La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2018 | FRANCE | N°15/02805

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 06 juin 2018, 15/02805


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRÊT DU 06 Juin 2018

(n° , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/02805





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Février 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/11559





APPELANT



Monsieur Jean-Pierre X...

[...]

né le [...] à Lyon (69000)

comparant en personne, assisté de M

e Alexandre Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : B440



INTIMEE



SA ALTRAN TECHNOLOGIES

[...]

N° SIRET : 702 012 956

représentée par Me Pierre-Randolph Z..., avocat au barreau de PAR...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRÊT DU 06 Juin 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/02805

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Février 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F13/11559

APPELANT

Monsieur Jean-Pierre X...

[...]

né le [...] à Lyon (69000)

comparant en personne, assisté de Me Alexandre Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : B440

INTIMEE

SA ALTRAN TECHNOLOGIES

[...]

N° SIRET : 702 012 956

représentée par Me Pierre-Randolph Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : C1355

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mars 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Laure TOUTENU, Vice-président placé, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine SOMMÉ, président

Monsieur Benoit HOLLEAUX, conseiller

Madame Laure TOUTENU, vice-président placé

Greffier : Mme Caroline GAUTIER, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- Mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- Signé par Madame Catherine SOMMÉ, présidente, et par Madame Laurie TEIGELL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

M. Jean-Pierre X... a été engagé par la société SA Altran Technologies suivant contrat à durée indéterminée à compter du 22 septembre 2008 en qualité de consultant confirmé, avec le statut de cadre, position 2.2, coefficient 130, moyennant une rémunération annuelle brute de 35 400 €. La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseils, dite Syntec.

Par lettre du 30 juillet 2013, M. X... a demandé à faire valoir ses droits à la retraite avec effet au 30 septembre 2013.

Revendiquant notamment une classification conventionnelle supérieure à celle qui lui avait été attribuée, le 23 juillet 2013, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris de demandes de rappel de salaires, de rappel d'indemnité de départ à la retraite et de contrepartie à la clause de non-concurrence.

Par jugement du 24 février 2015 notifié le 19 mars 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a:

- condamné la société Altran Technologies à payer à M. X... les sommes suivantes :

16 497 € à titre de contrepartie de la clause de non concurrence

1 649 € au titre des congés payés afférents

avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation

500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- débouté M. X... du surplus de ses demandes

- débouté la société Altran Technologies de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné la société Altran Technologies aux dépens.

M. X... a interjeté appel de cette décision le 11 mars 2015.

Aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement le 19 mars 2018, M. X... demande à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il lui a alloué une indemnité de non concurrence, les congés payés afférents et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, d'infirmer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau, de :

* à titre principal :

- dire qu'il relevait de la position conventionnelle 3.1 coefficient 170 à compter de son embauche et condamner la société Altran Technologies à lui payer les sommes suivantes:

235 847,50 € à titre de rappel de salaire sur le principe 'à travail égal, salaire égal' ou 47 698,41 € relativement au minimum conventionnel majoré de 115% à titre subsidiaire

23 584,75 € au titre des congés payés afférents ou 4 769,84 € à titre subsidiaire

3 945 € à titre de rappel d'indemnité de départ en retraite, ou 880,42 € à titre subsidiaire

37 800 € à titre de contrepartie de clause de non concurrence, ou 21 251,24 € à titre subsidiaire

3 780 € au titre des congés payés afférents ou 2 125,12 € à titre subsidiaire

* subsidiairement :

- dire qu'il relevait de la position conventionnelle 2.3 coefficient 150 à compter de son embauche et condamner la société Altran Technologies à lui payer les sommes suivantes:

137 566,94 € à titre de rappel de salaire sur le principe 'à travail égal, salaire égal' ou 20 940,36 € relativement au minimum conventionnel majoré de 115% à titre subsidiaire

13 756,69 € au titre des congés payés afférents ou 2 094,04 € à titre subsidiaire

2 197,66 € à titre de rappel d'indemnité de départ en retraite, ou 431,23 € à titre subsidiaire

28 364,36 € à titre de contrepartie de clause de non concurrence, ou 18 825,64 € à titre subsidiaire

2 836,43 € au titre des congés payés afférents ou 1 882,56 € à titre subsidiaire

* plus subsidiairement :

- condamner la société Altran Technologies à lui payer les sommes suivantes :

93 943,98 € à titre de rappel de salaires sur le principe 'à travail égal, salaire égal'

9 394,40 € au titre des congés payés afférents

1 528,33 € à titre de rappel d'indemnité de départ en retraite

24 749,98 € à titre de contrepartie de clause de non concurrence ou 16 497€ à titre subsidiaire

2 475€ au titre des congés payés afférents, ou 1 649,7€ à titre subsidiaire

* en tout état de cause :

- condamner la société Altran Technologies à lui payer les sommes suivantes:

10 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- dire que les sommes produiront intérêts au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes

- ordonner la remise des bulletins de paie, attestation Pôle emploi, certificat de travail et solde de tout compte conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par document et par jour de retard à compter d'un mois suivant la notification de l'arrêt, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte

- condamner la société intimée aux dépens.

La société Altran Technologies reprend les termes de ses conclusions visées par le greffier et demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes relatives au repositionnement conventionnel, à une inégalité de rémunération, et en ce qu'il l'a débouté du surplus de ses demandes, sa condamnation à lui verser une indemnité de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre la charge des dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la classification conventionnelle

M. X... soutient que son diplôme d'ingénierie de 2002 est un diplôme universitaire en ingénierie informatique et réseaux obtenu en cours de carrière qui concrétise la reconnaissance de son expérience professionnelle et d'une équivalence de niveau, et que l'employeur a d'ailleurs reconnu son niveau dans un dossier déposé auprès des services de l'Etat lors de son embauche. Il fait valoir que la convention collective prend également en compte son ancienneté acquise dans ses fonctions, et qu'il a travaillé pendant 7 ans chez GFI en qualité d'analyste, avec le statut de cadre puis pendant 10 mois chez Randstad en qualité de chef de projet, qu'il avait donc déjà plus de six ans de pratique en tant que cadre ce qui devait lui permettre d'être placé d'office en position 2.3, coefficient 150 dès son embauche en application des dispositions conventionnelles et du référentiel interne de l'entreprise. Le salarié conclut qu'il a accompli des missions d'assistance à maîtrise d'ouvrage pour le client Cedicam, comprenant de la négociation commerciale, de l'accompagnement au changement et de la formation, de la prestation complémentaire sur interface et de la prestation complémentaire pour assistance à maîtrise d'ouvrage. Il précise qu'il a mené seul cette mission chez le client et que ce dernier a renouvelé la mission. Il ajoute avoir travaillé à la mise en place d'outil de pilotage chez Orange, à l'audit de projets chez Nokia, à la mise en place d'un processus de recette chez Brossette. Il déclare avoir réalisé deux fiches méthodologiques pour Altran. Il indique avoir été placé sous le régime d'une convention de forfait hebdomadaire en heures, avec plafond annuel en jours, ce qui souligne l'autonomie dont il disposait.

M. X... se prévaut des mêmes fonctions qu'une salariée consultant senior Mme A... qui exerçait en tant que chef de projet, assistant à maîtrise d'ouvrage. Il conclut qu'il était placé sous les ordres d'un directeur opérationnel, qu'il exerçait des fonctions dans lesquelles il mettait en oeuvre des connaissances sanctionnées par des diplômes ainsi que des connaissances pratiques résultant de son expérience professionnelle de 38 ans de carrière, qu'il avait plus de six ans de pratique en qualité d'assistant à maîtrise d'ouvrage, qu'il était en pleine possession de son métier, qu'il assumait la responsabilité des projets et faisait preuve d'autonomie pour les mener à bien dans les délais, enfin qu'il encadrait du personnel.

M. X... affirme qu'il remplit les critères prévus par la convention collective applicable pour prétendre au statut de cadre, position 3.1, coefficient 170. Subsidiairement, il se prévaut de la classification de cadre, position 2.3, coefficient 150.

La qualification d'un salarié s'apprécie au regard des fonctions qu'il exerce effectivement et selon les critères fixés par la convention applicable.

Il appartient au salarié qui revendique une classification supérieure à celle qui lui est attribuée de rapporter la preuve qu'il remplit les conditions prévues par la convention collective applicable.

La classification attribuée à M. X... par la société Altran Technologies pendant la relation contractuelle était celle de cadre position 2.2, coefficient 130.

L'annexe II classification des ingénieurs et cadres du 15 décembre 1987 de la convention

collective Syntec prévoit, s'agissant des positions 2 et 3 :

Position 2 :

2.1. Ingénieurs ou cadres ayant au moins 2 ans de pratique de la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d'études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés, travaillant aux mêmes tâches qu'eux dans les corps d'état étudiés par le bureau d'études:

- âgés de moins de 26 ans

- âgés de 26 ans au moins

coefficient 105, 115

2.2. Remplissent les conditions de la position 2.1 et, en outre, partant d'instructions précises de leur supérieur, doivent prendre des initiatives et assumer des responsabilités que nécessite la réalisation de ces instructions ; étudient des projets courants et peuvent participer à leur exécution. Ingénieurs d'études ou de recherches, mais sans fonction de commandement

coefficient 130

2.3. Ingénieurs ou cadres ayant au moins 6 ans de pratique en cette qualité et étant en pleine possession de leur métier ; partant des directives données par leur supérieur, ils doivent avoir à prendre des initiatives et assumer des responsabilités pour diriger les employés, techniciens ou ingénieurs travaillant à la même tâche

coefficient 150

Position 3 :

3.1. Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d'un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en 'uvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme, mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer, toutefois, dans leurs fonctions, une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef

coefficient 170

3.2. Ingénieurs ou cadres ayant à prendre, dans l'accomplissement de leurs fonctions, les initiatives et les responsabilités qui en découlent, en suscitant, orientant et contrôlant le travail de leurs subordonnés. Cette position implique un commandement sur des collaborateurs et cadres de toute nature

coefficient 210

Au sein de la société Altran, il résulte du référentiel interne de compétences et chemins de carrières

- que le poste de consultant confirmé correspond aux positions 2.1, 2.2 et 2.3 ;

- que le poste de consultant senior correspond aux positions 2.3 et 3.1.

Il ressort des contrats et de l'organigramme produits par M. X..., qu'il a participé à la maîtrise d'ouvrage pour le client Cedicam pendant plus de deux ans, dans l'équipe en charge du domaine de l'émission des équipements porteurs, le projet d'ampleur comprenant 22 personnes dont 15 en assistance à maîtrise d'ouvrage. Il se déduit des éléments du dossier qu'il a participé à la refonte de systèmes d'information et aux différentes étapes du projet (notamment expression des besoins, élaboration d'un cahier des charges, rédaction de spécifications fonctionnelles détaillées, préparation et suivi de la phase de recette applicative, suivi des phases de réception, accompagnement au changement). Il a également été présenté comme chef de projet dans le cadre d'une proposition de service, ainsi qu'en atteste le support d'une présentation faite le 23 février 2011.

Au vu du compte rendu de l'entretien annuel du 7 octobre 2009 et du courriel de M. B..., responsable d'unité de développement du 16 avril 2010, l'employeur a exprimé de fortes attentes de progrès à réaliser par M. X..., en particulier sur l'acquisition de compétences (formation à ITIL, échanges proactifs avec la direction technique et le pôle AMOA) et de prise de 'leadership' : renforcer la prise d'intiative, la force de proposition, la communication, 'l'ownership', et a noté l'absence d'autonomie sur plusieurs points du projet Cedicam (sur les aspects techniques, sur l'utilisation d'outils bureautiques tel que Visio, sur le processus industriel et les spécificités).

Il ressort de deux comptes-rendus de réunion de convergence qu'au second semestre 2011, M. X... a travaillé en qualité de consultant chez Orange à la mise en place et au choix d'un outil de vision anticipée de charges, outil de pilotage à destination d'experts, le projet comprenant le choix de l'outil, l'élaboration du prototype, la présentation à la direction et aux experts, l'évolution sur prototypage.

Le client s'est déclaré satisfait de la prestation dans ces comptes-rendus.

M. X... déclare avoir travaillé à l'audit de projets chez Nokia en 2012, en effectuant des vérifications de cohérence et de facturation.

L'intéressé expose avoir également été affecté à la gestion et au pilotage d'activités chez Brossette en 2012 en réalisant la mise en place d'un 'process' de recette, avec analyse des domaines, détermination du planning, organisation, tests, accompagnements aux ateliers et au changement.

M. X... fait également état de son travail à l'élaboration d'une fiche descriptive de gestion de projet dans le secteur industriel bancaire, et à une méthodologie de gestion de projet.

Cependant, ces différentes affectations et missions ne permettent pas d'établir que le salarié a pris des initiatives ou des responsabilités significatives dans le cadre de ces projets, ni qu'il s'est vu confier l'encadrement d'une équipe, M. C..., directeur Business Unit, attestant le 30 septembre 2014 que 'M. X... n'a jamais exercé de fonction de management dans le cadre de ses projets avec Altran durant la période où il était sous ma responsabilité', dans une attestation soumise aux observations contradictoires des parties et donc recevable.

En outre, l'analyse des dossiers de compétence du salarié et de Mme A... montre que Mme A... a un Master 2 et une maîtrise en management, qu'elle a une expérience reconnue de consultante expérimentée montrant une évolution marquée de consultante junior en maîtrise d'ouvrage, puis en tant que consultante, en qualité d'assistante maîtrise d'ouvrage et de coordinateur de projets depuis 2006, alors que M. X... possède un diplôme d'ingénierie de la formation, d'ingénierie informatique et réseaux et deux diplômes universitaires, qu'il a été employé en qualité de cadre position Syntec 2.1 puis '2.11" en qualité d'analyste chez GFI Informatique du 15 septembre 1997 au 6 mai 2004 puis en qualité de chef de projet chez Randstad en 2007. Le salarié ne démontre pas davantage qu'il ait travaillé en qualité de consultant confirmé chez GFI Informatique et Randstad dans la mesure où les éléments produits consistent en des certificats de travail insuffisants pour justifier de prise d'initiatives ou de responsabilités dans les projets accomplis par M. X... ou qu'il ait assumé l'encadrement d'une équipe.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la cour estime que le salarié ne peut prétendre à une qualification supérieure à celle de consultant confirmé, avec le statut de cadre, position 2.2, coefficient 130, en ce que le salarié ne démontre pas que dans les différents projets auxquels il a été affecté, il ait pris des initiatives ou assumé des responsabilités pour diriger une équipe, ses diplômes et l'ancienneté acquise dans ses postes précédents ne lui permettant pas d'accéder à la qualification supérieure et son manque d'autonomie étant relevé dans plusieurs domaines.

En conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté l'intéressé de sa demande de repositionnement au niveau 2.3 coefficient 150, et a fortiori au niveau 3.1 coefficient 170, ainsi que de ses demandes pécuniaires subséquentes en rappel de salaire, rappel relativement au minimum conventionnel, rappel de congés payés afférents et rappel d'indemnité de départ en retraite.

Sur l'égalité de traitement

Il résulte des dispositions de l'article L. 3221-2 du code du travail, que l'employeur doit assurer l'égalité de traitement entre salariés lorsqu'ils effectuent un même travail ou un travail de valeur égale.

Sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

En application des dispositions de l'article 1315 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une inégalité de traitement de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser cette inégalité et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.

En l'espèce, M. X... fait valoir que les chiffres fournis par la direction dans le cadre des négociations annuelles obligatoires montrent que le salaire maximal versé à un collaborateur relevant des positions 3.1, 2.3, 2.2 a toujours été supérieur à celui qu'il a perçu.

Il produit une analyse des salaires et augmentation dans le cadre des négociations annuelles, qui mentionne pour un consultant en position 2.2 :

en 2008 en 2009

salaire minimum :28 116 €

salaire maximum : 54 224 € 55 344 €

salaire moyen : 37 990 € 38 935 €

Or, M. X... a perçu 2 950 € X 3 mois en 2008 et 2 950 € X 12 mois, soit 35 400 € en 2009, ce qui est supérieur au salaire minimum, mais inférieur au salaire moyen.

Cependant, ces éléments de fait ne sont pas susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, dès lors que M. X... produit des éléments l'année de son embauche et l'année postérieure, et que l'inégalité de traitement ne peut résulter du fait qu'il se situe en dessous de la moyenne de sa position, alors qu'il venait d'être embauché et n'avait pas d'ancienneté dans l'entreprise, à partir du moment où son salaire se situe au-delà du minimum conventionnel.

Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a dit que M. X... n'avait pas subi d'inégalité de traitement et en ce qu'elle a débouté l'intéressé des demandes formulées à ce titre.

Sur la clause de non concurrence

M. X... demande la confirmation du jugement entrepris qui a condamné l'employeur à lui verser la contrepartie à la clause de non-concurrence après avoir retenu que la société Altran Technologies n'avait pas levé l'obligation de non-concurrence dans les délais prévus.

L'employeur n'articule aucune critique et ne fait valoir aucun moyen à l'encontre du jugement déféré en ce qu'il l'a condamné à payer à M. X... la somme de 16 497 € à titre de contrepartie à la clause de non-concurrence outre les congés payés afférents.

Le contrat de travail de M. X... comporte en son article 8 une clause de non concurrence rédigée comme suit :

« Compte tenu de la nature des fonctions et des informations confidentielles dont disposera Monsieur Jean-Pierre X..., et afin de préserver les intérêts légitimes de la Société, le salarié s'interdit expressément d'intervenir directement ou indirectement, et ce, à quelque titre que ce soit, en qualité de salarié et/ou d'indépendant, auprès des sociétés susceptibles de faire concurrence au groupe Altran.

Cette interdiction est limitée aux activités de bureaux d'études techniques, de cabinets d'ingénieurs

conseils, de société de conseils et de SSII.

A ce titre, Monsieur Jean-Pierre X... ne pourra pas être salarié d'une autre entreprise pour y effectuer le même travail que celui qu'il réalisait auparavant dans le cadre de ses missions pour le compte du groupe Altran.

Cette clause de non concurrence est limitée au périmètre géographique (région(s)) dans lequel le consultant est intervenu dans le cadre de son activité salariée pour le compte du groupe Altran.

Cette clause de non concurrence s'applique pendant les 12 mois qui suivent le départ effet du salarié, et ce quelque soit le motif de rupture du contrat de travail.

En contrepartie de cette obligation de non concurrence, le salarié percevra pendant les 12 mois suivant son départ effectif de la société une indemnité spéciale mensuelle et forfaitaire égale à :

- 25% du dernier salaire fixe mensuel brut hors primes et intéressements, si le salarié a moins de

deux ans d'ancienneté à la date de son départ,

- 45% du dernier salaire fixe mensuel brut hors primes et intéressements, si le salarié a plus de

deux ans d'ancienneté.

Cette contrepartie a la nature d'un salaire, et sera soumise à cotisations sociales, à CSG et CRDS; elle sera versée mensuellement durant toute la durée d'application de la clause.

Toute inexécution de cette obligation de non concurrence donnera lieu à réparation intégrale du préjudice subi par la société estimé à 12 mois du dernier salaire fixe brut perçu par Monsieur Jean- Pierre X... durant son dernier mois complet d'activité en qualité de salarié de la société.

La société se réserve la faculté, quelque soit le motif de la rupture du contrat de travail et quel qu'en soit l'auteur, de renoncer à l'application de la présente clause. La renonciation sera notifiée dans les 15 jours suivant la rupture du contrat de travail, par tous moyens. L'indemnité contractuelle prévue ci-dessus ne sera alors pas due'.

La validité de cette clause n'est pas contestée.

Il y a lieu de constater que l'employeur n'a pas levé la clause de non concurrence dans le délai de 15 jours suivant la rupture du contrat reçu par lettre du 30 juillet 2013, soit au 15 août 2013.

Il s'en déduit que l'employeur est redevable de l'indemnité fixée contractuellement à 45% du dernier salaire fixe mensuel brut hors primes et intéressements pendant une durée de douze mois, le salarié justifiant de plus de deux ans d'ancienneté.

Par conséquent, il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné l'employeur à payer à M. X... la somme de 16 497 € à ce titre, outre 1 649 € au titre des congés payés afférents.

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

M. X... sollicite le paiement de la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Il reproche à son employeur de ne pas l'avoir positionné sur la bonne classification conventionnelle, de ne pas avoir donné suite à ses demandes amiables de régularisation pendant le contrat de travail, de ne pas avoir honoré ses engagements écrit de revalorisation, de n'avoir opposé aucun argument pour tenter d'expliquer son refus, de ne pas avoir réglé spontanément la contrepartie financière à la clause de non concurrence, de l'avoir contraint à faire valoir ses droits à la retraite dans le cadre d'une procédure prud'homale, source de stress et d'anxiété.

La société intimée expose que M. X... était bien positionné compte tenu de son autonomie réduite, de ses faibles responsabilités, de la nature même de ses fonctions. L'employeur fait valoir qu'il a toujours donné suite aux sollicitations amiables de l'intéressé qui a notamment été reçu par le directeur des ressources humaines. L'employeur conteste s'être engagé tant oralement que par écrit à revaloriser le salaire et la position de M. X... et conclut que dès l'entretien annuel de 2009, ce dernier a été informé que la revalorisation de sa position était liée à ses progrès, qu'il ne serait pas augmenté pour 2009, et l'atteinte des progrès attendus justifierait éventuellement d'envisager un repositionnement.

M. X... ne rapporte pas la preuve des manquements invoqués à l'encontre de son employeur, à l'exception de l'absence de règlement spontané par ce dernier de la contrepartie financière à la clause de non concurrence.

Il y a lieu de lui allouer une somme de 1 000 € en réparation du préjudice résultant des tracas générés par la nécessité d'engager une procédure judiciaire de ce fait, alors qu'il a pris l'initiative de faire valoir ses droits à la retraite.

La décision entreprise sera donc infirmée sur ce point, et l'employeur sera condamné à payer à M. X... la somme de 1 000 € en réparation de son préjudice.

Sur la demande de remise de documents sociaux

Il convient d'ordonner à la société Altran Technologies de remettre à M. X... un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte n'apparaisse nécessaire.

Sur les autres demandes

En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. Il n'y a pas lieu à déroger à ces dispositions et à faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme demandé.

La société Altran Technologies succombant à la présente instance, en supportera les dépens. Il convient de condamner la société Altran Technologies à payer à M. X... une indemnité destinée à couvrir les frais non compris dans les dépens qu'il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts et qu'il y a lieu de fixer à 2 000 €.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté M. Jean-Pierre X... de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

CONDAMNE la SA Altran Technologies à payer à M. Jean-Pierre X... la somme de 1000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

ORDONNE à la SA Altran Technologies de remettre à M. Jean-Pierre X... un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt ;

CONDAMNE la SA Altran Technologies à payer à M. Jean-Pierre X... la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

REJETTE le surplus des demandes ;

CONDAMNE la SA Altran Technologies aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 15/02805
Date de la décision : 06/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K9, arrêt n°15/02805 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-06;15.02805 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award