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04/07/2018 | FRANCE | N°16/13262

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 04 juillet 2018, 16/13262


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 04 Juillet 2018

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/13262



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Août 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX section RG n° F 14/01479









APPELANTE

SASU ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE prise en la personne de son Président

[...]

[..

.]

N° SIREN : 303 40 9 5 93

représentée par Me Grégory X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0107







INTIMÉ

Monsieur A... Y...

[...]

[...]

représenté par Me Amalia Z..., avocat...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 04 Juillet 2018

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/13262

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Août 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX section RG n° F 14/01479

APPELANTE

SASU ELIOR SERVICES PROPRETE ET SANTE prise en la personne de son Président

[...]

[...]

N° SIREN : 303 40 9 5 93

représentée par Me Grégory X..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

INTIMÉ

Monsieur A... Y...

[...]

[...]

représenté par Me Amalia Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1359

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Avril 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente, Rédactrice,

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Madame Séverine TECHER, Vice-présidente placée

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier : Mme Clémence UEHLI, greffier lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. Y... A... a été embauché par la société Sin & Stes par contrat de travail en date du 19 février 2002 en qualité d'agent de propreté, il était affecté sur le site de la société Disneyland-Paris.

Cette dernière, après avoir assuré directement le nettoyage de son parc d'attractions, a confié le marché de nettoyage du site à la société Sidel à compter du 01 décembre 1994, puis à la société Sin & Stes, devenue Elior Services Propreté et Santé (ESPS), à compter du 01 mars 1998.

Le 24 décembre 2014, M. Y... A..., avec 158 autres salariés, a saisi le conseil de prud'hommes de Meaux de demandes en paiement de prime, de congés payés afférents et de dommages-intérêts, sur le fondement du principe d'égalité de traitement, formées à l'encontre de la société Elior Services Propreté et Santé, venant aux droits de la société Sin & Stes.

Par décision en date du 30 août 2016, le conseil de prud'hommes a condamné la société Elior Services Propreté et Santé à payer à M. Y... A... les sommes suivantes :

- 27441,00 € à titre de rappel de salaires,

- 2744,10 € au titre des congés payés afférents,

- 1400,00 € à titre de dommages intérêts,

- 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il a débouté M. Y... A... de ses autres demandes et la société Elior Services Propreté et Santé de sa demande reconventionnelle.

Le 17 octobre 2016, la société Elior Services Propreté et Santé a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt avant dire droit en date du 18 octobre 2017, la cour a rejeté la demande de la société ESPS en transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité et a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 03 avril 2018.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 27 mars 2018 auxquelles il est expressément fait référence, la société Elior Services Propreté et Santé soulève l'irrecevabilité de l'action du salarié, demande la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de M. Y... A... à lui payer la somme de 700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 mars 2018 et auxquelles il est expressément fait référence, M. Y... A... conclut à la réformation du jugement entrepris.

Il demande à la cour de condamner la société Elior Services Propreté et Santé à lui payer les sommes suivantes :

- 27.441 € à titre de rappel de salaire,

- 2.744,10 € au titre des congés payés afférents,

- 12.871€ à titre de dommages intérêts,

- 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure du 28 mars 2018 a été révoquée et prononcée à nouveau par mention au dossier, à la date du 03 avril 2018, avant ouverture des débats.

MOTIVATION

* Sur la prescription de l'action fondée sur l'inégalité de traitement résultant de la perception d'une prime exceptionnelle par M. B... :

La cour ne saurait écarter l'application des dispositions légales relatives au régime de preuve applicable en la matière, conformes au droit commun, au prétexte qu'elles porteraient atteinte au principe de sécurité juridique et rendraient la preuve impossible, comme le soutient la société ESPS.

En effet, les règles relatives au respect du principe de l'égalité de traitement mettent en oeuvre en droit interne les dispositions des articles 2, § 2, et 4, § 1, de la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 et poursuivent un intérêt général.

Et, l'article 2224 du code civil qui fixe le point de départ du délai de prescription au jour où le salarié a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance des faits, n'a pas pour effet une rétroactivité de la loi, ne porte pas atteinte à un acte ou à une situation légalement acquise et d'une façon plus générale à la stabilité des normes juridiques. Il ne remet pas en cause la sécurité juridique et son objet est, notamment, de rendre effectif le respect du principe à travail égal salaire égal, sans pour autant rendre la preuve impossible.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la société ESPS, le point de départ du délai de prescription ne peut être fixé au 01 mars 1998, jour du transfert du contrat de travail de M. B... Hamady de la société Sidel à la société Sin & Stes, nouvel attributaire du marché de nettoyage de la société Disneyland Paris.

Le fait générateur de l'action du salarié à l'encontre de la société ESPS est l'inégalité de traitement salarial entre lui et M. B... Hamady, seul salarié à percevoir depuis le 01 septembre 1996 une prime mensuelle, qualifiée d'exceptionnelle mais d'un montant stable.

Le point de départ du délai de prescription est, en application des dispositions de l'article 2224 du code civil, le jour où le salarié a eu ou aurait dû avoir connaissance de ce fait.

Au vu des pièces produites par l'employeur, il apparaît qu'à la suite de la communication du bulletin de salaire de M. B... du mois d'avril 2009, faisant apparaître le versement de cette prime, 63 salariés ont saisi le conseil de prud'hommes de Meaux le 13 août 2009 d'une demande en paiement d'un rappel de primes sur le fondement du principe 'à travail égal salaire égal'.

Il se déduit de cette saisine du conseil de prud'hommes par un collectif de salariés représentant environ 28 % du personnel affecté sur le même site que l'ensemble des salariés déjà embauchés à cette date, dont M. Y... A..., a eu connaissance de cette inégalité de traitement. Ce, d'autant plus que parmi les salariés ayant agi en août 2009 à l'encontre de Sin & Stes figurait M. C..., membre du comité d'entreprise.

Au demeurant, M. Y... A... et les 158 autres salariés ayant saisi le conseil de prud'hommes le 24 décembre 2014 ont produit, pour étayer leur demande en première instance, le même bulletin de salaire du mois d'avril 2009.

Enfin, contrairement à ce qu'affirme le salarié, la différence de traitement n'a pas été portée à sa connaissance lors de la réunion du comité d'entreprise du 25 septembre 2014. La lecture du compte-rendu y afférent démontre que les membres du comité d'entreprise ont été informés 'qu'une procédure a été débloquée courant de l'été sous forme de compensation financière...'. Faisant état d'une 'éventuelle discrimination liée au versement des indemnités transactionnelles', ils faisaient savoir à la direction que 140 salariés étaient déterminés à engager une action judiciaire.

Ces éléments, le caractère collectif des actions intentées en août 2009 puis le 24 décembre 2014, établissent qu'au cours du mois d'août 2014, les salariés ont eu connaissance, non pas de la perception d'une prime exceptionnelle par M. B..., inégalité dont ils se prévalent, mais de la signature de transactions entre les 63 salariés susnommés et l'employeur mettant un terme à la procédure initiée depuis cinq ans.

La preuve est ainsi rapportée que le salarié a eu connaissance de l'inégalité de traitement, résultant de la perception d'une prime exceptionnelle par M. B..., au plus tard au mois d'août 2009 et n'a saisi le conseil de prud'hommes que le 24 décembre 2014. En conséquence, sa demande à ce titre doit être déclarée prescrite, le conseil de prud'hommes ayant omis de statuer sur cette fin de non recevoir dans son dispositif.

* Sur la prescription et le bien fondé de l'action tirée de l'inégalité de traitement résultant de la signature de transactions avec 63 salariés :

Ces transactions ayant été conclues le 31 juillet 2014, le délai quinquennal de prescription n'était pas expiré lors de la saisine du conseil de prud'hommes.

En revanche, ces transactions ont l'autorité de la chose jugée, autorité relative, elles ne peuvent fonder une action sur le principe de l'inégalité de traitement et les salariés qui ont choisi de ne pas saisir le conseil de prud'hommes en août 2009 ne peuvent s'en prévaloir.

Dès lors, il convient de débouter M. Y... A... de l'ensemble de ses demandes à ce titre et de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a fait partiellement droit à ses demandes.

Sur les autres demandes

M. Y... A... qui succombe sera condamné aux dépens de la procédure de première instance et d'appel, il conservera la charge de ses frais irrépétibles, le jugement entrepris étant infirmé en ce qu'il lui a alloué une indemnité à ce titre.

L'équité et les circonstances de la cause ne commandent pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société Elior Services Propreté et Santé.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare prescrites les demandes de M. Y... A... fondées sur l'inégalité de traitement résultant de la perception d'une prime exceptionnelle,

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Déboute M. Y... A... de ses demandes

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. Y... A... aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/13262
Date de la décision : 04/07/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-04;16.13262 ?
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