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22/02/2018 | FRANCE | N°16/02635

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 22 février 2018, 16/02635


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2018



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02635



Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 11 Décembre 2015 - RG n° 2014019863



APPELANTS



1) Monsieur [Z] [U]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1] (VIETNAM)

de nationalité

française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

ayant pour avocat...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRÊT DU 22 FÉVRIER 2018

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/02635

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de PARIS en date du 11 Décembre 2015 - RG n° 2014019863

APPELANTS

1) Monsieur [Z] [U]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1] (VIETNAM)

de nationalité française

demeurant [Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

ayant pour avocat plaidant Me Bréhima DIALLO, avocat au barreau de PARIS, toque : E0844

2) SARL OUTSOURCIN FINANCE - OSIF

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 483 403 911

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

ayant pour avocat plaidant Me Bréhima DIALLO, avocat au barreau de PARIS, toque : E0844

3) SAS AFER SA

immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 352 463 665

demeurant [Adresse 2]

[Localité 3]

prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS - AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B1055

ayant pour avocat plaidant Me Bréhima DIALLO, avocat au barreau de PARIS, toque : E0844

INTIMÉS

1) Monsieur [C] [L]

né le [Date naissance 2] 1948 à [Localité 4] (ALGÉRIE)

demeurant [Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

2) Monsieur [U] [B]

né le [Date naissance 3] 1955 à [Localité 6] (Vietnam)

demeurant [Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

3) Monsieur [W] [R]

né le [Date naissance 4] 1953 à [Localité 8]

de nationalité française

demeurant [Adresse 5]

[Localité 9]

Représenté par Me Lamia GUENFOUD, avocat au barreau de PARIS, toque : E1622

ayant pour avocat plaidant Me Olivier BOULANGER, avocat au barreau de NANTERRE, toque : 64

4) Madame [L] [V]

née le [Date naissance 5] 1951 à [Localité 10]

demeurant [Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

5) Madame [P] [M]

née le [Date naissance 6] 1962 à [Localité 11]

demeurant [Adresse 6]

[Localité 12]

Représentée par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

6) Monsieur [V] [H]

né le [Date naissance 7] 1954 à [Localité 13]

demeurant [Adresse 7]

[Localité 14]

Représenté par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

7) Monsieur [V] [G] [X]

né le [Date naissance 8] 1948 à [Localité 15]

demeurant [Adresse 8]

[Localité 16]

Représenté par Me Eric VIGY, avocat au barreau de PARIS, toque : C0109

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Octobre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur François FRANCHI, Président de chambre

Madame Michèle PICARD, Présidente

Madame Christine ROSSI, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues à l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Pauline ROBERT

Ministère Public : L'affaire a été communiquée au ministère public.

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par François FRANCHI Président, et par Madame Christine LECERF, greffière, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Par actes sous seing privé de cession d'actions en date des 10 novembre 2011 et 7 décembre 2011, les actionnaires de la société d'expertise - comptable Afer SA - Monsieur [C] [L], Monsieur [U] [B], Madame [L] [V], Madame [P] [M], Monsieur [V] [H], Monsieur [V] [G] [X] et Monsieur [W] [R] - ont cédé à la société d'expertise - comptable Outsourcin Finance (Osif), ayant pour gérant et principal associé Monsieur [Z] [U], l'intégralité des actions qu'ils détenaient dans le capital de la SA AFER.

Par acte en date des 6, 10, 11, 12 et 13 mars 2014, les sociétés Osif, AFER et Monsieur [Z] [U] ont assigné Monsieur [C] [L], Monsieur [U] [B], Madame [L] [V], Madame [P] [M], Monsieur [V] [H], Monsieur [V] [G] [X] et Monsieur [W] [R] devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de voir dire nulle la cession des actions de la société AFER, subsidiairement de prononcer la résiliation de la cession d'actions.

Par jugement rendu le 11 février 2015, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS Afer SA de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamné in solidum Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS AFER SA à payer d'une part à Monsieur [C] [L], Monsieur [U] [B], Madame [L] [V], Madame [P] [M], Monsieur [V] [H] et Monsieur [V] [G] [X] la somme de 1.500 euros à chacun et d'autre part à Monsieur [W] [R] la somme de 4.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- condamné les demandeurs aux dépens.

La société Outsourcin Finance - Osif, Monsieur [Z] [U] et la société Afer SAS ont régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Prétentions des parties

La société Outsourcin Finance - Osif, Monsieur [Z] [U] et la société Afer SAS, par conclusions signifiées le 5 octobre 2016, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris ;

statuant à nouveau :

I - A titre principal, sur l'annulation de la cession de contrôle conclue par actes sous seings privés en date des 10 novembre et 7 décembre 2011, au titre de la réglementation spécifique des sociétés d'expertise-comptable, au visa des dispositions de l'article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 (article 22) et de l'article 6 du code civil,

- constater, en tant que de besoin, dire et juger que la cession de contrôle des 10 novembre et 7 décembre 2011, entre, d'une part, les actionnaires de la société Afer, cédants et, d'autre part, la société OSIF, cessionnaire, est nulle, comme ayant porté sur

les actions d'une société d'expertise ' comptable irrégulière et sous le coup de la radiation de plein droit prévue à l'article 7-III de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, pour défaut de mise en conformité avec les dispositions de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, imposant la détention majoritaire du capital des sociétés d'expertise-comptable par des experts - comptables et la direction des sociétés d'expertise-comptable par des experts - comptables, membres de la société ;

- condamner les intimés (Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V] épouse [L], Madame [P] [M]) solidairement, ou chacun des intimés pour sa part, à rembourser aux appelants le prix de vente des actions de la société Afer, soit la somme totale de 1.515.100 euros ;

- assortir la somme de 1.515.100 euros des intérêts au taux légal à compter de la date de signification de l'arrêt;

- assortir la condamnation au remboursement du prix de vente des actions d'une

astreinte de 1.000 euros par jour de retard et ce, à partir du délai de quinze jours à compter de la date de signification de l'arrêt ;

- condamner les intimés, solidairement, à payer à la société Osif et à Monsieur [U] la somme de 1.342.957 euros au titre de leur préjudice financier ;

- condamner les intimés, solidairement, à payer à la somme de 10.000 euros à chacun des

appelants, pour préjudice moral ;

II - A titre subsidiaire, en tout état de cause, sur l'annulation de la cession de contrôle conclue par actes sous seings privés en date des 10 novembre et 7 décembre 2011 sur le fondement des règles du droit commun des contrats, dans l'hypothèse où, par extraordinaire, la Cour ne prononcerait pas la nullité de la cession de contrôle intervenue entre l'ensemble des actionnaires de la société Afer, cédants et la société Osif, cessionnaire, au titre de la réglementation spécifique des sociétés d'expertise - comptable, au visa des dispositions des articles 6, 1110, 1116, 1128, 1131 et 1133 du Code civil et de l'article 7 de l'ordonnance n° 45 ' 2138 du 19 septembre 1945 dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010, article 22),

- constater, en tant que de besoin, dire que la société Osif et Monsieur [U] es qualité ont été victimes d'une erreur sur la substance dès lors qu'ils ont acquis, sans le savoir, du fait de la duplicité des intimés, une société d'expertise-comptable ' la société Afer ' irrégulière au regard des dispositions de la loi (article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010 ' 853 du 23 juillet 2010, article 22), du fait de la détention majoritaire du capital social et de la gestion de fait par un non expert ' comptable, cette situation non régularisée avant la date de la cession de contrôle ;

- constater, en tant que de besoin, dire et juger que la société Osif et Monsieur [U] ès qualités ont été victimes d'un dol par mensonge et d'un dol par réticence dès lors :

- qu'ils ont acquis une société d'expertise - comptable ' la société Afer ' faussement déclarée, par les intimés, dans les actes de cession, comme étant régulière au regard des dispositions de la loi (article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010 ' 853 du 23 juillet 2010, article 22), alors qu'elle était détenue majoritairement et gérée en fait par un non expert - comptable ;

- qu'ils ont acquis une société d'expertise - comptable ' la société Afer, alors que les intimés, cédants, ont dissimulé, sciemment, à la société Osif et à Monsieur [U] ès qualités, l'irrégularité de la société Afer au regard des dispositions de la loi (article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010- 853 du 23 juillet 2010, article 22), ladite société étant détenue majoritairement et gérée en fait par un non expert - comptable ;

- constater, en tant que de besoin, dire que la cession de contrôle des 10 novembre et 7 décembre 2011, entre, d'une part, les actionnaires de la société Afer, cédants et, d'autre part, la société Osif, cessionnaire, a eu un objet illicite, dès lors qu'elle a porté sur les actions d'une société d'expertise - comptable irrégulière au regard des dispositions de la loi (article 7 de l'Ordonnance n° 45 ' 2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010, article 22), du fait de la détention majoritaire du capital social et de la gestion de fait par un non expert- comptable, cette situation non régularisée avant la date de la cession de contrôle ;

- constater, en tant que de besoin, dire que la cession de contrôle des 10 novembre et 7 décembre 2011, entre, d'une part, les actionnaires de la société Afer, cédants et, d'autre part, la société Osif, cessionnaire, a eu une cause illicite, une fausse cause ou était sans cause, dès lors qu'elle a porté sur les actions d'une société d'expertise - comptable irrégulière au regard des dispositions de la loi (article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010 ' 853 du 23 juillet 2010, article 22), du fait de la détention majoritaire du capital social et de la gestion de fait par un non expert- comptable, cette situation non régularisée avant la date de la cession de contrôle ;

- prononcer la nullité de la cession de contrôle des 10 novembre et 7 décembre 2011, entre, d'une part, les actionnaires de la société Afer, cédants et, d'autre part, la société

Osif, cessionnaire ;

- condamner les intimés (Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V], épouse [L], Madame [P] [M]) solidairement, ou chacun des intimés pour sa part, à rembourser aux appelants le prix de vente des actions de la société Afer, soit la somme totale de 1.515.100 euros ;

- assortir la somme de 1.515.100 euros des intérêts au taux légal à compter de la date de signification de l'arrêt à venir ;

- assortir la condamnation au remboursement du prix de vente des actions d'une

astreinte de 1.000 euros par jour de retard et ce, à partir du délai de quinze jours à compter de la date de signification de l'arrêt ;

- condamner les intimés, solidairement, à payer à la société Osif et à Monsieur [U] la somme de 1.342.957 euros au titre de leur préjudice financier ;

- condamner les intimés, solidairement, à payer à la somme de 10.000 euros à chacun des

appelants, pour préjudice moral ;

III - Encore plus subsidiairement, sur la résolution de cession de contrôle conclue par actes sous seings privés en date des 10 novembre et 7 décembre 2011, dans l'hypothèse où, par extraordinaire, la Cour ne prononcerait pas la nullité de la cession de contrôle intervenue entre l'ensemble des actionnaires de la société Afer, cédants et la société Osif, cessionnaire et ce, soit au titre de la réglementation spécifique des sociétés d'expertise-comptable, soit sur le fondement des règles du droit commun des contrats, au visa des dispositions des articles 1134, 1625, 1626, 1628, 1630 et 1184 du code civil,

- constater, en tant que de besoin, dire et juger que les intimés ont manqué à leur obligation légale de garantie d'éviction du fait personnel, en détournant, via des sociétés tierces (Sociétés BGM Services et ACD Accounting) la clientèle de la société Afer, dont les actions avaient été cédées à la société Osif ;

- constater, en tant que de besoin, dire et juger que Monsieur [C] [L], représentant les intimés, a manqué à son engagement de présentation de clientèle et d'accompagnement de la société Osif, cessionnaire de l'intégralité des actions composant le capital social de la société Afer ;

En conséquence :

- prononcer la résolution de la cession de contrôle des 10 novembre et 7 décembre

2011, entre, d'une part, les actionnaires de la société Afer, cédants et, d'autre part, la société Osif, cessionnaire ;

- assortir la résolution de la vente exactement des mêmes conséquences, mutatis

mutandis, que celles ci-dessus énoncées, de la nullité pour violation de la réglementation spécifique des sociétés d'expertise- comptable et de la nullité pour

violation des règles du droit commun des contrats ;

IV - Sur la perte de chance,

- condamner solidairement les intimés à payer à la société Osif et à Monsieur [U] la somme de 360.000 euros au titre de la perte de chance ;

V - En tout état de cause,

- condamner solidairement les intimés à payer à chacun des appelants la somme de 20.000 en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Monsieur [C] [L], Madame [L] [V], épouse [L], Monsieur [U] [B], Madame [P] [M], Monsieur [V] [H] et Monsieur [V] [G] [X], par conclusions signifiées le 21 septembre 2016, demandent à la cour de :

- dire mal fondés Monsieur [U], la société Osif et la société Afer en leur appel ; - en conséquence, débouter Monsieur [U], la société Osif et la société Afer de l'intégralité de leurs demandes ;

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions en ce qu'il a débouté purement et simplement Monsieur [U], la société Outsourcin et la société

Afer de l'intégralité de leurs demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de Monsieur [L], Monsieur [B], Madame [V], Madame [M], Monsieur [H] et Monsieur [X] ;

Y ajoutant,

- condamner in solidum Monsieur [U], la société Outsourcin et la société Afer à payer à Monsieur [L], Monsieur [B], Madame [V], Madame [M], Monsieur [H] et Monsieur [X] la somme de 15.000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Monsieur [W] [R], par conclusions signifiées le 19 septembre 2016, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en tous ses points ;

A défaut,

- A titre principal

- dire que Monsieur [W] [R] n'a manqué à aucune de ses obligations issues de l'acte de cession des 50 actions de la société Afer convenu dans l'acte du 7 décembre 2012 ;

- débouter la société Outsourcin Finance, Monsieur [U], la société Afer de toutes leurs demandes visant une condamnation solidaire ou individuelle de Monsieur [R] et le mettre hors de cause ;

A titre subsidiaire :

-condamner solidairement l'ancienne direction de la société Afer,à savoir Messieurs [B], [H], [X] et Monsieur [L] à garantir Monsieur [R] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre ;

Infiniment subsidiairement,

- condamner solidairement l'ancienne direction de la société Afer à indemniser Monsieur [R] de son préjudice financier en suite du prononcé de l'annulation ou de la résolution des actions de la sociét Afer d'un montant de 32.000 euros ;

En tout état de cause,

- condamner la société Outsourcin Finance à verser à Monsieur [R] la somme de 4.500 euros, Monsieur [U] à verser à Monsieur [R] la somme de 4.500 euros, la société Afer à verser à Monsieur [R] la somme de 4.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure cvile ;

- condamner la société Outsourcin Finance, Monsieur [U] et la société Afer en tous les dépens de l'instance.

Il est expressément référé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits, de leur argumentation et de leurs moyens.

MOTIFS

Sur la nullité du contrat de cession

Considérant que les appelants fondent leur demande de nullité de la cession des actions de la société AFER notamment sur le vice du consentement ;

Considérant que l'article 1110 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que l'erreur n'est une cause de nullité de la convention que lorsqu'elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l'objet ;

Considérant que l'acte de cession comporte, en préambule, la mention : « Les cédants déclarent et garantissent que la société anonyme dont les actions font l'objet de la présente cession présente les caractéristiques suivantes : la société anonyme 'AFER' (Audit Finance Expertise Révision) a été régulièrement constituée,conformément à la réglementation en vigueur. Les actifs qu'elle détient ont été régulièrement apportés, créés ou achetés. Elle exerce ses activités conformément à la loi soit l'activité d'expertise comptable et conseils aux entreprises et est régulièrement immatriculée au RCS de Bobigny sous le n°352 463 665. Les statuts complets et à jour à la date de signature des présentes sont également annexés. La société exploite des activités, conformes à son objet social.(...)' ; que les cédants ont, par cette mention, affirmé que la société AFER exerçait régulièrement l'activité d'expertise comptable ;

Considérant que l'article 7 de l'ordonnance n° 45-2138 du 19 septembre 1945, dans sa rédaction issue de l'article 22 de la loi n° 2010- 853 du 23 juillet 2010 applicable aux faits de l'espèce, dispose :

« I - Les experts - comptables sont admis à constituer, pour exercer leur profession, des entités dotées de la personnalité morale, à l'exception des formes juridiques qui confèrent à leurs associés la qualité de commerçant. Elles doivent être inscrites au tableau de l'ordre et satisfaire aux conditions suivantes :

1° les experts-comptables doivent, directement ou indirectement par une société inscrite à l'ordre, détenir plus de la moitié du capital et plus des deux tiers des droits de vote ;

2° aucune personne ou groupement d'intérêts, extérieur à l'ordre, ne doit détenir, directement ou par personne interposée, une partie du capital ou des droits de vote de nature à mettre en péril l'exercice de la profession, l'indépendance des associés experts-comptables ou le respect par ces derniers des règles inhérentes à leur statut et à leur déontologie ;

3° (')

4° les gérants, le président du conseil d'administration ou les membres du directoire doivent être des experts-comptables, membres de la société.' ;

Qu'il s'en déduit que, pour qu'une société d'expertise comptable puisse régulièrement exercer son activité :

- plus de la moitié du capital d'une société commerciale d'expertise - comptable et plus des deux tiers des droits de vote doivent être détenus par des experts - comptables ;

- les dirigeants doivent être des experts-comptables, membres de la société ;

Considérant qu'il est constant qu'en 2009, 2010 et 2011, Monsieur [L], dont il n'est pas contesté qu'il n'a, à aucun moment, eu la qualité d'expert comptable, détenait :

- pour les années 2009 et 2010, 1950 actions de la société AFER, représentant 78 % du capital social (pièce Osif n°23) ;

- en 2011, 2174 actions, soit 87 % du capital social, aux termes de l'acte de cession d'actions conclu le 7 décembre 2011 entre, d'une part, Messieurs [U] [B], [W] [R] et [C] [L], cédants et, d'autre part, la société Osif, cessionnaire (pièce Osif n°6-1) ;

Qu'il résulte, par ailleurs, des pièces versées aux débats que Monsieur [L], directeur administratif et financier de la société AFER, signait les lettres de mission (pièce n°105) - lettre que seul un expert-comptable ou un détenteur de la signature sociale peut signer dès lors qu'elle formalise la relation contractuelle entre le professionnel de l'expertise comptable et son client - gérait les relations avec les clients (pièce n°80 à 82), signait les lettres notifiant les augmentations de salaires (pièce n°32) ; qu'il s'en déduit que s'est immicé dans les fonctions déterminantes pour la direction générale de l'entreprise, impliquant une participation continue à cette direction et un contrôle effectif et constant de la marche de la société en cause, tâches excédant celles qui lui incombaient au titre de la seule direction administrative et financière d'AFER ; que Monsieur [L] doit, dans ces conditions, être regardé comme exerçant les pouvoirs d'un dirigeant de fait de la société AFER ;

Considérant qu'il résulte de ces éléments que la société AFER ne respectait les dispositions régissant l'exercice, par des personnes morales, de l'expertise comptable ni sur la répartition de son capital, ni sur la qualité de son dirigeant ; que la société AFER ne pouvait, dans ces conditions, exercer l'activité d'expertise comptable ; qu'il n'est, par ailleurs, pas soutenu qu'une quelconque initiative aurait été prise à l'endroit de l'ordre des experts - comptables de Paris Ile de France pour procéder à la régularisation de la situation ;

Considérant que la dissimulation, par les cédants, de la situation irrégulière de la société AFER au regard de sa capacité à exercer l'activité de l'expertise comptable - élément ayant trait à la qualité substentielle de la chose cédé - a provoqué une erreur déterminante du consentement à l'acquisition des actions représentant le capital de cette société ; que cet élément justifie l'annulation des actes de cession des actions de la société AFER ; que la cour, infirmant le jugement entrepris, prononcera cette nullité ;

Considérant que, par suite de cette annulation, les appelants sont fondés à solliciter la condamnation des intimés solidairement à rembourser aux appelants le prix de vente des actions de la société AFER, soit la somme totale de 1.515.100 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de signification du présent arrêt ; que les appelants sera déboutés de leur demande de condamnation à astreinte, le préjudice causé par le retard apporté à l'exécution d'une condamnation étant réparé, conformément à l'article 1153 ancien du code civil, par l'application des intérêts moratoires ;

Sur la demande de dommages et intérêts

Considérant que les appelants sollicitent par ailleurs la condamnation des intimés à payer à la société OSIF et à Monsieur [U] les sommes de 1.342.957 euros au titre de leur préjudice financier et de 10.000 euros à chacun en réparation de leur préjudice moral ; qu'ils se prévalent des conclusions de l'expertise amiable réalisée par Monsieur [G] (pièce appelants n° 96) qui font état du non-respect, par les cédants, des termes de l'acte de cession et du préjudice causé aux cessionnaires par suite de l'exécution déloyale de la cession ;

Mais considérant que les appelants ne sauraient tout à la fois invoquer la nullité de l'acte de cession et son inexécution ; que, par ailleurs, ils ne rapportent la preuve ni du préjudice d'image allégué, ni d'un quelconque préjudice moral résultant de la nullité de l'acte de cession ; que, par substitution de motifs, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté à Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS Afer SA de leur demande de dommages et intérêts ;

Considérant que l'équité commande de condamner in solidum Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V], épouse [L] et [P] [M] à payer à Monsieur [Z] [U], à la SARL Outsourcin Finance - Osif et à la SAS Afer SA à payer à chacun la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

La Cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS Afer SA de leur demande de dommages et intérêts ;

STATUANT A NOUVEAU du chef infirmé ;

PRONONCE la nullité des actes de cession d'actions de la société AFER en date des 10 novembre 2011 et 7 décembre 2011 ;

CONDAMNE solidairement Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V], épouse [L] et [P] [M] à payer à Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS Afer SA la somme totale de 1.515.100 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de signification du présent arrêt ;

DEBOUTE Monsieur [Z] [U], la SARL Outsourcin Finance - Osif et la SAS Afer SA du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE in solidum Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V], épouse [L] et [P] [M] à payer à Monsieur [Z] [U], à la SARL Outsourcin Finance - Osif et à la SAS Afer SA à chacun la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum Messieurs [C] [L], [U] [B], [W] [R], [V] [H], [V] [G] [X], Mesdames [L] [V], épouse [L] et [P] [M] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

C. LECERF F. FRANCHI


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 16/02635
Date de la décision : 22/02/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I9, arrêt n°16/02635 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-02-22;16.02635 ?
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