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01/03/2018 | FRANCE | N°15/08631

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 01 mars 2018, 15/08631


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRÊT DU 1er MARS 2018



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/08631



Décision déférée à la cour : jugement du 17 février 2015 -tribunal de commerce de BOBIGNY - RG n° 2011F01112





APPELANTE



SAS GEODIS FREIGHT FORWARDING FRANCE anciennement dénommée GEODIS WILSON FRANCE

ayant

son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Olivier DECOUR de l'AARPI GODIN ASS...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRÊT DU 1er MARS 2018

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/08631

Décision déférée à la cour : jugement du 17 février 2015 -tribunal de commerce de BOBIGNY - RG n° 2011F01112

APPELANTE

SAS GEODIS FREIGHT FORWARDING FRANCE anciennement dénommée GEODIS WILSON FRANCE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Olivier DECOUR de l'AARPI GODIN ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

INTIMÉS

Monsieur [R] [Y] exerçant à titre individuel sous l'enseigne 'CARGOCONSULT E.U'

demeurant [Adresse 2]

[Adresse 2] (AUTRICHE )

Représenté par Maître Marie-Catherine VIGNES de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Ayant pour avocat plaidant Maître Brigitte VICTOR-GRANZER, avocate au barreau de PARIS, toque : C2176

SASU ALTEAD SOLUTIONS INDUSTRIELLES

ayant son siège social [Adresse 3]

[Adresse 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Ayant pour avocat plaidant Maître Cyril BOURAYNE de la SELARL BOURAYNE & PREISSL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0369

Société AIG EUROPE LIMITED venant aux droits de la société CHARTIS EUROPE, société de droit étranger

ayant son siège social [Adresse 4]

[Adresse 4] (ROYAUME-UNI)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège et élisant domicile au siège de la société AM RECOURS (RCS LYON 431 925 304)

[Adresse 5]

Représentée par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL Cabinet SEVELLEC, avocat au barreau de PARIS, toque : W09

Ayant pour avocat plaidant Maître Nicolas FANGET de la SCP VEBER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 625

SAS SIDEL BLOWING & SERVICES

ayant son siège social [Adresse 6]

[Adresse 6]

N° SIRET : 424 623 759

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Guillaume DAUCHEL de la SELARL Cabinet SEVELLEC, avocat au barreau de PARIS, toque : W09

Ayant pour avocat plaidant Maître Nicolas FANGET de la SCP VEBER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 625

Société ZWAAR TRANSPORT TWENTE B.V, Société de droit étranger

ayant son siège social [Adresse 7]

[Adresse 7] (PAYS-BAS)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Mariam PAPAZIAN de la SCP HOURBLIN PAPAZIAN, avocate au barreau de PARIS, toque : J017

Ayant pour avocat plaidant Maître Vy-Loan HUYNH - OLIVIERI de la SCP INCE & CO FRANCE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Janvier 2018, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président de chambre, chargé du rapport

Madame Fabienne SCHALLER, Conseillère

Madame Anne DU BESSET, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffière, lors des débats : Madame Hortense VITELA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président et par Madame Hortense VITELA, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire présent lors du prononcé.

***

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Sidel Blowing & Services (Sidel) a vendu à la société allemande Alpla Werke une machine « roue de soufflage », d'un poids total de 27 tonnes, répartie en sept colis. Elle a confié l'emballage et le chargement de la machine à la société Altéad Solutions Industrielles (Altéad) et a chargé la société Géodis Wilson France (Géodis) de son transport routier entre Le Havre (France) et (Allemagne), pour une livraison prévue le 1er avril 2010.

Le 24 février 2010, la société Géodis a donné mission à Monsieur [Y], domicilié en Autriche, exerçant sous l'enseigne « Cargoconsult » d'effectuer ce transport.

Monsieur [Y] a confirmé cet ordre et a confirmé les trois types d'engins à utiliser en raison des dimensions exceptionnelles de certains colis ; pour l'exécution du transport « convoi », il a fait intervenir le transporteur hollandais Zwaar Transport Twente B.V. (Zwaar).

Le 29 mars 2010, la société Zwaar a pris sous sa garde trois colis en véhicule ouvert (du fait de leur taille) à châssis bas chez la société Altéad.

Le 1er avril 2010, lors de la livraison de trois colis correspondant à environ 20 tonnes, le destinataire a émis des réserves, notamment en indiquant que le colis n'était couvert que par une bâche sans autre protection.

Le 7 avril 2010, une expertise contradictoire a eu lieu en présence des experts des sociétés Géodis et Altéad.

Le 29 juin 2011, la société Sidel et son assureur, la société Chartis Europe, aux droits de laquelle vient la société AIG, ont assigné les sociétés Géodis et Altéad en paiement du montant dû suite à la réclamation. Le 30 juin 2011, la société Géodis a appelé dans la cause Monsieur [Y] (Cargoconsult) et la société Zwaar.

Par jugement du 17 février 2015, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Bobigny a :

- reçu la compagnie AIG Europe et la société Sidel Blowing & Services en leurs demandes, les a dites partiellement fondées, y a fait droit partiellement ;

- déclaré nulles les demandes adressées à CargoConsult ;

- dit prescrites les demandes de la société Géodis Wilson à l'encontre de Monsieur [R] [Y] et de la société Zwaar transport Twente ;

- débouté la société Altéad de ses demandes à l'encontre de Monsieur [R] [Y] et de la société ZTT ;

- condamné les sociétés Géodis Wilson et Altéad à payer chacune la somme de 41.012,66 euros à AIG Europe et 762,50 euros à la société Sidedl Blowing & Services, outre intérêts au taux CMR à compter du 29 juin 2011 et capitalisation à compter de cette même date ;

- condamné les sociétés Géodis Wilson et Altéad à payer chacune les sommes de 2.000 euros à Monsieur [R] [Y] et de 2.000 euros à la société Zwaar Transport Twente ;

- condamné les sociétés Géodis Wilson et Altéad à payer chacune à la compagnie AIG Europe la somme de 2.500 euros ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné in solidum les sociétés Géodis Wilson et Altéad aux entiers dépens ;

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 199,40 euros TTC.

Vu la déclaration d'appel du 16 avril 2015 de la société Geodis Wilson France ;

***

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société Géodis Freight Forwarding France, venant aux droits de la société Geodis Wilson France, par dernières conclusions signifiées le 12 décembre 2017, demande à la cour de :

- dire les sociétés AIG et la société Sidel Blowing & Services recevables mais mal fondées en leur appel incident ;

- les en débouter ;

Vu les appels incidents de Monsieur [R] [Y] et de la société Altead,

- dire la société Geodis recevable et bien fondée en son appel ;

- y faire droit ;

- infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

- dire l'action de la compagnie AIG irrecevable au sens de l'article 31 du code de procédure civile ;

- débouter la compagnie AIG de ses demandes ;

- condamner la compagnie AIG à payer à la société Geodis la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- dire que la société Sidel ne peut agir au-delà de la somme de 1.525 euros ;

En toute hypothèse,

- dire que les intervenants au transport bénéficient de la cause d'exonération prévue par l'article 17-4 de la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route en date à Genève du 19 mai 1956, dite Convention CMR résultant du défaut d'emballage et d'arrimage de la marchandise confiée ;

- débouter la compagnie AIG et la société Sidel de leurs demandes ;

- condamner la compagnie AIG et la société Sidel, in solidum, à payer à la société Geodis la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Subsidiairement,

- dire que la compagnie AIG et la société Sidel ne rapportent pas la preuve du préjudice ;

- les débouter de leurs demandes ;

- condamner la compagnie AIG et la société Sidel, in solidum, à payer à la société Geodis la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

Plus subsidiairement, au cas où par impossible une condamnation quelconque viendrait à être mise à la charge de Geodis,

- condamner Monsieur [R] [Y] et la société Zwaar Transport Twente B.V., in solidum à relever et garantir la société Geodis de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge et à lui payer une indemnité de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Sur l'irrecevabilité de l'action de la compagnie AIG Europe et le quantum des demandes de la société Sidel, la société Géodis fait valoir que la société AIG ne pourrait agir à l'encontre des différentes sociétés qu'à travers un recours subrogatoire. Or, elle oppose que les conditions de la subrogation légale ne sont pas remplies, étant donné que la société AIG Europe n'apporte pas la preuve que la société Sidel fait bien partie des sociétés assurés par la police d'assurance en cause. Elle ajoute que les conditions de la subrogation conventionnelle ne sont pas non plus remplies, la quittance de subrogative faisant référence au code des assurances et non au code civil. S'agissant de la demande de la société Sidel, elle doit être limitée à 1.525 euros, soit le solde restant du fait du paiement de sa compagnie d'assurance, qui, si elle ne l'a pas subrogée dans ses droits, a néanmoins éteint sa créance. Elle ajoute qu'elle s'associe à la société Altéad quant au préjudice subi par la société Sidel.

Sur l'exonération de responsabilité des intervenants au transport, la société Géodis fait valoir qu'il appartient aux sociétés AIG et Sidel de démontrer que l'intervention de la société Géodis relevait d'un contrat de commission de transport et non d'un simple transport de marchandises, peu important qu'elle ait ensuite elle-même sous-traité sa prestation. Dès lors, elle soutient qu'il ne saurait lui être opposée une présomption de responsabilité sans procéder à une inversion de la charge de la preuve.

Elle fait valoir qu'au titre de l'article 17§4b) de la convention CMR, elle doit bénéficier d'une exonération de responsabilité du fait de l'insuffisance de l'emballage, qui aurait dû protéger la marchandise contre les risques normaux du transport, faute incombant à la société Altéad. Elle ajoute que cette même convention prévoit une présomption de responsabilité pesant sur la société ayant procédé à l'emballage. Elle oppose que les dommages causés à la machine ne proviennent non pas du fait que la remorque de transport était ajourée au-dessous, mais bien du fait que la société Altéad avait connaissance de ce fait et n'a pas réalisé un emballage adapté. Elle rappelle que le calage et l'arrimage de la marchandise sont des obligations dont l'exécution incombe au chargeur et non au transporteur, ce dernier n'ayant qu'à réaliser une vérification de l'absence de vices apparents de l'arrimage. A défaut de la preuve par le demandeur à l'indemnité de la défectuosité du chargement au moment de la prise en charge par le transporteur, ce dernier est déchargé de sa responsabilité.

Subsidiairement, sur le préjudice, l'appelante fait valoir que sur les cinq postes de préjudices invoqués par la société Sidel, seuls certains sont indemnisables par le transporteur aux termes de la convention CMR, d'autres proviennent directement des défauts d'emballage, et sont en tout état de cause surévalués.

Sur les appels en garantie, Géodis précise qu'elle est bien fondée à demander la condamnation in solidum Monsieur [Y] et Zwaar, sans qu'aucune prescription ne puisse lui être opposée, cette fin de non recevoir n'étant d'ailleurs pas soulevée par Monsieur [Y].

Monsieur [R] [Y], par dernières conclusions signifiées le 5 décembre 2017, demande à la cour, au visa des articles 9, 31,32,56,122 et 648 du code de procédure civile, 117 et suivants du code de procédure civile, 10,17.4 alinéa a,b,c de la CMR, 18.2 et 32 de la CMR, et 1382 ancien du code civil, de :

- dire Monsieur [R] [Y] recevable et bien fondé en son appel ;

- infirmer partiellement le jugement entrepris ;

Statuant partiellement à nouveau,

- déclarer l'action de la société AIG irrecevable ;

- déclarer l'action de la société Sidel irrecevable ;

En conséquence,

- déclarer les appels en garantie à l'encontre de Monsieur [Y] sans objet ;

A titre subsidiaire,

- constater que Monsieur [R] [Y] bénéficie de l'exonération de sa responsabilité et/ou ne répond pas des faits personnels des autres maillons de la chaîne de transport ;

- débouter toutes les demandes dirigées à son encontre par la société Geodis ;

A titre plus subsidiaire,

- déclarer la demande en garantie de la société Altead à l'encontre de Monsieur [Y] irrecevable, car prescrite ;

A titre subsidiaire,

- constater qu'aucune faute ne saurait lui être reprochable dans l'exécution du transport ;

- déclarer l'appel de la société Altead mal fondé sur ce point ;

- débouter tout recours exercé sur le terrain de la responsabilité délictuelle fondée sur l'article 1382 ancien du code civil contre Monsieur [Y] ;

- condamner la société Geodis et la société Altead solidairement à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Sur l'irrecevabilité des demandes de la compagnie AIG, Monsieur [Y] s'associe aux moyens des sociétés Géodis et Altéad afin de faire constater qu'il n'y a eu ni subrogation légale ni conventionnelle de la société AIG dans les droits de la société Sidel.

Sur l'irrecevabilité des demandes de la société Sidel, Monsieur [Y] fait valoir que la société Sidel qui a été indemnisée par son assureur ne saurait prétendre à une indemnisation dépassant 1.525 euros.

Sur l'action en garantie de Géodis Wilson à son encontre, Monsieur [Y] précise que cette demande est mal-fondée dans la mesure où le substitué n'a pas à garantir les faits personnels de son donneur d'ordre. Il ajoute qu'il bénéficie d'une exonération en tant que voiturier substitué, tout comme le voiturier effectif, et reprend à cet effet l'argumentation développée par la société Zwaar.

Sur l'exonération du voiturier, Monsieur [Y] fait valoir qu'il est bien fondé à se prévaloir de la présomption d'origine de dommage résultant de la convention CMR du fait de l'existence d'un risque particulier résultant de l'emploi d'un véhicule ouvert et non bâché, d'un défaut d'emballage non apparent constaté par les experts, et d'un défaut d'arrimage non apparent, probablement combiné à un risque particulier de mauvais chargement et déchargement lié au poids du colis.

Sur les demandes en garantie de la société Altéad formulées à l'encontre de Monsieur [Y], Monsieur [Y] fait valoir que la société Altéad n'a établi aucune faute contractuelle des transporteurs susceptible de constituer une faute délictuelle à son égard. Elle ajoute qu'elle n'avait pas à signaler le type particulier de véhicule employé et inadapté à l'emballage réalisé dès lors que le type de véhicule à utiliser savait été contractuellement prévu avec la société Sidel. A titre subsidiaire, sur l'irrecevabilité de l'appel en garantie de la société Altéad à son encontre, Monsieur [Y] indique que l'action de la société Altéad à son encontre est prescrite, que la société Altéad doit en effet être considérée comme partie intégrante de la chaîne de transport et est donc soumise aux dispositions de la convention CMR prévoyant un délai de prescription d'un an, soit au plus tard un an après la livraison de la marchandise le 2 avril 2010.

A titre très subsidiaire, sur le quantum du préjudice à indemniser, Monsieur [Y] soutient que chaque partie invoque un montant de préjudice différent, de telle sorte qu'il est en réalité impossible de l'évaluer.

La société Altéad Solutions Industrielles, par dernières conclusions signifiées le 10 novembre 2017, demande à la cour, au visa de l'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539, du Règlement CE n° 593/2008 du 17 juin 2009 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, du contrat type «général» applicable aux transports publics de marchandises pour lesquels il n'existe pas de contrat type spéci'que, tel que résultant du décret du 6 avril 1999, des articles L.121-12 du code des assurances, 9, 31 et 32 du code de procédure civile, 8 et 9 de la Convention de Genève du 19 mai 1956 dite « CMR '', 1382 et 1964 du code civil, de :

- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

A titre principal,

- débouter les sociétés AIG et Sidel de leur appel incident formé par conclusions signi'ées le 16 septembre 2015 ;

- dire la société AIG irrecevable en sa demande formée à l'encontre de la société Altead ;

- la déclarer irrecevable pour agir au-delà de la somme de 82.025,33 euros ;

- dire la société Sidel irrecevable à agir au-delà de la somme de 1.525 euros ;

- écarter des débats toute pièce non traduite en langue française ;

- débouter les sociétés AIG et Sidel de l'ensemb1e de leurs demandes formées à l'encontre de la société Altead ;

Subsidiairement,

- limiter toute condamnation à la somme de 11.098,35 euros ;

- dire que seuls les intéréts légaux s'appliqueront sur cette somme à compter de la décision à intervenir ;

En toute hypothèse,

- condamner Monsieur [Y] solidairement avec la société Zwaar, ou l'une ou l'un à défaut de l'autre, à garantir la société Altead de toutes éventuelles condamnations prononcées à son encontre ;

- condamner la société AIG ainsi que la société Sidel et subsidiairement, toute partie succombante, à payer à la société Altead la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens dont distraction au profit de Maître Edmond Fromantin, Avocat au Barreau de Paris.

Sur l'irrecevabilité des demandes d'AIG, la société Altéad expose que les éléments communiqués par AIG sont insuffisants pour justifier d'une subrogation légale de la société Chartis (AIG) dans les droits de son assurée. Notamment, elle souligne que la société Chartis ne devait pas sa garantie, à défaut d'aléa au moment de la régularisation de l'avenant n°6, seul document mentionnant la société Sidel comme assuré et régularisé postérieurement à la réalisation du dommage. Elle oppose également que le fondement invoqué de l'enrichissement sans cause ne saurait aboutir, le paiement effectué par la société Chartis ayant été réalisé en toute connaissance de cause et pas par erreur.

S'agissant des demandes de la société Sidel, elle fait valoir que l'action intentée par l'assuré indemnisé est systématiquement irrecevable. Dès lors, la société Sidel ne justifie pas avoir subi un préjudice au-delà de la somme de 1.525 euros de franchise restée à sa charge.

Sur la responsabilité au titre des chocs et déformations mécaniques de la machine, la société Altéad fait valoir que sa prestation étant totalement distincte des prestations de transport, elle n'était pas partie à la convention de transport de telle sorte que le droit de la convention CMR n'est pas applicable et seul le délai de prescription de droit commun de cinq ans doit être retenu.

S'agissant des obligations de l'expéditeur et du transporteur routier au stade du chargement, la société Altéad oppose qu'elles n'ont pas été respectées. Elle fait valoir que les chocs et déformations constatées sont dues à un défaut de calage et d'arrimage imputable uniquement à l'expéditeur, quand bien même la société Altéad serait intervenue en tant que préposé occasionnel, sous la responsabilité et les ordres de la société Sidel, pour positionner la machine sur l'ensemble routier.

Elle rappelle qu'aucune des parties présente au chargement de la machine n'a émis de réserve sur quoi que soit, de tel sorte que tout dommage constaté au déchargement ne peut qu'être lié au transport.

Elle souligne en outre que la société Zwaar a mis à la disposition de la société Sidel une remorque inadaptée pour le transport en cause, qu'elle n'a pas signalé cette inadéquation au moment des opérations de chargement et qu'elle n'a pas émis de réserves sur l'inadaptation apparente de l'emballage, constituant dès lors une faute de sa part, indemnisable sur le terrain délictuel.

A titre subsidiaire, sur la responsabilité au titre de la pollution de la machine, la société Altéad fait valoir que le transporteur se doit de réaliser une inspection de l'état apparent de la machine et de son emballage avant le départ. Elle ajoute donc que la société Zwaar connaissant seule les conditions de transport du convoi, il lui appartenait de procéder à des réserves quant à l'insuffisance de l'emballage.

Elle oppose également que Monsieur [Y] n'établit pas que l'utilisation d'une remorque à plateau ajouté a été expressément convenu avec la société Géodis, d'autant moins qu'aucune mention relative au type de véhicule fourni n'apparaît sur la lettre de voiture CMR. Dès lors, elle fait valoir que Monsieur [Y] et la société Zwaar devront la garantir si la cour venait à condamner la société Altéad.

S'agissant de la responsabilité de la société Géodis en sa qualité de commissionnaire de transport, la société Altéad fait valoir qu'engage sa responsabilité le commissionnaire de transport qui ne veille pas à ce que le transporteur routier mette à disposition un véhicule adapté au transport de la marchandise et à son état d'emballage.

En toute hypothèse, sur le préjudice invoqué par les sociétés AIG et Sidel, la société Altéad indique que les documents fournis par ces sociétés sont non seulement en langue étrangère non traduite, mais également non probants car ne correspondant pas au préjudice dû à la pollution de la machine.

En toute hypothèse, sur l'impossibilité de prononcer une condamnation in solidum des sociétés Géodis et Altéad et les intérêts applicables, la société Altéad fait valoir que la cour devrait limiter toute condamnation à son encontre aux conséquences financières des seuls faits qui lui sont imputables, soit au maximum 11.098,35euros.

Elle oppose également que sa responsabilité étant recherchée par les sociétés AIG et Sidel sur le fondement de l'article 1147 du code civil, les dispositions spécifiques de la convention CMR sur les intérêts de l'indemnité ne peuvent pas lui être appliqués.

Les sociétés AIG Europe et Sidel Blowing & Services, par dernières conclusions signifiées le 19 décembre 2017, demandent à la cour, au visa de la CMR et des articles L.132-4 et suivants du code de commerce et 1147 ancien du code civil, de :

- déclarer recevable l'appel incident interjeté ;

- rejeter les appels incidents de Monsieur [R] [Y] et de la société Altead ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a notamment reconnu la qualité et l'intérêt à agir des sociétés AIG et Sidel, reconnu la qualité de commissionnaire de la société Geodis, retenu la responsabilité personnelle de la société Geodis et celle de la société Altead, condamné les sociétés Geodis et Altead à payer à la société AIG la somme de 82.025,33 euros, outre intérêts au taux CMR de 5 % l'an à compter de la réclamation du 29 juin 2011, et capitalisation, condamné les sociétés Geodis WILSON et Altead a payé à la société AIG la somme de 2.500 euros chacune au titre des frais irrépétibles engagées ainsi qu'aux entiers dépens de premières instance ;

- réformer le jugement pour le surplus ;

- condamner in solidum les sociétés Geodis et Altead à payer la somme de 34.416,92 euros (32.891,93 euros au titre du solde du préjudice et 1.525 euros au titre de la franchise) à la société Sidel au titre du préjudice resté à sa charge, outre intérêts au taux CMR de 5 % l'an à compter de la réclamation du 29 juin 2011 ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner in solidum les sociétés Geodis et Altead à payer aux sociétés AIG et Sidel la somme de 7.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile appliquées en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Sur la qualité à agir de la compagnie AIG Europe et de la société Sidel, elles font valoir que la société AIG est l'assureur du groupe Tetra Laval dont fait partie la société Sidel visée dans la police, et qu'elles communiquent la police d'assurance et la quittance subrogative justifiant du paiement de l'indemnité d'assurance. Sur la subrogation conventionnelle de la compagnie AIG, la quittance subrogative prouve la volonté de subroger, et est antérieure au paiement subrogatoire de telle sorte que la société AIG est bien subrogée dans les droits de son assuré ; la mention sur la quittance des textes du code des assurances relatives à la subrogation légale et l'absence de mention de l'article 1250 du code civil n'est pas une condition prévue légalement qui empêcherait la réalisation de la subrogation conventionnelle, soumise uniquement à une volonté de subrogation antérieure au paiement subrogatoire.

Elles ajoutent que la société Sidel, qui garde à sa charge le surplus de son préjudice, à savoir 32.891,93 euros, et le montant de sa franchise, pour 1.525 euros, conserve sa qualité à agir. Subsidiairement, elles font valoir que, si la subrogation n'est pas valable, comme le soutiennent les autres parties, alors aucun paiement n'a éteint les droits de la société Sidel au titre du sinistre et cette dernière a alors intérêt à agir à hauteur de l'ensemble du préjudice.

Sur la responsabilité du commissionnaire Géodis, les sociétés AIG et Sidel et font valoir que la société Sidel a bien contracté avec la société Géodis en qualité de commissionnaire et non de simple transporteur, comme le prouve la lettre de voiture. Elle oppose que la société Géodis ne conteste ce statut qu'afin de bénéficier de la prescription quinquennale et non annale dans son rapport avec la société Zwaar. Elle rappelle que le commissionnaire de transport est responsable tant de son fait personnel que du fait des voituriers et autres intermédiaires auxquels il a eu recours, ainsi que des avaries des marchandises. A ce titre, il est soumis à une présomption de responsabilité. Les marchandises ayant été réceptionnées auprès de la société Altéad sans réserve, la responsabilité de la société Géodis est engagée du seul constat des dommages à la livraison. En effet, pèse sur le transporteur une obligation de vérifier l'état apparent de la marchandise et de son emballage, et d'émettre des réserves le cas échéant.

Sur la responsabilité de la société Altéad, elles indiquent que l'emballeur professionnel assume vis-à-vis de son client un devoir de conseil et une obligation de résultat, à laquelle la société Altéad a manqué, tel qu'en attestent les différentes expertises.

Sur l'indemnisation du préjudice, elles font valoir que le commissionnaire de transport et l'emballeur sont tenus à la réparation intégrale du préjudice, calculée d'après la valeur de la marchandise au lieu et à l'époque de la prise en charge. Elles opposent que les différents montants résultent d'erreurs d'experts, et que le montant à retenir est celui de 116.442,25 euros. Elles soulignent que le fait que la société Sidel ait accepté de ne pas être indemnisée du poste de préjudice correspondant au remplacement ponctuel de la machine par une autre ne veut pas dire qu'elle a renoncé à en obtenir réparation par les sociétés responsables à savoir la société Géodis et la société Altéad.

La société Zwaar Transport Twente B.V, par dernières conclusions signifiées le 13 décembre 2017, demande à la cour, au visa notamment de la Convention relative au contrat de transport international de marchandise par route du 19 mai 1956, de :

A titre principal,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny en ce qu'il a, d'une part, déclaré irrecevable la demande de la société Geodis à l'encontre de Zwaar comme prescrite, et d'autre part, débouté Altead de ses demandes à l'encontre de Zwaar ;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la demande de Geodis à l'encontre de Zwaar serait déclarée recevable,

- la débouter de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de Zwaar ;

En tout état de cause,

- débouter toutes les parties de leurs demandes en tant que dirigées contre Zwaar ;

- condamner conjointement la société Geodis WILSON FRANCE et toute autre partie succombant à payer à Zwaar la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Sur l'irrecevabilité de l'action en garantie de Géodis à l'encontre de la société Zwaar, la société Zwaar soutient que la garantie de Géodis est prescrite conformément aux disposition de l'article 32 de la convention CMR qui prévoit un délai d'un an commençant à courir, en cas d'avarie, au jour de la livraison, que l'action soit une action principale ou récursoire, ce qui a été confirmé à plusieurs reprises par la jurisprudence.

Sur le fond, la société Zwaar fait valoir que l'argumentation de la société Altéad, fondée sur l'article 1382 du code civil, selon laquelle « toute faute contractuelle caractérise une faute délictuelle », est irrecevable car la société Altéad ne rapporte pas la preuve d'une faute commise par la société Zwaar.

Elle conclut à l'absence de toute responsabilité de sa part quant aux dommages allégués sur la machine expédiée ; elle fait valoir que, même si l'action de la société Altéad était jugée recevable, Altéad ne peut rechercher sa responsabilité puisque Zwaar bénéficie :

- d'une présomption de livraison conforme, les réserves émises en langue allemande sur la lettre de voiture étant en très grande partie illisibles ;

- d'une exonération de responsabilité fondée sur l'insuffisance d'emballage imputable à Altéad, le dommage résultant principalement d'un emballage et d'un conditionnement inadaptés ;

- d'une exonération de responsabilité résultant d'un défaut d'arrimage imputable à l'expéditeur Sidel.

Elle rappelle que la société Altéad a reconnu que les organes internes de la machine ont été endommagés par une pollution occasionnée par des projections pendant le trajet. Elle fait également remarquer que le reproche de la société Altéad selon lequel elle aurait dû émettre des réserves lors de la prise en charge de la marchandise concernant la remorque ou l'emballage est irrecevable puisque la remorque a été acceptée par la société Altéad et par la société Sidel et qu'il n'appartenait en aucun cas au transporteur d'émettre des réserves sur l'adéquation de l'emballage au transport demandé, sauf défaut apparent.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

***

MOTIFS

Sur la recevabilité de la société AIG

Considérant que AIG se prévaut du bénéfice d'une subrogation conventionnelle de l'article 1250, alinéa 1er, du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Considérant que la subrogation conventionnelle doit être expresse et faîte concomitamment au paiement ;

Considérant que, par quittance subrogative en date du 2 septembre 2011, Sidel indique 'avoir reçu de la compagnie d'assurance Chartis (') la somme de 82.025,33 euros en règlement du sinistre dont nous avons été victime le 1er avril 2010. (') Je déclare subroger Chartis dans tous mes droits et actions contre le ou les tiers responsables, jusqu'à concurrence de la présente quittance et en vertu des articles L 121-12 et L 172-29 du code des assurances.' ;

Considérant qu'aucune disposition ne subordonne la validité de la quittance subrogative à la mention de l'article 1250 du code civil ; qu'est versé aux débats un ordre de virement de Chartis en date du vendredi 2 septembre 2011 pour un montant de 82.025,33 euros et un relevé du compte courant de Sidel faisant état d'un virement reçu le mardi 6 septembre 2011 de Chartis d'un montant de 82.025,33 euros (pièce AIG n° 13), éléments établissant que le paiement de l'indemnité d'assurance est intervenu à une date contemporaine de signature de la quittance, de sorte que la condition de la concomittance de l'établissement de la quittance subrogative et du paiement est remplie ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit recevable l'action d'AIG ;

Sur la responsabilité de la société Geodis

Considérant que les sociétés AIG et Sidel invoquent la qualité de commissionnaire de transport de Geodis ;

Considérant que l'article L.1411-1 du code des transports définit le commissionnaire comme étant celui qui 'organise et fait exécuter, sous sa responsabilité et en son propre nom, un transport de marchandises selon les modes de son choix pour le compte du commettant.' ; que le commissionnaire est un intermédiaire, organise le transport en disposant du choix des voies et des moyens et traite en son nom personnel ;

Considérant que Geodis a été chargée de l'acheminement par la société Sidel ; qu'elle n'est pas identifiée comme transporteur sur la lettre de voiture CMR (pièce AIG Sidel n°3) ; qu'elle n'a pas effectué les opérations de transport, mais en a confié, en son propre nom ainsi que cela ressort du 'Transport order' en date du 24 février 2010 (pièce Zwaar n°3), l'exécution à Monsieur [Y], mission à laquelle Sidel a donné son consentement ainsi que cela résulte de la lettre de voiture CMR ; que Geodis ne soutient pas que les conditions d'exécution du transport ' notamment le choix du véhicule de transport - lui auraient été imposées par l'expéditeur Sidel ; qu'il s'en déduit que Geodis, qui n'a, à aucun moment, envisagé d'exécuter elle-même le transport, s'est inscrite dans une mission d'organisation de l'acheminement de la marchandise ; que c'est en conséquence à raison que les premiers juges ont retenu que la société Geodis n'avait pas la qualité de transporteur mais celle de commissionnaire de transport ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.132-4 du code de commerce, le commissionnaire de transport est tenu d'une obligation de résultat envers son client ; qu'il doit indemniser le commettant à raison de l'ensemble des dommages résultant de la mauvaise exécution du transport qu'il a été chargé d'organiser ;

Considérant qu'AIG et Sidel recherchent la responsabilité du commissionnaire de transport de son fait personnel ; qu'il est établi qu'il n'y a pas eu livraison conforme, des réserves ayant été prises le 1er avril 2010 sur la lettre de voiture elle-même, par Monsieur [L], technicien de la société Sidel ' identifié par le rapport [G] en page 2 - en langue allemande, selon une traduction en français non contestée : 'La machine était simplement couverte d'une bâche, elle n'a pas été protégée des souillures par en dessous. La machine était complètement souillée à l'intérieur avec du sable lors du transport . De plus, les portes et les éléments de la structure ont été endommagés pendant le transport' ; que ces réserves indiquent la nature générale de l'avarie et présentent dès lors un degré de précision suffisant ; que le commissionnaire de transport, qui était tenu de la bonne fin d'ensemble de l'opération, ne saurait se retrancher derrière le défaut d'emballage et d'arrimage de la marchandise, missions confiées à Altead ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de Geodis ;

Sur la responsabilité de la société Altead

Considérant qu'il est constant que, le 24 février 2010, la société Sidel a confié à la société Altead, prestataire spécialisé dans les domaines annexes au transport, notamment en matière d'emballage et de conditionnement de marchandise à déplacer, une prestation complète d'emballage pour un transport par route en Allemagne d'une machine SBO 20 de 27.785 kg ;

Considérant qu'il résulte de l'expertise contradictoire que le défaut d'emballage et le défaut de chargement conformes sont à l'origine du sinistre du 1er avril 2010 ; que le cabinet [G] retient à cet égard un 'conditionnement inadapté au camionnage direct, associé à une manutention incorrecte / brutale' (pièce Zwaar n° 5) ; que le commissaire d'avaries de Paris observe :

'1- pour les pièces de la chaine cinématique : défaut d'emballage ayant conduit à leur pollution par des projections de gravillons, eau, poussières abrasives, etc'

2- pour l'habillage : défaut d'arrimage du matériel sur sa remorque de transport' (pièce Zwaar n° 6 - rapport d'expertise du commissaire d'avaries de Paris) ;

Qu'Altead ne saurait invoquer :

- ni l'application de l'article 7.2, alinéa 1er, du contrat type général applicable aux transports publics de marchandises aux termes duquel, pour les envois supérieurs à trois tonnes, 'le chargement, le calage et l'arrimage de la marchandise sont exécutés par le donneur d'ordre ou son représentant sous sa responsabilité', alors qu'en l'espèce, l'arrimage a été effectué non par le donneur d'ordre, mais par le prestataire spécialisé désigné à cet effet par le contrat du 24 février 2010 ;

- ni le caractère non apparent de la défectuosité du chargement, dès lors que l'emballeur professionnel était tenu d'une obligation de résultat ;

Considérant que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité d'Altead ;

Sur l'action en garantie exercée à l'encontre de Monsieur [Y]

Considérant qu'il est constant que Monsieur [Y] n'a pas invoqué devant le tribunal de commerce l'irrecevabilité des demandes d'AIG et Sidel à son encontre, ayant accordé à Geodis un report du délai de prescription jusqu'au 30 juin 2011 ; que le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit irrecevable comme prescrite l'action récursoire de Geodis à l'encontre de Monsieur [Y] ;

Considérant que, dès lors que sa responsabilité a été recherchée pour son fait personnel, et non du fait des voituriers qu'elle s'est substituée, Geodis ne saurait obtenir la garantie de Monsieur [Y], le substitué ne pouvant garantir la faute personnelle de son donneur d'ordre ; que Geodis sera en conséquence déboutée de son action en garantie ;

Considérant, par ailleurs, qu'Altead ne saurait faire garantir ses fautes personnelles par les voituriers substitués ; qu'au surplus, elle n'établit pas l'existence de la faute alléguée à l'encontre de Monsieur [Y], tenant au choix d'un plateau ajouré, le rapport d'expertise [G] ne retenant pas ce point comme élément causal du sinistre et Altead ne contestant pas n'avoir émis aucune réserve sur ce point lors du chargement de la marchandise ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Altead de sa demande de garantie ;

Sur l'action en garantie exercée à l'encontre de la société Zwaar

Considérant que l'article 32 de la convention CMR dispose que 'les actions auxquelles peuvent donner lieu les transports soumis à la présente convention sont prescrites dans le délai d'un an. ('), a) dans le cas de perte partielle, d'avarie ou de retard, à partir du jour où la marchandise a été livrée' et que les actions auxquelles peuvent donner lieu les transports soumis à la CMR sont prescrites dans le délai d'un an, même si elles sont exercées sous forme de demandes reconventionnelles ou d'exception de procédure, ces dispositions ne régissent pas les actions en garantie ; que l'opération de transport en cause étant soumise aux dispositions de la CMR, il convient de faire application de l'article 32 de cette convention, et non de l'article L.133-6, alinéa 4, du code de commerce ; que la prescription était acquise au bénéfice de Zwaar dès le 1er avril 2011 ; que la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a dit irrecevables comme prescrites les demandes de garantie exercée à l'encontre de la société Zwaar par Altead et Geodis ;

Sur le préjudice

Considérant qu'il est constant qu'AIG a versé à Sidel la somme de 82.025,33 euros ; que Geodis et Altead seront condamnées in solidum à payer à AIG la somme de 82.025,33 euros, avec intérêts au taux CMR et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Considérant que Sidel fait valoir que le montant total du préjudice doit être arrêté à la somme de 116.442,25 euros ; que le rapport [G] fixe le montant total des dommages à 105.315,17 euros, se décomposant en :

- frais de grutage et de manutention : 2.236,75 euros ;

- frais de transport découlant du sinistre : 9.885,00 euros ;

- transformation de la machine de remplacement : 32.891,93 euros ;

- pièces de rechange : 47.436,49 euros ;

- travaux de réparation effectués par CNC Lebrun : 12.865,00 euros ;

Mais considérant que, si le rapport d'expertise vise une facture n° 1760472 retenue pour 47.436,49 euros (rapport p. 7 § 3), il ressort en réalité de cette facture que son montant est en réalité de 58.563,57 euros HT (pièces n° 4 et 4 bis) ; que Sidel justifie, dans ces conditions, d'un préjudice total de 116.442,25 euros incluant la franchise d'un montant de 1.525 euros ; que Geodis, qui, en sa qualité de commissionnaire de transport, répond de l'entier dommage lorsqu'il a commis une faute personnelle, et Altead seront en conséquence condamnées in solidum à payer à Sidel la somme de 34.416,92 euros (116.442,25 - 82.025,33), avec intérêts au taux CMR et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

Considérant que l'équité commande de condamner, en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, in solidum Geodis et Altead à payer à AIG la somme de 2.000 euros, à Monsieur [Y] celle de 2.000 euros, à Zwaar celle de 2.000 euros ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a dit irrecevable comme prescrite l'action récursoire de la société Geodis à l'encontre de Monsieur [Y] et sur les condamnations prononcées à l'encontre des sociétés Altead Solutions Industrielles et Geodis ;

Statuant à nouveau de ces chefs ;

CONDAMNE in solidum la société Géodis Freight Forwarding France et la société Altead Solutions Industrielles à payer à la société AIG Europe Limited la somme de 82.025,33 euros et à la société Sidel Blowing & Services celle de 34.416,92 euros, avec intérêts, sur chacune de ces sommes, au taux CMR et capitalisation des intérêts en application de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

CONDAMNE, en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, in solidum la société Géodis Freight Forwarding France et la société Altead Solutions Industrielles à payer à la société AIG Europe Limited la somme de 2.000 euros, à la société Sidel Blowing & Services celle de 2.000 euros, à Monsieur [R] [Y] celle de 2.000 euros, à la société Zwaar Transport Twente B.V celle de 2.000 euros ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE in solidum la société Géodis Freight Forwarding France et la société Altead Solutions Industrielles aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La Greffière Le Président

Hortense VITELA Patrick BIROLLEAU


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 15/08631
Date de la décision : 01/03/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°15/08631 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-03-01;15.08631 ?
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