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19/06/2018 | FRANCE | N°16/06134

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 19 juin 2018, 16/06134


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 19 Juin 2018

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/06134



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/06605





APPELANTE

Madame X... Y...

[...]

née le [...] à ORAN (ALGERIE) (84100)

représentée par Me Florence A..., avocat au bar

reau de PARIS







INTIMEE

SARL LA MAIN TENDUE

[...]

N° SIRET : 443 146 030

représentée par Me Virginie Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : C0207







COMPOSITION DE LA...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 19 Juin 2018

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/06134

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/06605

APPELANTE

Madame X... Y...

[...]

née le [...] à ORAN (ALGERIE) (84100)

représentée par Me Florence A..., avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

SARL LA MAIN TENDUE

[...]

N° SIRET : 443 146 030

représentée par Me Virginie Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : C0207

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mai 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Olivier MANSION, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Bruno BLANC, président

Soleine HUNTER FALCK, conseiller

Olivier MANSION, conseiller

Greffier : Monsieur Philippe ANDRIANASOLO, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bruno BLANC, Président et par Philippe ANDRIANASOLO, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Exposé du litige :

Mme Y... (la salariée) a été engagée le 19 novembre 2010 par contrat à durée indéterminée en qualité d'assistante de vie par la société La main tendue (l'employeur).

En 2015, elle a été désignée déléguée du personnel suppléante.

La demande de licenciement a été rejetée par l'inspection du travail et le ministère du travail.

Estimant que l'employeur aurait manqué à ses obligations, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes en résiliation judiciaire de son contrat de travail qui, par jugement du 22 mars 2016 a accueilli cette demande et a condamné l'employeur au paiement de diverses sommes.

La salariée a interjeté appel le 15 avril 2016.

Elle demande la confirmation du jugement sur la résiliation judiciaire mais l'infirmation sur les sommes allouées et réclame paiement de :

- 25 014,21 € de rappel de salaires pour la période du 1er janvier 2011 au 30 novembre 2014,

- 2 501,41 € de congés payés afférents,

- 2 979,10 € d'indemnité de préavis,

- 297,91 € de congés payés afférents,

subsidiairement, confirmation du jugement sur ces deux dernières sommes,

- 1 668,30 € d'indemnité de licenciement, subsidiairement 1 172,22 €,

- 14 000 € de dommages et intérêts pour 'licenciement nul',

- 44 686,50 € d'indemnité pour violation du statut protecteur, subsidiairement 31 398,90 € outre 3 139,89 €,

- la capitalisation des intérêts,

et réclame la délivrance des documents sociaux et des bulletins de paie rectifiés.

L'employeur conclut à l'infirmation du jugement et sollicite paiement de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties du 7 mai 2018.

MOTIFS :

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

Le salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en démontrant que l'employeur est à l'origine de manquements suffisamment graves dans l'exécution de ses obligations contractuelles de telle sorte que ces manquements ne permettent pas la poursuite du contrat de travail.

Si la résiliation est prononcée, elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En l'espèce, la salariée reproche à l'employeur l'absence de paiement des salaires contractuels prévus à hauteur de 130 heures par mois, le non-paiement de la prime de transport, des temps de déplacement, la violation des dispositions légales en matière de contrat de travail à temps partiel, ainsi qu'une modification unilatérale de son contrat de travail.

Ces griefs seront examinés successivement.

Sur le paiement des salaires, il convient de relever que le contrat de travail initial prévoyait 45 heures par mois, durée portée à 130 heures par avenant du 1er mars 2011 (pièce n°2).

Le contrat stipule que chaque mois, un détail des horaires journaliers sera communiqué avec précision du nom des bénéficiaires et la durée de chaque intervention.

Cette durée de temps de travail se retrouve sur la plupart des bulletins de paie produits (pièce n°4) même si certains font apparaître quelque fois des durées inférieures ou supérieures.

Par ailleurs, il n'est pas établi que la salariée ait travaillé à temps plein à compter de l'avenant précité alors que l'employeur verse au débat des plannings mensuels pour la période janvier 2014 à mars 2015 (pièces n°25, 40 et 88) conformément aux stipulations contractuelles.

Il en résulte que la demande de requalification de la durée de travail et du rappel de salaire en découlant doit être rejetée.

Sur les temps de déplacement, il convient de relever qu'il s'agit d'un temps de travail effectif comme le rappelle la convention collective applicable, soit la convention collective nationale des entreprises de services à la personne du 20 septembre 2012.

Il en va de même pour la période d'exécution du contrat de travail lors de la période antérieure à l'application de cette convention collective dans l'entreprise dès lors que ces déplacements ont pour but de se rendre d'un lieu de travail à un autre et que le salarié est à la disposition de l'employeur.

La convention collective ajoute, section 2, I, § f) que : 'Les temps entre deux interventions sont pris en compte comme suit :

-en cas d'interruption d'une durée inférieure à 15 minutes, le temps d'attente est payé comme du temps de travail effectif ;

-en cas d'interruption d'une durée supérieure à 15 minutes (hors trajet séparant deux lieux d'interventions), le salarié reprend sa liberté pouvant ainsi vaquer librement à des occupations personnelles sans consignes particulières de son employeur n'étant plus à sa disposition, le temps entre deux interventions n'est alors ni décompté comme du temps de travail effectif, ni rémunéré'.

Si l'employeur se plaint de l'absence de pointage de la part de la salariée pour évaluer son temps de travail, il lui appartenait de faire respecter le dispositif mis en place au sein de l'entreprise sans pouvoir se prévaloir de sa carence sur ce point. Par ailleurs, il n'est pas démontré que les temps de déplacement entre deux lieux d'intervention excédait 15 minutes, en excluant le temps de trajet qui devait être effectué.

Il en résulte que le manquement est avéré, dans la limite de la prescription, soit pour une demande formulée la première fois en avril 2018, à partir d'avril 2015 au regard du délai de prescription applicable et prévu à l'article L. 3245-1 du code du travail.

La demande se limitant à la période de janvier 2014 à mars 2015 (pièce n°47), elle est prescrite et ne peut entraîner condamnation à paiement.

Sur les primes de transport, il est justifié par l'employeur qu'elles ont été payées sous la dénomination 'pass Navigo' et selon deux méthodes comptables différentes avant et après décembre 2014.

Il est également soutenu que l'employeur aurait modifié le contrat de travail de façon unilatérale en confiant à la salariée des tâches purement ménagères alors qu'elle a été engagée comme assistante de vie.

Toutefois, la convention collective, annexe I, description des emplois repères, définit l'emploi d'assistante de vie selon trois niveaux, le premier décrivant les activités principales comme : accompagner une personne dans la réalisation des tâches quotidiennes, entretenir les espaces, effectuer les courses, effectuer des tâches administratives simples, préparer des repas simples.

La notion d'entretien des espaces se retrouve dans les niveaux 2 et 3 et implique nécessairement des tâches ménagères.

Le cantonnement à des tâches uniquement ménagères n'est nullement établi, la salariée se contentant de rapporter ses propres affirmations (pièces n°12 à 15, 18, 21, 23).

Par ailleurs, la décision de l'inspecteur du travail quant à la demande de licenciement de la salariée protégée porte essentiellement sur une accusation de vol.

Les lettres (pièces n°22 à 25) ne sont pas plus probantes sur le grief de modification du contrat de travail.

Il en résulte que le seul reproche fondé, à savoir le non-paiement du temps de déplacement, demande par ailleurs prescrite, n'est pas suffisamment grave pour justifier le résiliation judiciaire du contrat de travail en raison de son caractère ancien et limité et n'a pas empêché la poursuite du contrat de travail.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point et les demandes relatives au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour 'licenciement nul' seront rejetées.

Sur la violation alléguée du statut protecteur :

Sur ce point, la salariée ne procède à aucun développement spécifique dans ses conclusions sauf pour chiffrer sa demande.

Au regard des griefs invoqués au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail, la salariée fait état d'intimidations ayant nécessité l'intervention d'un syndicat (pièces n°14, 15 et 17).

Ces affirmations ne sont pas étayées et les lettres du syndicat se bornent à reprendre les déclarations de la salariée sans autre élément probant.

La demande sera donc rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

1°) Les demandes de capitalisation des intérêts et de remise de divers documents deviennent sans objet.

2°) Les demandes formées au visa de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

La salariée supportera les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :

- Infirme le jugement du 22 mars 2016, sauf en ce qu'il rejette la demande de Mme Y... en paiement d'une indemnité pour violation du statut protecteur lié au mandat de déléguée du personnel suppléante ;

Statuant à nouveau sur les autres chefs :

- Rejette les demandes de Mme Y... ;

Y ajoutant :

- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

- Condamne Mme Y... aux dépens de première instance et d'appel ;

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 16/06134
Date de la décision : 19/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°16/06134 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-19;16.06134 ?
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