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06/06/2018 | FRANCE | N°17/05069

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 06 juin 2018, 17/05069


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS


Pôle 6 - Chambre 10





ARRÊT DU 06 Juin 2018





(n° , 04 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/05069





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/18019





APPELANTE


Madame Alix X... épouse Y...


[...]


née le [...] à VER

SAILLES (78000)


comparante en personne,


assistée de Me Florence G..., avocat au barreau de PARIS, toque : E2034 substitué par Me Alexandre Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : E2034





INTIMEE


COMMERZBANK A...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 06 Juin 2018

(n° , 04 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/05069

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Décembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/18019

APPELANTE

Madame Alix X... épouse Y...

[...]

née le [...] à VERSAILLES (78000)

comparante en personne,

assistée de Me Florence G..., avocat au barreau de PARIS, toque : E2034 substitué par Me Alexandre Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : E2034

INTIMEE

COMMERZBANK AKTIENGESELLSCHAFT - Liquidateur du GIE DRESDNER KLEINWORT FRANCE

[...]

[...]

représentée par Me Eric A..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0438 substitué par Me Nathalie B..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0438

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Antoinette C..., Présidente et Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette C..., Présidente

Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente

Madame Florence D..., vice président placé faisant fonction de conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 14 décembre 2017

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Valérie LETOURNEUR, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinette C..., Présidente, président de chambre et par Madame Valérie LETOURNEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE'

Madame Y... a été engagée par le GIE Dresdner Kleinwort France suivant un contrat de travail du 2 juin 2004, à effet à compter du 21 juin 2004, en qualité de «'vendeur crédit sales'» avec le titre de vice président, statut cadre, niveau HC selon la convention collective applicable.

Selon le contrat de travail, la rémunération est composée d'une rémunération fixe à laquelle s'ajoute un bonus discrétionnaire dont le montant est déterminé chaque année par la direction de la société au vu des résultats de celle-ci, du groupe Dresdner en général et en fonction de la contribution personnelle de la salariée à sa bonne marche.

Une voiture de fonction lui a aussi été attribuée.

À compter du 1er mars 2007, elle a été promue au rang de «'director'» de la convention collective de la banque et à compter du 1er octobre 2007, ses fonctions ont été «'responsable vente crédit'».

La société Commerzbank Aktiengesellschaft a acquis la banque Dresdner, le 12 janvier 2009.

À la suite du rachat, un plan de licenciement collectif pour motif économique basé sur la nécessaire réorganisation de l'entreprise a été mis en 'uvre. Madame Y... a fait l'objet d'un licenciement pour motif économique notifié par lettre du 5 novembre 2009.

Estimant ne pas avoir été remplie de ses droits salariaux pour l'année 2008, Madame Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris en paiement des rappels de bonus pour 2008,

Par jugement du 8 décembre 2014, le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement a débouté Madame Y... de l'intégralité de ses prétentions.

Appelante de ce jugement Madame Y... demande à la cour de l'infirmer, statuant à nouveau de condamner la société Commerzbank Aktiengesellschaft, liquidateur du groupement d'intérêt économique Dresdner Kleinwort France, en qualité de liquidateur amiable du GIE Dresdner à lui verser les sommes suivantes :

- 202 500 € au titre du rappel de bonus 2008,

- 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle demande que les sommes allouées portent intérêts au taux légal tel que mentionné par l'article L. 313-2 du code monétaire et financier et ce, avec capitalisation.

La société Commerzbank Aktiengesellschaft, liquidateur du groupement d'intérêt économique Dresdner Kleinwort France, conclut à la confirmation du jugement déféré, s'oppose aux prétentions formulées par la salariée, réclame à son tour 5000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. À titre subsidiaire, elle prétend que le taux d'intérêt applicable serait le taux d'intérêt des créanciers agissant pour des besoins professionnels.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.

MOTIFS

Sur le rappel de bonus pour l'année 2008'

Madame Y... a perçu, en février 2009 pour l'exercice 2008, un bonus d'un montant de 22 500 euros correspondant à 10 % de la somme à laquelle l'employeur l'avait déclarée éligible aux termes d'une lettre du 19 décembre 2008.

Elle estime que l'employeur est redevable de la part non réglée, soit de la somme de 202 500 euros.

Elle invoque l'engagement unilatéral pris par lui le 18 août 2008 de verser aux salariés un bonus global de 400 millions d'euros, considère que la société devait donc verser l'intégralité de cette enveloppe, les montants à revenir à chaque salarié étant déterminés par le manager en fonction de la contribution individuelle de chacun.

Elle explique qu' en tenant compte de ce dernier élément, elle pouvait prétendre à l'allocation d'un bonus de 225 000 euros correspondant au montant du bonus provisoire tel qu'il lui a été notifié le 19 décembre 2008, que la condition de révision dite MAC ne lui est pas opposable en ce qu'elle caractérise une modification de l'engagement unilatéral.

Pour s'opposer à cette demande, l'employeur soutient que les parties étaient convenues, aux termes du contrat de travail, du versement d'un bonus discrétionnaire, suivant le régime des gratifications bénévoles et ne présentant pas le caractère d'un élément obligatoire de rémunération.

Il conteste l'existence d'un engagement unilatéral pris lors de la réunion du 18 août 2008 relative au «'bonuspool'», M. E... s'étant limité à faire une annonce générale destinée à l'ensemble des salariés du groupe à travers le monde, toutes activités confondues, énonçant à titre indicatif un montant global et non individualisé de l'enveloppe et, en toute hypothèse, non susceptible de créer un droit individuel à un certain montant de bonus pour les salariés.

Il dénie également au courriel de M. F... en date du 20 octobre 2008 la valeur d'un engagement unilatéral dès lors que ce courriel était une fois encore adressé à l'ensemble des salariés, qu'il ne mentionnait aucun montant. Il ajoute que Monsieur F... rappelait au contraire que les montants des bonus continuaient à être discrétionnaires et seraient déterminés par le management concerné.

Enfin, selon l'employeur, la lettre du 19 décembre 2008 ne comportait pas un engagement à verser à Madame Y... un bonus ferme et définitif de 225'000 € dès lors qu'il est au contraire fait mention que son bonus discrétionnaire était provisoirement fixé à hauteur de 225'000 €, que ce bonus provisoire pourrait être réexaminé dans l'hypothèse où des écarts supplémentaires importants dans le chiffre d'affaires et les bénéfices de Dresdner par rapport aux prévisions pour les mois de novembre et décembre 2008 seraient relevés au cours de la préparation des états financiers annuels pour 2008. Il était encore précisé que «' la société se réserve le droit de réexaminer ce bonus provisoire et, si nécessaire, d'en diminuer le montant[...] un état détaillé confirmant l'octroi de votre bonus définitif en devise locale vous sera adressé en février 2009. Il vous sera versé en paye en février 2009'»

Il fait valoir que le principe selon lequel la condition dont un engagement unilatéral est assorti doit être précise et objective pour être valable n'a pas vocation à s'appliquer dans le cas d'espèce.

En tant que de besoin, l'employeur expose que la juridiction française ne peut se fonder sur les motifs d'un arrêt rendu par une juridiction britannique concernant d'autres salariés du groupe et fait observer qu'une juridiction allemande a tranché dans un sens exactement opposé pour des salariés basés en Allemagne.

D'après le contrat de travail communiqué, Madame Y... pouvait prétendre à une rémunération fixe, et au «'bénéfice d'un bonus discrétionnaire dont le montant sera déterminé chaque année par la direction de la société au vu des résultats de la société, du groupe Dresdner en général et en fonction de votre contribution personnelle à cette bonne marche'».

Le fait que M. E... ait, le 18 août 2008, annoncé qu'une enveloppe de 400 millions d'euros serait affectée au paiement des bonus pour l'exercice 2008, sans aucune condition relative aux performances à venir de la société jusqu'à la fin de l'exercice, est établi par le constat opéré par la juridiction britannique.

Au demeurant, l'employeur ne conteste pas cette annonce.

Aux termes d'un courriel du 20 octobre 2008 rédigé par Monsieur F..., le responsable mondial des ressources humaines et diffusé à l'ensemble des personnels, il est fait directement mention de cette annonce dans les termes suivants': «' l'enveloppe des bonus pour le front office a déjà été communiquée par Stephan E... dans ses communications régulières. L'enveloppe des bonus pour les fonctions sera comparable à celle de l'an dernier avec les ajustements dus au changement du nombre d'employés. Les montants individuels de bonus continueront à être discrétionnaires et déterminés par les managers responsables et le montant octroyé l'an dernier ne doit pas être considéré comme une indication du niveau de bonus pour 2008. Les bonus communiqués le 19 décembre 2008 seront payés en totalité avec les salaires de janvier lors de la paie de janvier'[...]».

Il est également patent que le 4 décembre 2008, le conseil d'administration de DBAG a décidé «'de laisser inchangé le volume du pool de bonus tel qu'il avait été déterminé le 12 août 2008'». Toutefois, ce conseil d'administration a ajouté que «'cette résolution est soumise à la condition qu'une clause soit insérée dans la lettre de bonus indiquant que le paiement de la prime sera ajusté si des écarts négatifs substantiels du chiffre d'affaires de DKIB et du bénéfice par rapport aux prévisions existantes pour les mois de novembre à décembre 2008 sont établis lors de la préparation annuelle des états financiers pour 2008.[...] le conseil délègue la décision sur chaque ajustement du pool de bonus qui pourrait être nécessaire à la suite de cet examen à Monsieur [...].'»

Par une lettre du 19 décembre 2008, l'employeur a notifié à Madame Y... le montant du bonus à lui revenir dans ces termes':«'le bonus discrétionnaire pour 2008 [vous] a été provisoirement attribué selon les termes suivants':155'000 € bruts'»

Il a ensuite été précisé que «'le bonus provisoire susvisé [était]susceptible de faire l'objet d'une révision dans l'hypothèse où le chiffre d'affaires et les bénéfices de Dresdner feraient apparaître des écarts substantiels supplémentaires par rapport aux prévisions[...]'».

Or, cette annonce de l'affectation d''une somme globale de 400 millions d'euros à l'ensemble des salariés de toutes les entités du groupe dans le monde entier, ne vaut pas engagement unilatéral dont pourrait se prévaloir directement chaque salarié à défaut pour l'employeur d'avoir à cette occasion fixé les conditions permettant de déterminer le bonus à lui revenir suivant un critère objectif bien défini.

Madame Y... ne peut donc s'en prévaloir pour obtenir le paiement d'un solde de bonus à hauteur de 202 500 euros.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Madame Y... de l'ensemble de ses prétentions financières.

Sur les demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile'

L'équité commande de débouter les parties de leurs prétention à cet égard.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement déféré toutes ses dispositions,

Déboute les parties de leurs demandes,

Condamne Madame Y... aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/05069
Date de la décision : 06/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°17/05069 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-06;17.05069 ?
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