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28/06/2018 | FRANCE | N°17/23250

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 28 juin 2018, 17/23250


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 28 JUIN 2018



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 17/23250



Décision déférée à la cour : jugement du 18 décembre 2017 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° [...] - Appel sur la compétence





APPELANT



Monsieur Jean-Pierre X...

Demeurant [...]

né le [

...] à PARIS (75016)



Représenté par Maître Pascale B... de la SCP NABOUDET - HATET, avocate au barreau de PARIS, toque : L0046

Ayant pour avocat plaidant Maître Bernard A... C... A... SELARL, avoca...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 28 JUIN 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/23250

Décision déférée à la cour : jugement du 18 décembre 2017 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° [...] - Appel sur la compétence

APPELANT

Monsieur Jean-Pierre X...

Demeurant [...]

né le [...] à PARIS (75016)

Représenté par Maître Pascale B... de la SCP NABOUDET - HATET, avocate au barreau de PARIS, toque : L0046

Ayant pour avocat plaidant Maître Bernard A... C... A... SELARL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0794

INTIMEE

Société DEL MONTE INTERNATIONAL GMBH, société de droit suisse ayant un établissement à Monaco sis [...] (MC98000)

Ayant son siège social c/o Buchhaltungs - Und Revisions - AG, Bundesstrasse 3

[...] (SUISSE)

Représentée par Maître Laurent D... & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0490

Ayant pour avocate plaidante Maître Charlotte Y..., avocate au barreau de PARIS, toque : P0490

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 Mai 2018, en audience publique, devant la cour composée de:

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre chargé du rapport

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère, rapporteur

Madame Anne DU BESSET, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Patrick BIROLLEAU, Président de chambre et par Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

Jean-Pierre X..., exerçant sous l'enseigne «Bureau Jean-Pierre X...- X... Group International», ci-après «Z... X...», est agent commercial d'entreprises pour la vente de jus de fruits pour l'industrie des jus de fruits en France et en Europe et par ailleurs arbitre, membre de la Chambre arbitrale de Paris depuis 1985.

Le groupe Del Monte International Gmbh (ci-après la «société Del Monte») dont le siège est [...] en Suisse, est une filiale de la société Fresh Del Monte Produce dont le siège est [...], en Floride, et est spécialisée dans la production, la commercialisation et la distribution de fruits et légumes sous toutes formes.

Z... X..., qui a collaboré avec la société Del Monte de 1973 jusqu'en 1998 puis, de nouveau, à partir de 2006, s'est vu consentir des missions de courtage commercial pour la vente de jus et de concentrés d'ananas, par des contrats successifs à durée déterminée intitulés « Brokerage Agreement» contenant en annexe les conditions générales et une clause compromissoire prévoyant en cas de litige un arbitrage sous l'égide du Règlement d'Arbitrage International, administré par l'ICDR et devant se tenir à Miami en Floride.

Le 13 août 2015, par lettre RAR, la société Del Monte a informé Monsieur Jean-Pierre X... du non- renouvellement du contrat en cours, soit le 6 mars 2016.

À la suite de ce courrier, Monsieur X... a entamé des négociations en vue de l'indemniser de cette rupture.

S'estimant victime d'une rupture brutale des relations commerciales établies, Monsieur X... a, par assignation du 26 décembre 2016, assigné la société Del Monte devant le tribunal de commerce de Paris en réparation du préjudice consécutif.

Par jugement rendu le 18 décembre 2017, le tribunal de commerce de Paris s'est déclaré incompétent, a renvoyé Monsieur Jean-Pierre X... à mieux se pouvoir dans le cadre d'un arbitrage à Miami (Floride), USA, sous égide de l'International Center for Dispute Résolution et a :

- dit qu'en application de l'article 84 du code de procédure civile, la voie de l'appel est ouverte à l'encontre de la présente décision,

- condamné Monsieur Jean-Pierre X... à payer à la société de droit suisse Del Monte International Gmbh, pris en son établissement à Monaco chez la société Del Monte Internationale Gmbh Monaco Branch la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus,

- condamné Monsieur Jean-Pierre X... aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 90,00 euros dont 14,79 euros de TVA.

Vu l'appel interjeté le 27 décembre 2017 par Monsieur Jean-Pierre X... à l'encontre de cette décision

Vu les dernières conclusions signifiées le 26 avril 2018 par Monsieur Jean-Pierre X..., par lesquelles il est demandé à la cour de :

- déclarer l'appel de Monsieur Jean-Pierre X... du jugement rendu le 18 décembre 2017 par le tribunal de commerce de Paris sur la compétence, recevable et bien fondé ;

- dire et juger que l'annexe contenant la clause compromissoire, au contrat signé par Monsieur Jean-Pierre X... «Brokerage Agreement» le 6 mars 2015, pour la période comprise entre le 6 mars 2015 au 6 mars 2016, objet de la rupture, n'est pas signée par ce dernier ;

- dire et juger que le contrat lui-même du 6 mars 2015 et son annexe contenant la clause compromissoire, ne sont pas signés par la société Del Monte International Gmbh et que cette dernière ne saurait en aucune manière s'en prévaloir, alors qu'elle tend à la soustraire à son juge naturel ;

- dire et juger la société Del Monte International, en ne signant ni le contrat du 6 mars 2015 ni son annexe, a bien renoncé à se prévaloir de ce contrat et de la clause compromissoire qu'il contient et n'a pas entendu s'y référer;

- dire et juger que sa demande en application de la clause compromissoire qu'elle invoque se heurte à une fin de non recevoir ;

- dire et juger que la société Del Monte International, en n'exigeant pas de Monsieur X... lors des contrats précédents qui se sont succédés qu'il signe ses annexes et en ne signant ni le dernier contrat de 2015 ni son annexe a bien renoncé à se prévaloir de ce contrat et de la clause compromissoire qu'il contient ;

- dire et juger que seul un contrat verbal a régi les relations entre les parties ;

- dire et juger qu'on ne peut pas transporter la clause que stipule un contrat antérieur venu à son échéance qui n'est plus doté d'aucune force obligatoire, dans un contrat ultérieur ne faisant aucunement référence au précédent ;

- dire et juger en conséquence qu'aucune des parties n'a donné son consentement à ce contrat distinct du contrat principal, de sorte qu'aucun lien arbitral ne s'est formé entre elles, ce qui ressort de l'évidence exigée par l'article 1448 du code de procédure civile ;

Vu les dispositions de l'article 1448 du code de procédure civile,

- constater l'inexistence et /ou l'inopposabilité de la clause compromissoire invoquée alors qu'aucune des parties n'a signé l'annexe au contrat et que le contrat lui-même n'est pas signé par la société Del Monte International Gmbh qui s'en prévaut ;

Vu l'article 14 du code civil,

- infirmer le jugement entrepris,

- débouter la société Del Monte International Gmbh de ses demandes en vue de voir déclarer incompétent le tribunal de commerce de Paris au profit d'un tribunal arbitral de Miami, sous l'égide de l'International Centre for Dispute Resolution ;

- déclarer compétent le tribunal de commerce de Paris pour statuer, et renvoyer le litige devant ledit tribunal ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Monsieur X... au paiement de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouter la société Del Monte de sa demande en paiement additionnelle de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Del Monte en tous les dépens de 1ère instance et d'appel afférents au présent incident, dont distraction, pour ceux d'appel, au profit de la société Naboutet-Hatet, avocats, en vertu des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions signifiées le 23 avril 2018 par la société Del Monte International Gmbh, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu les articles 1465 et 1448 du code de procédure civile,

Vu la clause compromissoire contenue à l'article 16 des conditions de courtage de la société Del Monte International Gmbh,

dire et juger que la clause compromissoire n'est pas manifestement nulle ni manifestement inapplicable en vertu des dispositions de l'article 1448 du code de procédure civile,

En conséquence,

- dire et juger Monsieur Jean-Pierre X... mal fondé en son appel du jugement rendu le 18 décembre 2017 par le tribunal de commerce de Paris qui se déclare incompétent et renvoie Monsieur Jean-Pierre X... à mieux se pourvoir dans le cadre d'un arbitrage à Miami (Floride), USA sous l'égide de l'International Center for Dispute Resolution ;

- confirmer le jugement rendu le 18 décembre 2017 par le tribunal de commerce de Paris en l'ensemble de ses dispositions ;

Y ajoutant,

- condamner Monsieur Jean-Pierre X... à payer à la société Del Monte International Gmbh la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles d'appel, outre les entiers dépens d'appel avec distraction au profit de la Aarpi Lerins & BCW, avocats, en vertu de l'article 699 du code de procédure civile.

***

Monsieur X... fait valoir que la clause compromissoire est manifestement inapplicable au motif que l'annexe au contrat n'a pas été signée par la société Del Monte, et qu'il n'a jamais accepté cette clause compromissoire, le fait que les conditions générales aient été signées par Monsieur X... seul ne permettant pas d'invoquer l'application de la clause dans le cadre de la résiliation du contrat en mars 2016, chaque contrat étant autonome et le dernier contrat n'ayant pas été signé par la société Del Monte, que cette dernière ne peut se prévaloir d'un contrat qu'elle n'a pas signé, et que les juridictions françaises sont seules compétentes pour connaître du litige, que la preuve de la connaissance et de l'acceptation par Monsieur X... de ladite clause n'est pas rapportée, l'absence de signature des conditions générales de courtage valant au contraire désaccord à l'applicabilité de la clause compromissoire.

En réponse,

La société Del Monte fait valoir que la clause compromissoire contenue dans l'ensemble contractuel la liant à Monsieur X... est applicable à l'espèce, Monsieur X... ne justifiant d'aucune inapplicabilité manifeste de ladite clause et ayant signé les contrats de 2012, 2013 et 2014 renvoyant aux conditions générales de courtage, que le contrat de 2015 a été exécuté et que, enfin, il a signé les conditions générales de courtage contenant cette clause compromissoire en 2013, de sorte que Monsieur X..., qui se présente comme exerçant la fonction d'arbitre, avait une parfaite connaissance de la clause litigieuse.

Sur ce, la cour,

Considéant qu'il est constant que l'arbitrage n'était pas exclu du seul fait que les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° soient invoqués par l'une de parties au litige;

Considérant qu'aux termes de l'article 1448 du code de procédure civile, lorsqu'un litige relevant d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction de l'Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi et si la convention d'arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable;

Qu'en droit international, la convention d'arbitrage n'est soumise à aucune condition de formeet peut être contenue, par exemple dans des conditions générales ou un contrat-type accepté par les parties;

Considérant qu'en l'espèce, seule est invoquée l'inapplicabilité de la clause compromissoire et non sa nullité;

Qu'il résulte des éléments versés aux débats que le 17 janvier 2012, le Bureau Jean-Pierre X... ' X... Group International a signé avec la société de droit suisse Del Monte International GmbH un contrat de courtage rédigé en anglais intitulé «Brookerage Agreement» prévoyant les conditions de commissionnement de Z... X... de 3% sur les ventes, et renvoyant aux conditions générales figurant au verso pour les conditions d'exécution du contrat;

Que ce contrat de courtage, dont il n'est pas contesté qu'il n'était pas signé par la société Del Monte, l'accord s'étant fait par courriel, et Monsieur X... ayant retourné son exemplaire signé, a néanmoins été exécuté sans difficulté depuis le début et renouvelé à plusieurs reprises dans les mêmes termes, ce qui n'est pas contesté, et ce jusqu'à la rupture, sans que les parties aient jamais contesté la validité desdits contrats, la société Delmonte International, rédacteur des contrats, les transmettant à Monsieur X... qui les retournait signésou non, l'exemplaire daté du 17 janvier 2013 ayant été, lui, dûment signé de part et d'autre, et les clauses n'étant pas modifiées d'une année sur l'autre ;

Que la relation d'affaires qui s'est poursuivie entre les parties pendant toutes ces années est dès lors établie;

Que les conditions générales imprimées au verso ont bien été signées par les parties au recto et au verso en 2013;

Que ces conditions générales comportent une clause compromissoire selon laquelle «toutes contestations, controverses et plaintes en lien avec ce contrat ou y trouvant leur origine doivent être réglées et déterminées par un arbitrage obligatoire, liant les parties en accord avec les règles de l'arbitrage international et administrés par le Centre international de résolution des différents par un (1) arbitre désigné d'un commun accord des parties ou, à défaut, d'accord 30 jours après que chaque partie a proposé un arbitre à l'autre partie, par trois (3) arbitres, un désigné par chacune des deux parties et le troisième désigné par accord mutuel des deux arbitres désignés par les deux parties respectivement. Chaque partie accepte que l'arbitrage soit tenu à Miami, Floride, aux Etats-Unis, et soit conduit en anglais. Chaque partie accepte que toutes sentences, jugements ou ordres rendus par l'arbitrage seront définitifs et contraignants pour les parties et pourront être produits devant tout tribunal ayant compétence et les demande pour les rendre contraignantes pourront être faites devant tout tribunal compétent, mais ne pourront faire l'objet d'un appel»;

Que l'incorporation de cette clause au contrat a été expressément acceptée lors de la signature du contrat initial par Monsieur X..., puis par les deux parties l'année suivante en 2013, et enfin à nouveau par Monsieur X... en 2015, qui a signé l'exemplaire lui revenant;

Que les conditions générales constituent par conséquent l'accord des parties, régulièrement renouvelé dans les mêmes termes;

Que Monsieur X... ne peut soutenir qu'il n'a pas eu connaissance de la teneur de la clause incorporée au contrat;

Que la clause compromissoire, dont la validité n'est pas contestée, n'est dès lors entachée ni de nullité ni d'une inapplicabilité manifeste;

Qu'en conséquence, compte tenu de la relation d'affaires qui s'est établie entre les parties et qui n'est pas contestée, Monsieur X..., qui est par ailleurs arbitre lui-même, a accepté que les différends susceptibles de naître de ces relations soient réglés par voie d'arbitrage;

Que c'est dès lors à juste titre, et par des motifs que la cour adopte, que les premiers juges se sont déclarés incompétents;

Qu'il y a lieu de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et d'allouer à la société Del Monte une indemnisation complémentaire au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant

CONDAMNE Monsieur Jean-Pierre X... à payer à la société Del Monte International la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Monsieur Jean-Pierre X... aux entiers dépens dont distraction au profit de la AAPI Lerins & BCW, avocats, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 17/23250
Date de la décision : 28/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°17/23250 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-28;17.23250 ?
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