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12/03/2018 | FRANCE | N°15/18724

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 12 mars 2018, 15/18724


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 12 MARS 2018



(n° 97 , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/18724



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2004028830





APPELANTS



Monsieur [X] [W]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]



Madame [S] [A] veuv

e [W], décédée le [Date décès 1]2017

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]



SARL SIMVEST - SOCIÉTÉ IMMOBILIERE ET D'INVESTISSEMENT

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 339 449 7...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 12 MARS 2018

(n° 97 , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/18724

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2011 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2004028830

APPELANTS

Monsieur [X] [W]

demeurant [Adresse 1]

[Localité 1]

Madame [S] [A] veuve [W], décédée le [Date décès 1]2017

demeurant [Adresse 2]

[Localité 2]

SARL SIMVEST - SOCIÉTÉ IMMOBILIERE ET D'INVESTISSEMENT

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 339 449 746

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

SCI VICTOIRE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 342 839 925

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

SCI SAINT MARTIN

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 440 316 495

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

Représentée par Me Christine PAQUELIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0450

INTIMEES

SAS WHBL 7

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 3]

N° SIRET : 542 027 222

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Bruno LANDON, avocat au barreau de PARIS, toque : C0595

SA SOCIÉTÉ DE GESTION DE GARANTIE ET DE PARTICIPATIONS

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 4]

N° SIRET : 302 097 191

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Représentée par Me Olivier BURETH, avocat au barreau de PARIS, toque : P0529

PARTIES INTERVENANTES :

Monsieur [I] [Y] [W], ès qualité d'héritier de Mme [S] [W], décédée

demeurant [Adresse 5]

[Localité 5]

28000 ISRAEL

Madame [D] [O] [F] [W] épouse [S], ès qualité d'héritère de Mme [S] [W], décédée

demeurant [Adresse 6]

[Localité 1]

Intervenants volontaires

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Janvier 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président

Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de procédure civile,

Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Edouard LOOS, président et par Madame Cyrielle BURBAN, greffière à qui la minute de la décision a été remise par la magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [X] [W] exerçait dans les années 1990 une activité de marchand de biens et de promoteur immobilier par l'intermédiaire de la société Simvest dont il est l'unique associé et diverses sociétés civiles immobilières, chacune étant dédiée à une opération immobilière.

Son principal banquier était la Sofal (aux droits de laquelle est venue l'UIC, puis la société WHBL 7) laquelle lui avait consenti plusieurs financements.

La société Simvest, les SCI [Adresse 7], [Adresse 8] et Immomartre, représentées par Monsieur [W], ont saisi le Président du tribunal de commerce de Paris d'une demande de règlement amiable.

Par ordonnance du 17 février 1993, le Président du tribunal de commerce a fait droit à la demande de règlement amiable et nommé Monsieur [J] en qualité de conciliateur.

Par ordonnance du 9 juillet 1993, la procédure de règlement amiable a été étendue aux SCI Marsoulan, Victoire, du Sud-Ouest, Les Jardins Wallace et Saint-Martin.

La mission du conciliateur a ainsi pris fin le 12 janvier 1994 sans que les parties se soient accordées. Les parties ont, postérieurement, signé un protocole d'accord le 23 mars 1994 puis un avenant du 11 juillet 1994.

Par exploit d'huissier du 19 mars 2004, Monsieur [X] [W], Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest et les SCI Victoire et Saint Martin ont assigné les sociétés WHBL7, la société Baticrédit Participations et la SCN [Adresse 8] devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de nullité et, à titre subsidiaire, de résolution du protocole et de son avenant.

Par jugement du 29 septembre 2011, le tribunal de commerce a :

dire recevables et bien fondées les fins de non-recevoir soulevées par la SAS WHBL7, la SA de Gestion de Garanties et de Participations et la SC [Adresse 8],

dit en conséquence,irrecevables les demandes de Monsieur [W] [X], de l'EURL Simvest, de la SCI Victoire, de la SCI Saint Martin et de Madame [A] veuve [W] [S] ;

débouté les parties demanderesses de leurs demandes de dommages et intérêts ;

condamné in solidum Monsieur [W] [X], de l'EURL Simvest, de la SCI Victoire, de la SCI Saint Martin et de Madame [A] veuve [W] [S] ; à paer à la D WHBL7 anciennement dénommée UIC ' Union Industrielle de Crédit, une indemnité de 30 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum Monsieur [W] [X], de l'EURL Simvest, de la SCI Victoire, de la SCI Saint Martin et de Madame [A] veuve [W] [S] aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 344,34 euros dont TVA : 55,78 euros.

Monsieur [W] [X], l'EURL Simvest, la SCI Victoire, la SCI Saint Martin et Madame [A] veuve [W] [S] ont relevé appel de ce jugement le 18 septembre 2015.

Par conclusions signifiées le 8 décembre 2017, Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] demandent à la cour au visa des articles 1104, 1231, 1224 et 1240 du code civil, de leur donner acte de ce qu'ils interviennent en la cause en qualité d'héritiers de Madame [A] veuve [W], décédée le [Date décès 2] 2017.

Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [A] veuve [W], l'EURL Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin demandent de les déclarer recevables et bien fondés en leur appel, d'infirmer le jugement entrepris et de débouter les intimées de l'intégralité de leurs demandes.

Ils prient la cour, à titre principal, de :

- prononcer la résolution judiciaire du protocole du 23 mars 1994 et de son avenant du 11 juillet 1994,

- désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec la mission de :

. convoquer les parties et se faire remettre tous les documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

. évaluer les actifs du groupe [W] au jour de la signature du protocole d'accord,

. évaluer le montant de la créance de la Sofal vis-à-vis du groupe [W] au jour de la signature du protocole,

. donner son avis sur la réalité et l'importance des préjudices de Monsieur [W],

. déterminer les fruits qui auraient été effectivement perçus par le groupe [W] entre la date de conclusion du protocole et sa date de résolution,

. donner son avis sur les pertes de profit du groupe [W] à la suite de son éviction des opérations immobilières reprises par la Sofal et sur les pertes de chances subies,

. fournir d'une façon générale tout élément technique ou de fait de nature de permettre à la juridiction compétente de se prononcer sur les préjudices subis par le groupe [W].

- dire que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,

- fixer la provision à consigner au greffe à titre d'avance sur les honoraires de l'expert dans le délai imparti par l'arrêt à intervenir.

A titre subsidiaire, en considération du total non-accompagnement de la société WHBL7 dans la poursuite de l'activité du «groupe [W]», dont la SGGP s'est rendue complice, de condamner in solidum les intimés à verser aux appelants la somme de 50 252 235 €, à titre de dommages et intérêts,

- en tout état de cause, condamner les intimés in solidum à verser aux appelants une somme de 50 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 19 décembre 2017, la société WHBL7 demande à la cour de:

- débouter Monsieur [X] [W], la société Simvest, la SCI Victoire, la SCI Saint Martin et Madame [A] veuve [W] de toutes leurs demandes, fins et conclusions.

Vu l'article 1382 du code civil, condamner in solidum Monsieur [X] [W], la société Simvest, la SCI Victoire, la SCI Saint-Martin et Madame [A] veuve [W] au paiement de la somme de 50 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive.

- condamner solidairement Monsieur [X] [W], la société Simvest, la SCI Victoire, la SCI Saint Martin et Madame [A] veuve [W] au paiement de la somme de 50 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamner solidairement Monsieur [X] [W], la société Simvest, la SCI Victoire, la SCI Saint Martin et Madame [A] veuve [W] en tous les dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître Bruno Landin conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 18 décembre 2017, la société de Gestion de Garanties et de Participations SA, représentée par son liquidateur amiable, venant aux droits de la société Bati-Crédit Participations SNC, demande à la cour, au visa des articles 31, 32, 122 du code de procédure civile, ses articles 68, 547, 554, 555, 564 et 954, les articles 2219 et suivants et 2224 et suivants du code civil en leur rédaction issue de la loi n° 2008, 561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, les articles 2219 et suivants du code civil en leur rédaction antérieure à ladite loi et l'article 26 II de ladite loi, 6, 7, 9, 15, 16 et 954 du code de procédure civile, l'article 6, alinéa 1er de la Convention européenne des droits de l'homme, 1382 du code civil (en sa version antérieure à la réforme du droit des obligations), l'article 9 de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, de :

- constater que le jugement du tribunal de commerce de Paris du 29 septembre 2011 a omis de statuer sur les demandes de Monsieur [X] [W], de Madame [S] [A] veuve [W]

et des sociétés Simvest SARL, SCI Victoire et SCI Saint Martin tendant à la résolution judiciaire du protocole d'accord du 23 mars 1994 et de son avenant du 11 juillet 1994 et à l'allocation de dommages-intérêts pour une inexécution fautive des dites conventions ;

- au cas où la cour considèrerait, contrairement à l'avis de la Société de Gestion de Garanties et de Crédits SA, que ledit jugement dont appel a statué sur la demande de dommages-intérêts, pour la rejeter, le confirmer à cet égard ;

- puis, ajoutant audit jugement dont appel :

à titre principal,

- déclarer irrecevable à son encontre, en sa qualité d'ayant droit de la société Bati-Crédit Participations SNC, en raison de son défaut de qualité à défendre (ou du défaut de tout intérêt à agir à son encontre) et/ou en raison de la prescription extinctive, les demandes principales de Monsieur [X] [W], des héritiers de Madame [S] [A] veuve [W] et des sociétés Simvest SARL, SCI Victoire et SCI Saint-Martin visant à faire prononcer la résolution judiciaire du protocole d'accord du 23 mars 1994 et de son avenant du 11 juillet 1994 et à faire ordonner une mesure d'expertise judiciaire ainsi que la demande subsidiaire desdits appelants visant à la faire condamner à des dommages-intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle, in solidum avec la société WHBL SAS ;

- déclarer irrecevable toutes les demandes que Monsieur [X] [W], les héritiers de Madame [S] [A] veuve [W] et les sociétés Simvest SARL, SCI Victoire et SCI Saint-Martin auraient formée contre elle, prise en une qualité différente de celle d'ayant-droit de la société Bati-Crédit Crédits SNC ;

- débouter les appelants de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens à son encontre ;

à titre subsidiaire,

- débouter Monsieur [X] [W], les héritiers de Madame [S] [A] veuve [W] et les sociétés Simvest SARL, SCI Victoire et SCI Saint Martin de toutes leurs demandes à son encontre ;

en tout état de cause,

- condamner Monsieur [X] [W] (en son nom personnel et ès qualités d'héritier de Madame [S] [A] veuve [W]), Madame [D], [O], [F] [S] née [W] ès qualités d'héritière de Madame [S] [A] veuve [W], Monsieur [I], [Y] [W] ès qualités d'héritier de Madame [S] [A] veuve [W] et les sociétés Simvest SARL, SCI Victoire et SCI Saint Martin, in solidum, à payer à la Société de Gestion de Garanties et de Crédits SA (en liquidation amiable) une somme de 100 000 € à titre dommages-intérêts pour abus du droit d'appel ;

- les condamner, in solidum, à payer à la Société de Gestion de Garanties et de Participations SA (en liquidation amiable). une somme de 50 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des dépens irrépétibles de la procédure d'appel (hors procédure d'incident et de déféré) ;

- les condamner, in solidum, aux entiers dépens de la procédure d'appel (hors procédure d'incident et de déféré) qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 29 septembre 2011 en ce qu'il a condamné les consorts [W] aux dépens de la première instance ;

- préciser que les condamnations sollicitées ci-dessus, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, s'ajouteront à cette condamnation aux dépens de la première instance, ainsi qu'à toute condamnation des consorts [W] au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en faveur de la société WHBL 7 SAS, qui serait confirmée par la cour de céans ou prononcée par elle en ajoutant au jugement dont appel.

SUR CE,

Il convient de souligner que les appelants ne critiquent pas le jugement en ce qu'il a jugé les demandes en nullité du protocole et de son avenant irrecevables et en ce qu'il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts subséquente.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ces chefs.

Sur la recevabilité de l'action à l'encontre de la SGCP

Les appelants soutiennent que la Sofal, avec la complicité de la SGCP venant notamment aux droits des sociétés Baticrédit Participations, Baticrédit et Baticrédit Finances a gravement manqué à ses obligations telles que prévues au protocole et à son avenant ce qui justifie leur demande de résolution et la condamnation subsidiaire des intimées sur le fondement des articles 1231-1, 1104 et 1224 du code civil.

La société SGCP invoque son défaut de qualité pour défendre contre les demandes principales et l'irrecevabilité nécessaire de la demande subsidiaire des appelants

Les consorts [W] sollicitent, aux termes du dispositif de leurs conclusions, la résolution judiciaire du protocole d'accord du 23 mars 1994 et son avenant du 11 juillet 1994 et une demande d'expertise aux fins d'évaluation de leur préjudice.

Ainsi que l'expose la SGCP, le protocole et son avenant ont été conclus entre la société Sofal, d'une part, et, le « groupe [W] , tel que défini en sa première page, composé de Monsieur [X] [W], la société Simvest, la SCI [Adresse 8], la SCI [Adresse 7] et la SCI Victoire et contenaient des stipulations en faveur et à la charge de la SCI Saint-Martin et de la mère de Monsieur [W], Madame [S] [A] veuve [W]. Les consorts [W] précisent que la SGCP a été assignée en qualité d'ayant-droit de la société Bati-Crédit Crédits dont il n'est pas établi qu'elle ait été un ayant droit de la société Sofal, à laquelle a succédé la société WHBL 7 (anciennement dénommée UIC). En vertu de l'effet relatif des contrats, la SGGP n'est donc pas liée par le protocole d'accord et l'avenant et ne peut pas se voir reprocher une éventuelle inexécution contractuelle de la Sofal. Elle est donc dépourvue de qualité à défendre contre les demandes tendant à la résolution judiciaire de ces deux conventions auxquelles elle n'est pas parties ainsi qu'à la demande d'expertise.

L'action en résolution, la demande d'expertise subséquente fondée sur une inexécution contractuelle de la SGGP et sur l'article 1231-1 du code civil relatif à la responsabilité contractuelle, est, faute de contrat liant les appelants à la SGGP, irrecevable.

Sur la demande de résolution du protocole et de son annexe en application de l'article 8-4 du protocole

Le jugement entrepris n'a pas statué sur la demande de résolution formée par les consorts [W], l'EURL Simvest et les SCI Victoire et Saint Martin. Cette demande sera donc examinée à hauteur d'appel.

Les consorts [W] soutiennent que la Sofal n'a pas rempli ses obligations résultant du protocole et de son annexe et en sollicitent la résolution et, à titre subsidiaire, la condamnation des intimés sur le fondement des articles 1231-1, 1104 et 1224 du code civil. Ils soulignent qu'au 8 septembre 1998, date à laquelle la Sofal a informé M. [W] de la cessation de son activité bancaire, celle-ci a reconnu qu'il avait subi une perte de chance jusqu'au 11 juillet 1999 à défaut de pouvoir faire examiner ses demandes de financement pendant cette période tout en estimant qu'il n'en résultait aucun préjudice. Ils soutiennent que la Sofal a manqué à son obligation essentielle et déterminante de participer à la continuation de l'activité du groupe [W] au regard du refus de financement des 7 demandes présentées en 4 ans, sans justificatif et en adoptant des comportements constituant un obstacle à cette continuation ; qu'elle s'est opposée au versement du moindre honoraire à M. [W] à l'exception de ceux prévus à l'article 6 au titre de la résiliation d'un contrat de gestion.

La société WHBL expose que le but du protocole était d'éviter la liquidation judiciaire du groupe [W] et la mise en jeu des cautions accordées mais nullement un accompagnement pour la poursuite du groupe [W] après la conclusion de l'accord alors que M. [W] soutient que la poursuite de l'activité du groupe était un élément essentiel de l'accord à laquelle la Sofal s'était engagée, tel que cela résulte du préambule et des autres dispositions (article 5-5 et article 8 qui parle de projet d'entreprise); que l'objectif commun du protocole était la continuation de l'activité du groupe avec l'accompagnement de la Sofal en contrepartie du transfert de la quasi-totalité du patrimoine du groupe [W] au profit de la Sofal entrainant l'allègement de l'endettement du groupe et alors que la liquidation judiciaire du groupe [W] n'était nullement avérée.

Elle soutient qu'elle a respecté le protocole et notamment l'article 8.4 relatif à l'examen des demandes de financement, soulignant qu'il s'agissait d'une obligation de moyen.

sur l'absence de financement

Les consorts [W] soutiennent que la Sofal avait une obligation de moyen renforcée au regard de l'objet du protocole conventionnellement fixé quant à la continuation du groupe groupe [W] et qu'elle devait examiner effectivement les demandes de financement présentées alors qu'elle les a refusés de manière systématique et arbitraire sans en expliciter les raisons.

La société WHBL7 venue aux droits de la société Sofal réplique que ni l'esprit ni la lettre du protocole ne conforte cette allégation ; l'objet du protocole étant de permettre à [X] [W] de poursuivre l'exploitation de son groupe par un allègement substantiel de son endettement et qu'aucune disposition ne lui imposait d'accéder aux demandes de financement.

Ceci étant exposé, il convient de rappeler qu'en application de l'article 1224 (anciennement 1183) du code civil, il appartient au demandeur à la résolution d'un contrat de rapporter la preuve de la grave inexécution par le co-contractant de son ou de ses obligations.

Il est précisé dans le préambule du protocole signé par les parties le 23 mars 1994 que Monsieur [X] [W], personnellement et en qualité de dirigeant des sociétés emprunteuses est entré en relation avec Sofal (qui a financé diverses opérations entreprises par ces dernières ou par M. [X] [W]) pour déterminer les efforts que celle-ci serait disposée à consentir, pour lui permettre de poursuivre l'exploitation de son groupe. Il a demande à Sofal qui accepte de l'envisager dans le cadre du règlement amiable d'acquérir directement ou par le biais de titres donnant droit à leur propriété, plusieurs de ses immeubles afin de réduire l'endettement de son groupe. Sofal a accepté d'abandonner la créance résiduelle qu'elle détient sur le groupe [W] après lesdites acquisitions pour une partie à titre définitif le solde étant assorti d'une clause de retour à meilleur fortune.

En application de l'article 8, il est indiqué « l'allègement sensible de l'endettement du groupe [W] et la libération de Monsieur [W] de son engagement de caution, prévus dans le présent protocole sont de nature à permettre la continuation de l'exploitation, conformément à l'ordonnance de règlement amiable du tribunal de commerce de Paris du 17 février 1993. »

Cet article dispose, qu'outre ces dispositions d'économie générale et le versement au groupe [W] d'honoraires de gestion et de commercialisation prévus aux articles 6 et 9, la Sofal accepte de favoriser la continuation de l'activité du groupe [W] par les dispositions suivantes :

. au titre de l'article 8.1 : la mise à disposition pendant 23 mois au profit de M. [W] du plateau de bureaux qu'il occupe au 4ème étage de l'immeuble de bureaux [Adresse 9] ;

. au titre de l'article 8.2 ; l'abandon immédiat, après la remise de la copie exécutoire représentative de la créance sur l'opération [N] [U], de la somme de 10 000 000 F et l'obligation de signer tout acte de mainlevée à première demande de M. [W] ;

. au titre de l'article 8.3 la conservation par M. [W] de la propriété de son appartement personnel [Adresse 9] (92) ;

. au titre de l'article 8.4, la « Sofal s'engage à examiner le financement de toute nouvelle opération qui lui serait présentée par Monsieur [W]. »

Au titre de l'article 5.5 relatif au retour à meilleure fortune, M. [W] s'est engagé à soumettre à Sofal par priorité tout projet d'investissement réalisé personnellement ou par le truchement de toute société existante ou à créer, Sofal disposant d'un délai de 15 jours après réception du dossier pour lui permettre de prendre sa décision pour prendre parti sur les demandes de financement qui lui seront transmises par Monsieur [W].

Il s'en déduit que l'objet du protocole était de permettre à M. [X] [W] de poursuivre l'exploitation de son groupe par un allègement substantiel de son endettement bancaire et la mainlevée de ses engagements de caution. L'acceptation des demandes de financement n'entraient pas dans le champ contractuel et l'obligation d'examiner les demandes de financement n'était qu'une obligation de moyen et non une obligation de résultat ni, contrairement à ce que soutiennent les consorts [W], une obligation de moyen renforcée.

Il est précisé qu'aucune disposition n'interdisait à M. [W] de solliciter des concours financiers auprès d'autres banques, ce que M. [W] reconnaît d'ailleurs avoir fait fait, précisant que les projets se sont avérés bénéficiaires.

sur les autres manquements invoqués

Les consorts [W] invoquent le non respect des articles 4-1, 5-4-3, 6, 7, 8-2, 9-3 du protocole.

La société WHBL7 soutient que les manquements contractuels autres que l'absence de financement (non respect des articles 4-1, 5-4-4, 6, 8-2 et 9-3 du protocole) sont prescrits en application de l'article L 110-4 du code de commerce puisque ce n'est que par conclusions signifiées le 12 mars 2011 devant la cour que les appelants se sont prévalus pour la première fois ou se heurtent à l'autorité de la chose jugée s'agissant du non respect de l'article 9-3 du protocole concernant le refus du paiement des honoraires de commercialisation en raison du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 28 avril 1997 confirmé par arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 janvier 2000 et qu'en tout état de cause, les griefs invoqués ne sont pas établis

S'agissant du non-respect de l'article 4-1, les consorts [W] reprochent à la Sofal de l'avoir contraint à exercer un droit de repentir concernant un locataire à la suite d'un arrêt de la cour du 7 février 1995 et versent aux débats les pièces n° 25 (arrêt du 7 février 1995) et la pièce n° 26 en date du 9 février 1995. S'agissant du non respect de l'article 5-4-3, ils reprochent à la Sofal de ne pas avoir cédé le rang de l'une des hypothèques au Trésor Public et produisent une pièce n° 27-1 en date du 12 février 1998. S'agissant du non respect de l'article 6, il est reproché à Sofal de n'avoir pas réglé à bonne date 9 mensualités de 100 000 F à compter du 1er avril 1994 et s'appuient sur les pièces n° 48, 43, 44 et 45 datant respectivement de mars juillet, octobre et décembre 1994. S'agissant de l'article 7, les consorts [W] soutiennent que la Sofal serait redevable d'une taxe de raccordement à l'égout et s'appuient sur les pièces n° 28, 29, 30 datant respectivement du 18 juin, du 7 novembre et du 14 novembre 1996. S'agissant de l'abandon de la créance Pommier, les appelants invoquent la déloyauté de la Sofal et s'appuient sur la pièce n° 31 qui est datée du 27 octobre 1994 et les pièces n° 20, 40, 42, et 46-1 à 46-4. S'agissant du non respect de l'article 9-3, il est reproché à la Sofal d'avoir refusé de payer à M. [W] des honoraires de commercialisation et s'appuient sur les pièces n° 32, 33, 35, 36, 37 et 30 dont les plus récente est datée du 11 septembre 1995. Enfin, ils invoquent les entraves faites par la Sofal au projet de [Localité 6] et s'appuient sur les pièces n° 48, 52, 53, 54, 56, 57, 58, et 59 dont la plus récente est datée du 3 septembre 1998.

Ceci étant exposé, l'article L 110-4 du code de commerce dans sa version applicable à l'espèce dispose que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants se prescrivent par 10 ans.

L'assignation introductive d'instance délivrée à la requête des consorts [W] date du 19 mars 2004 ne contient qu'un seul grief à savoir le non respect de l'article 8-4 du protocole concernant les demandes de financement.

Ce n'est que par conclusions récapitulatives déposées devant le tribunal de commerce pour l'audience du 15 juin 2011 que les appelants se sont prévalus pour la première fois des manquements ci-dessus mentionnés.

Or, la prescription de l'action en résolution d'un contrat pour inexécution a pour point de départ la date à laquelle la victime des agissements fautifs a eu connaissance du dommage.

Faute d'avoir identifié dans les délais de la prescription extinctive, des faits fautifs ou des circonstances précises susceptible d'être qualifiés de manquement à des obligations contractuelles de la Sofal ayant entraîné un dommage, l'action visant à voir sanctionner les manquements ci-dessus mentionnés est prescrite.

Ainsi le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions et les consorts [W] seront déboutés de leur demande de résolution du protocole et de son annexe ainsi que de leur demande subséquente d'expertise.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société WHBL7 et la SGGC ne rapportent pas la preuve que les consorts [W], l'EURL Simvest et les SCI Victoire et Saint Martin ont, en les assignant et en relevant appel d'une décision leur faisant grief, fait dégénérer leur droit d'ester en justice et de faire appel en abus.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages pour procédure abusive.

Les sociétés WHBL et SGGC seront déboutées de leur demande de dommages et intérêts formées à hauteur d'appel.

Les consorts [W] seront condamnés solidairement aux dépens d'appel et déboutés de leur demande d'indemnité de procédure. Ils seront condamnés in solidum, sur ce même fondement, à payer à chacun des intimés la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

DONNE ACTE à Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] qu'ils interviennent en la cause en qualité d'héritiers de Madame [A] veuve [W] ;

CONFIRME le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 29 septembre 2011 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

DECLARE irrecevable l'action diligentée par Monsieur [X] [W] à titre personnel Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin contre la société de Gestion de Garanties et de Participations ;

DEBOUTE Monsieur [X] [W] à titre personnel Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin de leur demande de résolution judiciaire du protocole du 23 mars 1994 et de son avenant du 11 juillet 1994 et de leur demande d'expertise ;

DEBOUTE la société WHBL7 de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

DEBOUTE la Société de Gestion de Garanties et de Participations de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [X] [W] à titre personnel Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin aux dépens d'appel avec recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

DEBOUTE Monsieur [X] [W] à titre personnel Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin de leur demande d'indemnité de procédure ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [X] [W] à titre personnel Monsieur [X] [W], Madame [D] [W] épouse [S] et Monsieur [I] [W] ès qualités d'héritiers de Madame [S] [A] veuve [W], la société Simvest, la SCI Victoire et la SCI Saint Martin à payer à la société WHBL7 et à la Société de Gestion de Garanties et de Participations la somme de 2 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

C. BURBAN E. LOOS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 15/18724
Date de la décision : 12/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris J1, arrêt n°15/18724 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-12;15.18724 ?
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