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16/05/2018 | FRANCE | N°16/02207

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 16 mai 2018, 16/02207


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 16 Mai 2018



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/02207



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/18081





APPELANT

Monsieur [P] [Q]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Célia DUFOUR de la SELEURL COM

ES AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0532





INTIMÉES

Me [I] [G]- Mandataire liquidateur de SAS DSF MARKETS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Isabelle FRANCOU avocate ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 16 Mai 2018

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/02207

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/18081

APPELANT

Monsieur [P] [Q]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Célia DUFOUR de la SELEURL COMES AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0532

INTIMÉES

Me [I] [G]- Mandataire liquidateur de SAS DSF MARKETS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Isabelle FRANCOU avocate au barreau de Paris (D2082), substituée par Me Valentin TREAL, avocat au barreau de Paris

Monsieur [Y] [V] - Liquidateur amiable de SA SOCIETE DU 25 JUILLET 2013

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Fabienne ARRIGHI, avocat au barreau de PARIS, toque : J008

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 1] prise en la personne de son Directeur, Monsieur [T] [P]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentée par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Marina DUCOTTET CHAREYRON, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre, rédactrice,

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Mme Aline DELIERE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Clémence UEHLI, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Monsieur [P] [Q] a été embauché par la SA Bil Finance, filiale de la Banque Internationale à Luxembourg, désormais dénommée Société du 25 juillet 2013, par contrat de travail à durée indéterminée en date du 14 septembre 2012, à effet au 9 octobre 2012, en qualité de managing director Corporate finance, en charge des activités Corporate pour une rémunération fixe brute annuelle de 180'000 €outre une rémunération variable discrétionnaire.

Monsieur [P] [Q] était nommé directeur général délégué de la société Bil Finance le 30 octobre 2012.

Le 28 mai 2013 la SA Bil Finance lors d'une réunion extraordinaire des délégués du personnel leur soumettait un projet de cession totale du fonds de commerce à la société DSF Markets. Lors d'une deuxième réunion extraordinaire en date du 30 mai 2013 les délégués du personnel émettaient un avis favorable à la solution de la cession de la totalité du fonds de commerce à DSF Markets pour la sauvegarde des emplois.

Par lettre recommandée avec accusé de réception date en du 25 juin 2013 la société Bil Finance informait Monsieur [Q] du transfert de son contrat de travail à la SAS DSF Markets le 25 juillet 2013 en application des dispositions de l'article L 1124-1 du code du travail, suite à la cession du fonds de commerce selon acte du 25 juin 2013

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 septembre 2013 Monsieur [Q] était convoqué par la société DSF Markets à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 4 octobre 2013 avec mise à pied à titre conservatoire.

Le 8 octobre 2013 la société DSF Markets notifiait à Monsieur [Q] son licenciement pour faute grave.

Par jugement en date du 14 mai 2014 le tribunal de commerce de Paris a ouvert la liquidation judiciaire de la société DSF Markets et a désigné la SCP [I] en qualité de liquidateur.

Par décision de son assemblée générale en date du 21 mai 2014 la Société du 25 juillet 2013, anciennement Bil Finance, faisait l'objet d'une liquidation amiable.

Le 18 décembre 2013, Monsieur [Q] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris en annulation de son licenciement et en condamnation solidaire des sociétés DSF Markets et Bil Finance à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement nul, des indemnités de rupture et un rappel de salaire pendant la mise à pied, et subsidiairement en contestation de son licenciement et en condamnation de DSF Markets à lui payer des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail outre les indemnités de rupture.

Par décision en date du 11 janvier 2016, le Conseil de Prud'hommes a mis hors de cause la société Bil Finance, devenue Société du 25 juillet 2013, dit que le licenciement de Monsieur [Q] est abusif et a fixé sa créance au passif de la société DSF Markets, représentée par la SCP [I] en sa qualité de liquidateur judiciaire, aux sommes suivantes :

- 15'000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1500 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 9295,77 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire,

- 929,57 euros au titre des congés payés afférents,

ces sommes produisant intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation,

- 15'000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

et a débouté Monsieur [Q] de ses autres demandes et les défendeurs de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 11 février 2016, Monsieur [Q] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 20 mars 2018, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Monsieur [Q] conclut à la réformation partielle du jugement entrepris. Il demande sa confirmation ce qui concerne le montant du rappel de salaire et de congés payés afférents pendant la mise à pied conservatoire, et en ce qui concerne le montant des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis. Il sollicite son infirmation pour le surplus et demande à la cour de dire son licenciement nul et demande la condamnation des sociétés DSF Markets et Bil Finance à lui payer les sommes suivantes :

- 8125 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 540'000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul, ou subsidiairement 270'000 €

à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

- 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 20 mars 2018 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la société DSF Markets, représentée par la SCP [I] mandataire liquidateur, demande la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur [Q] en annulation de son licenciement et à son infirmation pour le surplus. Elle demande à la cour de juger le licenciement de Monsieur [Q] bien-fondé et de le débouter de toutes ses demandes. Subsidiairement elle demande à la cour de fixer la somme due au titre du rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire à 7000 € outre 700 € au titre de congés payés afférents. En tout état de cause elle demande la condamnation de Monsieur [Q] à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 20 mars 2018 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence la Société du 25 juillet 2013, anciennement dénommée Bil Finance, prise en la personne de son liquidateur amiable, demande la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il l'a mise hors de cause et la condamnation de Monsieur [Q] à lui payer la somme de 3500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 20 mars 2018 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence l'AGS-CGEA d'[Localité 2] demande sa mise hors de cause. Elle conclut à l'irrecevabilité des demandes en condamnation formées par Monsieur [Q] à l'encontre de la société en procédure collective, à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté Monsieur [Q] de sa demande en annulation du licenciement et à son infirmation pour le surplus. Elle conclut au débouté total de Monsieur [Q] et rappelle les limites de sa garantie.

MOTIVATION

* Sur la recevabilité des demandes en condamnation à l'encontre de la SAS DSF Markets :

Ces demandes s'analysent implicitement et nécessairement en demandes en fixation de créances au passif de la liquidation judiciaire de cette société. La fin de non-recevoir soulevée par l'AGS sera donc écartée.

* Sur la collusion frauduleuse entre les sociétés Bil Finance et DSF Markets :

La bonne foi est présumée et il incombe à Monsieur [Q] de rapporter la preuve d'une fraude entre les deux sociétés cédante et cessionnaire.

Pour accréditer l'existence d'une collusion frauduleuse entre ses deux employeurs successifs M. [Q] se fonde principalement sur un rapport effectué par une société d'expertise comptable CE Consultant en décembre 2014 à la demande du comité d'entreprise de la société DSF Markets.

À l'examen de celui-ci il apparaît que sans le rachat du fonds de commerce de Bil Finance le 25 juin 2013 la trésorerie de DSF Markets aurait été négative au 30 juin 2013, date d'échéance donnant lieu à un arrêté des comptes reporté à l'ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel), autorité de tutelle. Selon les auditeurs, ce rachat du fonds Corporate, sans condition suspensive d'obtention d'un agrément pour l'activité placements, a permis à DSF Markets de comptabiliser une indemnité de trésorerie de 5 346 k euros versée par la société mère, la société BIL, ce qui a sauvé DSF Markets du risque de perte de ses agréments.

Surtout le cabinet CE Consultant estime que ces opérations n'avaient qu'un objectif soutenir artificiellement DSF Markets pour retarder sa déconfiture dans le but de tenir à l'écart de toutes responsabilités juridique et sociale la société mère de Bil Finance, la BIL banque internationale du Luxembourg. À l'appui de ce point de vue il relève notamment que DSF Markets était en état de cessation de paiement dès le mois de juin 2012.

Il est exact que la société DSF Markets qui détenait des agréments de l'ACPR pour la compensation d'instruments financiers, la réception et la transmission d'ordres pour le compte de tiers, l'exécution d'ordres pour le compte de tiers, la négociation pour compte propre, le conseil en investissement pour : les titres de capital émis par les sociétés par actions, les titres de créance, les instruments financiers à terme, les autres instruments financiers étrangers, ne disposait pas de l'agrément pour les placements non garantis à la différence de la SA Bil Finance, et que sa demande d'obtention de cet agrément était en cours d'instruction au moment de réalisation de la cession. Or, ainsi que cela résulte du procès-verbal de la réunion du conseil d'administration du 7 juin 2013, lors duquel Monsieur [Q] était présent, les activités concernées par le service de placements représentaient 50 % du chiffre d'affaires budgétés en 2013 de la société Bil Finance.

En revanche, contrairement à l'appréciation portée par le cabinet CE Consultant, le tribunal de commerce de Paris, saisi d'une demande de report de la date de cessation des paiements par le liquidateur de la société DSF Markets a maintenu par jugement en date du 17 décembre 2015 la fixation de cette date au 10 février 2014.

Ainsi lors de la cession du fonds de commerce à DSF Markets cette dernière était in bonis et la seule considération tirée de l'absence de condition suspensive quant à l'obtention de l'agrément 'placements non garantis' ne permet pas à elle seule de caractériser une collusion frauduleuse entre les deux sociétés, étant observé que la demande d'extension d'agrément formée par DSF Markets devait être examinée par l'ACPR le 3 octobre 2013.

La décision de l'actionnaire majoritaire de Bil Finance de cesser toute activité soit par voie de cession du fonds soit par voie de cessation d'activité est une décision de stratégie économique sur laquelle la cour n'a pas à se prononcer. Quant à la décision d'acquisition par la SAS DSF Marketss, qui espérait par cette opération de rachat élargir son offre de services, elle a été soumise à la consultation du comité d'entreprise de DSF Markets lors de la séance extraordinaire du 14 mai 2013 et les membres du comité d'entreprise ont émis à l'unanimité un avis favorable à ce projet.

La preuve de la fraude n'est pas établie.

Monsieur [Q] a bien été informé le 25 juin 2013 du transfert de son contrat de travail à DSF Markets, en application des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail, avec un effet différé au 25 juillet 2013, date prévue pour la réalisation de l'unique contrat de placement non garanti obligataire en cours d'exécution (dossier [X]).

Cependant il convient de relever qu'à la lecture de son contrat de travail l'activité de Monsieur [Q] n'était pas limitée aux placements non garantis. Il était en charge de toutes les activités Corporate et ne démontre par aucune pièce que ses tâches étaient majoritairement rattachées à l'activité de placement pour laquelle la demande d'agrément formée par DSF Markets était toujours en cours.

Le contrat de travail de M. [Q] a bien été transféré le 25 juillet 2013 date à laquelle Bil Finance a été déchargée du dossier [X] par le client . Affecté à une entité économique transférée en application du contrat de cession de la totalité du fonds, son contrat de travail a été transféré dans son ensemble même s'il a continué pendant un mois a exercé des tâches dans un secteur encore exploité par la société cédante Bil Finance.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis hors de cause la Société du 25 juillet 2013, a débouté Monsieur [Q] de sa demande en annulation de son licenciement et de ses demandes subséquentes.

* Sur la rupture du contrat de travail :

Liminairement il convient de rappeler que la lettre de licenciement fixe les termes du litige et que le refus du transfert de son contrat de travail par le salarié n'est pas visé par la lettre de licenciement et ne peut donc être invoqué pour tenter de justifier celui-ci.

Le licenciement pour faute grave de Monsieur [Q] est motivé par trois types de griefs :

- un dénigrement systématique de DSF Markets : plus précisément il est reproché à Monsieur [Q] de ce répandre sur le fait que DSF Markets ne disposerait pas d'agréments suffisants, que son bilan ne serait pas de nature à rassurer les clients, qu'elle aurait des fonds propres ridicules, un résultat d'exploitation insuffisant et qu'elle ne supporterait pas la comparaison avec les structures bancaires fréquentées par Monsieur [Q] jusqu'alors. La société DSF Markets, représentée par son liquidateur, ne produit aucune pièce de nature à établir la réalité de tels propos. Ce grief ne sera pas retenu.

- Une incompréhension et un refus d'adhésion à l'organisation de DSF Markets, à l'exploitation de ses différents métiers en particulier la séparation qui doit exister entre les activités Corporate et les activités d'intermédiation : aucune pièce n'est produite pour étayer la réalité de ce grief qui ne sera pas retenu.

- Une insubordination caractérisée : un refus de rendre compte de son activité par des compte-rendus sur son emploi du temps, l'état d'avancement de ses travaux, de ses rendez-vous selon un rythme hebdomadaire. M. [Q] fait valoir qu'il est resté dans les locaux de son ancien employeur et n'a jamais disposé de moyens permettant de faire face à son activité.

Outre le fait que l'obligation de rapporter chaque semaine ses activités apparaît en décalage total avec le niveau hiérarchique de M. [Q] les fonctions qu'il occupait jusque-là, la société ne fournit aucun document de nature à déterminer le périmètre des responsabilités et des activités qu'elle entendait lui confier.

S'agissant du refus de M. [Q] de transmettre un projet de business plan il est établi que ce document lui a été demandé par courriels de l'employeur les 16 et 18 septembre 2013 et qu'il ne l'a jamais transmis.

Parailleurs M. [Q] reconnaît être resté dans l'entreprise après réception d'un e-mail le 24 septembre l'informant de la décision de sa mise à pied à titre conservatoire, mais avoir obtempéré à réception de la lettre de notification de cette décision le 25 septembre après-midi. Monsieur [Q] aurait dû dès le 24 septembre 2013 quitter l'entreprise. Son maintien dans celle-ci a un caractère fautif.

Ce dernier fait, qui résulte d'une mauvaise connaissance des règles de droit applicables en la matière, et non d'une volonté de défier l'employeur a un caractère bénin.

Quant à la non communication d'un business plan par voie écrite, si ce grief a incontestablement un caractère plus sérieux il doit être re-situé dans le contexte particulièrement difficile pour le salarié, dont le bureau n'avait pas été rapatrié dans les locaux de l'entreprise, qui venait de perdre sa fonction de directeur général délégué, et auquel son nouvel employeur n'avait manifestement communiqué aucun des nombreux renseignements sollicités par courriel du 17 septembre 2013 en vue de la préparation de la réunion du 18 septembre 2013. Renseignements sur le développement d'activités Corporate, sur l'articulation des activités Corporate avec les activités de courtage actuelles.... étant observé que Monsieur [Q] a terminé ce courriel par des questions quant à l'accès à des systèmes informatiques, la mise à sa disposition de cartes de visite, à la possibilité d'inviter des clients à déjeuner, à la procédure à respecter pour les notes de frais etc.

Aucune réponse de l'employeur n'est produite.

Dès lors, dans un contexte de rétention d'informations par l'employeur et de défaut de mise à disposition d'un certain nombre de moyens il y a lieu de considérer que le défaut de transmission d'un business plan avant une réunion qui s'est tenue le 20 septembre 2013 ne peut caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

* Sur l'indemnisation du préjudice né du licenciement abusif :

Le montant des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés sur préavis ne fait l'objet d'aucune discussion et le jugement entrepris sera donc confirmé à cet égard.

Il en va de même en ce qui concerne le rejet de la demande de Monsieur [Q] en paiement d'une indemnité de licenciement. En effet au jour de la notification de son licenciement le 8 octobre 2013, jour d'expédition de la lettre de licenciement le cachet de la poste faisant foi, Monsieur [Q] avait moins d'un an d'ancienneté or, le droit au versement d'une indemnité de licenciement légal comme conventionnelle suppose que le salarié ait au moins un an d'ancienneté.

S'agissant du rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire M [Q] est en droit de prétendre à un rappel de salaire du 25 septembre jusqu'au 8 octobre 2013, soit la somme de 7500 € bruts outre 750 € bruts au titre des congés payés afférents. Le jugement entrepris sera donc réformé en ce qui concerne le montant de sa créance à ce titre.

Aux termes des dispositions de l'alinéa 2 de l'article L 1235-5 du code du travail, le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté ou celui employé par une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, peut prétendre en cas de licenciement abusif, à une indemnité calculée en fonction du préjudice subi. Monsieur [Q] avait un an d'ancienneté il percevait une rémunération de 15'000 € bruts par mois a connu une longue période pendant laquelle il a été indemnisé par pôle emploi. Il justifie de nombreuses recherches d'emploi.

Au regard de ces éléments, de son âge au moment de son licenciement, il y a lieu de réformer le jugement entrepris et de fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société DSF Markets à la somme de 54'000 € à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif.

* Sur les autres demandes

La société DSF Markets qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamnée aux dépens de la procédure.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de Monsieur [Q] et la société DSF Markets sera condamnée à lui payer une indemnité de 2000 € à ce titre.

En revanche il apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Bil Finance les frais irrépétibles qu'elle a engagés dans le cadre de la présente instance. Elle sera déboutée de sa demande à l'encontre de Monsieur [Q] à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Écarte la fin de non-recevoir soulevée par l'AGS-CGEA

Infirme le jugement déféré en ce qui concerne le montant des créances de Monsieur [Q] au titre du rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, des congés payés afférents, et des dommages-intérêts pour licenciement abusif,

et statuant de nouveau

Fixe, la créance de Monsieur [Q] au passif de la liquidation judiciaire de la société DSF Markets aux sommes suivantes :

- 7500 € bruts à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 750 € au titre des congés payés afférents,

- 54'000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

Confirme le jugement entrepris pour le surplus,

Y ajoutant,

Déboute la société du 25 juillet 2013 de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la société DSF Markets, représentée par son liquidateur la SCP [I] à verser à Monsieur [Q] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société DSF Markets, représentée par son liquidateur la SCP [I] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/02207
Date de la décision : 16/05/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°16/02207 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-05-16;16.02207 ?
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