RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 06 Juin 2018
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/04400
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Février 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY RG n° 10/01296
APPELANT
Monsieur Daniel X...
[...]
né le [...] [...]
comparant en personne, assisté de Me Bruno Y..., avocat au barreau de PARIS, toque: C1813
INTIMÉE
SAS ATALIAN CLEANING venant aux droits de la SAS TFN VAL venant aux droit de la SARL SPECIAUX TRANSPORTS AERIENS ROISSY
[...]
représentée par Me Daniel Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0392 substitué par Me Claire A..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0392
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Mars 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoît HOLLEAUX, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Benoit HOLLEAUX, conseiller faisant fonction de Président
Madame Christine LETHIEC, conseiller
Madame Laure TOUTENU, vice-président placé
Greffier : Mme Aurélie VARGAS, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par M. Benoît HOLLEAUX, conseiller faisant fonction de Président et par Madame Laurie TEIGELL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. Daniel X... a été engagé par la SARL Star suivant contrat à durée indéterminée à compter du 16 mars 2002 en qualité de chauffeur poids lourd, groupe 6,coefficient 138 M. A compter du 5 juillet 2004, il est passé en groupe 7 au coefficient 150. La relation de travail est régie par la convention collective des transports routiers.
M. X... a assuré la ligne Erstein-Gennevilliers jusqu'en mai 2004, puis la ligne Paris-Bordeaux pour le client La Poste.
Le 18 décembre 2009, M. X... a subi un accident de travail et a fait l'objet d'arrêts de travail jusqu'au 25 avril 2010.
Il a ensuite bénéficié de congés payés jusqu'au 29 mai 2010 et le 31 mai 2010, à l'issue de la visite médicale de reprise, le médecin du travail l'a déclaré apte à son poste.
Reprochant divers manquements à son employeur, notamment des heures supplémentaires non rémunérées, par lettre recommandée en date du 26 mai 2010 et présentée le 1er juin 2010, M. X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail.
La société emploie plus de dix salariés à la date de la rupture.
Le 6 avril 2010, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny. Il a formé des demandes en paiement de différentes sommes liées à l'exécution du contrat de travail ainsi qu'aux fins de voir dire que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement des sommes consécutives à la rupture du contrat.
Par jugement du 15 février 2012 notifié le 19 avril 2012, le conseil de prud'hommes de Bobigny a:
- dit que la prise d'acte équivaut à une démission
- condamné la SARL Star à payer à M. X... les sommes suivantes :
[...]
[...]
- condamné M. X... à payer à la SARL Star les sommes suivantes:
[...]
[...]
- débouté les parties du surplus de leurs demandes
- condamné la SARL Star aux dépens.
M. X... a interjeté appel de cette décision le 30 avril 2012.
Lors de l'audience du 17 mars 2014, l'affaire a été mise en délibéré.
Par mention au dossier du 14 mai 2014, l'affaire a fait l'objet d'une réouverture des débats, afin de s'assurer de la régularité de la convocation de la SARL Star.
L'affaire a été renvoyée à plusieurs reprises à la demande des parties, l'affaire n'étant pas en l'état.
La société SAS Atalian Cleaning vient aux droits de la société TFN VAL laquelle vient aux droits de la SARL Star.
Aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement le 28 mars 2018, M. X... demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'employeur à lui payer les sommes suivantes:
[...]
[...] conventionnel
avec intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2010, date de la convocation de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation
d'infirmer le jugement pour le surplus, et de :
- dire que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
- fixer le salaire brut moyen mensuel à la somme de 3194€
- condamner la SAS Atalian Cleaning à lui payer les sommes suivantes :
11 700€ sauf à parfaire, à titre d'heures supplémentaire entre novembre 2008 et octobre 2009
1 170€ au titre des congés payés afférents
[...] pris
10 080€ à titre d'indemnisation pour non respect du salaire minimum
1 008€ au titre des congés payés afférents
19 164€ à titre d'indemnité pour travail dissimulé
[...]
6 388€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis
638€ au titre des congés payés afférents
38 328€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
9 582€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral
3 194€ au titre de la perte des droits à DIF
3 194€ à titre d'indemnité pour défaut d'information sur la portabilité de la prévoyance
3 194€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos entre juin 2008 et novembre 2009
319€ au titre des congés payés afférents
3 194€ au titre du préjudice pour absence d'information de repos compensateur
319€ au titre des congés payés afférents
5 000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- ordonner la remise des bulletins de paie, sous astreinte de 100€ par jour de retard et par bulletin de paie à compter de la notification de la décision
- ordonner la remise des documents légaux, sous astreinte de 100€ par jour de retard et par document
- ordonner l'exécution provisoire
- dire que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 7 avril 2010, date de la convocation de la partie défenderesse devant le bureau de conciliation
-ordonner la capitalisation des intérêts.
La SAS Atalian Cleaning reprend les termes de ses conclusions visées par le greffier et soulève la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée du jugement en date du 20 mai 2015 du tribunal de grande instance de Bobigny. A titre subsidiaire, la SAS Atalian Cleaning demande la confirmation du jugement, le rejet de l'ensemble des demandes de M. X..., outre sa condamnation à lui verser une indemnité de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS :
Sur le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée
La SAS Atalian Cleaning soulève la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la décision du tribunal correctionnel. L'employeur expose d'une part que les faits sont exactement les mêmes que ceux définitivement jugés par le tribunal correctionnel de Bobigny devant lequel il s'était porté partie civile, et que le salarié cherche manifestement à obtenir réparation des mêmes préjudices que devant le tribunal correctionnel. L'employeur précise que le salarié n'a pas interjeté appel du jugement correctionnel qui est désormais irrévocable, que la voie civile lui est désormais définitivement fermée.
M. X... fait valoir que d'une part, les dispositions de l'article 122 du code de procédure civile ne peuvent jouer qu'entre les décisions civiles et non entre les décisions pénales et les décisions civiles, et que d'autre part, l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil prévaut dans le cas où une sentence pénale a été prononcée. Il précise qu'il était victime dans le procès au pénal contre son employeur, qu'aucune sentence pénale n'a donc été prononcée contre lui et que l'autorité de la chose jugée ne saurait prospérer. Il ajoute que les parties ne sont pas identiques, que l'objet de la demande n'est pas identique. M. X... indique que les demandes ont été initiées avant la procédure pénale par le conseil de prud'hommes et ne peuvent être considérées comme deuxième ou nouvelle demande. Le salarié expose que l'article 4.1 du code de procédure pénale dissocie la faute civile de la faute pénale, de sorte que l'autorité de la chose jugée ne s'applique pas.
L'autorité de la chose jugée définitivement au pénal peut s'appliquer à une décision au civil.
En l'espèce, l'employeur de M. X... a été relaxé par un jugement devenu définitif du tribunal correctionnel de Bobigny du 20 mai 2015 des chefs de prévention suivants:
- obstacle au contrôle des conditions de travail le 1er novembre 2008
- mise en danger d'autrui par violation manifestement délibérée d'une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence le 1er novembre 2008
- non indication sur le bulletin de paie ou un document annexe des mentions relatives aux temps de travail et aux repos le 1er novembre 2008
Le tribunal a constaté l'extinction de l'action publique à l'égard de la société TFN VAL, venant aux droits de la société STAR, a reçu M. X... en sa constitution de partie civile et l'a débouté de ses demandes.
Dans le cadre de sa prise d'acte, M. X... reproche plusieurs manquements à son employeur :
- violation de l'obligation de sécurité de résultat
- non respect des repos hebdomadaires et du droit au repos compensateur
- non respect des visites médicales obligatoires
- non paiement des heures supplémentaires, salaire horaire minimum conventionnel, congés payés acquis non pris et travail dissimulé
- dégradation des conditions de travail et harcèlement moral
Il ressort des différentes qualifications pénales qui ont été jugées définitivement par le tribunal qu'il n'y a pas identité entre les faits qualifiés pénalement et les faits invoqués dans le cadre de la présente instance en droit du travail, l'objet de la demande n'est donc pas identique.
Il y a donc lieu de rejeter le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée soulevé par l'employeur.
Sur la demande de rappel d'heures supplémentaires
M. X... indique qu'il a effectué trois rotations par semaine à compter de 2008, avec les conséquences qui en découlent en matière de multiplication d'heures supplémentaires. Il ajoute que l'employeur ne respectait pas le calcul des heures supplémentaires, qu'il a reconnu ce point lors d'une audition dans le cadre de la procédure pénale.
L'employeur fait valoir que le salarié était rémunéré sur la base de 200 heures supplémentaires par mois, incluant le paiement d'heures supplémentaires et de leur majoration, comme indiqué sur les bulletins de paie, qu'aucune somme ne lui est due au titre d'heures supplémentaires non rémunérées.
Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
M. X... sollicite la confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a condamné la partie adverse à lui régler au titre d'un rappel d'heures supplémentaires la somme de 725,57 €, outre 72,55 € de congés payés afférents, sur la période de novembre 2008 à décembre 2009 inclus.
Il réclame également son infirmation avec la condamnation de l'intimée à lui verser du même chef un rappel autre à hauteur de la somme de 11 700€, et 1 170€ d'incidence congés payés, sur la période susvisée.
Il verse aux débats des relevés tachygraphes de juin 2008 à novembre 2009, les relevés visio produits par l'employeur de janvier à novembre 2009, une analyse de ces relevés et indique que sur la période de novembre 2008 à décembre 2009, un expert comptable a calculé que les heures supplémentaires s'élèvent à 11 700 €, soit 900 € par mois.
L'analyse des relevés tachygraphes produits en quasi totalité sur la période de novembre 2008 à juillet 2009 inclus, comprenant l'heure de départ, l'heure d'arrivée, le temps de conduite, le temps de travail hors conduite, montre que le salarié effectuait :
- des trajets de nuit en partant souvent vers 2h du matin
- en général 6 trajets par semaine du lundi au samedi de novembre 2008 à juin 2009
- en moyenne 5,5 trajets par semaine en juillet, août 2009
- en général 6 trajets par semaine en septembre 2009
- en moyenne 5,5 trajets par semaine en octobre 2009
- en moyenne 5 trajets par semaine en novembre 2009
La durée des trajets varie de 7 à 8 heures en moyenne, avec des dépassements.
Les relevés faisant état d'un jour non travaillé la veille d'un jour férié, de jours de congés en janvier 2009.
Le salarié conclut qu'il travaillait en moyenne 237 heures par mois sur la période, contrairement aux 200 heures par mois déclarées par l'employeur.
Il s'en déduit que le salarié étaye sa demande de sorte que l'employeur est en mesure d'y répondre.
L'employeur fait valoir à juste titre que le rapport d'expert comptable invoqué par le salarié n'est pas versé aux débats.
L'employeur expose que pour la première fois devant le conseil de prud'hommes, le salarié indique qu'il effectue non plus 5 mais 6 trajets hebdomadaires.
Or, l'analyse des rotations sur la période montre qu'en moyenne le salarié a effectué 5,8 trajets hebdomadaires.
L'employeur produit un cahier des charges, avec avenant en mai 2009, et souligne que les rotations ont toujours répondu à des départs fixes et que le temps de conduite hebdomadaire a toujours été de 94h45, soit 47h20 environ par salarié, soit 200 heures par mois.
L'employeur pointe des contradictions dans les tableaux du salarié, le reliquat à payer selon le salarié, s'élèverait selon ses propres calculs à 728,57 € par mois et non pas 900 € et relève plusieurs incohérences dans les temps de travail enregistrés.
Au vu des pièces produites par chacune des parties, après les avoir analysées et après déduction des heures supplémentaires déjà payées par l'employeur, il y a lieu de dire que le premier juge a justement retenu que le salarié a accompli des heures supplémentaires non rémunérées, et qu'il a justement évaluées à la somme de 725,57 €, ainsi que 72,55 € de congés payés afférents, sur la période de novembre 2008 à décembre 2009 inclus, de sorte que la décision entreprise sera confirmée sur ce point en ses dispositions de condamnation à due concurrence, d'une part, et infirmée en ce qu'elle a condamné reconventionnellement l'appelant à rembourser à la partie intimée la somme de1 525,28 €, outre 152,52 € de congés payés afférents, au titre d'heures prétendument enregistrées de manière fallacieuse, ainsi que celle de 187,28 € en remboursement de frais professionnels prétendument non justifiés, d'autre part.
Sur la demande au titre du non respect du salaire minimum
Le salarié demande la confirmation de la condamnation à hauteur de la somme de 1688,58€ à titre de rappel de salaire conventionnel, ainsi que le paiement d'une somme de 10 080€ au titre du non respect du salaire minimum, et 1 008€ de congés payés afférents.
Il fait valoir qu'il a été payé en deçà du salarie minimum en 2004, 2005, 2006 et 2008, que la perte est de 105 € par mois sur une moyenne de 200 heures par mois sur quatre années.
L'employeur soulève la prescription de la demande afférente à l'année 2004, la saisine du conseil de prud'hommes étant de mai 2010. Il reconnaît devoir les sommes de 1 688,58 € à titre de rappel de salaire minimum conventionnel, outre 168,85€ pour les congés payés afférents pour la période de juillet 2005 à septembre 2008 inclus.
Il reconnaît que les salaires horaires minimum conventionnels étaient pour la classification 150M:
8,51€ en juillet 2005
8.8€ en janvier 2007
9,2€ en janvier 2008
Il y a lieu de constater que les demandes en rappel de salaire antérieures au 6 avril 2005 sont prescrites en ce que les créances de salaires sont soumises à la prescription quinquennale à cette période.
Or l'analyse des bulletins de paie confirme que le salarié était payé en dessous de ce minimum jusqu'en septembre 2008 inclus à l'exception de la période d'avril 2007 à décembre 2007 inclus, à hauteur d'un salaire horaire de :
8.03€ en juillet 2005
8.27€ en janvier 2007 puis à 8,98€ en avril 2007
8,98€ en janvier 2008 puis à 9,34€ en octobre 2008
La cour constate que le calcul de l'employeur retenu par les premiers juges n'est relatif qu'à la période de janvier 2006 à décembre 2008 inclus.
La cour évalue, sur la base d'une différence mensuelle moyenne de 78 €, la totalité du rappel de salaires fondé sur les minima conventionnels du 6 avril 2005 à septembre 2008 inclus, à l'exception de la période d'avril 2007 à décembre 2007, à la somme de 2390 €, outre 239 € d'incidence congés payés.
En conséquence, la décision entreprise sera infirmée quant au quantum retenu.
Sur la demande de rappel de congés payés
M. X... sollicite le paiement d'une indemnité de 126,5 jours de salaires à titre d'indemnité de congés payés, soit 8 270,57€ sur une base de 65,38€ par jour. Il expose qu'il n'a pas pu prendre de congés payés depuis 2004 à l'exception de jours pris concernant deux périodes de garde à vue de 4 jours et deux jours pour des faits non retenus contre lui.
L'employeur fait valoir que le salarié ne s'est jamais plaint, alors que s'il n'avait pu prendre aucun congé, il n'aurait manqué de le contester, que les instances représentatives ou la médecine du travail n'ont pas été saisies. L'employeur explique que les congés payés apparaissaient sur les plannings de travail et relevés mensuels d'activité, et que ce n'est que depuis mai 2008 que le logiciel de paie ayant été reparamétré, les congés sont mentionnés aux bulletins de paie.
-Sur les périodes antérieures
Le salarié ne démontre pas qu'il a été placé dans l'impossibilité de prendre les congés payés auxquels il avait droit pour les périodes antérieures à mai 2009, ni qu'il ait demandé à son employeur leur report, il les perd donc à la fin de la période de prise.
-Sur la période en cours
L'analyse des bulletins de salaire de l'année 2010, confirme qu'au moment de la rupture du contrat de travail, M. X... avait acquis 30 jours de congés pendant la période de référence allant de juin 2009 à mai 2010.
L'employeur n'allègue ni ne démontre que le salarié ait pris des congés payés pendant cette période.
En conséquence, il y a lieu d'infirmer la décision entreprise et de condamner l'employeur à payer au salarié la prime de congés payés correspondant, s'élevant sur la base journalière non contestée de 65,38€ à la somme totale de (65,38X 30)= 1 961,4 € au titre de la période de juin 2009 à mai 2010.
Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé
Il résulte des dispositions des articles L 8221-5 et L 8223-1 du code du travail, que le fait, pour l'employeur, de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie du salarié un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli est réputé travail dissimulé et ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.
En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que les bulletins de paie de M. X... mentionnent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli et que l'employeur ne pouvait ignorer ce fait.
Par conséquent, M. X... est fondé à obtenir paiement d'une indemnité égale à six mois de salaire, soit la somme de 13 934,04€.
En conséquence, il convient d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté l'intéressé de sa demande à ce titre.
Sur la demande au titre du repos compensateur
M. X... sollicite à titre de demande nouvellement formée en cause d'appel le paiement des sommes suivantes:
3 194€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos entre juin 2008 et novembre 2009
319€ au titre des congés payés afférents
3 194€ au titre du préjudice pour absence d'information de repos compensateur
319€ au titre des congés payés afférents
Il indique que l'employeur n'a pas respecté la législation relative à la durée maximale de travail et donc aux durées minimales de repos, la durée maximale de travail étant de 48 heures sur 7 jours conformément à la directive du 23 novembre 1993, qu'il a fréquemment dépassé la durée de travail de 48 heures par semaine. Il ajoute qu'il a d'ailleurs été verbalisé pour infractions à la législation routière en matière de repos journalier et hebdomadaire. Il souligne que dans le cours de l'enquête pénale, ses supérieurs hiérarchiques ont reconnu qu'ils avaient connaissance des difficultés liées aux dépassements récurrents des durées maximales de travail.
En 2008, le contingent donnant lieu à droit à repos compensateur est de 195 heures.
A l'intérieur du contingent, les heures supplémentaire effectuées au-delà de 45 heures par semaine (41 h + 4) donnent lieu à repos compensateur à 50%
Au-delà du contingent les heures supplémentaires (au-delà de 39 heures par semaine) donnent lieu à repos compensateur à 100%. A compter de 2007, le repos compensateur est calculé en nombre de jours en fonction des fourchettes d'heures supplémentaires accomplies.
Au vu de l'analyse des heures supplémentaires susmentionnée, le salarié a dépassé le contingent donnant lieu à droit à repos compensateur sur la période, l'employeur ayant lui-même déclaré que le salarié travaillait en moyenne 200 heures par mois.
Il sera donc fait droit à sa demande à hauteur de 3 194€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos dont il n'a jamais pu bénéficier entre juin 2008 et novembre 2009 ainsi que la somme de 319€ au titre des congés payés afférents.
Le salarié doit être informé de sa durée du travail et du nombre d'heures de repos compensateur et des contreparties obligatoires en repos acquis.
En l'espèce, il est avéré que l'employeur a manqué à son devoir d'information du salarié sur la durée du travail en matière de repos compensateur. Le salarié a donc été privé de la possibilité de bénéficier de repos compensateur.
Il y a lieu de condamner l'employeur à payer au salarié une somme de 800€ en réparation de son préjudice de perte de chance de bénéficier de repos compensateur résultant de l'absence d'information.
Sur la rupture du contrat de travail
-Sur l'imputabilité de la rupture
Il résulte des dispositions de l'article L 1231-1 du code du travail que le salarié peut prendre acte de la rupture du contrat de travail et que cette prise d'acte produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsqu'il rapporte la preuve de manquements de l'employeur faisant obstacle à la poursuite du contrat de travail, soit, dans le cas contraire, d'une démission.
En l'espèce, M. X... invoque les manquements suivants de l'employeur :
- violation de l'obligation de sécurité de résultat
- non respect des repos hebdomadaires et du droit au repos compensateur
- non respect des visites médicales obligatoires
- non paiement des heures supplémentaires, salaire horaire minimum conventionnel, congés payés acquis non pris et travail dissimulé
- dégradation des conditions de travail et harcèlement moral
L'employeur expose qu'en premier lieu, aucun des griefs invoqués par le salarié n'est fondé de sorte que la prise d'acte est injustifiée et ne peut qu'être requalifiée en démission. L'employeur indique qu'en second lieu, l'ancienneté des griefs dont certains remontent à l'embauche en 2002, et pour d'autres à la renégociation du contrat avec la Poste en 2008, démontre qu'ils n'étaient pas de nature à rendre impossible la poursuite de son contrat de travail, le salarié ayant le 8 janvier 2010 pour la première fois fait état d'heures supplémentaires non rémunérées
Au vu des développements qui précèdent, l'employeur a manqué à ses obligations en matière de respect des repos hebdomadaires et du droit au repos compensateur, en matière de paiement des heures supplémentaires, en matière d'application du salaire horaire minimum conventionnel, en matière de paiement de l'indemnité à congés payés et de travail dissimulé.
Ces manquements sont en eux-mêmes suffisamment graves pour faire obstacle à la poursuite du contrat de travail et justifier la prise d'acte du salarié, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres manquements invoqués.
En outre, les manquements relatifs au non respect des repos hebdomadaires et du droit au repos compensateur, en matière de paiement des heures supplémentaires sont invoqués relativement aux années 2008 et 2009 et sont suffisamment proches de la prise d'acte intervenue le 1er juin 2010, après une période de suspension du contrat de travail en raison de l'accident de travail du 18 décembre 2009. Il convient donc d'écarter le moyen tiré de l'ancienneté des manquements.
Le salarié allègue également que sa prise d'acte est intervenue pendant la suspension de son contrat de travail, consécutive à son accident du travail du 18 décembre 2009, aux fins de voire dire que sa prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul.
Cependant, si le salarié a bien subi un accident de travail le 18 décembre 2009 en circulant sur une route verglacée et en étant percuté par le camion roulant derrière lui, il a fait l'objet d'une visite médicale de reprise le 31 mai 2010 l'ayant déclaré apte à son poste. Ainsi, le 31 mai 2010, la visite médicale de reprise a mis fin à la suspension du contrat de travail du salarié.
La prise d'acte ayant été présentée le 1er juin 2010, elle n'a pas été notifiée pendant la période de suspension du contrat de travail.
Il s'en déduit que la prise d'acte justifiée du salarié produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La décision entreprise sera donc infirmée sur ce point.
-Sur les conséquences attachées à une prise d'acte justifiée
Le salarié invoque un salaire mensuel brut moyen de 3 194€ .
L'employeur invoque une moyenne des trois derniers mois de salaire à hauteur de 2 322,34€.
La cour retient la moyenne des trois deniers mois de pleine activité de septembre à novembre 2009 pour un montant de 2 322,34€, qui est la plus favorable au salarié.
*
Le salaire de référence est le plus favorable entre la moyenne des douze derniers mois de salaire ou des trois derniers mois. La période à prendre en compte est celle correspondant aux derniers mois travaillés en cas d'arrêt de travail pour maladie.
M. X... est fondé à percevoir une indemnité légale de licenciement sur le fondement des dispositions de l'article L 1234-9 et R 1234-2 du code du travail, soit un cinquième de mois par année d'ancienneté, soit 3 832,8€ à hauteur de sa demande.
*
M. X... avait plus de deux années d'ancienneté et est donc fondé à percevoir une indemnité compensatrice légale de préavis de deux mois de salaire sur le fondement des articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail, soit la somme de 4 645,19 € ainsi que les congés payés afférents, soit 464,5€.
*
L'entreprise comptant plus de dix salariés, M. X..., qui avait plus de deux ans d'ancienneté, a droit à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par les dispositions de l'article L1235-3 du code du travail, et qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire.
Au moment de la rupture, M. X..., âgé de 67 ans, comptait plus de 8 ans d'ancienneté.
Au vu de cette situation, il convient de lui allouer une indemnité équivalente à environ 8 mois de salaire, soit la somme de 18 600 €.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral
Le salarié indique qu'il a dû travailler dans des conditions sécuritaires inacceptables, qu'il a subi une pression importante alors qu'il réclamait le versement de sommes dues. Il ajoute qu'il souffre encore de l'accident du travail dont il a été victime compte tenu du manquement de l'employeur quant à son obligation de sécurité de résultat. Il précise que le harcèlement moral est apparu lors que la direction de la société a été modifiée en 2008 mais qu'il a devait obéir aux ordres de l'employeur s'il devait conserver son emploi.
Cependant le salarié n'invoque pas de faits matériellement établis laissant présumer des agissements de harcèlement moral.
En outre, le salarié n'invoque pas de manquements distincts de ceux figurant dans sa prise d'acte et déjà réparés par l'allocation de dommages et intérêts dans le cadre de la rupture du contrat de travail.
Enfin, le salarié ne caractérise pas de préjudice consécutif à l'accident du travail qui n'ait déjà fait l'objet d'une réparation.
En conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre du DIF
Le salarié réclame une indemnisation à hauteur de 3 194€ au titre de la perte des droits à DIF.
Cependant, le salarié ne motive pas sa demande.
Il n'allègue ni ne démontre avoir demandé le bénéfice d'une formation qui lui aurait été refusée, ou une absence d'information lors de la rupture du contrat de travail.
Il doit donc être débouté de sa demande nouvellement formée en cause d'appel.
Sur la demande de dommages et intérêts au titre de la prévoyance
Le salarié revendique une indemnisation à hauteur de 3 194€ à ce titre. Il invoque un défaut d'information sur la portabilité de la prévoyance.
Cependant le salarié ne rapporte pas la preuve qu'il pouvait bénéficier d'une portabilité éventuelle de la prévoyance, il ne caractérise donc pas de préjudice résultant du manquement invoqué.
Il sera donc débouté de sa demande nouvellement formée en cause d'appel.
Sur la demande de remise de documents
Il convient d'ordonner la remise de bulletins de salaire de la SAS Atalian Cleaning à M. X..., ainsi que d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse nécessaire.
Sur les autres demandes
En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt.
Il convient de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil recodifié sous l'article 1343-2 du même code par l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
La SAS Atalian Cleaning succombant à la présente instance, en supportera les dépens tant de première instance que d'appel. Il convient de condamner la SAS Atalian Cleaning à payer à M. X... une indemnité destinée à couvrir les frais non compris dans les dépens qu'il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts et qu'il y a lieu de fixer à 2 500 €.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
CONFIRME le jugement déféré seulement en ce qu'il a débouté M. Daniel X... de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral, ainsi qu'en ses dispositions sur le rappel d'heures supplémentaires et les dépens ;
L'INFIRME pour le surplus,
STATUANT à nouveau et Y AJOUTANT,
REJETTE la fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée soulevée par la société SAS Atalian Cleaning
DIT que la prise d'acte justifiée par M. Daniel X... de la rupture de son contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, FIXE le salaire moyen à la somme de 2 322,34€ bruts mensuels et, en conséquence, CONDAMNE la SAS Atalian Cleaning à lui régler les sommes de :
[...] la période de novembre 2008 à décembre 2009 inclus
[...]
2390€ de rappel de salaires fondé sur les minima conventionnels
239€ au titre des congés payés afférents
[...] congés payés
13 934,04€ d'indemnité légale pour travail dissimulé
3 194€ de contrepartie obligatoire en repos entre juin 2008 et novembre 2009
319€ au titre des congés payés afférents
[...]
4 645,19 € d'indemnité légale compensatrice de préavis
[...],
ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation
800€ en réparation de sa perte de chance de bénéficier de repos compensateur résultant de l'absence d'information
18 600€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
ces sommes avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt
DEBOUTE M. Daniel X... de ses autres demandes
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière
ORDONNE à la SAS Atalian Cleaning de remettre à M. Daniel X... bulletins de salaire, certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt
CONDAMNE la SAS Atalian Cleaning à payer à M. Daniel X... la somme de 2 500€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SAS Atalian Cleaning aux dépens d'appel.
LE GREFFIERLE CONSEILLER FAISANT FONCTION DE PRESIDENT