RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRÊT DU 23 Mai 2018
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/07289
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Mai 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL RG n° F 12/01605
APPELANT
Monsieur [H] [Y]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 1]
comparant en personne, assisté de Me Christophe BILAND, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Hayet IHDENE, avocat au barreau d'ESSONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2014/050953 du 28/11/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEE
SAS DODIN CAMPENON BERNARD
[Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : B 3 430 433 60
représentée par Me Guillaume CHARENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0461
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mars 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Antoinette COLAS, Président de Chambre
Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseiller
Madame Florence OLLIVIER, Vice Président placé faisant fonction de Conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 14 décembre 2017
Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Antoinette COLAS, Président de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [Y] a été engagé par la Campenon Bernard Sud suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 5 février 1990.
Il a été muté à compter du 8 septembre 1995 auprès de la direction des grands projets de France du groupe Campenon Bernard France SGE.
La relation contractuelle a été confirmée par un document signé par les parties le 4 novembre 1996. Monsieur [Y] occupait le poste d'offreur, niveau 2, position 2 coefficient 140 avec reprise d'ancienneté au 5 février 1990.
Le 1er juin 2008, le contrat de travail a été transféré à la SAS Dodin Campenon Bernard.
Monsieur [Y] a été promu chef de file coffreur à compter du mois de décembre 2009.
La relation contractuelle était régie par la convention collective nationale des ouvriers des entreprises de travaux publics du 15 décembre 1992.
Par une lettre du 1er mars 2012, Monsieur [Y] a été convoqué pour le 9 mars 2012 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, lequel lui a été notifié, pour insuffisance professionnelle, par lettre du 23 mars 2012.
Estimant n'avoir pas été rempli de ses droits salariaux en raison d'un travail réalisé effectivement en tant que chef d'équipe depuis 2006, revalorisé sur le plan de sa rémunération, et contestant le bien fondé de son licenciement, Monsieur [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil aux fins d'obtenir un rappel de salaire, le paiement d'heures supplémentaires, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse ainsi que pour discrimination et pour exécution déloyale du contrat de travail.
Par jugement du 14 mai 2014, le conseil de prud'hommes de Créteil a retenu que le licenciement reposait sur une cause réelle sérieuse, a accordé à Monsieur [Y] un rappel de salaire à hauteur de 652,11 euros outre les congés payés afférents ainsi qu'une indemnité de 1000 sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il a ordonné à l'employeur de remettre à Monsieur [Y] les bulletins de paie rectifiés pour la période du 5 décembre 2011 au 23 mai 2012.
Il a débouté les parties du surplus de leurs réclamations.
Appelant de ce jugement, Monsieur [Y] en sollicite la réformation.
Il demande à la cour, statuant à nouveau, de condamner la SAS Dodin Campenon Bernard à lui verser les sommes suivantes :
- 65 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle sérieuse,
- 26 007,21 euros ou à titre subsidiaire 15 183,46 euros au titre de rappel de salaire pour la période de juin 2007 à mai 2012 outre les congés payés afférents,
- 7155,90 euros pour des heures supplémentaires outre les congés payés afférents,
Il sollicite également que l'employeur soit condamné à lui remettre les bulletins de salaires conformes aux termes de l'arrêt sous astreinte de 100 € par jour et par document, la cour se réservant de liquider l'astreinte.
À titre subsidiaire il propose la confirmation du jugement déféré s'agissant de la condamnation au titre d'un rappel de salaire et la remise des bulletins de paie rectifiés pour la période du 5 décembre 2011 au 23 mai 2012.
La SAS Dodin Campenon Bernard conclut à titre principal à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur [Y] de ses demandes au titre du licenciement et du rappel de salaire pour une période autre que celle du 5 décembre 2011 23 mai 2012, mais à sa réformation s'agissant des condamnations prononcées estimant que le rappel de salaire doit être limité à 401,60 euros bruts outre les congés payés afférents.
À titre subsidiaire, la SAS Dodin Campenon Bernard propose de voir limiter les dommages-intérêts à revenir à Monsieur [Y] à la somme de 15 407,74 euros.
À titre infiniment subsidiaire, elle conclut que la condamnation au titre d'un rappel de salaire ne peut être supérieure à 7381,09 euros.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.
MOTIFS
Sur la qualification ;
La qualification d'un salarié dépend des fonctions réellement occupées.
Après avoir précisé qu'il a obtenu les diplômes nécessaires pour être chef d'équipe en octobre 2006, Monsieur [Y] soutient avoir occupé réellement un emploi de chef d'équipe dès cette date.
Pour en justifier, il communique aux débats :
- le témoignage de Monsieur [L] [Z], collègue de travail affirmant avoir travaillé avec Monsieur [Y] en tant que maçon coffreur au sein de l'entreprise et attestant que celui-ci a toujours fait son travail correctement, ayant la fonction de chef d'équipe mais ne touchant pas le salaire adéquat,
- les attestations de Messieurs [S] [Q] et [V] [Q] affirmant avoir travaillé avec Monsieur [Y] dans le tunnel de [Localité 2] à [Localité 3], ce dernier occupant le poste de chef d'équipe,
- le témoignage de Monsieur [T], qui expose avoir travaillé avec Monsieur [Y] sur le chantier du [Localité 4] ce dernier occupant la fonction de chef d'équipe.
- plusieurs comptes-rendus d'évaluation aux termes desquels il apparaît que
*le 12 juin 2006, l'évaluateur précisait que Monsieur [Y] était motivé pour devenir chef d'équipe, et qu'il faisait office de chef d'équipe pour la réalisation de maçonneries et la préfabrication de prédalles,
* le 17 novembre 2008, le supérieur hiérarchique expliquait n'avoir pu évaluer Monsieur [Y] à la fonction de chef d'équipe malgré le titre obtenu le 12 octobre 2006, porté à sa connaissance une semaine auparavant,
*le 18 novembre 2009, le rédacteur de l'évaluation exposait que Monsieur [Y] devait voir sa qualification augmenter cette année, qu'il est ponctuel et assidu, qu'il a les capacités pour passer chef d'équipe.
- des lettres qu'il a lui-même adressées à l'employeur le 13 septembre 2007, le 10 mars 2009, le 21 mars 2009, le 9 avril 2011, le 29 juillet 2011, pour réclamer d'être positionné comme chef d'équipe sur les chantiers et pour déplorer que des chefs d'équipe intérimaires soient régulièrement embauchés.
Il communique également une lettre en date du 13 décembre 2001 aux termes de laquelle le représentant de Vinci le remerciait et le félicitait pour son action sur le site de [Localité 5]. L'auteur de la lettre écrivait: « il y a quelques mois, lorsque nous cherchions des ouvriers qualifiés pour encadrer la main-d''uvre ukrainienne de notre chantier de l'intérim Storage à [Localité 5], vous avez accepté de relever le défi. Le pari était difficile : pays inconnu, autre langue, autre mentalité, autres habitudes de travail, site particulier. Malgré toutes ces difficultés vous avez su, grâce à vos compétences et votre volonté, vous imposer face aux équipes ukrainiennes et apporter organisation et rigueur dans le travail[...] ».
Il est avéré que le salarié a occupé des fonctions de chef d'équipe pour les travaux de maçonnerie et d'installation de prédalles, dans le courant de l'année ce que l'employeur a expressément indiqué aux termes de la lettre de licenciement en évoquant une première expérience en tant que chef d'équipe sur le chantier de [Localité 4] et ce qui est confirmé tant par l'évaluateur en 2006 que par Monsieur [T] .
Toutefois, le salarié ne démontre pas avoir été confirmé ultérieurement dans ce poste par les éléments produits.
Au contraire, les différentes lettres que Monsieur [Y] a lui-même adressées à l'entreprise corroborent le constat qu'il n'exerçait pas les fonctions de chef d'équipe puisqu'il déplorait le recours à des salariés recrutés dans le cadre de contrats intérimaires pour occuper ces postes de chef d'équipe.
Le témoignage de Monsieur [L] est rédigé dans des termes très généraux et est imprécis en ce qu'il ne fournit aucune indication sur les périodes au cours desquelles les deux salariés ont collaboré.
S'agissant des constatations de Messieurs [S] et [V] [Q], la cour relève qu'elles sont en concordance avec les conclusions de l'employeur qui fait écrire que le salarié a effectivement été positionné en qualité de chef d'équipe sur les plannings à compter de la semaine 49 de l'année 2011 soit, sur le chantier de [Localité 2].
Dans ces conditions, à défaut pour le salarié d'établir qu'il a occupé réellement un poste de chef d'équipe sauf de manière ponctuelle dans le courant de l'année 2006, avant le 5 décembre 2011, date à laquelle l'employeur admet l'avoir positionné sur le planning en cette qualification « à l'essai » à compter de la semaine 49, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a reconnu cette qualité de chef d'équipe pour la seule période du 5 décembre 2011 au 23 mai 2012.
Au regard des objections pertinentes de l'employeur sur le montant des sommes accordées, le rappel de salaire sera limité à la somme de 401,60 euros outre les congés payés afférents.
Le jugement déféré sera réformé sur ce point.
Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ;
Selon l'article L. 3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Il incombe au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
Monsieur [Y] explique qu'il était réglé sur la base d'une durée hebdomadaire de travail de 35 heures mais qu'il accomplissait en réalité au moins 50 heures de travail par semaine.
Toutefois, Monsieur [Y] ne produit aux débats aucun élément pour étayer sa demande de rappel de salaire.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il n'a pas fait droit cette demande.
Sur le licenciement ;
En application des dispositions de l'article L. 1235 -1 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, « en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties...si un doute subsiste, il profite au salarié ».
La lettre de licenciement du 23 mars 2012 est rédigée dans les termes suivants :
« vous avez été engagé en qualité de coffreur au sein de l'entreprise puis vous avez passé les qualifications nécessaires pour occuper les fonctions de chef d'équipe. C'est dans ce contexte qu' au mois d'octobre 2010, vous avez été affecté sur le chantier du tunnel de [Localité 4]. Vos difficultés à occuper votre position de chef d'équipe nous ont conduits à vous réaffecter en qualité de coffreur.
Suite à vos différentes réclamations écrites, il a été décidé de vous donner une seconde chance et de vous affecter sur le chantier du tunnel de [Localité 2] afin d'occuper à nouveau le poste de chef d'équipe. Après une semaine passée sur ce chantier, votre chef de chantier a constaté que vous n'aviez pas les qualités requises pour occuper un tel poste.
Par ailleurs, il s'avère que vos équipes redoutent vos prises de décisions qui sont considérées comme pouvant compromettre à certains moments la sécurité de l'ouvrage et des collaborateurs. Pour preuve le 7 février 2012, vous avez décidé de démonter la conduite à béton sans prévenir vos collègues ni même vous soucier de savoir si ces derniers étaient à proximité. Or, lors de ce démontage, le tuyau est tombé sur la tête d'un de vos collègues lui occasionnant un dommage corporel et ce malgré son casque de protection. Outre ce manquement aux règles de sécurité, vous éprouvez des difficultés à apprécier des situations qui sont accidentogènes.
D'ailleurs, chaque remarque émise par votre hiérarchie est systématiquement contestée.
À titre d'exemple, il vous a été reproché d'utiliser un engin de chantier et ce alors que vous n'aviez pas le CACES correspondant à l'engin conduit, pour porter des pieds d'échafaudage qui auraient pu être portés à la main ; ce à quoi vous avez répondu « alors on ne va pas les prendre à la main ! Poids3 kilos ».
Vous n'acceptez en aucune façon les remarques qui vous sont faites par le supérieur hiérarchique, estimant que vous remplissez parfaitement vos fonctions. Votre attitude de défiance vis-à-vis de votre hiérarchie ainsi que la méfiance de vos collègues à votre égard quant à votre prise de décision ainsi que vos affectation au sein d'équipes différentes a permis de mettre en évidence toutes ses difficultés.
Or, aujourd'hui nous sommes au regret de constater que vous êtes dans l'impossibilité d'occuper le poste de chef d'équipe qui vous a été confié tant du point de vue de votre comportement que de vos compétences.
Nous sommes donc au regret de constater que nous sommes aujourd'hui dans une situation sans issue qui rend impossible la poursuite de nos relations contractuelles à l'avenir.
Aussi nous vous confirmons par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle[...] »
L'insuffisance professionnelle, qui se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié d'exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, constitue une cause légitime de licenciement.
Si l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal, l'insuffisance alléguée doit toutefois reposer sur des éléments concrets et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur.
Pour justifier le licenciement, les griefs formulés doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l'entreprise ou être préjudiciable aux intérêts de celle-ci.
Pour établir la réalité de faits matériellement vérifiables de nature à démontrer l'insuffisance professionnelle de Monsieur [Y], la SAS Dodin Campenon Bernard communique aux débats l'attestation de Monsieur [M] [J], conducteur de travaux, supérieur hiérarchique de Monsieur [Y] sur le chantier de [Localité 2] rédigée dans ces termes :
« [...]le vendredi 3 février 2012, Monsieur [Y] s'est permis de quitter son poste de travail en plein bétonnage de la voûte à 17 heures déséquilibrant l' équipe dans laquelle il était affecté pour prendre son train alors que sa journée de travail n'était pas terminée. Il n'a demandé l'autorisation de le faire ni à son responsable hiérarchique direct sur le chantier, ni à moi-même,
Le mardi 7 février 2012, Monsieur [Y] affecté dans l'équipe de coffrage des inter tubes a pris l'initiative, sans en référer au chef d'équipe Monsieur [E] ni au chef de chantier présent au moment des faits de démonter la conduite à béton mise en place[...] sans prévenir et sans se soucier de savoir si de ses collègues étaient à proximité. Un élément de la conduite ( tuyau) est alors tombé sur la tête d'un compagnon Monsieur [B] qui heureusement portait son casque mais s'est retrouvé avec une bosse malgré cette protection. Un autre collègue qui se trouvait à côté de lui a reçu un autre tuyau sur la main sans blessure.
Le mercredi 22 février 2012, [...]Monsieur [Y] en présence de son chef d'équipe Monsieur [E] [X] et de ses camarades de travail [...]a eu l'audace de prendre une mini pelle alors qu'il n'a ni le CACES, ni l'autorisation de conduite pour transporter 2 pieds d'échafaudage (poids approximatif 2 kg pièce) sur une distance à parcourir[...] de 6 mètres. Lorsque son chef d'équipe lui en a fait la remontrance, Monsieur [Y] a répondu « alors on ne va pas les porter à la main ». Cette attitude confirme que les prises de décisions de Monsieur [Y] ne sont pas en adéquation avec le rôle de chef d'équipe auquel il peut prétendre »
L'auteur de l'attestation ajoute : « j'ai fait en sorte depuis le début du chantier de mettre Monsieur [Y] dans différentes équipes pour trouver celle dans laquelle il pouvait se sentir le plus en confiance mais toutes les expériences se sont soldées par des échecs et au final, plus aucun chef de chantier ne souhaitait l'avoir dans ses équipes. En effet, Monsieur [Y] ne reconnaît pas l'autorité des chefs de chantier et chefs d'équipe sous les ordres desquels il est placé et se manifeste par des excès de zèle et des prises d'initiatives hasardeuses basées sur des mauvaises analyses des situations aux conséquences qui peuvent se révéler accidentogènes. Pour un salarié qui prétend à la fonction de chef d'équipe, Monsieur [Y] n'a ni les qualités requises ni le comportement adéquat. Même employé en tant que compagnon, il fait preuve d'insubordination et j'avais donc informé ma hiérarchie que je ne voulais plus de lui dans mes équipes ne serait-ce que pour des raisons de sécurité. »
Monsieur [Y] demande que ce témoignage de Monsieur [J] soit écarté au motif qu'il a déposé une plainte à son encontre pour attestation mensongère et faux témoignage.
Toutefois, la cour relève que Monsieur [Y] ne justifie pas des suites données à la plainte qu'il a déposée, en 2014, soit depuis plus de trois années, à l'encontre de Monsieur [J] pour faux témoignage et attestation mensongère.
Cette attestation ne sera donc pas écartée des débats.
Par ailleurs, pour combattre le constat opéré par le chef de chantier, Monsieur [Y] renvoie aux témoignages de Messieurs [Q] [S] et [V] qui précisent qu'il : « a travaillé en sécurité, qu'il faisait son travail correctement et qu'il avait un bon comportement »
Or, la cour observe que Messieurs [S] et [V] [Q], présents sur le chantier de [Localité 2] ne remettent absolument pas en cause de façon précise et circonstanciée les constatations de Monsieur [J], ni surtout ne font état du fait que celui-ci a rapporté des faits inexistants s'agissant de la chute de deux tuyaux sur le casque d'un salarié et sur la main d'un autre en lien avec le démontage opéré par Monsieur [Y].
Par ailleurs, c'est vainement que Monsieur [Y] soutient que dans la mesure où les fonctions de chef d'équipe exercées sur le chantier de [Localité 2] ne correspondaient ni à sa qualification contractuelle, ni au salaire versé, l'employeur qui l'avait programmé à l'essai sur ce chantier comme chef d'équipe, ne pouvait se prévaloir d'une insuffisance professionnelle pour le licencier, qu'il pouvait tout au plus le rétablir dans son poste antérieur conforme à sa qualification contractuelle.
En effet le témoignage de Monsieur [J] montre que Monsieur [Y] qui prétendait à un poste de chef d'équipe depuis plusieurs années, ne reconnaissait pas l'autorité de ses supérieurs hiérarchiques, qu'il s'agisse de chef de chantier ou de chef d'équipe, faisait preuve d'excès de zèle, prenait des initiatives hasardeuses, basées sur de mauvaises analyses des situations aux conséquences pouvant se révéler accidentogènes.
Il se déduit de ce qui précède, que Monsieur [Y], salarié assidu, s'autorisait à prendre des initiatives hasardeuses susceptibles de porter atteinte à la sécurité de ses collègues et du chantier, sans respecter les consignes de ses supérieurs hiérarchiques et ce quelle que fût sa qualification de « chef de file coffreur » ou de « chef d'équipe », le conducteur des travaux exprimant le constat qu'il ne pouvait plus l'affecter à aucun poste dans aucune équipe.
Le jugement ayant retenu que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse sera en conséquence confirmé.
Sur les demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
L'équité commande tout à la fois de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à Monsieur [Y] une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile mais de débouter les deux parties de leurs réclamations à ce titre pour les frais exposés en cause d'appel.
Monsieur [Y] qui succombe dans la présente instance, sera condamné aux dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a alloué au salarié un rappel de salaire d'un montant de
652,11 euros outre les congés payés afférents
Le réforme sur ce point,
Statuant à nouveau,
Condamne la SAS Dodin Campenon Bernard à verser à Monsieur [Y] la somme de 401,60 euros outre 40,16 euros pour les congés payés afférents,
Déboute les parties du surplus de leurs demandes,,
Condamne Monsieur [Y] aux entiers dépens.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE