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08/06/2018 | FRANCE | N°15/09804

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 08 juin 2018, 15/09804


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 08 Juin 2018



(n° , 2 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09804



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Septembre 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 13-01168



APPELANTES

Madame Maria X... G... Y... veuve Z...

Née le [...] à PADRENDA (ESPAGNE)

[...]

représentée par Me

Hélène A..., avocat au barreau de PARIS, toque : A476



Madame Cynthia Catharina Z...

Née le [...] [...]

22 Rue du Pont Louis Philippe

[...]

comparante en personne, assistée de Me Hé...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 08 Juin 2018

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/09804

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Septembre 2015 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 13-01168

APPELANTES

Madame Maria X... G... Y... veuve Z...

Née le [...] à PADRENDA (ESPAGNE)

[...]

représentée par Me Hélène A..., avocat au barreau de PARIS, toque : A476

Madame Cynthia Catharina Z...

Née le [...] [...]

22 Rue du Pont Louis Philippe

[...]

comparante en personne, assistée de Me Hélène A..., avocat au barreau de PARIS, toque : A476

Madame Lucie Maria B...

Née le [...] [...]

22 Rue du Pont Louis Philippe

[...]

représentée par Me Hélène A..., avocat au barreau de PARIS, toque : A476

INTIMEES

Me C... I... - Mandataire ad'hoc de SARL L'EUROPEENNE D'INTERIM

[...]

non comparant

SA ENTREPRISE GENERALE LEON GROSSE

[...]

représentée par Me Brigitte D..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0372 substituée par Me Laurence E..., avocat au barreau de PARIS, toque : D0424

CPAM [...] Couturier

SERVICE CONTENTIEUX

[...]

représentée par Me Amy F..., avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[...]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre

Mme Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseillère

Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Conseillère

Greffier : Mme Fatoumata BA, lors des débats

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Elisabeth LAPASSET-SEITHER, Présidente de chambre et par Mme Typhaine RIQUET, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par Mme Lucie B...,

Mme Cynthia Z... et Mme Maria G... Y..., à l'encontre d'un jugement rendu le 10 septembre 2015 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à la société Léon Grosse et à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS

M. Fernando Z..., salarié de la société de travail temporaire l'Européenne d'Interim, a par contrat du 1er novembre 1999 été mis à la disposition de la société Léon Grosse en qualité de boiseur pour la période du 1er novembre 1999 au 31 décembre 1999.

Le 15 décembre 1999, il a été victime d'un accident mortel sur le chantier: un moule de coffrage de poutre de 5 tonnes, soulevé par une grue au dessus de l'endroit où il travaillait, a heurté une poutre et s'est écrasé sur lui, entraînant son décès.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis, après enquête, a reconnu le 31 mars 2000 le caractère professionnel de l'accident.

L'inspection du travail a établi un procès-verbal d'infraction transmis au procureur de la République qui a prononcé un classement sans suite le 4 octobre 2000. Une plainte avec constitution de partie civile a été déposée le 11 décembre 2002 par les parents de la victime et un juge d'instruction de Nanterre a été désigné le 9 janvier 2003. La chambre de l'instruction de Versailles a infirmé le 5 juillet 2012 l'ordonnance de non lieu et renvoyé la société et son conducteur de travaux, M. H..., devant le tribunal correctionnel de Nanterre. Celui-ci dans un jugement du 8 juillet 2013 a relaxé la société et le salarié, et a accordé à la soeur de M. Z... la somme de 7000€ sur le fondement de l'article 1384 du code civil.

La société Européenne d'Interim a fait l'objet d'une liquidation judiciaire et le 26 mai 2008 a été prononcée la clôture de la procédure pour insuffisance d'actifs.

Le 14 juin 2013, Mme Maria G... Y..., mère de la victime, Mme Cynthia Z..., sa fille et Mme Lucie B..., sa concubine (ci après les consorts Z...) ont saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Léon Grosse le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny, qui, dans un jugement en date du

10 septembre 2015, a constaté la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable et débouté la société Léon Grosse de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme Y..., Mme Z... et Mme B... ont fait appel de cette décision et ont fait soutenir oralement à l'audience par leur avocat des conclusions écrites dans lesquelles elles demandent à la Cour d'infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau de :

- déclarer leur action non prescrite et recevable,

- dire que l'accident de travail mortel de Z... du 15 décembre 1999 résulte de la faute inexcusable de la société Léon Grosse et de fixer au maximum la majoration des rentes,

- ordonner le versement aux héritiers de M. Z... de l'indemnité forfaitaire du salaire minimum légal annuel au moment des faits, soit 19.655,40€, ainsi que de la somme de 50.000€ au titre des souffrances et de la somme de 50.000€ au titre du préjudice d'agrément.

- fixer le préjudice moral de sa fille Mme Cynthia Z... et de sa concubine, Mme B..., à la somme de 60.000€ chacune et celui de sa mère, Mme Y..., à 50.000€.

- dire que ces sommes seront versées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis

- condamner la société Léon Grosse à leur payer la somme de 3.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis a fait soutenir oralement à l'audience par son avocat des conclusions écrites dans lesquelles elle demande à la Cour de statuer ce que de droit sur la forclusion et la reconnaissance de la faute inexcusable, mais au cas où celle-ci serait reconnue de débouter les consorts Z... de leurs demandes formées au titre de l'action successorale et de ramener les autres demandes à de plus justes proportions.

Maître C..., mandataire ad hoc de la société l'Européenne d'intérim, n'était ni présente ni représentée.

La société Léon Grosse a fait soutenir oralement à l'audience par son avocat des conclusions écrites dans lesquelles elle demande à la Cour :

- à titre principal de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a constaté la forclusion de l'action des consorts Z...,

- à titre subsidiaire, si l'action était déclarée recevable, de dire que seule la société Européenne d'Interim, employeur, peut être tenue responsable de la faute inexcusable et de débouter de toute demande de condamnation formulée contre la société Léon Grosse,

- à titre très subsidiaire, de constater que la Société Léon Grosse n'a commis aucune faute inexcusable,

- à titre infiniment subsidiaire, si la faute inexcusable était reconnue:

. de débouter Mmes B... et Y... de leur demande de majoration de rente puisqu'elles n'en reçoivent pas,

. de débouter Mme Z... de sa demande de majoration de rente puisqu'elle ne justifie pas de la poursuite des études et de perception de la rente jusqu'à ses 20 ans,

. de débouter Mme Z... de ses demandes formulées au titre de l'action successorale,

. de débouter les consorts Z... de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

- Sur la recevabilité de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable

Les consorts Z... font valoir qu'aux termes de l'article 38 de la loi du 19 décembre 1991 sur l'aide juridique, l'action en justice qui doit avoir été intentée avant l'expiration d'un délai est réputée avoir été intentée dans ce délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant a été adressée avant l'expiration du dit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter de la notification d'admission provisoire.

Il est soutenu qu'en l'espèce, la demande d'aide juridictionnelle a été faite par les parents de la victime avant l'expiration du délai de deux ans pour la reconnaissance de la faute inexcusable, et que l'action pénale a été intentée dans les deux ans qui ont suivi l'admission à l'aide juridictionnelle; qu'ainsi l'action pénale est réputée avoir été introduite à la date du dépôt de la demande d'aide juridictionnelle et a interrompu la prescription; que cette interruption s'est poursuivie jusqu'à l'arrêt du tribunal correctionnel de Nanterre et que l'action devant le tribunal des affaires de sécurité sociale est réputée avoir été intentée dans les délais sans que la forclusion puisse être invoquée.

La société Léon Grosse fait valoir que seule l'action pénale peut interrompre la prescription, qu'elle n'est intentée que par un acte de poursuite du procureur de la République ou par une plainte avec constitution de partie civile, que la plainte avec constitution de partie civile des parents de la victime a été déposée plus de deux ans après la reconnaissance par la caisse du caractère professionnel de l'accident et que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable intentée 7 ans après est donc prescrite.

Elle soutient que la demande d'aide juridictionnelle déposée pour l'exercice d'une action pénale ne peut avoir pour effet que d'interrompre le délai de forclusion pour l'action pour laquelle elle est demandée ; qu'ainsi il n'y a pas eu d'interruption du délai de prescription biennale et que l'action était irrecevable.

Subsidiairement, elle fait valoir que seuls les parents de M. Z... avaient déposé une plainte avec constitution de partie civile et qu'ils pourraient seuls bénéficier, si elle était reconnue, de l'interruption de la prescription.

Aux termes l'article L.431-2 du code de la sécurité sociale, les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le code de la sécurité sociale se prescrivent par deux ans à compter du jour de l'accident ou de la clôture de l'enquête ou de la cessation du paiement des indemnités journalières. En cas de décès, la prescription court à compter de la fin de l'enquête obligatoire de la caisse et de la notification de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident.

Le dernier aliéna de l'article L431-2 précise que le délai de prescription est interrompu par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits.

En l'espèce, il est établi que la caisse ayant notifié, après enquête, la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident le 31 mars 2000, l'action en reconnaissance de la faute inexcusable devait être intentée avant le 31 mars 2002.

L'action en reconnaissance de la faute inexcusable ayant été intentée seulement le 14 juin 2013, soit plusieurs années après ce délai, il y a donc lieu de rechercher si la prescription a été interrompue avant le 31 mars 2002 par l'exercice d'une action pénale, c'est à dire soit par un acte de poursuite du procureur soit par une constitution de partie civile.

Une plainte avec constitution de partie civile a été déposée le 11 décembre 2002 par Mme Y... et son époux M. Z..., parents de la victime, après qu'ils aient obtenu le

2 mai 2002 l'aide juridictionnelle, demandée le 4 février 2002.

L'article 38 de la loi du décret du 19 décembre 1991 sur l'aide juridique, dans sa version applicable entre le 15 juin 2001 et le 28 juillet 2007, dispose que 'lorsqu'une action en justice doit être intentée avant l'expiration d'un délai devant la juridiction du premier degré, l'action est réputée avoir été intentée dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration du dit délai et si la demande en justice est introduite dans un nouveau délai de même durée à compter de la notification de la décision d'admission provisoire'.

L' article 38 de la loi du décret du 19 décembre 1991 n'a pas lieu de s'appliquer en outre lorsque l'action pour laquelle l'aide juridictionnelle était demandée a été intentée dans les délais, ce qui est le cas en l'espèce. L'accident de Z... a eu lieu le 15 décembre 1999 et la plainte avec constitution de partie civile a été déposée le 11 décembre 2002, soit dans le délai de prescription de l'action pénale de trois ans. L'action pénale, qui a été déclenchée dans le délai de 3 ans, n'est pas supposée avoir été intentée à la date de dépôt de la demande d'aide juridictionnelle. C'est donc la seule date du 11 décembre 2002 qui doit être retenue comme point de départ de l' action pénale.

A cette date, le délai de forclusion était expiré et l'action intentée par les consorts Z... le 14 juin 2013 était prescrite ; le jugement déféré doit être confirmé.

Compte tenu des circonstances, les consorts Z... seront dispensés du droit d'appel

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare l'appel recevable mais non fondé,

Confirme le jugement déféré,

Dispense Mme Maria G... Y..., Mme Cynthia Z... et Mme Lucie B... du paiement du droit d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 15/09804
Date de la décision : 08/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L4, arrêt n°15/09804 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-08;15.09804 ?
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