisir en qualité de collaboratrice Anne A... qui a accepté 'afin d'exercer en ses lieu et place auprès de sa patientèle dans son cabinet sis [...]', ce contrat étant à effet du 1er juillet 2013.

Il était prévu qu'Anne A... :

- exerce son activité de psychomotricienne les lundis, mardis, jeudi et vendredis, cette dernière s'engageant à informer Véronique X... des créneaux utilisés afin qu'elle-même puisse organiser son propre planning,

- donne des soins consciencieux et attentifs à toute la patientèle, dans la double préoccupation de lui donner satisfaction et de la maintenir attachée à Véronique X...,

- soumette à Véronique X... ses écrits pour relecture et correction éventuelle,

- suive le mode de fonctionnement du cabinet et de travail (transmission des bilans, rédaction de compte-rendu de bilan, devis et factures établis selon les modèles fournis), les demandes de premier rendez-vous étant centralisées et gérées par Véronique X...,

- remette un relevé journalier des actes effectués, du montant et de la forme des honoraires perçus,

ce en contrepartie de la perception par Anne A... de 30 % des honoraires perçus.

Force est de constater que Véronique X... était particulièrement pointilleuse s'agissant de l'organisation du cabinet et notamment qu'elle veillait spécialement au respect des consignes concernant notamment le partage des espaces communs et des bureaux dédiés aux entretiens.

Véronique X... communique elle-même le témoignage de Marie D... épouse E... collaboratrice de 2011 à 2016 qui déclare qu'elle tenait au respect du contrat établi mais qui indique aussi qu'elle faisait preuve d'une grande disponibilité lorsque l'une ou l'autre la sollicitait.

Cette dernière ajoute : ' Nous étions avec elle sur un pied d'égalité'.

Les nombreux échanges versés aux débats par Véronique X... concernant la période du 10 septembre 2014 au 28 mai 2015 montrent que les parties s'adressaient l'une à l'autre de manière libre et cordiale, sans qu'à aucun moment Véronique X... n'intervienne dans la prise en charge des patients, les échanges portant le plus souvent sur la prise de rendez-vous.

Au demeurant, Véronique X... elle-même dans un courriel particulièrement détaillé, adressé à toutes ses collaboratrices, en date du 4 septembre 2013, admet, après avoir rappelé certaines règles relatives à l'organisation matérielle du cabinet, 'être obsessionnelle (et parfois psychorigide)' concernant le respect du travail de chacun (silence, utilisation du téléphone...).

Les témoignages produits par Anne A... ne permettent en aucun de caractériser une quelconque volonté de la part de Véronique X... de se comporter comme un employeur exerçant un pouvoir de direction ou d'immixtion dans l'exécution au quotidien de ses fonctions de psychomotricienne.

Si les anciennes collaboratrices de Véronique X..., Noémie F..., Idrissa G..., Julie H..., Albane L... O..., Justine I..., Sylvaine J..., Tiffany K... confirment toutes que celle-ci pouvait faire preuve d'autoritarisme concernant la relecture des bilans, dont il y a lieu de relever qu'elle est expressément prévue dans le contrat signé par Anne A..., ainsi que la gestion des rendez-vous, rendue nécessaire par le partage des locaux par les intéressées, pour autant, il doit être constaté qu'aucune d'entre elles ne fait état de ce que celle-ci a pu faire, pendant toute la durée de la relation contractuelle, un quelconque usage d'un pouvoir disciplinaire à l'égard d'Anne A....

Cette dernière échoue à démontrer la preuve de la réalité du lien de subordination qu'elle invoque.

Le litige qui oppose les parties ne relève pas de la compétence du conseil de prud'hommes.

Il y a lieu d'infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, de dire que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail, de dire le conseil de prud'hommes de CRÉTEIL incompétent, et de dire le tribunal de grande instance compétent et de renvoyer l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige.

Sur l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions

Dit que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail

Déclare le conseil de prud'hommes de CRÉTEIL incompétent matériellement pour connaître du litige

Déclare le tribunal de grande instance compétent et renvoie l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige.

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne Anne A... aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 18/00403
Date de la décision : 04/10/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°18/00403 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-10-04;18.00403 ?
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