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02/07/2018 | FRANCE | N°17/01584

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 02 juillet 2018, 17/01584


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 02 JUILLET 2018



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/01584



Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15353





APPELANTE



Madame Arlette X... épouse D...

demeurant 8, rusnaweg Klosters Chalet M

arguns

7250 GRISONS / SUISSE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Jean Y... de la SELARL Y... & ASSOCIES, avocat au ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 02 JUILLET 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/01584

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Janvier 2017 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 14/15353

APPELANTE

Madame Arlette X... épouse D...

demeurant 8, rusnaweg Klosters Chalet Marguns

7250 GRISONS / SUISSE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Jean Y... de la SELARL Y... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0145

Représentée par Me Francine Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : D1250

INTIMEE

MADAME LA DIRECTRICE DE LA DIRECTION NATIONALE DES VERIFICATIONS DE SITUATIONS FISCALES 'DNVSF'

ayant ses bureaux [...]

[...]

agissant sous l'autorité de Monsieur le Directeur Général des Finances Publiques, [...]

Représentée par Me Pascale E..., avocat au barreau de PARIS, toque: L0046

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Mai 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Monsieur Edouard LOOS, Président

Mme Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Mme Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Edouard LOOS, président et par Mme Cyrielle BURBAN, greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Une demande d'entraide judiciaire en matière pénale a été présentée par les autorités suisses en janvier 2009. Le procureur de la République de Nice a fait procéder le 20 janvier 2009 à une perquisition au domicile de M. Hervé A..., ancien informaticien salarié de la filiale suisse de l'établissement britannique HSBC Private Bank situé à Geneve, soupçonné d'avoir dérobé des données de la base client de cet établissement. Cette perquisition a eu lieu en présence d'un magistrat et de deux enquêteurs de la police judiciaire de Berne.

Par la suite, l'enquête pénale a permis d'établir que Mme D... avait ouvert plusieurs comptes en Suisse auprès de la banque HSBC au nom d'une société Parita située au Panama et d'une société Myr Associates inc située dans les Iles Vierges britanniques à Tortola.

L'appelante a fait appel de cette décision. La cour d'appel de Paris a confirmé par un arrêt de mai 2017 la décision de culpabilité.

L'administration fiscale a déposé plainte. Mme D... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur les années 2003 à 2008 et sur les années 2004 à 2010 relatif à l'ISF. Mme D... a été poursuivie pour avoir omis de déclarer des avoirs détenus à l'étranger.

Par jugement du 13 avril 2015, la 32e chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Paris a déclaré Mme D... coupable des faits de soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt par dissimulation de sommes commis à Paris courant 2007 à 2010, des faits d'organisation frauduleuse d'insolvabilité par débiteur pour échapper à une condamnation de nature patrimoniale commis à Paris et en Corse courant 2009 à 2010 et des faits de blanchiment de fraude fiscale commis à Paris et en Corse courant 2007 à 2010.

Aux termes de la proposition de rectification, le service a conclu que Mme D... avait eu la disposition «via un profil clients» de plusieurs comptes ouverts en Suisse auprès de la banque HSBC au nom des deux sociétés suivantes :

- la sa Parita Compania Financiera située à Panama ;

- la société Myr Associates inc située à Tortola.

Le 8 novembre 2013, les droits rappelés ont été mis en recouvrement pour un montant total de 3543044 euros.

Mme D... a contesté les rappels mis à sa charge par une réclamation du 16 décembre 2013 qui a fait l'objet d'une décision de rejet en date du 30 juin 2014.

Elle a porté le litige devant le tribunal de grande instance de Paris. Par jugement rendu le 2 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Paris a rejeté l'ensemble des demandes de Mme D....

Mme D... a interjeté appel de la décision.

Par conclusions signifées le 6 avril 2017, Mme Arlette X... épouse D... demande à la cour de :

- réformer le jugement n° 14/15353 rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 2 janvier 2017

- ordonner le dégrèvement des impositions mises en recouvrement par les différents avis du 8 novembre 2013 pour un montant total de 3543044 euros dont 1717085 euros en principal, 476235 euros en intérêts de retard et 1349724 euros de majorations ;

- condamner l'etat à rembourser à la requérante les dépens mentionnés à l'article R.207-1 du livres des procédures fiscales ;

- condamner l'Etat au paiement d'une somme de 30000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, représentant les frais non compris dans les dépens

Par conclusions signifées le 2 juin 2017, la direction nationale des vérifiations de situations fiscales 'DNVSF' demande à la cour de :

Dire et juger Mme D... mal fondée en son appel du jugement rendu le 2

janvier 2017 par le tribunal de grande instance de Paris,

L'en débouter, ainsi que de toutes ses demandes, fins et conclusions,

La condamner à tous les dépens de l'instance et dire qu'en toute hypothèse, les frais entraînés par la constitution d'un avocat qui n'est pas obligatoire en matière fiscale (article R* 202-2 du LPF)resteront à sa charge (article R* 207-1 alinéas 1 et 3 du LPF) ;

Rejeter sa demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DISCUSSION

Sur l'irrecevabilité des éléments de preuve fondant les rehaussements

Mme D... soutient en appel que la quasi-totalité des redressements prononcés sont fondés sur les «fichiers dits HSBC» dont le caractère illicite ne fait plus débat devant les juridictions civiles, en se fondant notamment sur un arrêt de la chambre commerciale. Elle fait valoir que les preuves obtenues par un procédé déloyal et illicite doivent être écartées sur le fondement de l'article 9 du code de procédure civile.

L'administration répond que :

- les rehaussements litigieux ont été motivés à partir des informations recueillies en application des articles L. 81, L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales, par droit de communication régulièrement exercé les 17 avril, 5 juillet et 27 novembre 2012, auprès des juges d'instruction chargés de l'enquête judiciaire pour fraude fiscale diligentée contre Madame D..., à la suite des différentes plaintes pour fraude fiscale qu'elle avait déposées contre elle, sa fille et ses deux fils.

- l'origine licite ou illicite des informations est indifférente sur leur opposabilité dans le cadre de la procédure d'assiette, dès lors qu'elles ont été régulièrement obtenues.

Elle s'appuie sur la décision du Conseil constitutionnel n° 2013-679 DC du 4 décembre 2013, rendue à propos de la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière. Elle expose que la position du Conseil constitutionnel est très claire. Il considère que «les documents, pièces ou informations, portés à la connaissance des administrations fiscale ou douanière, dans le cadre des procédures de contrôle, à l'exception de celles relatives aux visites en tous lieux, même privés , ne peuvent être écartés au seul motif de leur origine, lorsqu'ils ont été régulièrement portés à la connaissance de l'administration.

Ceci étant exposé, en l'espèce, les documents litigieux ont été communiqués à l'administration fiscale par les autorités judiciaires, dans le cadre du droit de communication prévu par les articles L. 81, L. 82 C et L. 101 du livre des procédures fiscales.

Ainsi que le rappelle l'administration fiscale, le conseil constitutionnel a considéré dans sa décision du 4 décembre 2013, que les documents, pièces ou information communiqués soit dans le cadre du droit de communication prévu, selon le cas, par le livre des procédures fiscales ou le code des douanes, soit en application des droits de communication prévus par d'autres textes, soit en application des dispositions relatives à l'assistance administrative par les autorités compétentes des États étrangers, portées à la connaissance de l'administration fiscale, dans le cadre de procédure de contrôle, ne pouvaient être écartées au seul motif de leur origine.

De même, la cour de cassation, par deux arrêts de la chambre criminelle, a confirmé la validité des poursuites pénales engagées par l'administration fiscale à la suite de la transmission du fichier HSBC.

Ces décisions permettent d'affirmer que les documents sur lesquels se fonde l'administration fiscale, qui ont été régulièrement transmis à l'administration fiscale par des autorités judiciaires, dans le cadre d'une procédure de contrôle, ne peuvent être écartés du seul fait de leur origine.

Sur l'application de l'article L 101 du livre des procédures fiscales

Mme D... fait valoir que lorsque les informations ont été transmises par le procureur à l'administration fiscale, seule une enquête préliminaire était engagée, que l'enquête préliminaire ne saurait être assimilée à une instance ou à une information criminelle ou correctionnelle, au sens de l'article 101 du livre des procédures fiscales.

L'administration répond que les dispositions de l'article 101 du livre des procédures fiscales font obligation à l'autorité judiciaire de communiquer aux services fiscaux spontanément toute indication qu'elle peut recueillir à l'occasion d'une instance civile ou commerciale ou d'une information, qui inclut l'enquête préliminaire, la flagrance ou procédure d'information.

Ceci exposé, aux termes de l'article 101 du livre des procédures fiscales, l'autorité judiciaire doit communiquer à l'administration fiscale toute indication qu'elle recueille à l'occasion de toute procédure judiciaire de nature à faire présumer une fraude fiscale.

En l'espèce, les éléments transmis par le procureur de la république l'ont été dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte à la suite d'une demande d'entraide judiciaire en matière pénale. L'appelante refuse d'assimiler l'enquête préliminaire à une instance or, l'enquête préliminaire a été mise en oeuvre par le procureur de la république, autorité judiciaire agissant dans le cadre de ses pouvoirs, afin de réunir des preuves suffisantes et d'orienter les poursuites. Dès lors l'enquête préliminaire répond parfaitement à la lettre de l'article 101 précité, dont la rédaction permet d'appréhender largement la notion d'instance judiciaire.

La cour adopte ainsi les motifs du tribunal en ce qu'il a jugé que la transmission des documents n'était pas entachée d'irrégularité.

Sur l'insuffisante démonstration de la détention d'avoirs à l'étranger

L'appelante soutient que le tribunal a méconnu les règles de dévolution de la charge de la preuve, qu'il incombait à l'administration de démontrer qu'elle avait un lien juridique ou capitalistique avec les deux sociétés Parita et Myr, que cette preuve n'est pas rapportée ; que de plus, Mme D... se voit attribuée l'intégralité des parts, qui n'ont pas été évaluées et cela, malgré le fait que sa fille soit également qualifiée d'attorney ou du mandataire.

L'administration répond que les moyens développés sont inopérants dans la mesure où les éléments recueillis auprès des juges d'instruction ont démontré que Mme D... disposait de plusieurs comptes clients ouverts en Suisse après de la banque HSBC au nom des société Parita et Myr, qu'elle a d'ailleurs reconnu au cours de l'audience pénale qu'elle avait signé des ordres de virement vers le compte Parita ; qu'elle avait l'entière disposition des avoirs à l'étranger en qualité de mandataire ; qu'elle n'apporte aucun élément de preuve de nature à remettre en cause les éléments probants rapportés.

Ceci exposé,

Les allégations de Mme D... relatives la méconnaissance des règles de dévolution de la charge de la preuve et à l'absence de lien juridique ou capitalistique avec les deux sociétés Parita et Myr, sont dénuées de pertinence dès lors que les éléments recueillis auprès des juges d'instruction chargés du volet pénal, ont permis de caractériser ces liens. L'administration fiscale a pu démontrer la nature des liens unissant Mme D... aux société Parita et Myr et partant l'existence des avoirs à l'étranger, via un compte client. Ses opérations d'investissement démontrant sa parfaite information des opérations litigieuses et son implication.

Elle n'a jamais apporté le moindre élément de preuve contraire déniant la détention d'avoirs à l'étranger, ni devant le tribunal, ni devant la cour.

Il ressort en outre des procès verbaux d'audition que Mme D... a reconnu qu'elle avait hérité de comptes appartenant à son père, qui correspondaient aux comptes Parita et Myr .Mme D... précisait que son gestionnaire des fonds au sein de HSBC était M. B..., ce qui était confirmé. Elle déclarait cependant qu'elle n'était pas informée de la création de sociétés off shore, mais ses déclarations étaient contredites par la production d'ordres de virements de son contrat d'assurance vie vers Parita, via HSBC.

S'agissant de l'implication des enfants de la contribuable, l'administration ayant constaté que seule, Mme D... disposait des avoirs litigieux en qualité de mandataire, a décidé de ne poursuivre que Mme D..., en qualité de bénéficiare des comptes ouverts au nom des société Parita et Myr.

Le tribunal, après avoir analysé les différents éléments de preuve produits par l'administration et notamment, la retranscription d'une conversation téléphonique du 22 mars 2011 dans laquelle la contribuable reconnaît figurer sur la liste des clients de la HSBC et précise qu'elle a dû s'exiler en Suisse, le répertoire téléphonique de la contribuable saisi, qui mentionne la société Parita avec les numéros de compte client et de son administratrice des comptes de la société, ses différentes auditions, le document de la banque du Louvre, qui démontre que l'origine des capitaux provient de l'héritage de son père, fils de Nina X..., d'un montant de 23 millions d'euros ; les ordres de transfert du contrat d'assurance vie de Mme D... vers le compte Parita, a jugé que l'ensemble des éléments communiqués démontrait suffisamment que Mme D... était la véritable bénéficiaire des comptes ouverts au nom des sociétés Parita et Myr, étant précisé que les fonds détenus au sein de Myr avaient été virés sur les comptes de Parita.

La cour adopte les motifs pertinents du tribunal en ce qu'il a déclaré l'administration fondée à poursuivre Mme D... pour le montant recensé sur ses comptes.

Sur la résidence fiscale

Mme D..., conteste être résidente fiscale française depuis le 1er janvier 2010. Elle expose qu'elle a acheté une maison en Suisse. Elle estime qu'il existe un conflit de résidence entre la France et la Suisse dès lors que suite à la demande d'assistance administrative formulée par les autorités françaises auprès des autorités suisses le 9 octobre 2012, ces dernières ont confirmé par une réponse du 14 janvier 2014 qu'elle était résidente fiscale suisse au regard du droit suisse. Elle critique les éléments retenus par l'administration qu'elle estime non pertinents.

L'administration rappelle que le foyer fiscal au sens de l'article 4B du code général des impôts s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux sans qu'il soit tenu compte de ses séjours temporaires ailleurs. Elle relève que les enfants de l'appelante et ses petits enfants résidaient en France en 2010, que s'ajoutent les éléments figurant sur son répertoire téléphonique, la pleine propriété d'une maison à Paris et d'une maison en Corse qui n'étaient pas louées à des tiers, dont l'occupation est démontrée. En outre, elle fait valoir qu'elle établit que les jours de présence de Mme D... en France sont prépondérants pour 2010.

Ceci exposé, aux termes de l'article 4B du code général des impôts, sont considérées comme ayant leur domicile [...], les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal, le centre de ses intérêts économiques.

Les critères de résidence fixés par l'article 4B sont celui du foyer, du lieu principal de séjour, et du centre des intérêts économiques.

Il apparaît que l'administration s'est à bon droit attachée à vérifier les relations entretenues par la contribuable divorcée avec son entourage familial, conformément à ce que retient la jurisprudence en ce domaine.

Elle a constaté à ce titre, que les enfants majeurs et les petits enfants résidaient en France, à Paris en 2010. Elle a pu écarter l'attestation de M. C..., établie en date de 2013, après avoir relevé qu'elle ne prouvait pas l'existence d'une relation soutenue au regard de sa date et des éléments du dossier qui ont dévoilé que ce dernier s'occupait en réalité du courrier dans la résidence suisse de Mme D....

L'examen du répertoire téléphonique de l'appelante a montré que la plupart des membres de la famille résidaient en France et qu'il en était de même, pour les entreprises et prestataires de services auxquels elle faisait appel.

Sur le plan immobilier, il est justifié de ce que Mme D... était en 2010 propriétaire d'une maison à Paris en pleine propriété ainsi que d'une autre maison située en Corse, dont il est établi qu'elles n'étaient pas louées à des tiers.

L'occupation des locaux a été démontrée par les consommation d'eau, les abonnements audio visuels, ainsi que par les déclarations des employés de maison qui, auditionnés, ont déclaré que le domicile de Mme D... se situait principalement à Paris et en Corse durant l'été, que ses déplacements en Suisse étaient occasionnels.

Ces déclarations ont été confirmées par les dépenses de vie, les comptes bancaires en France, les bornages téléphoniques qui ont établi une présence en France de 247 jours.

S'il n'est pas contesté que Mme D... a des attaches avec la ville de Klosters en Suisse, les justificatifs produits montrent que ses jours de présence en France sont prépondérants pour l'année 2010, ce qu'elle a par ailleurs admis.

S'agissant du critère du centre des intérêts économiques, il est également établi que le patrimoine détenu par la contribuable en [...], est supérieur à celui qu'elle déclare en Suisse. Il s'ensuit que les critères de résidence corroborent les allégations de l'administration.

La cour adopte en conséquence les motifs du tribunal en ce qu'il a jugé que tant au regard du droit français que du droit conventionnel, l'admistration fiscale avait valablement estimé que Mme D... était résidente fiscale en France en 2010.

Sur l'insuffisante motivation des bases de redressements et sur le plafonnement de l'ISF

Mme D... reproche à l'administration de confondre les patrimoines des sociétés avec son propre patrimoine ; elle conteste l'assiette des redressements dès lors que l'administration ne dispose d'aucun élément financier permettant de retracer les avoirs financiers de 2005 et 2006. Elle expose qu'il ressort des procès verbal de synthèse que les montants détenus au sein de HSBC ne sont pas identifiés.

Elle fait valoir que l'administration a étendu la présomption pour déterminer le montant des avoirs aux fins de taxation à l'ISF, que l'article 151 du code général des impôts ne s' applique que dans le cadre d'une procédure de taxation d'office ; qu'en procédant de la sorte, l'administration commet un excès de pouvoir; qu'en l'espèce, la procédure contradictoire a été suivie, que les règles de preuve ne sont pas les mêmes, que la charge de la preuve incombe à l'administration.

Elle ajoute que cette disposition est excessive dans la mesure où les comptes supposés ont pû n'avoir produit aucun revenu.

L'administration répond qu'elle a rapporté la preuve des liens avec les sociétés Parita et Myr, qu'en application de l'article 885 A du code général des impôts Mme D... est imposable en France sur son patrimoine mondial. Elle précise que les avoirs bancaires sont des biens meubles dont la valeur peut être établie selon toutes méthodes estimatives, qu'à défaut d'information concernant les avoirs à l'étranger, les modalités de détermination de leur montant prévues à l'article 151 précité, peuvent être appliquées en matière d'ISF sans que la nature de la procédure ait une incidence sur cette valorisation

Ceci exposé, aux termes de l'article 885 A du code général des impôts sont soumis à l'ISF les contribuables ayant leur domicile [...] à raison de leurs biens situés en France ou hors de France.

Il ressort des développements précédents que l'administration a justifié et communiqué les éléments comptables qui établissent la détention des avoirs litigieux par la contribuable, au titre des années 2004 à 2010.

Dès lors qu'aucune information concernant les avoirs constitués à l'étranger n'a été communiquée par la contribuable, l'application des dispositions de l'article 151 du code général des impôts est admise, sans qu'elle puisse invoquer un excès de pouvoir.

Par ailleurs, l'administration a produit un tableau qui synthétise ses calculs relatifs à l'évolution des avoirs bancaires à l'étranger. Dans ce tableau sont retracés les montants des avoirs au 1er janvier 2006 déterminé à partir du constat des avoirs au 31 décembre 2005 et 31 décembre 2006 sur la base des éléments recueillis dans le cadre de l'enquête.

Pour les avoirs de 2008 à 2010, l'administration fiscale a procédé au calcul en appliquant le taux de rendement brut à l'émission des obligations privées ou TMO.

La reprise des actifs non déclarés a donc été calculée, selon les dispositions de l'article 151 du code général des impôts, avec les outils légaux mis à la disposition de l'administration, qui a intégré ces revenus, évalués de manière forfaitaire. Il s'en suit que la contribuable est mal fondée à critiquer le montant ainsi dégagé.

Sur le plafonnement de l'ISF

L'appelante fait valoir que l'administration a violé les règles du plafonnement en ce qu'elle a pris en compte pour le calcul, ses revenus rehaussés du produit des avoirs bancaires détenus par les sociétés Parita et Myr, qui constituent des revenus fictifs, estimés mais non des revenus réalisés.

L'administration répond qu'en application de l'article 885 V du code général des impôts tous les revenus sont intégrés dans le calcul du plafonnement et que les calculs ne sont pas fictifs.

Ceci exposé, aux termes de l'article 885 V du code général des impôts en vigueur au moment des faits tous les revenus doivent être intégrés dans le calcul du plafonnement ISF.

En l'espèce, Mme D... a fait le choix de souscrire une déclaration inexacte, en s'abstenant de déclarer ses avoirs à l'étranger. Il a été établi que les revenus, légalement calculés par l'administration selon les dispositions de l'article 151 précité, doivent être intégrés en qualité de revenus reconstitués forfaitairement, sans qu'il soit nécessaire, dans ce contexte d'opacité volontairement entretenu par la contribuable, de devoir apporter la preuve d'une distribution de dividende.

Le moyen sera rejeté.

Sur les majorations

Il résulte des développements précédents que Mme D... n'a pas procédé à la régulatisation de ses déclarations.

Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts les inexactitudes ou omissions entraînent l'application d'une majoration de 80% en cas de manoeuvres frauduleuses.

Il ressort des éléments de la procédure que Mme D... a reconnu que son père détenait des comptes en Suisse, qu'à son décès, elle ne les a pas déclarés ni rapatriés. Elle a également admis que ces comptes correspondaient aux comptes Parita et Myr et il a été démontré son implication active. Il s'en est déduit qu'elle avait une parfaite connaissance d'un patrimoine mobilier à l'étranger.

L'ensemble de ces éléments démontre le caractère intentionnel du manquement et par conséquent le jugement sera confirmé sur ce point également.

Sur les autres demandes

Mme D... partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera tenu de supporter la charge des dépens d'appel.

Il paraît équitable de laisser à sa charge les frais qu'elle a exposés en cause d'appel et sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions

DÉBOUTE Mme Arlette D... de ses autres demandes

CONDAMNE Mme Arlette D... aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/01584
Date de la décision : 02/07/2018

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°17/01584 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-07-02;17.01584 ?
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