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11/04/2018 | FRANCE | N°16/16744

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 11 avril 2018, 16/16744


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 11 AVRIL 2018



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/16744



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2016 -Président du TGI d'EVRY - RG n° 14/04926





APPELANTES :



SAS AZALÉE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Toulouse sous le numéro 803 7

58 242

[Adresse 1]

[Adresse 2]



SCI [F] prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Toulouse sous le numéro [F]

[Adresse 1]

[Adresse 2]



SA RIU-AUBL...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 11 AVRIL 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/16744

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2016 -Président du TGI d'EVRY - RG n° 14/04926

APPELANTES :

SAS AZALÉE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Toulouse sous le numéro 803 758 242

[Adresse 1]

[Adresse 2]

SCI [F] prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Toulouse sous le numéro [F]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

SA RIU-AUBLET ET COMPAGNIE prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS d'Évry sous le numéro 712 044 502

[Adresse 3]

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentées par Me Gilles OBADIA, avocat au barreau de PARIS, toque : E0072

INTIMÉE :

SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER prise en la personne de ses représentants légaux

Immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 338 880 180

[Adresse 6]

[Adresse 7]

Représentée par Me Laurent CREHANGE de la SELAS CREHANGE & KLEIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C1312, avocat postulant

Représentée par Me Jérémy GENY LA ROCCA, avocat au barreau de METZ, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre

Madame Marie-Brigitte FREMONT, conseillère

Madame Sandrine GIL, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Madame Anaïs CRUZ, greffier présent lors de la mise à disposition.

*****

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 17 mars 2003, la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, bénéficiaire d'un bail à construction consenti par la SCI [F], a donné à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à bail un local commercial sis [Adresse 8].

Ce bail a été consenti pour une durée de neuf années entières et consécutives, se terminant le 30 avril 2012, pour un loyer annuel de 121.960 € HT et HC payable par trimestre et d'avance.

Le loyer est assorti d'une clause d'échelle mobile avec ajustement automatique chaque année.

Par avenant du 17 novembre 2008, les parties ont convenu de substituer l'indice des loyers commerciaux à l'indice du coût de la construction.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 juillet 2012, la locataire a sollicité la révision du loyer à 87.000 € HT et HC en application de l'article L.145-39 du code de commerce selon lequel le loyer qui a évolué de plus d'un quart depuis sa fixation contractuelle ou judiciaire peut être ramené à sa valeur locative.

Par acte d'huissier du 2 janvier 2013, elle a assigné la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE devant le juge des loyers commerciaux, lequel a par jugement du 17 mai 2013 :

- sursis à statuer sur les demandes ;

- ordonné une expertise confiée à Mme[R] [K] afin de donner son avis sur la valeur locative des lieux loués ;

- maintenu le loyer contractuel pour la durée de l'instance ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- réservé les dépens ;

- ordonné le retrait de l'affaire du rôle.

Le bail à construction s'étant terminé le 02 novembre 2013, la SCI [F] est venue aux droits de la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE.

L'expert a rendu un rapport déposé au greffe le 24 mars 2014.

L'affaire a été remise au rôle par ordonnance du 21 juillet 2014.

Par acte authentique du 30 août 2014, la SCI [F] a cédé à la SAS AZALÉE le bâtiment dont elle était devenue propriétaire par accession.

La SCI [F] et la SAS AZALÉE sont intervenues volontairement à la procédure et par jugement du 22 mai 2015, le juge des loyers a rouvert les débats pour permettre aux défendeurs de répliquer au mémoire de la locataire, notifié tardivement.

Par jugement en date du 20 mai 2016, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance d'Évry a :

- Fixé à la somme de cent six mille sept cent quatre vingt quinze euros (106.795 euros) par an hors charges et hors taxes le montant du loyer au 23 juillet 2012 du bail consenti le 17 mars 2003 par la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER portant sur un local commercial sis [Adresse 8]) ;

- Condamné la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALEE à rembourser à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER, chacune pour la part des loyers qu'elle a perçus en qualité de bailleur, la différence entre le montant des loyers perçus depuis le 23 juillet 2012 et le montant des loyers fixés par la présente décision avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

- Fait masse des dépens de l'instance comprenant les frais d'expertise, qui seront supportés par moitié par chacune des parties ;

- Rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Les sociétés SAS AZALÉE, SCI [F] et SA RIU-AUBLET ET COMPAGNIE ont interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 29 juillet 2016.

Par dernières conclusions en date du 27 octobre 2016, les sociétés SAS AZALÉE, SCI [F] et SA RIU-AUBLET ET COMPAGNIE demandent à la Cour, au visa des articles L 145-39 et R 145-23 et suivants du code de commerce de :

- DIRE ET JUGER la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALEE recevables et bien fondées en leur appel ;

En conséquence y faire droit :

- REFORMER le jugement entrepris ;

- FIXER le montant du loyer à 162.855 €/an HC et HT (CENT SOIXANTE DEUX MILLE HUIT CENT CINQUANTE CINQ EUROS) à compter du 23 juillet 2012 ;

- CONDAMNER la société STOCK J. BOUTIQUE JENNYFER à payer à chacune des sociétés RIU AUBLET ET COMPAGNIE, [F] et AZALEE la différence entre le montant des loyers acquittés depuis le 23 juillet 2012 sur la base du jugement réformé et le montant des loyers fixés par l'arrêt à intervenir et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir; - CONDAMNER la STOCK J. BOUTIQUE JENNYFER au paiement des frais d'expertise judiciaire,

- CONDAMNER la Société STOCK J. BOUTIQUE JENNYFER au paiement de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNER la Société STOCK J. BOUTIQUE JENNYFER aux entiers dépens de l'instance.

SOUS TOUTES RESERVES

Par dernières conclusions en date du 22 décembre 2016, la société SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER demande à la Cour, au visa des articles L. 145-33, R 145-23 et suivants du code de commerce, de :

- DIRE ET JUGER la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER recevable et bien fondée en ses demandes,

- DONNER acte aux parties de leur accord pour fixer la valeur locative unitaire à la somme de 220 €/m² pondéré / an et en tant que de besoin homologuer cet accord définitif valant contrat judiciaire,

- INFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a fixé la valeur locative unitaire à la somme de 230 €/m² pondéré / an et en ce qu'il a omis de procéder à la déduction de la taxe foncière supportée par la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER,

EN CONSÉQUENCE,

- FIXER le montant du loyer du bail renouvelé à la valeur locative, soit à la somme annuelle de QUATRE VINGT SIX MILLE EUROS HORS TAXES ET HORS CHARGES (86 000 € HT/HC), à compter du 23 juillet 2012, date d'effet de la demande de révision,

- CONDAMNER solidairement les sociétés SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, SCI [F] et SAS AZALÉE à rembourser à la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER les loyers trop-perçus depuis le 23 juillet 2012, avec intérêts au taux légal,

- CONDAMNER les sociétés SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, SCI [F] et SAS AZALEE à régler à la société STOCK J BOUTIQUE JENNYFER une somme de DIX MILLE EUROS (10 000 €) en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- CONDAMNER les sociétés SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, SCI [F] et SAS AZALÉE aux entiers dépens de l'instance et de toutes suites, y compris au paiement des frais d'expertise judiciaire,

La procédure a été clôturée le 20 décembre 2017.

ET SUR CE

Sur les conditions d'application de l'article L145-39 du code de commerce :

Les parties conviennent que, le loyer révisé ayant été porté en 2012, par le jeu de l'indexation prévue par la clause d'échelle mobile insérée dans le bail, à la somme annuelle de 160 187,43 euros en principal, cette augmentation s'élève à plus de 25 % par rapport au loyer initialement fixé, ouvrant droit à l'application des dispositions de l'article L.145-39 du code de commerce autorisant la révision du loyer.

Sur la surface pondérée :

Selon le rapport d'expertise, les locaux sont situés dans la zone commerciale (ZAC) de [Localité 1], bien desservie par le RER C et un réseau d'autobus, au milieu de 160 enseignes de grande distribution.

Le bail désigne un local commercial au sein d'un immeuble d'une surface globale approximative d'environ 800 m² au rez-de-chaussée du bâtiment, plus précisément décrits aux termes des plans annexés aux présentes (lot N°3), et l'usage des emplacements de parking situés sur la parcelle.

La destination des lieux est la commercialisation au détail d'articles de prêt-à-porter féminin, chaussures et accessoires s'y rapportant.

L'expert a retenu une surface totale utile de 810m², se décomposant comme suit :

- magasin : 300m²

- locaux sociaux : 100m²

- entrepôt : 410m²

soit une surface pondérée de 453m².

Les parties appelantes font état d'une promesse synallagmatique de bail commercial régularisée entre les parties le 16 octobre 2012, aux termes de laquelle il était prévu deux conditions suspensives dont la réalisation était à la charge du preneur, l'une des conditions tenant à la demande et l'obtention d'une autorisation administrative d'ouverture d'une grande surface commercial auprès de la Commission Départementale d'Equipement Commercial (CDEC) avant le 31 mai 2003.

Elles reprochent à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER d'avoir caché cet élément à l'expert, de ne pas avoir communiqué la décision de rejet du CDEC, alors qu'elle aurait pu user de son droit de recours contre cette décision auprès de Monsieur le Président de la commission nationale d'équipements commerciaux.

Elles expliquent ne pas avoir été en mesure elles-mêmes de transmettre ces éléments à Mme [K], arguant que 'trois bailleurs s'étant succédés, la transmission ainsi que l'examen des dossiers archivés n'ont pu être effectués qu'à la faveur d'un changement d'avocat'.

Elles en déduisent que la rédaction du bail définitif signé postérieurement à la décision de rejet démontre que les parties n'ont pas entendu renoncer pour autant à leurs accords initiaux et qu'en septembre 2011, un cabinet d'architecte mandaté par la société JENNYFER, s'adressait au bailleur par un mail auquel est annexé un plan décrivant les modifications de surfaces envisagées par sa mandante, duquel il s'avère que la quasi-totalité de la surface est affectée à un usage commercial.

Elles estiment donc que la société JENNYFER a pris à bail les locaux dans le but d'augmenter la surface commerciale aux dépens de celles dédiées à la réserve et aux locaux sociaux, qu'elle avait bien la possibilité d'exercer son activité commerciale sur la totalité des surfaces données à bail, et que sa décision de ne pas exploiter les surfaces litigieuses n'est pas opposable au bailleur.

Les appelantes en concluent que c'est dans une volonté commune des parties de transformation du dépôt en surface commerciale que le bail a été signé, et que c'est donc la surface totale de 660m² (hors locaux sociaux et entrepôts) qui doit être affectée au magasin, sans application de coefficient de pondération, et critiquent le jugement qui a qualifié de « simple projet » la commune intention des parties de procéder à des travaux permettant d'augmenter la surface d'accueil de la clientèle dans les proportions habituelles au regard de la surface totale du local.

Elles demandent donc qu'il soit procédé à la pondération suivante :

- magasin : 660m² x 1,00 = 660m²

- locaux sociaux et entrepôts : 150m² x 0,30 = 45 m²

soit 705m² au total.

L'intimée demande à la Cour de confirmer le jugement de première instance qui retient une surface pondérée de 453 m2, conformément aux recommandations faites par l'expert.

Elle soutient que la promesse synallagmatique de bail est sans objet suite à la régularisation du bail le 17 mars 2003, et que le bail commercial est le seul acte régissant les rapports contractuels entre les parties, qu'en conséquence la demande d'une autorisation administrative d'ouverture d'une grande surface commerciale auprès de la Commission Départementale d'Equipement Commercial (CDEC) et les plans d'agrandissement des surfaces commerciales effectué par le cabinet d'architecture ne rentrent pas en compte dans l'estimation de la surface de vente.

La SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER affirme que l'affectation des lieux actuelle est rigoureusement identique à celle qui existait lors de la prise à bail des locaux par la société JENNYFER, comme en justifie le plan des locaux produit par la partie adverse elle-même, que dans la partie entrepôt certains éléments comportent encore des étiquettes JACQUELINE RlU, précédent exploitant et enseigne apparentée au bailleur, ce qui démontre sans équivoque que l'affectation des lieux n'a pas été modifiée par JENNYFER.

Elle ajoute que sa demande d'autorisation de la CDEC pour étendre la surface de vente de 300 m² à 660 m² a été déposée en date du 12 novembre 2002 avec l'accord du bailleur de l'époque, et que le refus de la CDEC de l'Essonne d'extension de la surface de vente datée du 30 janvier 2003 a été notifiée à la société JENNYFER le 12 février 2003 ; qu'ainsi lors de la signature du bail intervenue le 17 mars 2003, les parties savaient pertinemment que la société JENNYFER était dans l'impossibilité d'étendre sa surface de vente.

Elle rappelle que le bail ne comporte aucune obligation pour la société locataire d'augmenter sa surface de vente, et qu'en tout état de cause l'expert a considéré que les caractéristiques des locaux et leur présentation générale sont celles d'un entrepôt, et que la transformation de cette surface d'entrepôt en surface ouverte au public, « nécessiterait des travaux d'adaptation, création d'une partie pour la livraison, cloisonnement, ... ».

S'agissant de la destination des lieux, elle indique qu'il s'agit d'une destination spécialisée conforme aux usages courants en matière de baux commerciaux.

La cour relève que le bail signé le 17 mars 2003 porte sur un local d'une surface de 800m² environ et a pour destination la 'commercialisation au détail d'articles de prêt à porter féminin, chaussures et accessoires s'y rapportant'.

Le plan annexé à cet acte présente un lot n°3 uniforme sans affectation de surfaces.

Le plan daté de 1983 versé aux débats par les bailleurs n'est pas contractuel et ne saurait désigner les locaux tels qu'ils ont été donnés à bail, d'autant qu'il est antérieur de vingt ans de la prise à bail.

Il importe peu qu'une promesse synallagmatique de vente ait été conclue le 16 octobre 2002 sous conditions suspensives, dès lors qu'il est acquis que les parties sont passées outre ces conditions en signant un bail ferme et définitif qui régit leurs relations contractuelles.

La clause du bail suivant laquelle 'Il est en outre expressément prévu que le Preneur fait son affaire personnelle des éventuelles autorisations d'exploitation qu'il devrait devoir obtenir de la Commission Départementale d'Equipement Commercial compte tenu de la surface commerciale exploitée, sans que le refus de celles-ci puisse constituer une cause de résiliation du bail' ne saurait non plus s'entendre comme un engagement du preneur à augmenter la surface de vente de sa boutique, mais comme une possibilité qui lui est offerte de le faire.

Le courriel adressé au bailleur par un cabinet d'architecture le 19 septembre 2011, accompagné d'un plan du magasin, a pour objet une demande d'accord pour l'aménagement d'un accès destinés aux livraisons à l'arrière, afin de déposer une déclaration de travaux en ce sens, supposant une demande d'agrandissement de la surface de vente, démontrant ainsi que la surface louée pouvait parfaitement être affectée à la vente, moyennant comme l'a fait remarquer l'expert, quelques travaux d'aménagement.

Dès lors, seule la destination du bail, et les dispositions de l'article R. 145-3 du code de commerce, qui apprécient les surfaces selon leur affectation à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux doivent être prises en considération.

Il peut être ajouté que le loyer annuel consenti à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER en 2003 de 121.960 € HT et HC pour 800m² de surface correspond au loyer d'une boutique et non à celui d'un entrepôt.

Et même si l'expert relève que la visite et la configuration des lieux l'ont incitée à considérer les locaux accessoires à usage d'entrepôt et de locaux sociaux, du fait des installations de stockage sur une partie avec des étiquetages J. RIU, de la présence de deux portes sectionnelles pour la livraison des marchandises sur le côté droit du bâtiment, et de la nécessité de travaux d'adaptation en cas d'agrandissement de la partie à usage de réception de la clientèle, les locaux ont été loués pour leur totalité à usage de commerce, de sorte que les surfaces pondérées retenues seront les suivantes, la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALÉE admettant l'existence de locaux sociaux et entrepôts pour une surface de 150m² :

660m² x1 = 660m²p

150m² x 0,30 = 45m²p

soit 705m²p.

Sur la valeur locative :

Après avoir retenu un prix unitaire de 220 €/m²p, et appliqué une majoration de 2,5% pour autorisation de sous-location et une majoration de 2,5% du fait de la prise en charge par le bailleur de l'article 606 du code civil, la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALÉE concluent à une valeur locative annuelle de 155 400 €.

En tenant compte de la surface pondérée estimée par l'expert et le juge en première instance, de l'accord entre les parties portant sur le prix de la valeur locative unitaire de 220 €/m²p, de la majoration pour autorisation de sous-location partielle ou totale et de la déduction de la taxe foncière, la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER conclut à une valeur locative de 86 000 €.

Bien que le prix unitaire proposé par Mme l'expert se situe dans une fourchette haute de prix en comparaison avec des magasins d'une superficie commerciale équivalente, puisqu'elle a pris en considération la disproportion des locaux sociaux et entrepôt par rapport à l'espace de vente, la cour ne peut qu'entériner l'accord des parties portant sur un prix unitaire de 220 €/m²p.

Il convient d'ajouter une majoration de 2,5% pour la clause de sous-location partielle ou totale autorisée, mais considérant que la clause mettant à la charge du bailleur les travaux prévus par l'article 606 du code de procédure civile n'est pas constitutive d'un avantage exorbitant pour le preneur, il ne sera appliqué aucune majoration à ce titre.

L'usage commande de déduire la taxe foncière, qui incombe habituellement au bailleur, si celle-ci est mise à la charge du preneur.

Le loyer annuel sera donc calculé comme suit :

220 € x 705m² = 155 100 € + 2,5% = 158 977 € - 15 962 € (taxe foncière 2012) = 143 015 € arrondis à 143.000 €.

Sur le remboursement des loyers :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALÉE à rembourser à la locataire, chacune pour sa part des loyers qu'elle a perçus en qualité de bailleur, la différence entre le montant des loyers perçus depuis le 23 juillet 2012 et le montant des loyers fixés par la présente décision.

En revanche, il y a lieu de dire que les sommes dues produiront des intérêts au taux légal courant sur les arriérés de loyers trop perçus, à compter du premier mémoire en défense du bailleur, et à compter de chaque échéance sur les loyers postérieurs à cette date.

Sur les autres demandes :

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel seront mis à la charge de la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement, sauf en ses dispositions ayant condamné la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALÉE à rembourser à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER, chacune pour la part des loyers qu'elle a perçus en qualité de bailleur, la différence entre le montant des loyers perçus depuis le 23 juillet 2012 et le montant des loyers fixés par la présente décision, ayant statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Fixe à la somme de 143 000 euros par an hors charges et hors taxes le montant du loyer révisé au 23 juillet 2012 du bail consenti le 17 mars 2003 par la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER portant sur un local commercial sis [Adresse 8]) ;

Condamne la SA RIU AUBLET ET COMPAGNIE, la SCI [F] et la SAS AZALÉE, chacune pour sa part, à payer à la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER les intérêts au taux légal courant sur les arriérés de loyers trop perçus, à compter du premier mémoire en défense du bailleur, et à compter de chaque échéance sur les loyers postérieurs à cette date ;

Dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SAS STOCK J BOUTIQUE JENNYFER à payer les dépens d'appel.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/16744
Date de la décision : 11/04/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°16/16744 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-04-11;16.16744 ?
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