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12/04/2018 | FRANCE | N°17/14047

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 12 avril 2018, 17/14047


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 12 Avril 2018



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/14047



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 17/00789





APPELANTE DU CHEF DE LA COMPETENCE

SCI METEOR

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Olivier BERNABE, avoc

at au barreau de PARIS, toque : B0753, avocat postulant

représentée par Me Maryla GOLDSZAL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0800, avocat plaidant





INTIMEE DU CHEF DE LA COMPE...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 12 Avril 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/14047

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - section commerce - RG n° 17/00789

APPELANTE DU CHEF DE LA COMPETENCE

SCI METEOR

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753, avocat postulant

représentée par Me Maryla GOLDSZAL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0800, avocat plaidant

INTIMEE DU CHEF DE LA COMPETENCE

Madame [W] [K]

née le [Date naissance 1] 1980 à [Localité 2]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

représentée par Me Cécile ARVIN-BEROD, avocat au barreau de PARIS, toque : D1892, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine MÉTADIEU, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine MÉTADIEU, Président

Madame Patricia DUFOUR, Conseiller appelé à compléter la chambre par ordonnance de roulement en date du 05 janvier 2018

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.

Statuant sur l'appel interjeté le 20 novembre 2017 par la SCI METEOR à l'encontre du jugement rendu le 19 octobre 2017 par le conseil de prud'hommes de PARIS qui s'est déclaré compétent et a renvoyé l'affaire à l'audience de jugement du 29 mai 2018 ;

Vu les conclusions déposées le 8 février 2018 sur le RPVA par la SCI METEOR qui demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

- dire qu'il n'a existé aucune relation professionnelle salariée entre la SCI METEOR et [W] [K]

- déclarer le conseil de prud'hommes de PARIS incompétent au profit le cas échéant du tribunal d'instance du 17ème arrondissement de PARIS

- débouter [W] [K] de toutes ses demandes, fins et conclusions

Subsidiairement,

Si la cour devait se déclarer compétente et décidait d'évoquer le fond du dossier;

- ordonner le renvoi en invitant les parties à conclure au fond

Au principal

- condamner [W] [K] au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions déposées le 13 février 2018 sur le RPVA par [W] [K] qui demande à la cour de :

In limine litis,

- constater l'irrecevabilité de l'exception de procédure soulevée par la SCI METEOR

En tout état de cause,

- la dire mal fondée en ses demandes

- confirmer le jugement déféré

- déclarer le conseil de prud'hommes de PARIS compétent pour connaître du litige qui l'oppose à la SCI METEOR

Vu l'article 88 du code de procédure civile,

- évoquer le fond de l'affaire

- fixer la moyenne des trois derniers mois de salaire à 680 euros bruts

- juger que la rupture du contrat s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- condamner la SCI METEOR au paiement de :

' 3 510 euros de rappel de salaire (août 2016 à janvier 2017),

' 351 euros de congés payés afférents,

' 1 350 euros d'indemnité compensatrice de préavis,

' 135 euros de congés payés,

' 552,50 euros d'indemnité de licenciement,

' 4 080 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

avec intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation

- ordonner la capitalisation des intérêts

- ordonner la remise des documents sociaux conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document

- condamner la SCI METEOR au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE LA COUR,

[W] [K] a été embauchée à compter du 1er octobre 2013, aux termes d'une lettre d'engagement datée du 21 septembre 2013 par la SCI METEOR.

Ce contrat a fait l'objet d'une déclaration préalable à l'embauche auprès des services des Urssaf, pour une durée de travail de 33 heures par mois.

[W] [K] a été convoquée le 19 décembre 2016, pour le 30 décembre suivant à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Son licenciement pour faute grave lui a été notifié par lettre recommandée datée du 5 janvier 2017.

Estimant ne pas avoir été remplie de ses droits et contestant son licenciement, elle a, le 2 février 2017, saisi le conseil de prud'hommes.

In limine litis, la SCI METEOR a soulevé une exception d'incompétence matérielle.

C'est dans ces conditions qu'a été rendu le jugement déféré.

MOTIFS

Aux termes de l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions de ce même code entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient.

Il règle les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

Il résulte des articles L. 1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination, lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

L'existence d'un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur.

L'existence d'un lien de subordination n'est pas incompatible avec une indépendance technique dans l'exécution de la prestation.

En présence d'un contrat de travail écrit ou apparent, il appartient à celui qui entend en contester l'existence de rapporter la preuve de son caractère fictif.

La SCI METEOR précise que le contrat de travail dont se prévaut [W] [K] est signé par M. [J], son gérant, décédé le [Date décès 1] 2016, que sa fille a repris l'ensemble des sociétés dont il assurait la gérance, et que, dès qu'elle a eu connaissance de ce contrat, elle en a contesté le bien fondé.

Elle fait valoir que la mère d'[W] [K], Mme [M], était la compagne de son père, qu'au moment de la signature du contrat, celui-ci n'était plus en état de faire connaître sa volonté ni de signer quelque document que ce soit, que la lettre d'engagement comme la déclaration préalable à l'embauche ont été établies par Mme [M], qu'aucun lien de subordination entre les parties n'a jamais existé, qu'[W] [K] prenait ses instructions auprès de sa mère seule, étrangère à la SCI, et enfin qu'aucun contrôle du travail prétendu ne lui était imposé.

Elle fait enfin observer que c'est également Mme [M] qui signait les chèques de salaire.

[W] [K], quant à elle, fait observer que ce n'est que postérieurement au décès de M. [J] que la situation contractuelle a été remise en cause, qu'elle a effectué une véritable prestation de travail, qu'elle a perçu en contrepartie une rémunération et qu'elle était placée dans un lien de subordination à l'égard de la SCI METEOR.

La SCI METEOR verse aux débats de nombreuses pièces médicales qui établissent de manière incontestable que depuis le début de l'année 2007 M. [J] est affaibli notamment au plan mental :

- le Docteur [P] conclut son compte-rendu d'hospitalisation (du 30 mars au 17 avril 2007) en ces termes : 'démence lacunaire chez un patient avec multiples antécédents des lacunes ischémiques ...',

- compte-rendu d'hospitalisation du 23 au 30 juillet 2010 : 'conclusion : syndrome dépressif réactionnel : démence vasculaire, état grabataire',

- compte-rendu d'hospitalisation du 31 octobre au 2 novembre 2011 : 'conclusion:

diabète de type 2 connu depuis 7 ans chez un homme de 76 ans avec des AVC multiples responsables d'un état grabataire...'.

Aux termes de son attestation établie le 23 août 2017, le Docteur [I], neurologue, fait état d'antécédents médicaux certains, et ce depuis 2004, un de ses confrères, le Docteur [Z], neurologue à l'hôpital [Établissement 1], évoquant en avril 2004 des 'troubles intellectuels et cognitifs ... témoignant d'une démence débutante'.

Il précise qu'au vu de l'ensemble des pièces médicales qui lui ont été soumises 'on peut affirmer que M. [J] présentait une démence vasculaire avec troubles cognitifs ayant débuté au moins en 2002 avec des tests en 2004 mettant en évidence une démence légère et débutante et en 2007 une démence déjà sévère avec des troubles du comportement, du caractère, une agressivité entraînant des difficultés dans la prise en charge de sa maladie vasculaire, de son diabète et de nombreuses hospitalisations'.

Il doit à cet égard être relevé que la mère d'[W] [K] indiquait elle-même dans une lettre en date du 25 juillet 2008 adressée à la fille de M. [J], actuelle gérante de la SCI, après avoir noté que ce dernier ne marchait quasiment plus, : 'La baisse de ses facultés mentales et intellectuelles me préoccupe davantage. Il concentre toute son énergie sur des projets d'achat inadaptés à son état [...]'.

Outre le fait que ces éléments permettent d'établir que le gérant de la SCI METEOR n'était pas en mesure d'engager contractuellement la société en septembre 2013, l'appelante verse aux débats la copie d'un blog «les aventures d'[W]», tenu par [W] [K] entre la mi-novembre 2015 et mars 2016 montrant que durant toute cette période elle a séjourné en Indonésie et a de plus donné des cours de plongée ou assuré d'autres prestations.

Cette situation est incompatible avec celle d'une salariée, ainsi qu'elle se revendique, aucune pièce ne permettant de constater qu'elle aurait obtenu de la part de la SCI une quelconque autorisation d'absence pendant une période aussi longue (plus de quatre mois).

Par ailleurs et s'agissant des prestations qu'elle prétend avoir accomplies, la cour constate que la plupart des courriels versés aux débats émanent de la mère de l'intéressée Mme [M], l'expert comptable de la SCI attestant par ailleurs que cette dernière était sa seule interlocutrice, qu'il élaborait les fiches de paie de Mme [M] et qu'il n'était pas en mesure de connaître l'identité du signataire des chèques en règlement de ces fiches de paie.

La SCI METEOR verse aux débats des éléments de preuve pertinents démontrant le caractère fictif de la lettre d'engagement du 21 septembre 2013.

Il convient par conséquent d'infirmer le jugement déféré, de dire que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail, de dire le conseil de prud'hommes de Paris incompétent, de dire le tribunal d'instance du 17ème arrondissement de PARIS compétent, compte tenu du montant des sommes sollicitées devant le conseil, et de renvoyer l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et d'allouer à la SCI METEOR la somme de 1 200 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement rendu le 19 octobre 2017 par le conseil de prud'hommes de PARIS

Dit que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail

Dit le conseil de prud'hommes de PARIS incompétent

Déclare le tribunal d'instance du 17ème arrondissement de PARIS compétent pour connaître du litige

Renvoie l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige

Condamne [W] [K] à payer à SCI METEOR la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne [W] [K] aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 17/14047
Date de la décision : 12/04/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°17/14047 : Se dessaisit ou est dessaisi au profit d'une autre juridiction


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-12;17.14047 ?
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