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29/06/2018 | FRANCE | N°15/19406

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 1, 29 juin 2018, 15/19406


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1





ARRÊT DU 29 JUIN 2018



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/19406



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Septembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/11745







APPELANTS



Monsieur Guy X...

né le [...] à CORBELIN (38)



demeurant [.

..]



Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-D...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 1

ARRÊT DU 29 JUIN 2018

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 15/19406

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Septembre 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/11745

APPELANTS

Monsieur Guy X...

né le [...] à CORBELIN (38)

demeurant [...]

Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

Monsieur Pierre X...

né le [...] à CORBELIN (38)

demeurant [...]

Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

Madame Anna Maria A... - X...

née le [...] à VERONE - Italie (99)

demeurant [...]

Représentée par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assistée sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

Mademoiselle Elodie U... Adeline X...

née le [...] [...]

demeurant [...]

Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

Monsieur V... B... Maximilien X...

né le [...] [...]

demeurant [...]

Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

Monsieur Benoît-Walter Théodore Pierre X...

né le [...] [...]

demeurant [...]

Représenté par Me Christophe Y... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 19

Assisté sur l'audience par Me Francis Z... de la SCP A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 112

INTIMÉS

Madame Christiane X... épouse C...

appelante dans 15 24113

née le [...] à VEYRINS-THELLIN (38)

demeurant [...]

Représentée par Me Ilana D..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1807

Assisté sur l'audience par Me Bernard E..., avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE, substitué sur l'audience par Me Ilana D..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1807

Madame Marie-Claire X... épouse F...

appelante dans 15 24113

née le [...] à VEYRINS-THELLIN (38)

demeurant [...] - G... Florent - 84120 PERTHUIS

Représentée par Me Ilana D..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1807

Assisté sur l'audience par Me Bernard E..., avocat au barreau d'AIX EN PROVENCE, substitué sur l'audience par Me Ilana D..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1807

Monsieur Thierry P... membre de la H..., titulaire de l'Office notarial sis [...]

né le [...] à NEUILLY SUR SEINE

demeurant [...]

Représenté par Me Thomas I... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Assisté sur l'audience par Me Marie-josé T... J... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

H...

N° SIRET : 343 85 5 2 35

ayant son siège au [...]

Représentée par Me Thomas I... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Assistée sur l'audience par Me Marie-josé T... J... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

SCP LEFEBVRE BEGHAIN BURTHE-MIQUE GEMIGNANI PESCHARD - LBMB

N° SIRET : 309 81 4 2 91

ayant son siège au [...]

Représentée par Me Thomas I... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

Assistée sur l'audience par Me Marie-josé T... J... de la SCP I... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0499

SA BANK POLSA KASA OPIEKI Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

N° SIRET : 775 746 811

ayant son siège au [...] - 950 VARSOVIE POLOGNE

Représentée par Me Olivier K..., avocat au barreau de PARIS, toque : B0753

Assistée sur l'audience par Me L... M... de l'AARPI CASTALDI PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, toque : R237, substitué sur l'audience par Me Brice N..., avocat au barreau de PARIS, toque : E0644

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre

Mme Christine BARBEROT, Conseillère

Mme Béatrice CHARLIER-BONATTI, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par Christophe DECAIX, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant acte reçu le 25 avril 1994 par M. O..., notaire associé de la SCP notariale Lefebvre Beghain Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB, avec la participation de M. P..., notaire associé de la H..., la Bank Polska Kasa Opieki a prêté à la SARL les Goélands une somme de 1.800.000 F (274.408 €) destinée à l'acquisition d'un bar-brasserie à Créteil. M. et Mme X... (B... X... et Odette Q...) se sont portés «'cautions hypothécaires solidaires'» de cet emprunt et ont consenti à la banque prêteuse une hypothèque sur un bien leur appartenant, sis [...]. Ils ont également accepté le nantissement du fonds de commerce de bar-brasserie au profit XX... Polska Kasa Opieki.

Les échéances d'emprunt ayant cessé d'être honorées par la SARL, la banque a prononcé la déchéance du terme le 2 octobre 1995 et assigné, d'une part, la SARL les Goélands devant le tribunal de commerce de Créteil, d'autre part, M. et Mme X... devant le tribunal de grande instance du même siège, par assignation du 11 mars 1996.

Par jugement du 11 juin 1996, le tribunal de commerce de Créteil a condamné la SARL les Goélands à payer à la Bank Polska Kasa Opieki les sommes de 93.682,99 F, avec intérêts au taux de 16,50 % l'an à compter du 20 octobre 1995 et de 1.537.551,40 F avec intérêts au taux de 12,27 % l'an à compter du 20 octobre 1995.

Par jugement réputé contradictoire du 15 novembre 1996, le tribunal de grande instance de Créteil a constaté le montant de la créance XX... Polska Kasa Opieki et dit qu'elle pourrait poursuivre la vente du bien objet de l'inscription hypothécaire.

B... X... est décédé le [...] en laissant à sa succession son épouse, Odette Q... et ses cinq enfants, Christiane, Marie-Claire, Guy, Pierre et Gérard X....

Le 21 octobre 1997, la Bank Polska Kasa Opieki, Odette Q... et la SARL Les Goélands ont conclu un accord aux termes duquel la créance de la banque Polska était rééchelonnée et qu'à défaut de paiement d'une des échéances à bonne date, ladite Banque ferait exécuter les deux jugements. Selon avenant du 20 septembre 1998':

- la SARL Les Goélands a déclaré acquiescer au jugement du 11 juin 1996 en cas de non-respect de l'accord,

- Odette Q... a de même déclaré qu'elle acquiescerait au jugement du 15 novembre 1996 dans cette hypothèse.

La SARL a procédé à des paiements partiels jusqu'au 21 décembre 2004 et a cédé, le 19 mai 2005, le fonds de commerce de bar-brasserie pour un prix de 183.000 € qui n'a pu être appréhendé par la Bank Polska Kasa Opieki, laquelle avait omis de faire renouveler son nantissement sur le fonds de commerce.

Le 31 mars 2008, la Bank Polska Kasa Opieki a fait délivrer à Odette Q... un commandement aux fins de saisie-vente, converti en procès-verbal de sursis le 16 octobre 2008.

La Bank Polska Kasa Opieki a alors fait signifier le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996 à Odette Q... et aux cinq enfants de B... X... (les consorts X...). Par exploits des 14 février, 1er mars, 19 avril et 9 juin 2011, ces derniers l'ont, par acte extra-judiciaire du 2 août 2011, assignée aux fins de voir, à titre principal, constater la prescription de son action et d'entendre ordonner la mainlevée de l'inscription hypothécaire grevant l'immeuble de Vincennes. Le juge de la mise en état a alors constaté, par ordonnance du 24 septembre 2012, que le jugement du 15 novembre 1996 était non avenu à l'égard des consorts X.... L'appel de cette ordonnance a été déclaré irrecevable par arrêt de cette Cour du 4 juillet 2014.

Par acte extra-judiciaire du 7 mai 2013, la Bank Polska Kasa Opieki a assigné en intervention forcée et garantie M. P..., la H... et la SCP Lefebvre Beghain Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB.

Le 9 juillet 2013, Odette Q... est décédée en laissant à sa succession les cinq enfants susnommés. Le 11 août 2014, Gérard X... est décédé à son tour, laissant pour lui succéder son épouse Mme Anna-Maria R... et leurs trois enfants Élodie, V... et Benoît-Walter.

C'est dans ces conditions que, par jugement du 1er septembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a':

- rejeté la fin de non recevoir prise du défaut de qualité pour agir des enfants de B... X...,

- dit que le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996 n'était pas caduc faute d'avoir été signifié dans les six mois de sa date à Odette Q...

- constaté qu'Odette Q... avait acquiescé au jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996,

- dit que cet acquiescement était opposable aux héritiers de B... X...,

- dit que le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996 n'était pas caduc à l'égard des héritiers de B... X...,

- dit que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil n'était pas revêtu de l'autorité de chose jugée relativement à la qualification et à la nature de la sûreté litigieuse,

- dit que cette sûreté, dénommée cautionnement hypothécaire, solidaire, n'était pas un cautionnement et constituait une sûreté purement réelle,

- écarté, en conséquence, l'application des dispositions de l'article 2314 du code civil,

- débouté les consorts X... de toute demande tendant à s'entendre décharger à ce titre de leurs obligations à l'égard XX... Polska Kasa Opieki, en leur qualité d'héritiers de B... X... et d'Odette Q...,

- dit que le droit d'action XX... Polska Kasa Opieki n'était pas prescrit,

- dit que la Bank Polska Kasa Opieki n'avait en rien manqué à son devoir de loyauté en omettant de renouveler l'inscription du nantissement sur le fonds de commerce,

- débouté les consorts X... de toute demande à ce titre,

- rejeté toute autre prétention,

- condamné solidairement les consorts X... aux dépens.

MM. Guy, Pierre, V... et Benoît Walter X..., Mmes Anna R... veuve X... et Élodie X..., appelants, prient la Cour, par dernières conclusions du 28 mai 2018, de':

au visa des articles 1134, 1315, 1324 (anciens), 2243, 2314, 2488 du code civil, 478 du code de procédure civile,

- dire que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil est caduc faute d'avoir été signifié dans les six mois de sa date à Odette Q...,

- dire, en conséquence, que la présente procédure ne peut avoir un quelconque effet interruptif à l'égard des cautions et de leurs héritiers,

- constater, par ailleurs, que le seul titre exécutoire sur la base duquel la banque Polska peut exercer des poursuites contre les héritiers de B... X... et Odette Q... est l'acte notarié reçu par M. O... le 25 avril 1994,

- constater qu'il n'existe aucun acte interruptif de l'action en exécution de cet acte à l'égard des cautions dans le délai de dix ans de l'ancien article L. 110-4 du code de commerce,

en conséquence, dire prescrite l'action de la banque Polska,

- subsidiairement, constater que les parties à l'acte notarié ont entendu soumettre l'engagement de garantie de feus B... X... et Odette Q... au régime du cautionnement,

- dire qu'en ne renouvelant pas le nantissement sur le fonds de commerce de la société Les Goélands ainsi qu'elle s'y était engagée aux termes de l'acte notarié du 25 avril 1994 et en n'informant pas les cautions des difficultés du débiteur principal, la banque Polska a commis une faute,

- en conséquence, infirmer le jugement et, statuant à nouveau, faire application des dispositions de l'article 1234 du code civil et décharger les héritiers des cautions de toute obligation envers la banque,

- plus subsidiairement, condamner la banque Polska, sur le fondement de l'article 1134 ancien du code civil et au titre de son manquement à son devoir de loyauté, à payer aux héritiers des cautions une somme rigoureusement équivalente au montant de leur dette, avec compensation des créances et des dettes réciproques des parties,

- encore plus subsidiairement, dire que l'application d'un intérêt au taux conventionnel de 16,50 % l'an et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil en cas d'impayé est une pénalité excessive qui doit être réduite au taux légal sans majoration ni capitalisation,

- en tout état de cause, condamner la banque à leur payer la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

Mmes Christiane et Marie-Claire X... épouse F..., également appelantes, prient la Cour, par dernières conclusions du'25 février 2016, de':

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir prise du défaut de qualité pour agir des enfants de B... X... et dit que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil n'était pas revêtu de l'autorité de chose jugée relativement à la qualification et à la nature de la sûreté litigieuse,

- l'infirmer pour le surplus, notamment en ce qu'il a dit que le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996 n'était pas caduc faute d'avoir été signifié dans les six mois de sa date à Odette Q..., dit que la sûreté devait être qualifiée de «'réelle'» et écarté dès lors les dispositions de l'article 2314 du code civil, dit que la banque Polska n'avait pas manqué à son devoir de loyauté en manquant de renouveler l'inscription de nantissement litigieuse et dit que le droit d'action de cette banque n'était pas prescrit.

La Bank Polska Kasa Opieki prie la Cour, par dernières conclusions du 23 mai 2018, de':

au visa des articles 325 et suivants du code de procédure civile,1234, 1382, 2314 et 2244 du code civil,

- à titre principal, confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'engagement de caution de M. et Mme B... X... était un cautionnement réel, que son action n'était pas prescrite, qu'elle n'avait en rien manqué à son devoir de loyauté et débouté les consorts X... de leurs demandes,

- infirmer le jugement en ce qu'il a écarté l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 15 novembre 1996,

- dire que les prétentions des consorts X... se heurtent à cette autorité de la chose jugée et sont, dès lors, irrecevables,

- subsidiairement, la dire recevable et fondée à appeler en garantie M. P..., la H... et la SCP Lefebvre Beghain Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB dans l'instance introduite par les consorts X... par acte extra-judiciaire du 2 août 2011 et les condamner à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée contre elle,

- condamner les mêmes in solidum à lui payer la somme de 157.232,58 € sous réserve de réactualisation, au titre de sa responsabilité civile pour faute, en application de l'article 1382 du code civil ,correspondant au montant de la créance qu'elle ne pourrait pas recouvrer, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 7 mai 2013 et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- en tout état de cause, condamner in solidum les consorts X..., , M. P..., la H... et la SCP Lefebvre Beghain Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB au paiement de la somme de 30.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

M. P..., la H... et la SCP Lefebvre Gabegie Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB prient la Cour, par dernières conclusions du 30 octobre 2017, de':

au visa de l'article 1382 (ancien) du code civil,

- dire que M. P..., la S... Kasa Opieki n'ont commis aucun manquement à ses obligations professionnelles à l'égard des consorts X... et XX... Polska Kasa Opieki,

- dire que la Bank Polska Kasa Opieki succombe dans la charge de la preuve lui incombant, d'un préjudice né, réel et certain susceptible de recevoir indemnisation,

- en conséquence, débouter la Bank Polska Kasa Opieki de ses demandes de condamnation,

- la condamner au paiement de la somme de 4.000 € à la SCP Lefebvre Gabegie Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB et de la même somme de 4.000 € à M. P... et la H... ensemble, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

SUR CE

LA COUR

L'action engagée par les consorts X... a pour fin d'entendre dire que la créance, tenue de l'acte authentique du 25 avril 1994, de la banque Polska, est prescrite, faute d'acte d'exécution interruptif de la prescription décennale de l'article l. 110-4 du code de commerce'; la banque ne conteste pas l'applicabilité à sa créance de ce délai décennal mais soutient qu'est intervenue une interversion de prescription à compter de la reconnaissance par les consorts X... de son droit de créance'; par ailleurs, les consorts X... contestent le caractère exclusivement réel de leur obligation et estiment qu'en présence d'un cautionnement qui est personnel selon les clauses de l'acte constitutif et l'intention des parties audit acte, ils sont fondés à se prévaloir de la négligence fautive de la banque qui, ayant omis de renouveler le nantissement pris sur le fonds de commerce de la SARL les Goélands, les a privés de leur subrogation aux droits du créancier, ce qui conduit à les décharger de leur obligation par application de l'article 2314 du code civil'; ils soutiennent que le jugement du tribunal de grande instance de Créteil du 15 novembre 1996, qui a constaté que la créance de la banque Polska à l'encontre de la SARL les Goéland s'élevait à la somme de 1.691.234,39 F, et a autorisé ladite banque à poursuivre la vente du bien objet de la caution hypothécaire ne confère aucun droit à cette banque d'agir contre les cautions et leurs héritiers et en infèrent que l'action est prescrite dans la mesure où ce jugement n'est pas un titre exécutoire et où le délai écoulé depuis la signature de l'acte authentique du 25 avril 1994 a expiré à défaut d'acte d'exécution fondé sur ce titre'; ils réitèrent leurs allégations sur le caractère non avenu dudit jugement du 15 novembre 1996 qui n'a été signifié à Odette Q... que le 14 février 2011 et ne l'a pas été à B... X... et estiment qu'en raison de l'indivisibilité de l'obligation contractée sur un bien dépendant de la communauté entre époux, le jugement est non avenu à l'égard de tous'; ils contestent l'acquiescement à ce jugement imputée à Odette Q... dont ils dénient la signature apposée sur l'accord du 21 octobre 1997 et sur son avenant du 21 octobre 1997'; subsidiairement, ils concluent à la confirmation du jugement en ce qu'il a écarté l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 15 novembre 1996, objectent que l'action de la banque fondée sur un cautionnement réel est prescrite depuis le 2 octobre 2005 par application de l'article L. 110-4 du code de commerce, et ils estiment que les époux X... ont entendu placer leur engagement dans le cadre légal du cautionnement, ce qui autorise leurs héritiers à se prévaloir de la carence de la banque à renouveler le nantissement pris sur le fonds de commerce de la SARL Les Goélands, alors que l'engagement de caution donné par B... X... et Odette Q... a été donné en considération de ce nantissement'; enfin, ils reprochent à la banque d'avoir, de façon déloyale, manqué de renouveler ce nantissement qui lui aurait permis de recouvrer sa créance sur le prix de cession du fonds de commerce';

La Bank Polska Kasa Opieki soutient essentiellement que le jugement de condamnation du 15 novembre 1996 est revêtu de l'autorité de chose jugée en ce qui concerne la question du caractère personnel ou réel de la caution et en ce qu'il l'a autorisée à poursuivre la vente du bien hypothéqué et qu'en tout état de cause les appelants ont acquiescé à ce jugement en la personne d'Odette Q..., par l'avenant du 20 septembre 1998'; subsidiairement, elle réclame la garantie des notaires qui ont omis de lui rappeler de renouveler le nantissement pris sur le fonds de commerce de la SARL Les Goélands';

Les notaires répondent qu'ils ne sont pas tenus d'un mandat général afin de procéder aux inscriptions de garantie et à leur renouvellement, qu'ils ne sont pas davantage investis d'un mandat tacite, ajoutant, en ce qui concerne la H..., que la Bank Polska Kasa Opieki, à laquelle l'ensemble des pièces relatives au nantissement du fonds de commerce avait été envoyé,'s'est bornée à lui demander, le 16 avril 2003 et le 16 février 2013, de renouveler l'inscription hypothécaire et lui a renvoyé, à cet effet, la copie exécutoire de l'acte du 25 avril 1994'; subsidiairement, ils soulignent l'absence de préjudice en relation avec la faute alléguée, préjudice qui ne pourrait consister qu'en une perte de chance de recouvrer sa créance lors de la vente du fonds de commerce';

En cet état, il convient d'abord de rechercher si le jugement du tribunal de grande instance de Créteil est non avenu à l'égard des ayants droits d'Odette Q..., et, ensuite, si ce jugement est revêtu de l'autorité de chose jugée en ce qui concerne le caractère réel de l'obligation de cautionnement, ce qui exclurait toute discussion des cautions sur le préjudice qu'ils subissent en raison de l'omission de la banque à renouveler son nantissement'sur le fonds de commerce de la SARL les Goélands ;

Sur le premier point, les moyens des consorts X... ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation'; en effet':

- d'une part, ni Odette Q..., citée à personne, ni ses ayants droit par conséquent, ne peuvent prétendre à l'application des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile qui suppose que le jugement n'est réputé contradictoire que parce qu'il est susceptible d'appel'; or, Odette Q... ayant été citée à sa personne, le jugement était réputé contradictoire à son égard'indépendamment de la possibilité d'en faire appel,

- d'autre part, l'acquiescement d'Odette Q... à ce jugement par l'avenant du 20 septembre 1998, selon la mention manuscrite suivante qu'elle a apposée sur cet avenant en ces termes («'bon pour acquiescement au jugement du tribunal de «'commerce'» [grande instance] de Créteil (2ème chambre 907/96) du 15 novembre 1996 en cas de non-respect des dispositions dudit protocole'») est opposable à ses ayants droit comme à ceux de B... X..., en raison du caractère indivisible de l'obligation contractée par les deux époux envers la banque lorsqu'ils ont consenti l'inscription d'une hypothèque sur un immeuble dépendant de la communauté, chacun des débiteurs de cette obligation en étant tenu pour le tout';

C'est en vain que les consorts X... contestent l'authenticité de la signature d'Odette X... figurant sur cet avenant du 20 septembre 1998, car ,au vu des documents et pièces de comparaison incontestables produites aux débats, il apparaît qu'Odette Q... a modifié, postérieurement à l'acte de cautionnement du 25 avril 1994, tant son paraphe que sa signature, devenue «'C. X...'» au lieu de «'Q...'», de sorte que la vérification d'écritures à laquelle la Cour procède ne révèle aucune anomalie ni dissemblance de nature à conforter ou étayer la contestation par les consorts X... de la signature de leur auteur Odette Q...';

Au vu de ces éléments, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil n'était pas non-avenu à l'égard des consorts X..., pris en leur qualité d'ayants-droit d'Odette Q... qui avait acquiescé audit jugement et qui, en raison de l'indivisibilité de l'obligation, ne pouvaient se prévaloir du caractère non-avenu de la même décision en leur qualité d'ayants-droit de B... X...';

Ce jugement du 15 novembre 1996 qui a autorisé la banque Polska à poursuivre la vente du bien objet du cautionnement hypothécaire a eu, comme l'a dit le premier juge, un effet interruptif de prescription, le délai trentenaire de prescription se substituant, par interversion, au délai décennal du code de commerce, puisque les époux X... ne faisaient l'objet d'aucune condamnation en qualité de commerçants or, ce délai trentenaire n'était pas expiré lorsqu'est entrée en vigueur la loi du 17 juin 2008 qui a instauré un délai décennal de prescription'; cet effet interruptif est opposable à l'ensemble des ayants droit d'Odette Q... par application des articles 2245 et 1206 du code civil prévoyant que l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte d'exécution forcée ou par la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription contre tous les autres, même contre leurs héritiers, et, que les poursuites faites contre l'un des débiteurs solidaires interrompent la prescription à l'égard de tous';

Dès lors, le délai de prescription de mise à exécution du titre authentique du 25 avril 1994, a été interrompu valablement par l'assignation de la banque du 11 mars 1996 tendant à se voir autorisée à poursuivre la vente du bien hypothéqué pour obtenir remboursement de sa créance à hauteur des sommes de 93.682,99 € et de 1.537.551,40 F en principal';

En ce qui concerne l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 15 novembre 1996, le jugement sera infirmé en ce qu'il l'a écartée, alors que, pour autoriser la banque à poursuivre la vente du bien hypothéqué appartenant aux époux X... et la débouter de sa demande de condamnation contre ceux-ci pris personnellement, le tribunal a relevé et dit qu'ils ne s'étaient pas portés cautions personnelles'; il s'ensuit que le tribunal a bien tranché dans son dispositif un des objets de la demande, à savoir le caractère personnel de la caution, et qu'il est, quant à ce, revêtu de l'autorité de chose jugée, étant observé que ce point est sans emport sur la solution du litige, dès lors qu'il est constant, en droit, qu'un cautionnement hypothécaire n'est pas un cautionnement personnel au sens des articles 2288 et suivants du code civil';

A cet égard, il est également indifférent que les époux X... aient renoncé, dans l'acte constitutif de prise d'hypothèque de 1994 au bénéfice de division et de discussion, par des clauses «'de style'» n'ayant pas pour effet de conférer un caractère personnel à un droit réel'; quant à l'intention présumée des parties, elle ne saurait davantage substituer à un droit réel résultant d'un acte authentique régulièrement publié, un droit purement personnel';

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les consorts X... ne pouvaient revendiquer l'application des dispositions de l'article 2314 du code civil aux termes duquel «'la caution est déchargée lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution'»';

Par ailleurs, les consorts X... ne peuvent davantage opposer à la banque un défaut d'information qui ne concerne que les cautions';

Le jugement sera encore confirmé en ce qu'il a dit que la banque Polska n'avait pas manqué à son devoir de loyauté en omettant de renouveler le nantissement pris sur le fonds de commerce de la SARL Les Goélands, qu'en effet, ce moyen ne pouvait être soulevé de bonne foi alors que les consorts X..., qui détenaient pour certains le capital de la SARL susnommée, avaient perçu le prix de cession du fonds de commerce de cette SARL sans rembourser spontanément la créance de la banque prêteuse à cette occasion, alors qu'ils ne pouvaient en ignorer l'existence';

Sur la réduction des intérêts au taux contractuel capitalisés

Les consorts X... soutiennent à hauteur de Cour que le cumul d'un intérêt au taux conventionnel et de la capitalisation des intérêts telle que prévue à l'acte de prêt initial est constitutif d'une pénalité excessive et sollicitent la réduction du taux contractuel au taux d'intérêt légal'; cette prétention, qui constitue l'accessoire de la demande initiale des consorts X... tendant à voir dire que la banque ne peut valablement exécuter son gage hypothécaire sur l'immeuble de Vincennes en raison de la prescription extinctive, est recevable, mais sera rejetée, dès lors que ces intérêts au taux contractuel capitalisés n'apparaissent pas excessifs au regard du comportement morosif des consorts X... qui ont refusé, ou leurs auteurs, la proposition émise par la banque Polska en 2005 de mettre fin aux poursuites moyennant un versement forfaitaire de 50.000 €, et qui ont préféré engager des actions judiciaires longues et hasardeuses pour être déchargés de leurs obligations procédant de l'inscription hypothécaire sur l'immeuble indivis de Vincennes';

Sur l'appel en garantie des consorts X... contre M. P... et les SCP notariales

Cet appel en garantie est sans objet en raison de la solution apportée au litige';

En équité, les consorts X... seront condamnés in solidum à régler à la banque Polska la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile'; les notaires seront déboutés de leur demande sur ce fondement dirigée contre la banque Polska dès lors que celle-ci n'est pas succombante à l'instance ni condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement, sauf en ce qu'il a dit que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil n'était pas revêtu de l'autorité de chose jugée relativement à la qualification et à la nature de la sûreté litigieuse,

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que le jugement du 15 novembre 1996 du tribunal de grande instance de Créteil est revêtu de l'autorité de chose jugée relativement à la qualification et à la nature de la sûreté litigieuse,

Condamne in solidum les consorts X... à régler à la banque Polska la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit recevable la demande des consorts X... tendant à voir dire que l'application d'un intérêt au taux conventionnel de 16,50 % l'an et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil en cas d'impayé est une pénalité excessive qui doit être réduite au taux légal sans majoration ni capitalisation,

Déboute les consorts X... de cette prétention,

Dit sans objet l'appel en garantie XX... Polska Kasa Opieki contre M. P..., la H... et la SCP Lefebvre Gabegie Burthe-Mique Gemignani Peschard LBMB,

Rejette toute autre demande,

Condamne les consorts X... in solidum aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/19406
Date de la décision : 29/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G1, arrêt n°15/19406 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-29;15.19406 ?
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