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12/04/2018 | FRANCE | N°17/13111

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 12 avril 2018, 17/13111


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 12 Avril 2018



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/13111



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° F16/03460





APPELANT DU CHEF DE LA COMPETENCE

Monsieur [G] [G]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[

Adresse 1]

comparant en personne et assisté de Me Samya BOUICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0479, avocat postulant et plaidant





INTIMEE DU CHEF DE LA COMPETENCE

SAS ER...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 12 Avril 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 17/13111

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Octobre 2017 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS - section encadrement - RG n° F16/03460

APPELANT DU CHEF DE LA COMPETENCE

Monsieur [G] [G]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparant en personne et assisté de Me Samya BOUICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0479, avocat postulant et plaidant

INTIMEE DU CHEF DE LA COMPETENCE

SAS ERIDANIS FRANCE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

N° SIRET : 804 775 120

représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044, avocat postulant

représentée par Me Ségolène VIAL, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 161, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 février 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine MÉTADIEU, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine MÉTADIEU, Président

Madame Patricia DUFOUR, Conseiller appelé à compléter la chambre par ordonnance de roulement en date du 05 janvier 2018

Monsieur Christophe ESTEVE, Conseiller

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, Président et par Madame FOULON, Greffier.

Statuant sur l'appel formé le 27 octobre 2017 par [G] [G] à l'encontre du jugement rendu le 9 octobre 2017 par le conseil de prud'hommes de PARIS qui s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de PARIS ;

Vu l'assignation à jour fixe délivrée le 15 novembre 2017 à la requête de [G] [G] à la SAS ERIDANIS France ;

Vu les conclusions déposées le 8 février 2018 sur le RPVA par [G] [G] qui demande à la cour d'infirmer le jugement déféré et de :

- se déclarer compétente

- juger qu'il a bien la qualité de salarié statut cadre

- ordonner la requalification du mandat social en contrat de travail à effet du 1er octobre 2014, sous le statut de cadre et au poste de directeur technique

- évoquer le fond

- juger la rupture de son contrat de travail irrégulière et sans cause réelle et sérieuse

- ordonner à la SAS ERIDANIS France la régularisation sans délai des cotisations au titre de la privation d'emploi, et la remise d'un bulletin de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation Pôle emploi conformes sous astreinte de 100 euros par jour de retard

En conséquence,

-condamner la SAS ERIDANIS France à lui payer les sommes de :

' 22 249,98 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 2 224,99 € à titre de congés payés afférents,

' 2 884,28 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes

' 7 416,66 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure de licenciement,

' 133 499,88 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

' 15 000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale,

' 44 499,96 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

avec intérêts aux taux légal à compter de l'arrêt

' 3 600 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la capitalisation des intérêts

- ordonner la remise d'une attestation Pôle emploi et d'un bulletin de paie rectifié conformes ;

Vu les conclusions déposées le 3 janvier 2018 sur le RPVA pour la SAS ERIDANIS France qui demande à la cour de :

Sur la compétence,

- confirmer le jugement déféré

A titre subsidiaire,

- débouter [G] [G] de l'ensemble de ses demandes

'A titre reconventionnel',

- condamner [G] [G] au paiement de la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

SUR CE LA COUR,

[G] [G] expose qu'il est entré au service de la SAS ERIDANIS France le 1er octobre 2014, en qualité de directeur général, sous un statut de mandataire social, mais qu'en réalité, il exerçait les fonctions de directeur technique de la société, qu'il était placé sous la responsabilité directe d'[C] [O], « chief executive officer » et sous la hiérarchie indirecte de [D] [D], président directeur général de la société et qu'il percevait une rémunération brute mensuelle moyenne de 7 416,66 euros.

Il a été révoqué de ses fonctions de directeur général le 1er décembre 2015.

C'est dans ces circonstances, que [G] [G] a, le 31 mars 2016, saisi le conseil de prud'hommes.

MOTIFS

Aux termes de l'article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions de ce même code entre les employeurs ou leurs représentants et les salariés qu'ils emploient.

Il règle les litiges lorsque la conciliation n'a pas abouti.

Il résulte des articles L. 1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination, lorsque l'employeur en détermine unilatéralement les conditions d'exécution.

L'existence d'un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur.

L'existence d'un lien de subordination n'est pas incompatible avec une indépendance technique dans l'exécution de la prestation.

Un mandat social n'est pas incompatible avec un contrat de travail.

Toutefois, pour que le cumul soit possible, il faut que le contrat de travail corresponde à un emploi effectif s'entendant de fonctions techniques distinctes de celles de direction, donnant lieu en principe à rémunération distincte, exercée dans le cadre d'un lien de subordination vis-à-vis de la société et dans des conditions exclusives de toute fraude à la loi. Ces règles sont applicables aux fonctions de dirigeant.

Il appartient au dirigeant social qui se prévaut d'un contrat de travail d'en apporter la preuve, même en présence d'un contrat de travail écrit ou apparent.

[G] [G] invoque l'existence d'un contrat de travail apparent résultant de la remise de bulletins de salaire et fait valoir que :

- son statut de directeur général était purement fictif, ces fonctions étant occupées en réalité par [C] [O], directeur des opérations France, engagé à compter du 24 septembre 2014 selon un contrat de travail à durée indéterminée

- il est entré en fait en fonction le 1er octobre 2014,

- il exerçait des fonctions de directeur technique,

- il n'avait aucune autonomie, et ne prenait aucune décision administrative ou financière ou de gestion,

- il était placé dans un lien de subordination dès lors que des objectifs lui étaient fixés,

- il pilotait la direction technique de la société.

La SAS ERIDANIS France conteste ces affirmations et soutient que [G] [G] n'exerçait aucune fonction technique distincte de son mandat social.

Elle souligne le fait que c'est lui qui présidait les réunions hebdomadaires avec l'équipe de la SAS ERIDANIS France, qu'il est présenté comme directeur général de la société et comme pilotant 'également la direction technique du groupe'.

Elle précise qu'il ne percevait pas de rémunération spécifique au titre de fonctions techniques et qu'en aucun cas il n'a été placé dans un lien de subordination.

Selon son extrait Kbis, la SAS ERIDANIS a été constituée le 24 septembre 2014 puis immatriculée le 14 novembre 2014, avec comme président [D] [D] et comme directeur général [G] [G].

Cette société a pour associé unique la SA ROBINSON TECHNOLGIES

Aux termes d'un procès-verbal en date du 29 octobre 2014, cette société a pris la décision d'attribuer à [G] [G] une rémunération à effet rétroactif au 1er octobre 2014 constituée d'une partie fixe d'un montant mensuel de 6 116,66 € et d'une partie variable d'un montant annuel brut de 15 000 € à objectifs atteints, et prévoyant le remboursement sur justificatif des frais de représentation et de déplacement, et d'une manière générale des dépenses engagées pour le compte et dans l'intérêt de la société.

Il était également décidé en cette même occasion d'autoriser [G] [G] à :

'- négocier et signer tout type de contrats et tout document ayant trait aux affaires commerciales dans la limite de 800 000 euros ;

- négocier et contracter tout contrat de partenariat et coopération dont le montant ne pourra être supérieur à 800 000 euros ;

- négocier et conclure les contrats annexes connexes dont les engagements n'excèdent pas 800 000 euros'.

Il est en outre ajouté que [G] [G] 'aura la responsabilité de conclure tous les contrats de travail des salariés qui seront sous sa subordination, dans la limite de 60 000 euros bruts annuels par contrat de travail', au-delà, qu'il 'devra obtenir l'autorisation de M. [D] [D] , Président' et 'par exception' qu'il 'ne pourra pas conclure de contrat de travail visant à embaucher du personnel de structure, sauf autorisation expresse de M. [D] [D], Président'.

Contrairement à ce que [G] [G] affirme les courriels échangés le 16 février 2015 (pièce n°17 et 18) entre ce dernier, [C] [O] et [D] [D] ayant pour objet le paiement de leur rémunération variable ne permettent pas de constater qu'[C] [O] se comportait en directeur général à son égard, quand bien même il signait en tant que «CEO», [D] [J] attestant qu'il était effectivement 'CEO d' Eridanis UK'.

Les comptes-rendus de réunion sont tout aussi inopérants, l'intervention de [G] [G] au regard des enjeux et des clients concernés (à titre d'exemple AREVA ou VINCI) sont conformes aux missions qui lui ont été dévolues en sa qualité de directeur général, telles que rapportées ci-dessus.

Si dans des documents destinés aux tiers, business plan 2015-2016 (pièce 14) et bulletin hebdomadaire du 15 février 2015 (pièce n°41) [G] [G] est présenté comme «CTO» et s'il est mentionné dans la «VIE DES ENTREPRISES» tout à la fois qu'il est co-fondateur de la SAS ERIDANIS dont il 'pilote la direction technique', pour autant rien ne permet d'établir que :

- il exerçait en plus de son mandat social des fonctions techniques distinctes dont il y a lieu au demeurant de relever qu'elles ne sont nullement décrites ni explicitées par l'intéressé dans ses conclusions,

- il recevait des instructions, ordres ou de directives,

- la SAS ERIDANIS usait de moyens de contrôle qui lui auraient permis d'en vérifier la bonne exécution et encore moins qu'elle a pu faire un quelconque usage de son pouvoir disciplinaire envers lui.

Au contraire la SAS ERIDANIS produit de nombreuses pièces montrant que c'est bien en qualité de directeur général que :

- il a conclu une convention de rupture conventionnelle avec [Q] M. ainsi qu'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 16 février 2015

- il s'adresse à [U] [D] le 14 novembre 2015 : ' je rebondis sur la demande de M. [R] pour te demander les pièces dans le cadre de l'augmentation du capital d'Eridanis France de la semaine prochaine',

- il a signé plusieurs accords de confidentialité en février 2015,

- il a conclu le bail commercial du 13 mai 2005 concernant des locaux situés à [Adresse 3].

La teneur des échanges entre les parties ne permet pas plus de caractériser un quelconque lien de subordination de [G] [G] à l'égard de la SAS ERIDANIS et notamment d'[C] [O].

Dans un courriel en date du 25 février 2016 ayant pour objet : 'KPI commerce Eridanis', [G] [G] écrit : 'Voici le tableau commercial que je veux voir vivre : [...] [C]/ [Y], Je suis dispo pour affiner des points mais je pense que ce sont les bons KPI.', le ton utilisé montrant sans ambiguïté qu'il ne s'adressait pas comme il le prétend à un supérieur hiérarchique.

Par ailleurs, [Y] [U] atteste que le brevet co-déposé par GRTGAZ et la SAS ERIDANIS a fait l'objet d'un accord aux termes duquel [G] [G] 'directeur général de l'entreprise apparaîtrait en tant qu'inventeur comme mandataire de la société ERIDANIS pour les besoins administratifs'.

Enfin la cour relève que [G] [G] ne peut s'être mépris sur la nature de sa rémunération laquelle n'était pas soumise à cotisation sociale.

Aucune des pièces produites n'établit que [G] [G] exerçait des fonctions techniques distinctes de son mandat social de directeur général.

La preuve de la réalité du lien de subordination alléguée n'est de plus pas rapportée.

Le litige qui oppose les parties ne relève pas de la compétence du conseil de prud'hommes.

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, de dire que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail, de dire le conseil de prud'hommes de PARIS incompétent, de dire le tribunal de commerce de PARIS compétent et de renvoyer l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige.

Sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur des parties.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement

Dit que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail

Dit le conseil de prud'hommes de PARIS incompétent

Déclare le tribunal de commerce de PARIS compétent pour connaître du litige

Renvoie l'affaire devant cette juridiction pour qu'il soit statué sur le fond du litige

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne [G] [G] aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 17/13111
Date de la décision : 12/04/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°17/13111 : Se dessaisit ou est dessaisi au profit d'une autre juridiction


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-12;17.13111 ?
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