Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 5
ARRÊT DU 21 JUIN 2018
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/06004
Décision déférée à la cour : jugement du 05 février 2016 -tribunal de commerce de PARIS - RG n° J2016000015
APPELANTE
SARL CASUAL ACTIVE
Ayant son siège social : [...]
N° SIRET : 505 408 229 (RENNES)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jean-Charles B... FOUSSAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0454
Ayant pour avocat plaidant : Me Astrid BARBEY, de la SELEURL Cabinet FOUSSAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0454
INTIMÉE
SAS JSR
Ayant son siège social : [...]
N° SIRET : 449 572 999 (PARIS)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Z... C... Z... A... X..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1864
Ayant pour avocat plaidant : Me Mathieu TOUZE, de la SELASU Z... A... X..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1864
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mars 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, rapporteur
Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère
Madame Anne DU BESSET, Conseillère,
Greffière, lors des débats : Madame Cécile PENG
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS ET PROCÉDURE :
La société JSR, société de prêt à porter masculin, a conclu, le 13 janvier 2006, avec Monsieur Y..., (par ailleurs gérant de la société Kevax), pour le secteur géographique limité à l'ouest de la France (départements 14, 22, 29, 35, 37, 44, 49, 50, 53, 56, 61, 72, 79, 85, 86), un contrat d'agent commercial relatif à la vente de costumes, vestes, pantalons, manteaux, blousons et chemises de marque Izac.
La société Casual Active s'est prévalue de ce qu'elle venait aux droits de la société Kevax.
Invoquant la longueur des délais de règlement de ses commissions et la concurrence que lui faisait subir la société JSR du fait de la vente directe à certains clients, de la concurrence du site internet Izac et de l'ouverture de magasin Izac par la société JSR sur cette même zone, la société Casual Active a, par lettre du 30 avril 2014, pris acte de la rupture, du fait de JSR, du contrat d'agent commercial. Le 6 juin 2014, Casual a réclamé le paiement des indemnités dues à la cessation du contrat du fait de JSR, cette dernière répondant, le 25 juillet 2014, qu'elle n'entendait verser aucune des indemnités demandées ni au titre d'une prétendue rupture brutale du contrat, ni à celui de l'absence de préavis de rupture.
Par acte du 6 août 2014, la société Casual Active a assigné devant le tribunal de commerce de Paris la société JSR aux fins de paiement de ses commissions et d'une indemnité compensatrice au titre de la rupture du contrat d'agent. La société JSR a reconventionnellement réclamé la condamnation de la société Casual Active d'une part, à réparer le préjudice qu'elle prétendait avoir subi du fait de la rupture abusive du contrat par Casual, d'autre part, à lui payer la créance détenue sur Casual au titre de son activité de distribution.
Par jugement rendu le 5 février 2016, le tribunal de commerce de Paris a :
- joint les causes RG [...] et [...] sous le seul et même numéro RG J016000015 ;
- condamné la société JSR à payer à la société Casual Active la somme de 123.809,68 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 février 2015, date de la mise en demeure ;
- condamné la société Casual Active à payer à la société JSR la somme de 14.820 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2014 sur 4.940 euros, du 31 mai 2014 sur 4.940 euros et du 30 juin 2014 sur 4.940 euros ;
- ordonné la compensation judiciaire entre ces condamnations ;
- débouté la société Casual Active de sa demande de communication de pièces ;
- ordonné l'exécution provisoire sans caution du jugement ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif ;
- fait masse des dépens qui seront supportés pour moitié par la société Casual Active et par la société JSR, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.
La société Casual Active a interjeté un appel principal le 9 mars 2016 à l'encontre de cette décision. La société JSR a formé appel incident.
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PRÉTENTIONS DES PARTIES :
La société Casual Active, par dernières conclusions signifiées le 7 mars 2018, demande à la cour au visa des articles 1134 du code civil et L.134-1 et suivants du code de commerce, de :
- rejeter les fins de non-recevoir soulevées par la société JSR ;
- confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société JSR à payer à la société Casual Acive la somme de 123.809,68 euros TTC à titre d'arriérés de commissions avec intérêts au taux légal à compter de la date de mise en demeure;
Y ajoutant,
- dire que cette condamnation intervient à titre provisionnel ;
- infirmer la décision entreprise en toutes ses autres dispositions ;
Statuant à nouveau,
- dire que la rupture du contrat d'agent commercial de la société Casual Active est imputable à la société JSR ;
En conséquence,
- condamner la société JSR à payer à la société Casual Active une provision de 209.590 euros à titre d'indemnité de fin de contrat ;
- condamner la société JSR à payer à la société Casual Active une provision de 31.439 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
- condamner la société JSR à payer à la société Casual Active la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat d'agent commercial ;
le tout avec intérêts et capitalisation des intérêts à compter de l'acte introductif de la présente instance, soit le 6 août 2014 ;
- ordonner à la société JSR de communiquer l'ensemble de ses documents comptables relatifs au secteur de la société Casual Active pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014 et, en particulier :
- le journal des ventes réalisées par la société JSR depuis le 1er janvier 2010 sur le secteur confié à la société Casual Active ;
- les comptes clients de la société JSR depuis le 1er janvier 2010, relatifs aux clients du secteur de la société Casuel Active ;
- les tableaux récapitulatifs, et, plus généralement tous documents détenues par la société JSR détaillant les produits livrés par référence/dénomination et les chiffres d'affaires ainsi réalisés depuis le 1er janvier 2010, sur le secteur confié à la société Casual Active ;
le tout certifié exact et exhaustif par le commissaire aux comptes de la société JSR et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification à la société JSR de la décision à intervenir ;
- dire que l'affaire sera rappelée à l'audience de la cour après communication de ces documents par la société JSR, à l'initiative de l'une ou l'autre partie et au plus tard six mois après la décision à intervenir ;
- débouter la société JSR de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société JSR à payer, sauf à parfaire, 20 000 euros à la société Casual Active au titre des frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, sauf à parfaire, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Elle conclut au rejet de la fin de non-recevoir soulevée par la société JSR, selon laquelle la société Casual n'aurait été qu'un sous-agent, puisque la société JSR a exécuté le contrat avec la société Casual Active à la suite de la cession de contrat avec la société Kevax, attitude qui doit s'analyser en agrément tacite du successeur.
Elle souligne par ailleurs que l'agent commercial peut résilier le contrat en cas de manquement du mandant à ses obligations contractuelles, qu'un défaut de paiement des commissions dues à l'agent par le mandant suffit à ce que la rupture du contrat soit imputable au mandant, ce qui est le cas en l'espèce puisque la société JSR a reconnu être redevable à la société Casual Active de la somme de 123.809,68 euros au titre des commissions, qu'elle n'a pas remis les relevés de commission qu'elle était tenue de remettre, et qu'elle a décidé unilatéralement de ne plus verser d'avances sur commission à compter du début de l'année 2014. Elle invoque plusieurs courriers adressés à la société JSR, faisant état d'anomalies relatives au relevé de commissions.
Elle rappelle également que le mandant qui viole l'exclusivité consentie à son agent commercial rend imputable à lui-même la rupture du contrat à l'initiative de l'agent, ce qui est le cas en l'espèce puisque la société JSR ne conteste pas avoir fait affaire avec d'autres sociétés sur d'autres commandes, alors que l'exclusivité de la société Casual Active était prévue à l'article 3.2 du contrat. Elle ajoute que cette exclusivité vaut même si le contrat entre les sociétés Kevax et JSR n'avait pas été transféré.
Elle considère que la société JSR a également violé son obligation de loyauté puisqu'elle a ouvert des boutiques en propre à Nantes et à Rennes et a proposé des promotions de sorte que les clients ne passaient plus commande auprès de la société Casual Active, entraînant des conséquences désastreuses pour cette dernière.
La société Casual Active réclame :
- une indemnité de fin de contrat : elle rappelle à cet égard qu'en tant qu'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, elle a droit, en sa qualité d'agent commercial, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi qu'elle évalue à deux ans de rémunérations ;
- une indemnité compensatrice de préavis : le préavis conclu contractuellement était de trois mois ; or, la société JSR ne lui a pas permis de l'exécuter, de sorte que cette dernière est redevable d'une indemnité de préavis qui doit être fixée à 31.439 euros TTC ;
- des dommages-intérêts : elle rappelle que des dommages-intérêts peuvent se cumuler avec des dommages-intérêts pour rupture abusive lorsque les circonstances de la rupture révèlent un comportement fautif du mandant, ce qui est le cas en l'espèce puisque la société JSR a délibérément retenu le paiement des commissions devant normalement revenir à la société Casual Active, a refusé de communiquer les relevés de commissions, a ouvert des boutiques en propre, a affiché des promotions, a procédé à une rétention abusive de documents et sommes devant normalement lui revenir ainsi qu'à une saisie conservatoire pratiquée par la société JSR qui lui a causé un préjudice moral et financier supplémentaire.
La société Casual reproche aux premiers juges de ne pas avoir fait droit à sa demande de communication de pièces et indique que les documents censés faire apparaître les commissions de Casual ne constituent pas les pièces comptables dont l'agent commercial peut demander communication à son mandant.
La société JSR, par dernières conclusions signifiées le 6 mars 2018, demande à la cour, au visa des articles 1199 du code civil, L.134-1 et suivant du code de commerce, de:
A titre principal,
- déclarer la société Casual Active irrecevable en ses demandes d'indemnité au titre du contrat d'agence en date du 13 janvier 2006 ;
- la débouter de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la société JSR ;
A titre reconventionnel,
- constater la réalisé de la créance de la société JSR à l'encontre de la société Casual Active, au titre de son activité de distribution ;
- condamner la société Casual Active à payer à la société JSR la somme de :
- 17.987,34 euros en principal avec intérêts au taux légal ;
- 52,80 euros correspondant au coût de présentation de la requête ;
- 340,18 euros correspondant aux frais de procédure ;
- dire qu'en résiliant sans préavis le contrat d'agent qui la liait à la société JSR, la société Casual Active a commis une faute au préjudice de la société JSR ;
- condamner la société Casual Active à verser à la siccité JSR la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts ;
- condamner la société Casual Active à payer à la société JSR une somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, dont distraction au profit de Maître Z... A... X....
Elle rappelle que le contrat ne produit d'effets qu'entre les parties contractantes et précise que le contrat d'agence du 13 janvier 2006 a été signé, non pas avec la société Casual Active, mais avec Monsieur Gilles Y..., de sorte que la société Casual Active est un tiers au contrat. Ainsi, en l'absence d'une cession dudit contrat, elle n'est pas recevable à demander une indemnité de fin de contrat, puisqu'elle n'a pas d'intérêt ou de qualité à agir. Elle fait valoir que, si la qualité de sous-agent de la société Kevax devait être reconnue à la société Casual Active, cette dernière ne pourrait prétendre à l'indemnité compensatrice due au titre de la rupture du contrat puisque la société JSR est tiers au contrat entre Monsieur Gilles Y... et Casual Active et que cette indemnité ne peut être due qu'au titre de la rupture du contrat d'agent commercial entre Monsieur Gilles Y... et la société JSR.
Sur le manquements invoqués par Casual, la société JSR affirme qu'elle n'a :
- pas violé la clause d'exclusivité, puisque les sociétés invoquées par Casual étaient des clientes de longue date ;
- commis aucune déloyauté, dès lors qu'elle n'a mandaté aucun agent commercial en lieu et place de son agent habituel et ne l'a en aucune façon évincé de ses rapports avec la clientèle ;
- commis aucun manquement du fait de l'ouverture des boutiques en propre, Casual ne rapportant pas la preuve d'une conséquence réelle et directe de cette ouverture sur l'exécution du mandat de Monsieur Y... ;
- commis aucune faute en ce qui concerne le paiement des commissions ; elle rappelle que le paiement des commissions est en décalage - les règlements intervenant généralement dans les soixante jours (fin de mois) après l'émission de la facture de vente, voire dans un délai supérieur, allant parfois jusqu'à 5 ou 6 mois - décalage qui ne peut, en tout état de cause, justifier à lui seul la rupture unilatérale du contrat.
Elle soutient que c'est Casual qui a résilié brutalement le contrat d'agent commercial.
Elle considère qu'en ne démarchant pas les clients en temps utile, Monsieur Y... a manqué à ses obligations contractuelles.
La société JSR demande le rejet des demandes de la société appelante au titre du paiement de commissions, de l'indemnité de fin de contrat et d'indemnité compensatrice de préavis et enfin au titre de la rupture abusive.
La société JSR considère que la société Casual Active est débitrice d'une somme de 17.987,34 euros au titre des lettres de change émises afin de garantir le paiement des commandes passées le 31 juillet 2013.
Elle considère que la rupture du contrat par la société Casual Active était brutale puisque le mandat n'a pas été correctement exécuté et que Monsieur Y... aurait tenu des propos dénigrants, ce qui lui a causé un préjudice financier, puisqu'elle s'est retrouvée sans agent dans un secteur géographique important pour son chiffre d'affaires annuel.
Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.
***
MOTIFS :
' Sur les demandes principales de la société Casual
Sur la recevabilité des demandes de la société Casual
Considérant que, s'il est constant que le contrat en date du 13 janvier 2006 a été signé entre JSR et Monsieur Y..., il convient d'observer :
- d'une part, que ce contrat visait en réalité un numéro d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ('[...] RCS REC') dont il n'est pas contesté qu'il était celui de la société Kevax, de sorte que le contrat du 13 janvier 2006 a en réalité été conclu entre JSR et Kevax ;
- d'autre part, que ce contrat prévoit, en son article 8.1, que 'l'agent, ou en cas de décès, ses ayants droit, pourra présenter un successeur à l'agrément de la société JSR, sans toutefois que celle-ci soit tenue de l'agréer.' ;
Considérant que, si le transfert d'un contrat, qui emporte substitution de cocontractant, doit être accepté par la partie à laquelle il est opposé, l'acceptation peut être expresse ou tacite ; qu'en l'espèce, il importe peu qu'aucun écrit n'ait transféré à la société Casual le bénéfice du contrat d'agence conclu au bénéfice de Monsieur Gilles Y... (société Kevax), dès lors que la cession en a été tacitement approuvée par JSR, ainsi que cela résulte du fait que :
- le contrat d'agent commercial s'est poursuivi entre JSR et le cessionnaire Casual;
- c'est à Casual que JSR adressait ses relevés de commissions ;
- c'est Casual qui transmettait à JSR ses factures de commissions ;
- c'est à Casual que JSR payait directement les commissions dues ;
Que, ces éléments établissant que Casual était l'agent commercial de JSR, et non un sous-agent, le transfert du contrat d'agent commercial est opposable à JSR ; que, les premiers juges n'ayant pas statué sur ce point, il sera ajouté en ce sens au jugement entrepris ;
Sur la demande de paiement d'arriéré de commissions
Considérant que le montant des commissions restant dues à Casual n'est pas contesté ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société JSR à payer à la société Casual Active la somme de 123.809,68 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 5 février 2015, date de la mise en demeure ;
Sur les demandes indemnitaires de la société Casual Active
Considérant, sur l'indemnité de rupture, que l'article L 134-12 du code de commerce prévoit qu' 'en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi' ; que l'article L 134-13 du même code dispose que 'la réparation prévue à l'article L 134-12 n'est pas due dans les cas suivants : (') 2° la cessation du contrat résulte de l'initiative de l'agent à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant (')' ;
Considérant que Casual fait grief à JSR de ne pas lui avoir payé, à partir de septembre 2013, les commissions qui lui étaient dues et d'avoir violé l'exclusivité qui lui avait été consentie ;
Considérant, sur le paiement des commissions, que, dans son courrier du 30 avril 2014, elle fait grief à JSR de ne pas lui avoir payé les commissions qui lui seraient dues au titre de 2013 et d'avoir interrompu, au début de 2014, le versement des avances sur commissions ;
Considérant que le paiement des commissions à bonne date est une obligation essentielle à la charge du mandant ; que l'article 5.4 du contrat, reprenant les termes de l'article L.134-9, alinéa 2, du code de commerce, stipule que 'le règlement des commissions acquises s'effectuera sur présentation des factures par l'agent trimestriellement et au plus tard, le dernier jour du mois qui suit le trimestre d'acquisition.' ; que JSR n'a pas discuté devoir la somme de 123.809,68 euros TTC à Casual à titre d'arriérés de commissions pour la période postérieure à septembre 2013 ; que Casual a réclamé les paiements qu'elle estimait dus les 22 octobre 2013, 5 décembre 2013 et 8 février 2014, sans qu'une suite favorable ne soit donnée à ses demandes ; qu'il est constant que les commissions en cause n'ont pas été payées dans le délai des articles L 134-9, alinéa 2, du code de commerce et 5.4 du contrat ;
Que, par ailleurs, JSR ne conteste pas ne plus avoir, à compter du début de l'année 2014, versé à la société Casual d'avance sur commissions (d'un montant de 3.000 euros / mois) - à l'exception du mois de mars 2014 - contrairement à la pratique qui s'était instaurée depuis l'année 2011, soit pendant près de trois années ; que, si, selon l'article L.134-9, alinéa 2, du code de commerce, 'la commission doit être payée à l'agent au plus tard le dernier jour du mois qui suit le trimestre au cours duquel elle est acquise', ce texte précise qu' 'il peut être dérogé à cette règle dans un sens favorable à l'agent commercial' ; que, par la pratique des avances sur commissions dont JSR ne discute pas qu'elle ait été mise en oeuvre pendant trois années, les parties ont entendu déroger, dans un sens favorable à l'agent, à la règle légale prévue pour le paiement des commissions ; que JSR n'apporte aucune justification à la remise en cause du droit institué par les parties à la perception de telles avances ; que le retard important et durable apporté au paiement des commissions dues à l'agent commercial constitue un manquement d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation du contrat d'agence aux torts du mandant ;
Considérant, sur l'exclusivité, que l'article 3.2 du contrat stipule : 'Sur ce secteur ainsi défini pour les produits qui lui sont confiés à la vente, l'agent bénéficiera d'une exclusivité, l'agent s'engageant à ne pas confier de mandat à un autre agent, à charge pour l'agent de se faire assister pour assurer ses objectifs.' ; que cette clause institue au bénéfice de l'agent commercial une exclusivité sur le secteur géographique identifié à l'article 3.1 du contrat, pour la vente des produits énumérés à l'article 2 ; que la convention du 13 janvier 2006 ne prévoit aucune exception à l'exclusivité consentie à l'agent ; que JSR ne conteste pas avoir traité directement avec les sociétés Terres d'homme et ses boutiques situées à Allones, Arconnay et Le Mans (Sarthe), Histoire d'homme et sa boutique située à Challans (Vendée), et Hardy & Son et ses boutiques situées à Laval (Mayenne) et Noirmoutier (Vendée), soit dans des départements relevant de l'exclusivité consentie à l'agent, ni ne pas avoir commissionné Casual au titre des commandes passées ; que le mandant qui ne respecte pas la clause d'exclusivité dont bénéficie l'agent et qui ne lui verse pas les commissions pour toute opération conclue pendant la durée du contrat avec une personne appartenant au secteur exclusif qui lui est consenti crée les circonstances qui lui rendent imputable la rupture du contrat à l'initiative de l'agent ;
Qu'en conséquence, compte tenu des manquements de JSR en matière de paiement des commissions et de non-respect de l'exclusivité consentie à l'agent, la cour dira que la rupture du contrat d'agent commercial de la société Casual est imputable à la société JSR et infirmera en ce sens le jugement entrepris ;
Considérant qu'il convient de fixer le montant de l'indemnité de rupture en fonction des circonstances spécifiques de la cause, même s'il existe un usage reconnu qui consiste à accorder l'équivalent de deux années de commissions, lequel usage ne lie cependant pas la cour ; que, sur la base des chiffres communiqués par la société JSR aux termes de sa pièce n°2, les montants des rémunérations de la société Casual du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ont été de 98.986 euros du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, de 107.525 euros du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 et de 107.874 euros du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013, soit un montant de de 209.590 euros (314.385 / 36 x 24) au titre de l'indemnité de fin de contrat ;
Considérant, sur l'indemnité compensatrice de préavis, que l'article L 134-11 du code de commerce dispose que 'lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. (') La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.' ; que l'article 7.2 3 du contrat stipule qu' 'en cas de rupture du contrat à l'initiative de l'une ou l'autre des parties, le préavis serait de trois mois à compter de la troisième année d'exécution dudit contrat' ; que, la relation ayant débuté entre les parties le 13 janvier 2006, Casual était en droit de bénéficier d'un préavis de trois mois ; qu'elle est en conséquence fondée à obtenir, à ce titre, la somme de 31.439 euros TTC [(314 385 / 36 x 3) + TVA] ;
Qu'en conséquence, compte tenu des manquements de JSR en matière de paiement des commissions et de non-respect de l'exclusivité consentie à l'agent, la cour dira que la rupture du contrat d'agent commercial de la société Casual est imputable à la société JSR et infirmera en ce sens le jugement entrepris ;
Considérant qu'il convient de fixer le montant de l'indemnité de rupture en fonction des circonstances spécifiques de la cause, même s'il existe un usage reconnu qui consiste à accorder l'équivalent de deux années de commissions, lequel usage ne lie cependant pas la cour ; que, sur la base des chiffres communiqués par la société JSR aux termes de sa pièce n°2, les montants des rémunérations de la société Casual du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013 ont été de 98.986 euros du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011, de 107.525 euros du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 et de 107.874 euros du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013, soit un montant de de 209.590 euros (314.385 / 36 x 24) au titre de l'indemnité de fin de contrat ;
Considérant, sur l'indemnité compensatrice de préavis, que l'article L.134-11 du code de commerce dispose que 'lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des parties peut y mettre fin moyennant un préavis. (') La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes. En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.' ; que l'article 7.2 3 du contrat stipule qu' 'en cas de rupture du contrat à l'initiative de l'une ou l'autre des parties, le préavis serait de trois mois à compter de la troisième année d'exécution dudit contrat' ; que, la relation ayant débuté entre les parties le 13 janvier 2006, Casual était en droit de bénéficier d'un préavis de trois mois ; qu'elle est en conséquence fondée à obtenir, à ce titre, la somme de 31.439 euros TTC [(314 385 / 36 x 3) + TVA] ;
Considérant, sur la demande de dommages et intérêts, que Casual ne rapporte pas la preuve d'un préjudice distinct de celui réparé par l'indemnité de rupture et par l'octroi des intérêts de retard ; que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de ce chef ;
Considérant, sur la demande de communication de documents comptables par JSR, que l'article R.134-3 du code de commerce prévoit que: 'l'agent commercial a le droit d'exiger de son mandant qu'il lui fournisse toutes les informations, en particulier, un extrait des documents comptables nécessaires pour vérifier le montant des commissions qui lui sont dues' ; que le mandant doit permettre à l'agent de déterminer le montant de ses commissions par la communication des documents comptables en sa possession, cette obligation garantissant à l'agent un contrôle du calcul de ses commissions ; que Casual est en droit d'obtenir de JSR les documents comptables nécessaires pour établir le montant des commissions qui lui resteraient dues ; que la cour ordonnera à JSR de communiquer les documents comptables relatifs au secteur de la société Casual pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, en l'espèce le journal des ventes réalisées par la société JSR depuis le 1er janvier 2010 sur le secteur confié à la société Casual, les comptes clients de la société JSR depuis le 1er janvier 2010, relatifs aux clients du secteur de la société Casual, les tableaux récapitulatifs, et, plus généralement, tous documents détenus par la société JSR détaillant les produits livrés par référence / dénomination et les chiffres d'affaires ainsi réalisés depuis le 1er janvier 2010, sur le secteur confié à la société CASUAL, le tout certifié exact par le commissaire aux comptes de la société JSR et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de trois semaines à partir de la signification à la société JSR du présent arrêt ;
Que Casual sera déboutée du surplus de ses demandes ;
' Sur les demandes reconventionnelles de la société JSR
Considérant, sur la créance de la société JSR à l'encontre de la société Casual au titre de son activité de distribution, que Casual ne la conteste pas ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il condamné la société Casual Active à payer à la société JSR la somme de 14.820 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 avril 2014 sur 4.940 euros, du 31 mai 2014 sur 4.940 euros et du 30 juin 2014 sur 4.940 euros;
Que JSR, aux torts de laquelle le contrat a été résilié, doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts du fait de la rupture abusive du contrat d'agent ; que la décision déférée sera confirmée sur ce point ;
Considérant que l'équité commande de condamner JSR à payer à Casual la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS JSR au titre de l'arriéré de commissions, a condamné la SARL Casual Active au paiement des sommes restant dues à la SAS JSR, a ordonné la compensation judiciaire entre ces condamnations et a débouté la SARL Casual Active de sa demande de dommages et intérêts ;
Y ajoutant,
DECLARE recevable les demandes de la SARL Casual Active ;
INFIRME le jugement entrepris pour le surplus,
Statuant à nouveau,
DIT que la rupture du contrat d'agent commercial de la SARL Casual Active est imputable à la SAS JSR ;
CONDAMNE la SAS JSR à payer à la SARL Casual Active les sommes de :
- 209.590 euros à titre d'indemnité de fin de contrat ;
- 31.439 euros TTC à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
le tout avec intérêts aux taux légal à compter de l'acte introductif d'instance du 6 août 2014 et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
ORDONNE à la SAS JSR de communiquer les documents comptables relatifs au secteur de la SARL Casual Active pour les années 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014, en l'espèce le journal des ventes réalisées par la société JSR depuis le 1er janvier 2010 sur le secteur confié à la SARL Casual Active, les comptes clients de la société JSR depuis le 1er janvier 2010, relatifs aux clients du secteur de la SARL Casual Active, les tableaux récapitulatifs, et, plus généralement, tous documents détenus par la société JSR détaillant les produits livrés par référence / dénomination et les chiffres d'affaires ainsi réalisés depuis le 1er janvier 2010, sur le secteur confié à la SARL Casual Active, le tout certifié exact par le commissaire aux comptes de la SAS JSR, et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de trois semaines à partir de la signification à la SAS JSR du présent arrêt ;
DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;
CONDAMNE la SAS JSR à payer à la SARL Casual Active la somme de euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS JSR aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
La Greffière Le Président
Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU