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14/03/2018 | FRANCE | N°16/05539

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 14 mars 2018, 16/05539


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 14 MARS 2018



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05539



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Février 2016 -Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2014006009





APPELANTES



- SASU STAINLESS EUROPE

Ayant son siège social : [Adresse 1]

[Localité 1]

N

° SIRET : 538 102 518 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège



- SASU ALCO

Ayant son siège social : [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 320 290 5...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 14 MARS 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/05539

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Février 2016 -Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2014006009

APPELANTES

- SASU STAINLESS EUROPE

Ayant son siège social : [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 538 102 518 (PARIS)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

- SASU ALCO

Ayant son siège social : [Adresse 2]

[Localité 2]

N° SIRET : 320 290 505 (MELUN)

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentées par Me Jean-Yves FELTESSE de la SELARL FELTESSE WARUSFEL PASQUIER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K0028 et Me Jean-Yves LEBRAS, avocat au barreau de NANTERRE, toque : NAN 387

INTIMÉS

- Monsieur [L] [H]

né le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 3]

Demeurant : [Adresse 3]

[Localité 4]

- Monsieur [A] [H]

né le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 5]

Demeurant : [Adresse 4]

[Localité 6]

- Monsieur [T] [H]

né le [Date naissance 3] 1974 à [Localité 5]

Demeurant : [Adresse 5]

[Localité 7]

Représentés par Me Alain SEGERS, avocat au barreau de MEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Février 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Irène LUC, Présidente de chambre, rédacteur

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère,

Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Irène LUC dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Vu le jugement assorti de l'exécution provisoire rendu le 9 février 2016 par le tribunal de commerce de Meaux qui a :

- rejeté la demande des consorts [H] tendant à voir déclarer irrecevable la demande de la société Alco,

- dit les sociétés Stainless Europe et Alco recevables mais mal fondées en leur demandes et les en a déboutées,

- reçu les consorts [H] en leur demande reconventionnelle et les dit partiellement fondés,

- dit n'y avoir lieu de prononcer la nullité du rapport de M. [X],

- condamné la société Stainless Europe à payer aux consorts [H] la somme de 80.000 € TTC en principal, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2014, date du rapport d'expertise,

- débouté les consorts [H] de leur demande à titre de dommages-intérêts,

- condamné solidairement la société Stainless Europe et la société Alco à payer aux consorts [H] la somme globale de 5.000 € TTC par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné ces deux sociétés aux dépens, en ce compris les frais et honoraires d'expertise ;

Vu l'appel relevé le 2 mars 2016 par la société Stainless Europe et la société Alco ;

Vu l'ordonnance du 15 décembre 2016 arrêtant l'exécution provisoire attachée au jugement ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 16 février 2017 par les appelantes qui demandent à la cour, au visa des 1116, 1134 et 1147 du code civil ainsi que de l'article 237 du code de procédure civile, d'infirmer le jugement et :

1) sur le recel d'informations et les agissements déloyaux, de condamner solidairement les consorts [H] au paiement des sommes de :

- 586.000 €, avec intérêts de droit à compter de l'exploit introductif d'instance, pour préjudice commercial,

- 97.286 € pour préjudice moral,

2) sur l'absence de complément de prix, de :

- prononcer la nullité du rapport d'expertise,

- constater que le protocole de cession du 28 décembre 2011 ne confiait aucune mission à un expert pour la détermination du complément de prix,

- déclarer que le bilan de la société Alco, arrêté au 31 décembre 2012 et certifié par son commissaire aux comptes, ne permet pas d'attribuer un complément de prix aux cédants,

- à titre subsidiaire, nommer un expert judiciaire avec mission 'd'éclairer les parties et le tribunal sur les modalités de détermination de la marge brute telles que convenues dans le protocole de cession du 28 décembre 2011",

3) condamner les consorts [H] aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'au paiement de la somme de 15.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 22 janvier 2018 par [L] [H], [A] [H] et [T] [H] qui demandent à la cour de :

- confirmer purement et simplement le jugement,

- débouter la société Stainless Europe de ses demandes par application des articles 1116 et suivants du code civil,

- déclarer irrecevables les demandes formées par la société Alco pour défaut de qualité à agir, par application de l'article 122 du code de procédure civile,

- à titre subsidiaire, débouter la société Alco de ses demandes,

- faisant droit à leur demande reconventionnelle, condamner la société Stainless Europe à leur payer la somme de 80.000 € au titre du complément de prix, avec intérêts au taux légal à compter du 28 juin 2013, date à laquelle celui-ci aurait dû être réglé,

- condamner solidairement la société Stainless Europe et la société Alco à leur payer la somme de 15.000 €, à titre de dommages-intérêts, par application de l'article 1382 du code civil, et celle de 10.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner solidairement aux entiers dépens en ce compris les frais et honoraires d'expertise ;

SUR CE

Suivant protocole de cession signé le 28 décembre 2011, [L] [H], [A] [H] et [T] [H] ont cédé à la société Stainless Europe :

- la totalité des actions de la société Philae, société holding qui détenait 5.095 actions de la société Alco,

- les actions par eux détenues, aux côtés de la société Philae, dans le capital social de la société Alco, qui était spécialisée dans la distribution de tubes et accessoires en acier inoxydables pour pétrole, gaz, nucléaire, pétrochimie et armement naval.

Cette cession a été convenue moyennant :

- le paiement comptant de la somme de 2.568.000 €,

- le versement éventuel de deux complément de prix, à déterminer selon différents critères, devant avoir lieu : le premier au plus tard le 15 mai 2012, le second au plus tard le 28 juin 2013 sur la base du calcul de la marge commerciale réalisée par les sociétés Philae et Alco au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012.

Il était prévu qu'à défaut d'accord amiable des parties sur le complément de prix un expert serait désigné sur requête, les frais et honoraires consécutifs à sa désignation étant payés 'à frais communs'.

Le versement du premier complément de prix est intervenu sans difficulté en 2012 ; puis courant 2013, les consorts [H] ont réclamé la somme de 120.000 € au titre du second versement ; la société Stainless Europe contestant cette prétention, les consorts [H] ont obtenu, par ordonnance sur requête du 22 janvier 2014, la désignation de M. [X] en qualité d'expert avec mission de déterminer la marge brute réalisée par la société Alco sur l'exercice clos au 31 décembre 2012 en fonction de la formule prévue au protocole de cession, de son exécution loyale ainsi que des règles et usages en matière comptable.

Parallèlement, suite à un entretien préalable du 10 janvier 2014 avec [A] [H] qui, après la cession des actions, était resté délégué régional salarié au sein de la société Alco, la société Stainless Europe lui a adressé une lettre de licenciement pour faute grave le 20 janvier 2014. [A] [H] ayant contesté ce licenciement, une procédure est en cours devant le conseil des prud'hommes de Meaux.

Dans son rapport clos le 22 avril 2014, l'expert a évalué la marge commerciale servant de base au complément de prix à la somme de 1.834.591 €. Se fondant sur cette évaluation, les consorts [H] ont saisi le juge des référés, le 11 juin 2014, aux fins de voir condamner la société Stainless Europe au paiement de la somme de 80.000 € au titre du second complément de prix ; ce magistrat a fait droit à une exception d'incompétence territoriale soulevée par la défenderesse.

C'est dans ces circonstances qu'en juillet 2014, les sociétés Stainless Europe et Alco ont fait assigner [L] [H], [A] [H] et [T] [H] devant le tribunal de commerce de Meaux, reprochant aux cédants des agissements déloyaux et demandant leur condamnation à des dommages-intérêts pour préjudice commercial et pour préjudice moral. Les consorts [H] ayant formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 80.000 € au titre du complément de prix, le tribunal a fait droit à leur demande et a rejeté celles des sociétés Stainless et Alco.

Sur les demandes de dommages-intérêts des sociétés Stainless et Alco

Ces deux sociétés exposent avoir subi un effondrement des commandes de la société Sundyne-Sunstrand - client majeur de la société Alco avec lequel celle-ci réalisait 20 % de son chiffre d'affaires - à compter de début 2014, puis leur cessation complète en 2015 ; elles soutiennent que :

- lors de la cession des actions, les cédants, en particulier [L] [H] et son fils [A] [H], ont dissimulé les relations personnelles anormales et privilégiées - constitutives de connivence - qu'ils entretenaient avec Mme [U], responsable des achats de la société Sundyne-Sunstrand, laquelle mettait en avant et soutenait la société Alco,

- il s'agissait de conventions tacites occultes auxquelles les cédants pouvaient mettre fin et qui auraient dû être portées à la connaissance de la cessionnaire,

- si cette information avait été portée à sa connaissance, la cessionnaire n'aurait pas contracté ou, à tout le moins, aurait été conduite à plus de prudence dans l'appréciation du portefeuille clients et incitée à prendre des garanties pour assurer le maintien du flux commercial avec le client Sundyne-Sundstrand,

- le dol par réticence est caractérisé,

- lors de la cession, les cédants ont manqué à leur obligation de bonne foi en dissimulant une information de nature à exercer une influence sur leur consentement,

- c'est seulement au cours de l'été 2013 que la nature des relations entretenues avec la société Sundyne-Sunstrand a été révélée lorsque [A] [H] a menacé son employeur, si son contrat de travail était supprimé, de lui faire perdre le client Sundyne-Sunstrand,

- un élément essentiel du fonds de commerce, actif de la société Alco, ayant brutalement disparu à cause des manoeuvres déloyales du garant, [L] [H], celui-ci doit indemniser la cessionnaire par application du protocole de cession au titre de la garantie d'actif et de passif souscrite,

- en poursuivant ses relations avec la société Sundyne-Sunstrand après la cession d'actions, [L] [H] a violé la clause de non-concurrence insérée au protocole.

Les consorts [H] soulèvent l'irrecevabilité des demandes de la société Alco comme reposant sur les articles 1116, 1134 et 1147 du code civil alors que, n'étant pas signataire du protocole de cession, elle est, selon eux, dépourvue de toute qualité pour agir sur ce fondement.

Ils répliquent sur le fond :

- qu'il convient de se placer au moment de la conclusion du contrat de cession d'actions pour apprécier si la partie qui invoque un dol a contracté ou non en connaissance de cause,

- que les sociétés appelantes n'invoquent aucun fait antérieur à la cession et ne rapportent aucunement la preuve d'une réticence dolosive de leur part,

- que les échanges de courriels avec Mme [U] ne montrent aucune pratique commerciale anormale,

- que les attestations émanant de salariés de la société Alco n'ont aucune valeur probante compte tenu du contexte de subordination dans lequel elles ont été établies,

- que [A] [H] a toujours été considéré comme un excellent professionnel, comme le justifie son entretien d'évaluation du mois de février 2013, et que c'est seulement après la demande de complément de prix que son employeur a imaginé des griefs pour se débarrasser de lui,

- que les dirigeants des sociétés Stainless Europe et Alco n'ont pas su maintenir la qualité du service et des délais leur permettant de conserver la clientèle qui leur avait été cédée.

Mais la société Alco, qui invoque un préjudice résultant d'une réticence dolosive des cédants lors de la cession des actions ainsi que des manoeuvres frauduleuses commises après l'acte de cession par [A] [H], est recevable en sa demande de dommages-intérêts.

Sur le fond du litige, il n'est pas contesté que la société Alco entretenait depuis plus de quinze ans des relations commerciales avec la société Sunstrand, devenue société Sundyne en 2012 ; la société Stainless Europe, qui connaissait l'importance de ce client avec lequel avaient été réalisés les chiffres d'affaires de 710.000 € en 2009, de 501.000 € en 2010 et de 580.000 € en 2011, a décidé de confier à [A] [H] le suivi de ce client sur le plan commercial ; par la suite, ce chiffre d'affaires a été porté à 606.176 € en 2013 pour chuter à 59.807 € en 2014 et être réduit à néant en 2015 et 2016.

La société Alco ayant réalisé un chiffre d'affaires de 606.176 € avec la société Sundyne en 2013, les sociétés appelantes sont mal fondées à prétendre que la clientèle de cette société n'aurait pas été transmise par les cédants.

La teneur des courriels échangés entre [L] [H] ou [A] [H] et Mme [U], responsable des achats au sein de la société Sundyne, si elle révèle des relations personnelles et de grande familiarité entre eux dépassant le cadre de simples relations professionnelles, ne prouve cependant pas l'existence de conventions occultes de nature commerciale susceptibles d'avoir été dissimulées au cessionnaire lors de la cession des actions et d'avoir vicié son consentement ; dès lors c'est en vain que les appelantes prétendent avoir été victimes, lors de la cession des actions, d'une réticence dolosive ou d'un manquement à l'obligation de loyauté ; c'est encore vainement, en l'absence de tout élément probant, que les appelantes allèguent que [L] [H] aurait violé la clause de non concurrence et de non ré-installation insérée au protocole de cession ; les conditions de mise en oeuvre de la clause de garantie d'actif et de passif ne sont pas non plus réunies.

Les appelantes incriminent le comportement de [A] [H] après la cession, lui reprochant des manquements professionnels repris dans sa lettre de licenciement ; elles s'appuient sur les attestations suivantes dans lesquelles :

- M. [B], responsable de l'atelier logistique, salarié de la société Alco depuis 2009, déclare, notamment, que [A] [H] est allé visiter Sundyne aux alentours de février 2013 et, à son retour, a dit avoir dé-crédibilisé M. [K] (dirigeant de Stainless Europe), qu'au fil des mois jusqu'à son départ il a dit à plusieurs reprises que ce client lié à lui-même et à son père, quitterait Alco s'il venait lui à quitter l'entreprise, M. [B] ajoutant qu'entre 2012 et 2013 il avait eu de nombreux échanges avec Mme [U] , 3 ou 4 par semaine, et qu'il n'en avait plus eu un seul depuis le départ de [A] [H] début 2014,

- Mme [V], assistante commerciale, salariée de la société Alco depuis 1993, déclare avoir été témoin en juin/juillet 1993 d'une conversation entre [A] [H] et [I] [W] [N] (autre salarié) selon laquelle le client Sundyne ne passerait plus de commandes une fois que [A] [H] serait parti,

- M. [F], technico-commercial, salarié de la société Alco depuis 2005, déclare notamment que [L] [H] avait insisté lourdement auprès de M. [K] pour que son fils [A] [H] récupère le client Sundyne, entretenant des relations très proches avec son acheteuse ; il ajoute :

* qu'à partir de mai 2013, [A] [H] s'est targué en interne de pouvoir influer sur le cours des affaires s'il devait partir, en particulier que Sundyne arrêterait ou baisserait fortement son chiffre d'affaires à compter de son départ,

* que [A] [H] semblait s'amuser à discréditer M. [K] auprès de l'acheteuse et de la société Sundyne,

* que depuis le départ de [A] [H], Mme [U] qu'il avait régulièrement au téléphone, n'a plus appelé la société Alco sans raison connue.

Ces attestations, si elles sont susceptibles de permettre d'apprécier des manquements professionnels de [A] [H] dans le cadre du litige soumis au conseil de prud'hommes, sont insuffisantes à démontrer un lien direct de cause à effet avec le préjudice invoqué résultant de la perte du client Sundyne par la société Alco en 2014.

En effet, en 2014, la société Sundyne était libre de poursuivre ou non les relations commerciales entretenues avec la société Alco ; au cours d'un échange de courriels du 1er avril 2014 entre le dirigeant de la société Stainless Europe et le responsable des achats stratégiques de la société Sundyne, ce dernier a indiqué : 'Ce que je lis entre les lignes ne me convient absolument pas, ne reflète pas l'esprit de Sundyne et le fonctionnement de notre société. Vous savez aussi bien que moi que le commerce est une affaire d'hommes et de relations humaines. Alors oui, les changements chez Alco comme chez Sundyne ont sans doute un impact sur les relations entre les deux sociétés. Il est expressément urgent que l'on se rencontre, afin d'évoquer la situation et de faire taire certains propos subjectifs...Nous vous proposons le 11 avril à 14 H 00 en nos bureaux'.

Or les appelantes n'apportent aucune information sur la teneur de cette réunion, se bornant à déclarer qu'après celle-ci aucune relation commerciale n'a repris autre que la livraison des dernières commandes et la reprise du stock.

En cet état, les raisons exactes de la perte du client Sundyne en 2014 restent imprécises et ne peuvent donc être imputées à un comportement fautif des consorts [H].

Il résulte de tout ce qui précède que toutes les demandes de dommages-intérêts des sociétés Stainless Europe et Alco doivent être rejetées.

Sur les demandes des consorts [H]

L'acte de cession du 28 décembre 2011 stipulait que le second complément de prix d'un montant maximum de 230.000 €, payable au plus tard le 28 juin 2013, serait établi comme suit :

' Si la marge brute commerciale, déterminée selon la formule suivante : chiffre d'affaires hors taxes comprenant les prestations de service s'y rapportant diminué des achats hors taxes de marchandises et service net des frais de transport sur achats et vente + ou - la variation des stocks de marchandises de la société Alco, s'élève au moins à la somme d'un million sept cent quatre vingt dix mille (1.790.000) euros, le cédant bénéficiera d'un complément de prix comme suit :

- pour une marge brute comprise entre 1.790.000 et 1.819.999 euros : 40.000 €

- pour une marge brute comprise entre 1.820.000 et 1.859.999 euros : 80.000 €

- pour une marge brute comprise entre 1.860.000 et 1.889.999 euros : 120.000 € '.

Dans son rapport clos le 22 avril 2014, l'expert [X] a précisé que la marge commerciale selon les valeurs nettes au bilan comptable était de 1.803.970 € mais après ajustements, il l'a fixée à 1.843.591 €, ce qui aboutit à un complément de prix de 80.000 €.

Les appelantes soulèvent la nullité du rapport comme manquant d'impartialité et d'objectivité, M. [X], expert-comptable désigné à la demande des cédants étant un membre de la famille d'une des salariés de la société Alco ; les cédants ne contestent en aucune façon cette proximité, laquelle est de nature à jeter une suspicion sur l'impartialité de l'expert. En conséquence, il convient d'écarter les conclusions de son rapport.

Les appelantes soutiennent à juste raison que les modalités de détermination de la marge brute sont clairement prévues dans le protocole de cession et qu'aucun retraitement ou ajustement ne doit être effectué. Il ressort du calcul opéré par la société de commissaires aux comptes et d'expertise comptable Scorex, qu'elles ont mandatée :

- que les comptes 2010, 2011 et 2012 sont présentés de manière identique pour les trois exercices et ont été certifiés sans réserve par le même commissaire aux comptes,

- que les documents comptables ayant servi à la certification de la marge brute sont les comptes 2012, certifiés par le commissaire aux comptes et approuvés par l'assemblée générale ordinaire, et notamment la liasse fiscale,

- que le chiffre d'affaires prestations de service incluses s'élève à 5.129.768 €, dont il faut déduire les achats de marchandises et services nets des frais de transport sur achats et ventes, soit 3.257.082 €, et la variation des stocks de marchandises pour 108.832 €, ce qui aboutit à une marge brute de 1.763.854 €.

La marge brute au titre de l'exercice 2012, calculée conformément aux stipulations de l'acte de cession, étant inférieure à 1.790.000 €, aucune somme n'est due au titre du second complément de prix.

Contrairement à ce que prétendent les consorts [H], la procédure engagée par les sociétés Stainless et Alco à leur encontre ne présente pas un caractère abusif et leurs allégations ne traduisent pas une intention manifeste de nuire. La demande de dommages-intérêts des intimés sera donc rejetée.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Chaque partie qui succombe en ses prétentions, gardera la charge de ses dépens de première instance et d'appel ; vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, aucune indemnité ne sera allouée de ce chef à l'une ou à l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

CONFIRME le jugement en ce qu'il a :

- dit les sociétés Stainless Europe et Alco recevables mais mal fondées en leurs demandes et les en a déboutées,

- débouté les consorts [H] de leur demande de dommages-intérêts,

INFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions,

et, statuant à nouveau :

DÉBOUTE [L] [H], [A] [H] et [T] [H] de toutes leurs demandes,

DÉBOUTE la société Stainless Europe et la société Alco de toutes leurs demandes,

DIT que les sociétés Stainless Europe et Alco d'une part et les consorts [H] d'autre part garderont la charge de leurs dépens de première instance et d'appel.

Le Greffier La Présidente

Cécile PENG Irène LUC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 16/05539
Date de la décision : 14/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°16/05539 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-14;16.05539 ?
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