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13/06/2018 | FRANCE | N°17/22509

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 13 juin 2018, 17/22509


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 3





ARRET DU 13 JUIN 2018





(n° 365, 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 17/22509





Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 Novembre 2017 - Président du TGI de PARIS - RG n° 17/57788





APPELANTE





LA VILLE DE PARIS prise en la personne de Mada

me le Maire de PARIS, Anne X...


[...]





Représentée et assistée par Me Bruno I... de la SELAS I... ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R079








INTIMEES





Madame Daniela Y...


[...]





R...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRET DU 13 JUIN 2018

(n° 365, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 17/22509

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 Novembre 2017 - Président du TGI de PARIS - RG n° 17/57788

APPELANTE

LA VILLE DE PARIS prise en la personne de Madame le Maire de PARIS, Anne X...

[...]

Représentée et assistée par Me Bruno I... de la SELAS I... ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R079

INTIMEES

Madame Daniela Y...

[...]

Représentée par Me Roland Z... de la SELARL GOZLAN Z... ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0310

Assistée par Me Valérie A... substituant Me Roland Z... de la SELARL GOZLAN Z... ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0310

SAS HOME SERVICES PARIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[...]

N° SIRET : 810 582 643

Représentée et assistée par Me B... C... de l'ASSOCIATION C... G..., avocat au barreau de PARIS, toque : R082

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Mai 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Mme Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre

M. Renaud SORIEUL, Président de chambre

Mme Christina DIAS DA SILVA, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par MmeChristina DIAS DA SILVA, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Aymeric PINTIAU

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Martine ROY-ZENATI, Première Présidente de chambre et par Véronique COUVET, Greffière.

Le 6 juin 2017, la Ville de Paris a assigné Mme Daniela Y... et la société Home Services Paris au visa des articles L. 631-7 et L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation aux fins notamment de faire injonction sous astreinte à ces dernières de produire l'historique des transactions recensant les locations effectuées et correspondant à l'appartement sis [...] et de prononcer l'amende civile prévue par l'article L651-2 du code précité.

Par ordonnance rendue en la forme des référés du 16 novembre 2017, le juge délégué par le président du tribunal de grande instance de Paris a :

- constaté le désistement de la Ville de Paris en sa demande tendant à obtenir le relevé locatif du bien litigieux ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité des contrats passés entre Mme Daniela Y... et la société Home Services Paris et entre celle- ci et M. Mohammed E... ;

- débouté la Ville de Paris de l'ensemble de ses demandes ;

- laissé à la Ville de Paris la charge des dépens ;

- rejeté les demandes formées au titre des frais irrépétibles ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 7 décembre 2017, la Ville de Paris a interjeté appel de cette ordonnance.

Par ses conclusions transmises le 9 avril 2018, elle demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance entreprise,

- débouter Mme Daniela Y... et la société Home Services Paris de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- dire et juger que Mme Daniela Y... a commis une infraction en souscrivant au profit de la société Home Services Paris un contrat permettant des locations de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile et en conséquence la condamner à une amende civile d'un montant de 25.000 euros,

et dire que le produit de cette amende sera intégralement versé à la Ville de Paris,

- dire et juger que la société Home Services Paris a commis une infraction en louant l'appartement situé [...] pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile et la condamner à une amende civile d'un montant de 25.000 euros et dire que le produit de cette amende sera intégralement versé à la Ville de Paris,

- condamner Mme Daniela Y... et la société Home Services Paris à payer chacun la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles en première instance et la même somme en appel ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers sous le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir :

- que Mme Daniela Y... a méconnu la portée de l'article L. 631-7 alinéa 2 et 3 du code de la construction et de l'habitation en permettant contractuellement à la société Home Services Paris d'user du bien en vue de la sous-location, à l'exclusion de l'usage d'habitation de sorte qu'elle perçoit des revenus identiques à ceux d'une location à usage d'habitation tout en s'abstenant d'en subir les obligations, ce qui justifie qu'elle soit condamnée à une amende civile de 25.000 euros ;

- que le moyen d'irrecevabilité soulevée par Mme Daniela Y... doit être rejeté dès lors que la Ville de Paris a changé le fondement juridique de sa demande conformément aux dispositions de l'article 565 du code de procédure civile ;

- que les moyens de défense selon lesquels le changement d'usage ne serait pas imputable à Mme Daniela Y... doivent être rejetés dès lors que :

- le contrat de bail permet à la société Home Services Paris de sous-louer le bien sans limitation de durée ou de personne de sorte que l'invocation d'une location destinée au logement d'un prétendu employé de cette société est inopérante,

- le manquement consiste dans le fait d'avoir consenti à ladite société un contrat lui permettant de contrevenir à la loi et de procéder à des locations de courte durée contrairement aux dispositions de l'article L. 631-7 alinéa 1 et 2 du code de la construction et de l'habitation ;

- que la demande de dommages et intérêts formulée par Mme Daniela Y... au titre d'un préjudice moral est infondée et doit être rejetée alors qu'elle reconnaît elle-même s'être montrée 'imprudente' ;

- que la société Home Services Paris doit se voir imputer les locations de courte durée constatées par l'agent assermenté de la Ville de Paris dès lors que :

- en raison du caractère spécial de l'interdiction posée par l'article L. 631-7 alinéa 6 du code de la construction et de l'habitation, la société Home Services Paris ne peut opposer l'autorisation qui lui a été donnée par le propriétaire bailleur puisque le texte ne distingue pas suivant la qualité de l'auteur des locations dites touristiques ni ne prévoit une quelconque exception opposable à la Ville de Paris d'autant plus qu'il est indiscutable que le bien a fait l'objet de manière habituelle et sans limite de locations de courte durée,

- l'existence d'une nullité de l'accord conclu en contravention avec l'usage du bien rend ledit contrat inopposable à la Ville de Paris,

- le contrat de bail est dépourvu de tout caractère probant et la société Home Services Paris est défaillante dans la démonstration que celui-ci aurait véritablement existé de sorte qu'il n'est pas possible de savoir si elle serait exclu du champ d'application de la loi en n'étant qu'un intermédiaire pour le compte et au profit de M. E... qui, en sa qualité de locataire du bien, aurait souscrit des contrats de location à courte durée,

- le contrat produit présente des contradictions puisqu'il prévoit une destination d'habitation personnelle mais est exclusif du champ d'application de la loi du 6 juillet 1989, il ne précise pas qu'il s'agit d'un logement de fonction, il crée une obligation interdisant la sous-location alors que la société Home Services Paris est l'intermédiaire pour assurer la mise en location du bien aux touristes ;

- que la cour doit infirmer l'ordonnance et condamner la société Home Services Paris à l'amende civile prévue par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation à hauteur de 25.000 euros dès lors que sa prétention selon laquelle M. E... aurait été locataire du bien litigieux ne repose sur aucun élément sérieux, que la régularité des opérations de contrôle n'est pas contestable et que sa demande de dommages et intérêts doit être rejetée car elle n'est ni fondée en fait, ni en droit.

Par ses conclusions transmises le 9 avril 2018, Mme Daniela Y... demande à la cour de :

- juger que la demande suivante « Mme Daniela Y... a commis une infraction en souscrivant au profit de la société Home Services Paris un contrat permettant des locations de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile et en conséquence la condamner à une amende d'un montant de 25.000 € », est nouvelle en appel et donc irrecevable,

A titre subsidiaire

- juger qu'il n'est pas démontré que l'appartement litigieux lui appartienne,

- juger qu'il n'est pas démontré son implication, par quelque moyen que ce soit, dans le prétendu changement d'usage de son appartement,

- juger qu'il n'est pas démontré que son appartement ait été soumis, le cas échéant, à une location de courte durée à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile, pour plus de 120 jours par an,

En conséquence

- confirmer l'ordonnance du 16 novembre 2017

- débouter la Ville de Paris de sa demande de condamnation à son encontre,

A titre plus subsidiaire

- juger que la demande de condamnation à son encontre à hauteur de 25.000 euros est purement injustifiée,

A titre reconventionnel

- condamner la Ville de Paris à réparer le préjudice moral subi en lui versant la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- prononcer à ce titre l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

En tout état de cause

- condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Elle fait valoir :

- que la demande de la Ville de Paris est irrecevable dès lors qu'il s'agit d'une demande nouvelle au titre de l'article 564 du code de procédure civile puisqu'elle ne tend pas à la même fin que celle présentée en première instance ;

- que la cour doit confirmer l'ordonnance et débouter la Ville de Paris de ses demandes dès lors que le changement d'usage ne lui est pas imputable puisqu'aucune mention dans le contrat de bail conclu avec la société Home Services Paris ne permet d'affirmer qu'elle aurait délibérément modifié l'usage de son bien en vue de permettre la location en meublé touristique de courtes durées à une clientèle de passage d'autant plus qu'elle n'y a retiré aucun avantage pécuniaire ;

- que la cour doit confirmer l'ordonnance en l'absence de changement d'usage par application des articles L. 324-1-1 du code du tourisme et L. 631-7 A du code de la construction et de l'habitation dès lors que :

- la Ville de Paris échoue à démontrer qu'elle aurait souscrit un contrat permettant à la société Home Services Paris de louer le bien à une clientèle de passage d'autant plus qu'il n'est pas établi qu'il s'agisse de son appartement ou que ce soit elle qui ait posté l'annonce ou mandaté une personne physique ou morale pour le faire,

- et que ni le locataire, ni le sous-locataire n'ont modifié l'usage du bien ;

- que la Ville de Paris est mal fondée à solliciter sa condamnation à une amende civile dès lors qu'elle n'a retiré aucun bénéfice du prétendu changement d'usage du bien, ce que reconnaît la Ville de Paris ;

- que la cour doit condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral eu égard à son acharnement illégitime alors qu'elle échoue à rapporter la preuve d'une modification illicite de l'usage du bien.

Par ses conclusions transmises le 13 mars 2018, la société Home Services Paris demande à la cour de :

- constater que le logement a été loué par M. E... moins de 120 jours,

- en conséquence,

- confirmer l'ordonnance entreprise,

- y ajoutant,

- juger que le constat établi le 8 juillet 2016 par la Mairie de Paris est nul du fait de l'absence de date et de signature permettant de produire un quelconque effet,

- condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- condamner la Ville de Paris à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que :

- que Mme Y... lui a donné à bail un studio meublé, la société Home Services Paris lui précisant qu'elle souhaitait y loger l'un de ses salariés de sorte que la sous-location a été autorisée pour ce faire ;

- le constat d'infraction établi par la Ville de Paris est entaché d'irrégularités puisque l'ordre de mission désignant Mme F... en qualité d'agent de contrôle n'est ni daté ni signé, ces manquements portant atteinte à la valeur probante qu'on lui attribue ;

- M. E..., son salarié, ne commet aucune infraction lorsqu'il donne son appartement en location quelques jours dans l'année ; qu'il peut se prévaloir des dispositions dérogatoires des articles L324-1-1 du code du tourisme et L 631-7-1 A du code de la construction et de l'habitation dès lors qu'il l'a sous-loué pour une durée n'excédant pas 120 jours dans l'année ;

- la Ville de Paris procède par affirmations pour tenter de justifier ses poursuites justifiant qu'il lui soit alloué une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Considérant qu'en vertu de l'article L 631-7 du code de la construction et de l'habitation, le changement d'usage des locaux destinés à l'habitation est soumis à autorisation préalable dans les communes de plus de 200 000 habitants et dans celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne ; que la loi ALUR n°2014-366 du 24 mars 2014 a ajouté un dernier alinéa à cet article selon lequel «Le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile constitue un changement d'usage au sens du présent article» ; que ces locations 'répétées' de courtes durées sont alors considérées comme destinées à un usage hôtelier et non plus à un usage d'habitation et qu'à défaut d'une autorisation municipale, l'amende prévue par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation est encourue ;

Que l'article L.651-2 du code de la construction et de l'habitation, modifié par la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, dispose que : 'Toute personne qui enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 euros par local irrégulièrement transformé.

Cette amende est prononcée par le président du tribunal de grande instance, statuant en la forme des référés, sur requête du maire de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l'Agence nationale de l'habitat et sur conclusions du procureur de la République, partie jointe avisée de la procédure. Le produit de l'amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé ce local.' ;

Considérant que la Ville de Paris soutient que Mme Y... a conclu un bail avec la société Home Services Paris en infraction avec l'article L 631-7 alinéa 2 et 3 du code précité permettant la modification de l'usage de son local pour réclamer sa condamnation à une amende civile de 25.000 euros ;

Que Mme Y... invoque l'irrecevabilité de cette demande au visa de l'article 564 du code de procédure civile qu'elle considère comme nouvelle en appel ; que ce moyen ne saurait prospérer dès lors qu'en première instance la Ville de Paris sollicitait déjà sa condamnation au paiement d'une amende sur le fondement de l'article L 631-7 du code de la construction et de l'habitation ; que le changement de fondement juridique de la demande ( dernier alinéa de l'article L 631-7 en première instance et les deux premiers alinéas du même article en appel ) ne rend pas la demande nouvelle ainsi que le prévoit l'article 565 du code de procédure civile ;

Considérant qu'il ressort du rapport d'enquête des services de la ville de Paris établi le 8 juillet 2016 que l'appartement situé [...] , propriété de Mme Y..., a été proposé à la location pour de courtes durées par le biais du site internet 'booking.com' et 'bedandbreakfast.eu' à compter du 10 juillet 2015 et qu'au 26 mai 2016 le site 'booking.com' contenait 33 commentaires le concernant ;

Considérant que la société Home Services Paris ne peut valablement soutenir que le constat établi le 8 juillet 2016 est nul du fait de son absence de date et de signature dès lors qu'ainsi que l'a indiqué à juste titre le premier juge, le code de la construction et de l'habitation ne prévoit pas la forme que doit prendre le constat dressé par l'agent assermenté et qu'en tout état de cause le constat querellé a été rédigé et signé par Mme F... laquelle bénéficiait d'un ordre de mission de la Ville de Paris ainsi qu'il ressort de la pièce 6 de l'appelante ;

Considérant que Mme Y... fait valoir que la Ville de Paris ne démontre pas qu'elle a commis l'infraction qui lui est reprochée consistant à avoir souscrit un contrat permettant la modification de l'usage du local dont elle est propriétaire ;

Qu'elle verse aux débats le contrat de bail en meublé consenti au profit de la société Home Services Paris le 1er juin 2015 pour une durée d'un an renouvelable ; que si ce contrat autorise la sous-location, il ne comporte aucune mention permettant d'établir qu'il a été consenti pour un usage autre que l'habitation ; que l'affirmation de la propriétaire selon laquelle elle a autorisé la sous-location afin que la société Home Services Paris puisse y loger l'un de ses salariés est confirmée par l'attestation sur l'honneur de M. E..., salarié de ladite société, qui déclare qu'il occupe le local litigieux à titre de résidence principale depuis le 1er juin 2015; que la Ville de Paris ne produit aucune pièce permettant de prouver, comme elle l'affirme, que Mme Y... a consenti à la société Home Services Paris un contrat lui permettant de contrevenir à la loi, le seul fait que les parties n'aient pas expressément indiqué dans le contrat de bail que le logement était destiné au salarié de la société Home Services Paris ne pouvant en aucun cas permettre d'en déduire une fraude à la loi ; que de la même façon l'absence de dépôt de garantie à l'entrée des lieux ne peut en soi constituer un élément permettant de remettre en cause la validité du contrat de bail, les parties étant libres de prévoir ou de ne pas prévoir une telle clause ; qu'il s'ensuit que l'appelante ne rapporte pas la preuve que Mme Y... a commis l'infraction de location de meublée touristique irrégulière dans un local d'habitation ;

Considérant que de son coté la société Home Services Paris produit le contrat de bail des locaux dont s'agit qu'elle a consenti le 1er juin 2015 à l'un de ses salariés M. Mohammed E... moyennant un loyer mensuel de 590 euros, charges comprises, le locataire s'obligeant à occuper seul et à ne pas céder ni sous-louer les locaux loués, celui-ci ayant par ailleurs déclaré sur l'honneur que ces locaux constituent sa résidence principale ; qu'elle produit encore les bulletins de salaire de M. E..., de sorte que la ville de Paris ne peut valablement soutenir que la preuve d'une véritable relation de travail entre les deux susnommés n'est pas établie ;

Considérant qu'il se déduit de ces éléments que l'appartement situé [...] constitue la résidence principale de M. E... ; que la Ville de Paris ne produit aucune pièce permettant d'établir que le bien a été soumis à la location de courte durée pendant plus de 120 jours par an, les 33 commentaires publiés sur le site 'booking.com' ne pouvant à eux seuls rapporter cette preuve ; que c'est dès lors à bon droit que le premier juge a considéré que l'infraction poursuivie n'était pas établie ni à l'encontre de Mme Y... ni à celle de la société Home Services Paris et qu'elle a débouté la Ville de Paris de toutes ses prétentions, l'ordonnance étant confirmée en toutes ses dispositions ;

Considérant qu'à titre reconventionnel Mme Y... réclame la condamnation de la Ville de Paris à lui verser la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral lié à l'acharnement illégitime de la ville de Paris à exercer des poursuites à son encontre ; que la société Home Services Paris sollicite quant à elle la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice subi compte tenu de la persistance de la Ville de Paris dans son action ;

Considérant que l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une telle action constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner lieu à l'octroi de dommages-intérêts que lorsqu'est caractérisée une faute en lien de causalité directe avec un préjudice ; qu'en l'espèce, un tel comportement de la part de l'appelante n'est pas caractérisé ; que les demandes reconventionnelles de Mme Y... et de la société Home Services Parsi doivent dès lors être rejetées;

Considérant que le sort des dépens et de l'indemnité de procédure a été exactement réglé par le premier juge ;

Qu'à hauteur de cour, il convient d'accorder à chacun des intimés, contraints d'exposer de nouveaux frais pour se défendre, une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que la Ville de Paris, partie perdante, doit supporter les dépens de l'instance d'appel et ne saurait bénéficier d'une somme au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à référé s'agissant des demandes reconventionnelles de Mme Daniela Y... et de la société Home Services Paris ;

Condamne la Ville de Paris à payer à Mme Daniela Y... la somme de 1.000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Ville de Paris à payer à la société Home Services Paris la somme de 1.000 euros au titre des dispositions prévues par l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande de la Ville de Paris au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la Ville de Paris aux dépens d'appel.

la Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 17/22509
Date de la décision : 13/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris A3, arrêt n°17/22509 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-13;17.22509 ?
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