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22/03/2018 | FRANCE | N°16/17236

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 22 mars 2018, 16/17236


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3



ARRÊT DU 22 MARS 2018



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17236



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2016 -Tribunal d'Instance de 75016 PARIS - RG n° 11-16-177





APPELANTS



Monsieur [V] [Y]

Né le [Date naissance 1] 1922 à[Localité 1] (ALGÉRIE)

[Adresse 1]

[Adress

e 2]



Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065



Ayant pour avocat plaidant Me Michel MAAREK, avocat au barreau de PARIS, toque : D1096



Madame [U] ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3

ARRÊT DU 22 MARS 2018

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17236

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2016 -Tribunal d'Instance de 75016 PARIS - RG n° 11-16-177

APPELANTS

Monsieur [V] [Y]

Né le [Date naissance 1] 1922 à[Localité 1] (ALGÉRIE)

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représenté par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Michel MAAREK, avocat au barreau de PARIS, toque : D1096

Madame [U] [Y]

Née le [Date naissance 2] 1931 à [Localité 2] (ALGÉRIE)

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant Me Michel MAAREK, avocat au barreau de PARIS, toque : D1096

INTIMEE

Madame [L] [M] épouse [H]

Née le [Date naissance 3] 1934 à [Localité 3] (GUADELOUPE)

[Adresse 3]

[Adresse 4]

Représentée par Me Chantal SAINT-CYR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1434

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Madame [L] [W]

Née le [Date naissance 4] 1964 à [Localité 4] (CANADA)

[Adresse 5]

[Adresse 6])

Représentée par Me Chantal SAINT-CYR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1434

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Daniel FARINA, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Daniel FARINA, Président

M. Philippe JAVELAS, conseiller

Mme Pascale WOIRHAYE, conseiller

Greffier, lors des débats : Mme [T] LARDOUX

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Daniel FARINA, président et par Mme Sophie LARDOUX, greffier présent lors de la mise à disposition.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par contrat du 4 novembre 1997 Mme [H] a donné en location à M et Mme [Y] un appartement sis [Adresse 1].

Le bail conclu pour une durée de 6 ans, à compter du 1er novembre 1997 a été tacitement reconduit à compter du 31 octobre 2003.

Par acte d'huissier du 29 avril 2015 Mme [H] a délivré à M et Mme [Y] sur le fondement de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 un congé pour reprise pour le 31 octobre 2015.

Selon les énonciations du congé les locaux étaient repris pour être habités par la fille de Mme [H], Mme [T] [W] et son époux M [Y] [W], ainsi leurs enfants [W] et [N] [W] .

Par acte notarié du 16 décembre 2015 elle a donné à sa fille Mme [T] [W] la nue propriété du bien immobilier loué à M et Mme [Y] .

Le 23 février 2016 Mme [H] a fait assigner M et Mme [Y] en validation de congé.

Par jugement du 30 juin 2016 le Tribunal d'Instance de Paris 16ème arrondissement a :

- constaté que M et Mme [Y] sont occupants sans droit ni titre des locaux concernés,

- ordonné, à défaut de libération volontaire, leur expulsion ainsi que celle de tous occupants de leur chef,

- autorisé M et Mme [Y] à quitter les lieux dans le délai de 24 mois à compter de la signification du jugement,

- fixé le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à un montant égal à celui du loyer indexable du loyer, outre les charges, qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi,

- condamné solidairement M et Mme [Y] à verser à Mme [H] la somme de 1300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

M et Mme [Y] ont interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions du 28 novembre 2017 ils demandent à la cour de :

- au visa des articles 595 et 1382,du Code Civil,

- infirmer le jugement déféré,

- déclarer l'action de Mme [H] irrecevable sur le fondement de la loi du 6 juillet 1989.

- déclarer en conséquence nul le congé délivré le 29 avril 2015, sur le fondement de l'article 15-1 de cette loi .

- subsidiairement,

- accorder à M et Mme [Y] un délai minimum de 2 ans pour quitter les lieux à effet à la date du prononcé de l'arrêt,

- débouter Mme [H] de sa demande de fixation d'une indemnité d'occupation et de ses autres demandes,

- en tout état de cause,

- condamner Mme [H] aux dépens et au paiement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre celle de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions du 3 avril 2017, Mme [H] et Mme [T] [W], intervenante volontaire demandent à la cour de :

- au visa des articles 595 du code de procédure civile et 15 de la loi du 6 juillet 1989,

- déclarer recevable et fondée Mme [H] en ses demandes,

- y faisant droit,

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a :

- constaté que M et Mme [Y] sont occupants sans droit ni titre des locaux concernés,

- à défaut de libération volontaire, ordonné l'expulsion de M et Mme [Y] ainsi que celle de tous occupants de son chef,

- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

- autorisé M et Mme [Y] à quitter les lieux dans le délai de 24 mois à compter de la signification du jugement,

- fixé l'indemnité mensuelle d'occupation à un montant égal à celui du loyer,indexable, outre les charges, qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi,

- statuant à nouveau,

- condamner solidairement M et Mme [Y] à verser à Mme [H] une indemnité d'occupation de 5.581,52 euros par mois à compter du 1er novembre 2015 et jusqu'à libération effective des lieux.

- condamner solidairement M et Mme [Y] aux dépens et à payer à Mme [H] la somme de 5000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2017.

SUR CE

Sur la demande tendant à voir annuler le congé

Attendu que pour conclure à la nullité du congé M et Mme [Y] font valoir essentiellement que :

- le congé du 29 avril 2015 est irrégulier dès lors qu'à la date de l'assignation en validation de ce congé, soit le 23 février 2016, Mme [H] n'était pas propriétaire du bien loué mais seulement usufruitière,

- le congé n'ayant pas été délivré sur le fondement des dispositions des articles 595 et suivants du Code civil relatifs à l'usufruit mais en vertu de l'article 15' 1 de la loi du 6 juillet 1989, la validation du congé ne pouvait être sollicitée sur le fondement de ce dernier texte ;

Attendu que Mmes [H] et [T] [W] répliquent essentiellement

que :

- Mme [H] avait qualité à délivrer le congé dès lors que :

- lors de la délivrance du congé elle était propriétaire de l'appartement , et donc bailleresse au jour du congé.

- si entre la date de délivrance du congé et la date de l'assignation elle a donné la nue propriété de ce bien à sa fille Mme [T] [W], cette circonstance est sans influence sur la validité du congé qu'elle aurait pu délivrer même si à l'époque du congé elle n'avait été qu'usufruitière,

- elle n'avait donc pas à viser l'article 495 du code civil dans le congé,

Attendu, cela exposé, que des dispositions de l'article 15 alinéa 1er de la loi du 6 juillet 1989 il résulte que le bailleur peut délivrer un congé pour reprise du logement pour habiter ; que peuvent bénéficier de cette reprise le bailleur ou ses ascendants ou descendants ;

Attendu que pour apprécier la validité du congé il convient de se placer à la date de délivrance de celui-ci ;

Que celui qui, à la date du congé, est propriétaire du bien a qualité comme bailleur, à donner congé ; que si à cette dernière date, la propriété est démembrée, c'est l'usufruitier qui, en tant que bailleur, a qualité pour donner congé à fin de reprise pour habiter ;

Attendu en l'espèce qu'au 29 avril 2015 Mme [H] avait la pleine propriété

du bien donné en location ; qu'aucun texte particulier ne lui imposait de mentionner alors dans le congé une qualité d'usufruitière qu'elle n'avait pas ;

Que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur l'exception d'irrecevabilité tirée du défaut de qualité à agir

Attendu que pour conclure à l'irrecevabilité des demandes de Mme [H] pour défaut d'intérêt à agir M et Mme [Y] font valoir essentiellement que :

- l'article 15'1 de loi du 6 juillet 1989, prévoit que le congé doit être donné par le bailleur à peine de nullité,

- Mme [H] n'avait pas qualité pour agir en validation de congé dès lors qu'à la date de l'assignation délivrée le 23 février 2016 elle n'était plus propriétaire du bien immobilier donné à bail mais usufruitière de celui-ci,

- elle aurait dû alors fonder son congé sur le fondement des articles 595 et suivants du Code civil sans pouvoir invoquer l'article 15'1 de la loi du 6 juillet 1989,

- par ailleurs, Mme [H] n'était qu'usufruitière du bien au jour de l'acte

introductif d'instance,

- l'assignation qui a été délivrée sur le fondement de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989

aurait dû viser l'article 595 du code civil.

- cet acte est donc entaché d'une cause de nullité ;

Attendu qu'en réponse Mme [H] et Mme [T] [W] soutiennent

que :

- la loi du 6 juillet 1989, étant d'ordre public, la résiliation ne peut se fonder que sur les dispositions de l'article 15 de cette loi ;

- l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que le congé doit être donné par le bailleur,

- or à la date du congé la bailleresse était Mme [H],

- le fait qu'à la date de la délivrance de l'assignation un démembrement de propriété ait été effectué sur le bien, est sans influence sur la validité de la procédure, dès lors que Mme [H] en sa qualité d'usufruitière avait le droit de poursuivre la procédure fondée sur le congé,

- Mme [H] est en conséquence recevable à agir en validation de congé et en paiement ;

- par ailleurs, l'assignation est bien fondée en droit et en fait au sens de l'article 56 du Code de Procédure Civile.

- l'usufruitier est titulaire d'un droit direct et personnel à demander en justice l'exécution des obligations de sa locataire.

- au regard des dispositions des articles 114 à 116 du code de procédure civile :

- la nullité éventuelle soulevée par M et Mme [Y] n'est pas prévue par la loi,

- l'existence d'un éventuel grief n'est pas prouvée,

- le fait que l'assignation ne vise pas l'article 595 du Code de procédure civile ne cause à M et Mme [Y] aucun grief puisque ce n'est pas Mme [T] [W] qui a donné congé mais Mme [H],

- en tout état de cause, Mme [T] [W] intervient volontairement ;

- les dispositions relatives aux droits et obligations de l'usufruitier sont d'ordre public,

- la loi du 6 juillet 1989, n'a prévu aucune stipulation s'opposant au droit de l'usufruitier prévu aux articles 582 à 616 du code civil,

- l'article 595 alinéa 4 du code civil, ne fait pas obstacle à ce que l'usufruitier poursuive seul la résiliation du bail ,

Attendu cela exposé que les moyens soulevés par M et Mme [Y] portent :

'd'une part sur la qualité à agir de Mme [H],

- d'autre part sur la régularité de l'assignation délivrée au visa de l'article 15 - 1 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu sur le premier point que l'usufruitier d'un bien immobilier donné à bail à usage d'habitation a qualité à agir aux fins de validation du congé pour reprise de ce bien (3ème Civ, 29 janvier 1974) ;

Attendu en l'espèce, que le bail a été conclu entre Mme [H] en qualité de bailleresse, et M et Mme [Y], en qualité de locataires ;

Que s'il est constant qu'à la date de délivrance de l'assignation Mme [H] avait donné sa fille Mme [T] [W] la nue-propriété du bien immobilier loué, elle a conservé l'usufruit de celui-ci ;

Que la donation ne lui a donc pas fait perdre la qualité de bailleresse ;

Attendu en outre que par son intervention volontaire à la présente instance Mme [T] [W], nu propriétaire marque son consentement à l'action en validation du congé ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède le moyen pris d'un défaut de qualité à agir n'est pas fondé ;

Attendu sur le second point qu'aucun texte particulier n'impose au bailleur, lorsqu'il est usufruitier du bien donné en location, de mentionner expressément, à peine de nullité, dans l'acte introductif de l'instance en validation de congé, les dispositions de l'article 595 du code civil ;

Attendu par ailleurs, qu'en application de l'article 56 du code de procédure civile : «l'assignation contient à peine de nullité outre les mentions prescrites par les actes du huissier de justice :

'2 ° l'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit » ;

Attendu en l'espèce que dans son assignation Mme [H] fait état à la fois, du contrat de bail, du congé délivré aux locataires, et des textes de loi sur lesquels est fondée sa demande en validation de congé, ce qui suffit à définir l'objet de la demande et le fondement juridique de l'action ;

Que l'appréciation à porter sur la pertinence du fondement juridique mentionné dans l'assignation constitue exclusivement une question de fond, sans influence sur la validité elle-même de cet acte ; qu'aucune irrégularité ne peut donc être tirée du fait que l'assignation ne vise pas spécifiquement les dispositions légales relatives à l'usufruit ;

Attendu en outre qu'il a été retenu ci-dessus que Mme [H] avait qualité à agir pour voir valider le congé délivré sur le fondement de l'article 15'1 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Attendu que dans ce contexte le fait de fonder sur ce texte sa demande en validation de congé ne saurait constituer une irrégularité susceptible d'affecter la validité de l'acte introductif d'instance ;

Attendu que compte tenu de ce qui précède l'exception d'irrecevabilité soulevée par M.et Mme [Y] n'est pas fondée ;

Sur la validité du congé

Attendu que pour s'opposer à la validation du congé M et Mme [Y] font valoir que :

- en première instance Mme [H] avait fait prévaloir au visa du § 3 de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 sa qualité de bailleresse âgée de 82 ans pour justifier son opposition aux droits de renouvellement des locataires âgés de plus de 70 ans,

- or Mme [H] est usufruitière du logement et non pas propriétaire,

- sa fille, Mme [T] [W] nue-propriétaire âgée de 52 ans n'avait pas quant à elle qualité pour donner congé à M et Mme [Y] âgés de plus de 70 ans ;

Attendu que Mme [H] et Mme [T] [W] répliquent que :

-- en sa qualité d'usufruitière Mme [H] est fondée à invoquer les dispositions du § 3 de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ;

- Mme [H] souhaite, en application de ce texte, reprendre le bien pour habiter au profit de sa fille Mme [T] [W] et de son époux M [Y] [W] ainsi que de leur fils [W] et fille [N] [W].

- aux termes du congé pour reprise, M et Mme [Y] disposaient d'un délai de préavis de 6 mois pour quitter les lieux, expirant le 31 octobre 2015 à minuit.

- en application de l'article 15 -1 de la loi du 6 juillet 1989 M et Mme [Y] sont occupants sans droit ni titre depuis le 31 octobre 2015.

Attendu cela exposé que l'article 15-l de la loi du 06 juillet 1989, dispose que 'le bailleur

peut délivrer un congé pour reprise, six mois avant l'échéance du bail, en désignant le bénéficiaire de la reprise qui ne peut être que le bailleur, son conjoint, le partenaire de Pacs, le concubin notoire, ses ascendants et descendants ou ceux de son conjoint.

A l'expiration de ce délai, le locataire est déchu de tout titre d'occupation'.

Attendu qu'aux termes du III de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989 : « le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du contrat en donnant congé dans les conditions définies au paragraphe ci-dessus à l'égard de tous locataires âgés de plus de 70 ans et dont les ressources annuelles sont inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire mensuel de croissance, sans qu'un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues par l'article 13 bis de la loi du 1er septembre 948 précité.

Toutefois, les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables lorsque le bailleur est une personne physique âgée de plus de 60 ans ou si ses ressources annuelles sont inférieures à une fois et demie le montant annuel du salaire minimum de croissance.

L'âge du locataire et celui du bailleur sont appréciés à la date d'échéance du contrat » ;

Attendu qu'en application de ces dispositions légales la reprise peut s'opérer au profit des descendants ou ascendants ;

Attendu en l'espèce que Mme [H] en tant que bailleresse, avait, tant à la date de délivrance du congé, qu'à celle de l'acte introductif d'instance, qualité aussi bien pour donner congé que pour agir en validation de celui-ci ;

Qu'à la date d'effet du congé soit le 31 octobre 2015 Mme [H] était âgée de plus de soixante ans ;

Que les dispositions de l'article 15 III de la loi du 6 juillet 1989 invoquées par M et Mme [Y] ne sont donc pas applicables ;

Attendu que le congé doit être validé ;

Attendu que M et Mme [Y] qui se sont maintenus dans les lieux après la date d'expiration du préavis sont déchus de tout titre d'occupation des lieux loués depuis la date d'expiration du congé ;

Attendu que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a validé le congé et constaté l'absence de titre d'occupation de M et Mme [Y] ;

Sur la demande de délais

Attendu qu'au soutien de leur demande de délais M et Mme [Y] exposent essentiellement que :

- en raison de leur âge et de leur état de santé ils ont besoin d'un délai d'au moins deux ans pour quitter les lieux,

- l'état de santé actuel de M [Y] nécessite son maintien dans son logement,

- la disponibilité d'un appartement en location dans le même immeuble au cours de l'année 2016 ne saurait faire échec à leur demande de délai ;

- les allégations de Mme [H] qui soutient qu'ils disposent des ressources suffisantes pour déménager dans un appartement équivalent au motif qu'ils seraient qu'ils seraient gérants et associés de plusieurs sociétés sont infondées,

- deux de ces sociétés sont radiées depuis l'année 2009 et la Sci Socimag qui reste en activité ne leur a apporté en 2016 qu'une somme de 624 euros ;

- il ne peut leur être reproché de ne pas avoir recherché un nouveau logement alors qu'ils contestent la validité du congé et que leurs états de santé ne leur permettent pas d'envisager de telles démarches ;

Attendu que conclure au rejet de la demande Mme [H] soutient que :

- M et Mme [Y] ont les ressources nécessaires pour déménager dans un autre et même dans l'un des biens dont les SCI dont ils sont associés seraient propriétaires.

- au cours de l'année 2016, dans le même immeuble, un appartement de type F4 était disponible à la location. .

- M et Mme [Y] n'ont jamais recherché de nouveau logement.

- il n'a pas lieu de prolonger le délai accordé, car le délai accordé en définitive ne serait pas de 24 mois mais de presque du double, le congé ayant été délivré le 29 avril 2015,

- au 31 mars 2017, M et Mme [Y] ont disposé d'un délai de 23 mois suffisant pour leur permettre de se reloger.

- pour des raisons médicales, il y a urgence à la reprise de l'appartement ;

Attendu cela exposé que des dispositions des articles L.412-3, L.412-4, L.412-6 à L.412-8 du Code des procédures civiles d'exécution, il résulte que '.Le juge peut accorder des délais aux occupants de locaux d'habitation dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales'.

Que pour la fixation de ces délais, il doit notamment tenir compte des situations respectives du propriétaire et de I'occupant, ainsi que des diligences que I'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement'.

Attendu en l'espèce que par le jugement du 30 juin 2016 déféré le premier juge, prenant en considération l'état de santé de M et Mme [Y], a accordé un délai de 24 mois à compter de la signification du jugement ; que pour ces mêmes raisons le jugement déféré doit être confirmé ;

Attendu sur la demande d'octroi d'un nouveau délai, que le congé a été délivré le 29 avril 2015 pour le 31 octobre 2015 ; qu'en considération du délai octroyé, de l'absence de justification de démarches en vue d'un relogement au sens du texte précité, du défaut de production d'éléments concernant la situation financière des appelants, et au regard également des intérêts légitimes du bailleur dont le bien est rendu indisponible, il n'y a pas lieu d'allonger le délai accordé par le premier juge ;

Qu'à cet égard il convient d'observer en particulier que le premier juge avait relevé qu'une proposition avait été faite en mai 2015 à M et Mme [Y] pour un appartement de 91 m2 rénové dans le même immeuble pour un loyer comparable.;

Attendu que compte tenu de ce qui précède la demande d'octroi d'un nouveau délai ne peut aboutir ;

Sur l'indemnité d'occupation

Attendu que se prévalant de la clause pénale prévue par le bail Mme [H] sollicite la condamnation de M et Mme [Y] au paiement, à compter du 31 octobre 2015, d'une indemnité mensuelle d'occupation de 5580,52 euros représentant le double du montant du loyer mensuel, ;

Attendu que M et Mme [Y] demandent que l'indemnité mensuelle d'occupation soit fixée à un montant qui ne soit pas supérieur à celui du loyer actuel ;

Qu'au soutien de leur prétention ils exposent qu'ils payent régulièrement le loyer sans retard, et que la clause pénale invoquée ne peut s'appliquer dès lors que le congé litigieux est nul et qu'ayant obtenu un délai de paiement ils ne se maintiennent pas indûment dans les lieux ;

Attendu cela exposé, qu'à partir du moment où il est devenu occupant sans droit ni titre et jusqu'à la restitution des lieux le preneur qui se maintient dans les locaux peut être condamné à la demande du bailleur au paiement d'une indemnité d'occupation destinée notamment à compenser la perte des loyers et des charges récupérables, et à réparer le cas échéant d'autres éléments de préjudice liés à l'indisponibilité du bien ;

Attendu en l'espèce que la demande en paiement d'une indemnité d'occupation est fondée en son principe M et Mme [Y] s'étant maintenus dans les lieux après la date d'effet du congé ;

Attendu qu'aux termes de la stipulation contractuelle du bail intitulée « Clauses pénales» : « Le preneur dans le cas où, il se maintiendrait indûment dans les lieux à la cessation de la location, versera une indemnité d'occupation fixée de convention expresse entre les parties, forfaitairement au double du loyer» ;

Attendu que conformément à son intitulé, cette stipulation s'analyse en une clause pénale au sens des articles 1231 et 1152 du Code civil, ;

Qu'une clause pénale peut faire l'objet d'une réduction par le juge dans le cadre du pouvoir de modération prévu par l'article 1152 du Code civil (Cass civ 3ème 18 janvier 1989) ;

Attendu qu' en l'espèce que Mme [H] ne produit aucun élément de preuve d'un préjudice financier particulier distinct de celui que lui occasionne la perte du loyer et des charges récupérables ; qu'en conséquence et en considération des caractéristiques de l'appartement la pénalité contractuelle, sans rapport avec le préjudice lié au maintien de M et Mme [Y] dans les lieux, est manifestement excessive ;

Qu'en considération du montant du loyer ainsi que des caractéristiques du logement la cour dispose des éléments suffisants pour fixer le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation à celui du loyer, indexable outre les charges, qui serait dû si le bail s'était poursuivi ;

Que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

Sur les autres demandes

Attendu que les demandes de l'intimée étant justifiées, et la preuve d'une faute de nature à faire dégénérer en abus le droit de Mme [H] d'agir en justice n'étant pas rapportée, la demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive n'est pas fondée ;

Attendu que, dans les circonstances de la cause, l'équité commande de :

- confirmer les dispositions du jugement déféré relatives aux frais hors dépens,

- condamner M et Mme [Y] à payer à Mme [H] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Attendu qu'en application des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile les dépens seront mis à la charge de M et Mme [Y], qui au sens de ce texte, succombent en l'essentiel de leurs prétentions ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement,

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant

Condamne solidairement M [V] [Y] et Mme [U] [Y] à payer à Mme [L] [H] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent dispositif.

Condamne solidairement M [V] [Y] et Mme [U] [Y] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 16/17236
Date de la décision : 22/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G3, arrêt n°16/17236 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-22;16.17236 ?
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