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09/03/2018 | FRANCE | N°14/11724

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 09 mars 2018, 14/11724


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 09 Mars 2018



(n° , 8 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/11724



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juillet 2014 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 12-00285





APPELANTE

URSSAF - [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Mme [K] en vert

u d'un pouvoir général



INTIMEE

Société ACEP

[Adresse 2]

[Adresse 2]

SIRET 315 651 539 00027

représentée par Me Franck BUREL, avocat au barreau de LYON, toque : 2148 substitué par Me Raphaël RO...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 09 Mars 2018

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/11724

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juillet 2014 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MELUN RG n° 12-00285

APPELANTE

URSSAF - [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Mme [K] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

Société ACEP

[Adresse 2]

[Adresse 2]

SIRET 315 651 539 00027

représentée par Me Franck BUREL, avocat au barreau de LYON, toque : 2148 substitué par Me Raphaël ROULEAUX, avocat au barreau de PARIS, toque : R188

Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale

[Adresse 3]

[Adresse 3]

avisé - non comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Claire CHAUX, présidente de chambre

Madame Marie-Odile FABRE DEVILLERS, conseillère

Madame Chantal IHUELLOU LEVASSORT, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Claire CHAUX, présidente de chambre et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par l'Union pour le Recouvrement des Cotisations de Sécurité Sociale et d'Allocations Familiales ( l'URSSAF ) d'[Localité 1] à l'encontre d'un jugement rendu le 11 juillet 2014 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun dans un litige l'opposant à l'Association Création Equipements Pilotes Personnes Agées ( ACEP )

FAITS , PROCEDURE , PRETENTIONS DES PARTIES

Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard .

Il suffit de rappeler que l'Association Création Equipements Pilotes Personnes Agées ( ACEP ) a pour vocation de répondre aux besoins d'aide et de prise en charge de la personne âgée depuis 1981. Cette association loi 1901 a le statut d'EHPAD ( Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) . Son activité s'articule autour de 2 pôles distincts : la maison de retraite et le SSIAD ( Service des Soins Infirmiers à Domicile )

Par courrier du 22 avril 2010 , l'association a demandé à l'URSSAF le remboursement des contributions patronales au titre de l'aide à domicile / service à la personne pour l'EHPAD pour les aides soignantes , agents de service , agents qualifiés , à hauteur d'une somme totale de 908 633€ couvrant la période d'avril 2007 à mars 2010, estimant qu'elle en était exonérée en application de l'article L 241 - 10 III du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure à la loi de finance pour la sécurité sociale pour 2011 .

A ce titre l'URSSAF a remboursé à l'ACEP la somme totale de 869 582€ ( 752 093€ et 117 489€ ), soit en deniers , soit en quittances après compensation opérée par l'ACEP sur ses cotisations courantes.

Par courrier du 11 février 2011, l'ACEP a demandé à l'URSSAF, sur le même fondement, le remboursement des cotisations patronales pour l'EHPAD pour l'année 2010 , pour un montant de 298 232 € .

Courant 2011 , l'ACEP a fait l'objet d'un contrôle des services de l'URSSAF portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 , au sein de son établissement de ROISSY EN BRIE ( 77 ) .

Suite à ce contrôle, une lettre d'observations a été établie par l'URSSAF le 30 novembre 2011 portant sur 5 chefs de redressement dont le chef de redressement N° 3 relatif aux exonérations des aides à domicile , services à la personne :notion de domicile - amenant sur ce point une régularisation de cotisations et contributions d'un montant de 546 249€ pour les années 2008 et 2009 .

Les autres chefs de redressement n'ont pas été contestés :

-1°) CSG/CRDS omise sur la participation du CE à la mutuelle

- 2°) taxe de prévoyance erronée ( crédit )

- 4°) prévoyance complémentaire : contrat conclu avant le 1er janvier 2005 : limite d'exonération

- 5°) annulation des exonérations suite à absence de négociation annuelle obligatoire

Par lettre du 23 décembre 2011 , l'ACEP a contesté le chef de redressement N° 3, que l'URSSAF a , par courrier du 28 décembre 2011, maintenu dans son intégralité.

Le 3 janvier 2012, l'URSSAF a adressé une mise en demeure à l'ACEP portant sur la somme totale de 702 302 € au titre des cotisations et de majorations de retard pour les années 2008 , 2009 et 2010 ( 589 657€ de cotisations et 112 645€ de majorations de retard).

Contestant la décision de l'URSSAF du 28 décembre 2011 et cette mise en demeure à hauteur du chef de redressement N° 3, l' ACEP a saisi la commission de recours amiable.

Le 13 juillet 2012 , l'URSSAF lui a adressé une nouvelle mise en demeure portant sur la somme totale de 702 302 € au titre des cotisations et majorations de retard pour les années 2008 , 2009 et 2010.

Le 19 septembre 2012 , la commission de recours amiable a rejeté le recours .

L'ACEP a saisi le 16 avril 2012 le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun qui, par décision du 11 juillet 2014 a ordonné l'annulation du redressement effectué par l'URSSAF par lettre d'observations du 30 novembre 2011 suivie d'une mise en demeure du 3 janvier 2012 et d'une seconde du 13 juillet 2012 , portant sur 589 657€ de cotisations et 112 645€ de majorations de retard se rapportant à la période des années 2008 à 2010 incluses .

L'URSSAF fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions écrites aux termes desquelles elle demande à la Cour d'infirmer le jugement entrepris, de confirmer la décision de la commission de recours amiable , de faire droit à sa demande reconventionnelle et de condamner l'ACEP au paiement de la somme de 589 657€ en cotisations et 112 645€ de majorations , au titre du redressement opéré pour les années 2008 , 2009 et 2010 , de condamner l'ACEP au paiement des sommes de 5000€ à titre de dommages et intérêts pour la faute commise et de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

Elle fait valoir :

- que son action n'est pas prescrite , dans la mesure où c'est à la suite d'une information erronée de l'ACEP que l'URSSAF a procédé au remboursement de l'indu revendiqué, que la fraude ouvre un délai de prescription de 5 ans , de sorte que les cotisations patronales de l'année 2008 ne sont pas prescrites,

- qu'il est constant que l'article L 241 - 10 III du code de la sécurité sociale , dans sa rédaction applicable au litige , qui prévoit, sur les rémunérations des aides à domicile employées dans les conditions prévues par ce texte, une exonération des cotisations patronales pour la fraction versée en contrepartie des tâches effectuées chez les personnes visées au I du même texte , ne peut s'appliquer qu'aux rémunérations des salariés intervenant au domicile privatif de ces personnes , à l'exclusion des lieux non privatifs ou collectifs occupés en établissement , qu'en l'espèce, l'établissement géré par l'ACEP est une solution d'hébergement collectif, que la prestation ne vise pas au maintien dans un domicile privatif , que la domiciliation des personnes hébergées au sein de l'EHPAD est une domiciliation collective et non une domiciliation individualisée par rapport à un logement privatif acquis ou loués ,

- qu'en formulant sa demande de remboursement le 22 avril 2010 , l'ACEP a sciemment induit en erreur l'URSSAF en indiquant dans son courrier que sa demande de régularisation ne concernait que les tâches d'aide à domicile réalisées au domicile individuel des personnes telles que aides aux personnes âgées, aux personnes handicapées, garde- malade , que la faute évidente justifie l'allocation d'une somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts .

L'ACEP fait déposer et soutenir oralement par son conseil des conclusions aux termes desquelles elle demande à la Cour :

Sur la prescription :

- d'infirmer le jugement entrepris ,

* de dire que l'URSSAF ne peut exiger le paiement des cotisations 2008 , celles - ci étant prescrites ,

* de constater que les conditions de validité de la mise en demeure n'étant pas respectées, la procédure de redressement elle- même est entachée de nullité ,

* de dire que le redressement opéré par la voie d'une mise en demeure visant une période prescrite dont entachée de nullité , est nul,

* d'annuler le redressement opéré d'un montant de 702 302€ , ainsi que les mises en demeure du 3 janvier 2012 et du 13 juillet 2012 ,

Si la Cour estimait le redressement régulier :

* constater que les cotisations au titre de l'année 2008 ne peuvent être exigées, celles - ci étant prescrites ,

- *déduire la somme de 262 348 € du montant de ce redressement

Sur le fond :

- confirmer le jugement entrepris

* constater que le texte de l'article L 241 - 10 III du code de la sécurité sociale est clair et ne souffre aucune interprétation ,

* constater l'absence de condition relative au domicile et a fortiori , relative au maintien à domicile ou au type de logement occupé ,

-* dire que l'URSSAF ne pouvait faire application d'une condition non prévue par le texte ,

Si par impossible , la Cour estimait , nonobstant les termes de l'article L241- 10 III que celui - ci pose comme condition d'application de l'exonération que la prestation soit accomplie au domicile du bénéficiaire ,

- constater que de nombreux textes, notamment la loi 2009 - 879 du 21 juillet 2009 modifiant l'article L 6111- 1 du code de la santé publique, ont reconnu la domiciliation au sein de structures d'hébergement collectif ,

- dire que le domicile doit être déterminé conformément au droit commun, selon la définition classique des articles 102 et suivants du code civil,

- dire que l'ACEP constitue le domicile de ses résidents conformément à l'article 102 du code civil ,

Si par ailleurs, la Cour estimait que l'article L 241 - 10 III nécessite une interprétation et donc une recherche d'interprétation du législateur ,

- dire que l'analyse de l'article L 241 - 10 III sous l'angle grammatical et logique et celle des travaux parlementaires ayant précédé la promulgation de la loi conduisent à admettre l'éligibilité des EHPAD au bénéfice de l'exonération

En conséquence de quoi:

- Constater que l'ACEP satisfait à l'ensemble des conditions posées par l'article L 241 - 10 III du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige ,

- dire que l'ACEP doit bénéficier de l'exonération de charges patronales sur le salaire du personnel qu'elle emploie au titre des prestations d'aide à domicile ,

- infirmer la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF ,

- annuler le redressement de 702 302 € pratiqué par l'URSSAF ainsi que les mises en demeure du 3 janvier 2012 et du 13 juillet 2012 ,

- ordonner le remboursement sollicité de 298 232 € au titre de l'année 2010 ,

- enjoindre à l'URSSAF de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643 868€

En tout état de cause ,

- condamner l'URSSAF au paiement de la somme de 3000€ en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions .

SUR CE , LA COUR ,

Sur la prescription :

Il résulte des dispositions de l'article L 244 - 3 du code de la sécurité sociale , dans sa version applicable au litige, que la mise en demeure notifiée par l'URSSAF ne peut concerner que les cotisations exigibles dans les trois années qui précèdent l'année de son envoi ainsi que celles exigibles au cours de l'année de son envoi .

Le point de départ de la prescription est la date limite d'exigibilité des cotisations .

Par courrier du 22 avril 2010 , l'association a demandé à l'URSSAF le remboursement des contributions patronales au titre de l'aide à domicile / service à la personne pour l'EHPAD pour les aides soignantes , agents de service , agents qualifiés , à hauteur d'une somme totale de 908 633€ couvrant la période d'avril 2007 à mars 2010, estimant qu'elle en était exonérée en application de l'article L 241 - 10 III du code de la sécurité sociale dans sa version antérieure à la loi de finance pour la sécurité sociale pour 2011 .

A l'initiative de l'URSSAF , cette demande a été rectifiée par courrier du 30 août 2010 , le montant s'élevant à 815 798€, l'URSSAF ayant également sollicité que celle portant sur le premier trimestre 2010 soit faite en 2011 au titre de l'année 2010 entière .

Au cours de l'année 2010, l'URSSAF a demandé à l'ACEP des informations complémentaires sans remettre en cause le bien fondé de la demande.

L'ACEP a déduit des acomptes sur ses déclarations mensuelles et obtenu le 19 novembre 2010 un avis de crédit d'un montant total de 117 489€

A la suite du contrôle effectué en 2011, ayant abouti à la lettre d'observations du 30 novembre 2011, l'URSSAF a adressé à l'ACEP une première mise en demeure le 3 janvier 2012 puis une seconde le 13 juillet 2012 portant sur les cotisations de l'année 2008 , 2009 et 2010.

Dès lors les cotisations 2008 ne sont devenues exigibles qu'à la date de la réception de la mise en demeure par l'ACEP . Elles n'étaient donc pas prescrites.

Sur le chef de redressement N° 3 relatif aux exonérations des aides à domicile , services à la personne :notion de domicile ( années 2009 et 2010)

Les dispositions de l'article L 241 - 10 III , dans leur version applicable au litige , prévoient III.-Les rémunérations des aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée

ou sous contrat à durée déterminée pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu dans les conditions visées à l'article L. 122-1-1 du code du travail par les associations et les entreprises admises, en application de l'article L. 129-1 du code du travail, à exercer des activités concernant la garde d'enfant ou l'assistance aux personnes âgées ou handicapées, les centres communaux et intercommunaux d'action sociale et les organismes habilités au titre de l'aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme de sécurité sociale sont exonérées des cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales pour la fraction versée en contrepartie de l'exécution des tâches effectuées chez les personnes visées au I ou bénéficiaires de prestations d'aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l'aide sociale légale ou dans le cadre d'une convention conclue entre ces associations ou organismes et un organisme de sécurité sociale, dans la limite, pour les personnes visées au a du I, du plafond prévu par ce a.

Ainsi, l'article L 241 - 10 III , dans sa version applicable au litige , soumet le bénéfice de l'exonération aux conditions suivantes :

- elle doit porter sur les cotisations patronales d'assurances sociales et d'allocations familiales ,

- le personnel et les personnes visées sont les aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée ou déterminée pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu pour effectuer des tâches d'aide à domicile

- les employeurs sont soit des centres communaux ou intercommunaux d'action sociale, soit des associations ou des entreprises ayant obtenu l'agrément en application du code du travail pour exercer des activités de service à la personne , soit des organismes habilités au tire de l'aide sociale ou ayant passé une convention avec un organisme de sécurité sociale

- les tâches doivent être effectuées chez les personnes visées au a)b)c)d)e) visés au I : les personnes âgées d'au moins 70 ans non dépendantes , les parents d'un enfant handicapé , les personnes titulaires de la prestation de compensation ou de la majoration tierce personne, les personnes âgées d'au moins 60 ans dans l'obligation de recours à l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes de la vie courante , les personnes remplissant la condition de perte d'autonomie titulaire de l'APA .

Il n'est pas contesté que l'ACEP est un organisme, habilité à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale , qui a passé une convention avec un organisme de sécurité sociale , l'assurance maladie , que l 'exonération qu'elle sollicite porte uniquement sur les cotisations patronales pour le personnel qu'elle emploie sous contrat à durée indéterminée ou déterminée et pour les tâches d'aide à domicile qu'il effectue .

Cependant , pour refuser à l'ACEP le bénéfice de l'exonération , l'URSSAF fait valoir que le dispositif prévu par les dispositions susvisées est réservé aux activités réalisées au domicile des bénéficiaires , ce qui exclurait les structures d'hébergement collectif , à l'exception des foyers logement.

Force est de constater que le terme de domicile n'est pas employé au paragraphe III des dispositions litigieuses. Le texte prévoit que les taches doivent être effectuées " chez " les personnes visées au visées au a)b)c)d)e) visés au I.

Or il est constant que les EHPAD offrent un hébergement aux personnes âgées dépendantes et les prestations d'aide à domicile sont délivrées par le personnel de l'ACEP auprès des résidents et chez les résidents au sein de l'établissement.

Même si l'URSSAF interprète l'adverbe " chez " comme étant synonyme de domicile , lieu du principal établissement de la personne , ainsi qu'il ressort de l'article 102 du code civil, il doit être constaté que l'ACEP constitue l'habitation réelle et effective des résidents . Ils ont signé un contrat de séjour , prennent leur repas à l'ACEP , ils y dorment , y reçoivent leur famille et y exercent la majorité de leurs activités journalières . Ils ont également la possibilité d'aménager leur logement et de le personnaliser.

Le domicile étant non seulement le lieu où la personne a son principal établissement mais encore celui , qu'elle y habite ou non , où elle a le droit de se dire chez elle , quels que soient le titre de son occupation et l'affectation donnée aux locaux , peu importe les conditions juridiques de l'installation , qu'elle soit ou non titulaire d'un bail .

En l'espèce , les résidents ont signé avec l'établissement un contrat de séjour à durée indéterminée . Un état des lieux a été dressé et ils ont versé un dépôt de garantie. Ce contrat constitue un titre leur donnant droit à l'occupation de leur logement.

Par ailleurs, il est établi , au vu des pièces produites ,que les personnes âgées résidant au sein de l'ACEP sont fiscalement domiciliées à l'adresse de l'ACEP , qu'elles y reçoivent leur courrier , qu'elles sont inscrites sur les listes électorales de leur lieu de domicile que constitue L'ACEP.

Outre ces conditions matérielles, l'élément intentionnel du principal établissement se définit comme la volonté manifestée par l'intéressé de se fixer en un lieu de manière complète et permanente mais non pas nécessairement définitive.

En l'espèce , le changement de domicile fiscal , électoral et social a exigé des démarches auprès des administrations et l'installation à l'ACEP a impliqué une procédure préalable d'inscription , de sorte que ces circonstances établissent l'intention des résidents de s'y fixer de manière complète et permanente mais non pas nécessairement définitive.

Enfin, le fait que le domicile soit constitué d'une partie privative au sein d'une structure collective n'est pas de nature à priver l'ACEP du bénéfice de l'exonération dans la mesure où le texte de l'article L 241 - 10 III ne prévoit aucune exclusion du bénéfice de l'exonération des structures d'hébergement collectif .

En conséquence, il convient d'annuler le chef de redressement N°3 relatif aux exonérations des aides à domicile , services à la personne :notion de domicile , pour un montant 546 249€ au titre des cotisations outre les majorations de retard .

En revanche , les autres chefs de redressement N° 1, N° 2 ,N° 4, N°5 n'étant pas contestés, il convient de les confirmer .

Le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions

Il appartient à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties .

Sur la demande de remboursement de la somme de 298 232 € au titre des cotisations 2010

Le chef de redressement N°3 n'ayant porté que sur les années 2008 et 2009 , il convient au vu des pièces du dossier , de faire droit à la demande de remboursement présentée par l'ACEP au titre des mêmes cotisations 2010 pour un montant de 298 232€.

Sur les autres demandes:

Le chef de redressement N° 3 étant annulé , la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée .

En revanche , il convient d'enjoindre à l'URSSAF de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643 868€

L'URSSAF qui succombe sera déboutée de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

L'équité ne commande pas de faire droit à la demande de l'ACEP présentée sur le même fondement .

Il sera rappelé que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale est gratuite et sans frais .

PAR CES MOTIFS ,

LA COUR ,

INFIRME le jugement entrepris,

STATUANT A NOUVEAU ,

Annule le chef de redressement N°3 relatif aux exonérations des aides à domicile , services à la personne :notion de domicile pour un montant 546 249€ au titre des cotisations outre les majorations de retard

Maintient les chefs de redressement N° 1, N° 2 ,N° 4, N°5 ,

Ordonne à l'URSSAF d' [Localité 1] de rembourser à l'ACEP la somme de 298 232€ au titre des cotisations 2010 ,

Dit qu'il appartient à l'ACEP de se rapprocher de l'URSSAF [Localité 1] aux fins de faire les comptes de régularisation des comptes entre les parties ,

Y AJOUTANT ,

REJETTE la demande de l'URSSAF en paiement de dommages et intérêts ,

ENJOINT à l'URSSAF [Localité 1] de faire cesser l'effet de l'inscription de privilège du 6 septembre 2012 d'un montant de 643 868€ ,

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de statuer sur les dépens ;

Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144 - 10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant au 10ème du montant mensuel du plafond prévu par l'article L 241 - 3 et condamne L'URSSAF [Localité 1] au paiement de ce droit s'élevant à 331,10€ .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 14/11724
Date de la décision : 09/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris L3, arrêt n°14/11724 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-09;14.11724 ?
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